
- 256 pages
- French
- ePUB (adapté aux mobiles)
- Disponible sur iOS et Android
eBook - ePub
L'Esprit qui veille
À propos de ce livre
À travers son parcours professionnel dans les hautes sphères de la finance et de l'industrie, ses expériences, ses rencontres, ses voyages depuis les terres arides du Hoggar jusqu'aux plateaux glacés des Andes et du Tibet, Gilles Cosson nous propose une philosophie de vie, une voie de dépassement destinée à l'homme pressé d'aujourd'hui comme celui de demain. Surtout il nous donne une nouvelle raison de vivre et d'espérer, à l'ombre de cet « Esprit qui veille » sur l'univers.
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Informations
Éditeur
Michalon éditeurAnnée
2013ISBN de l'eBook
9782368470848SOUS LE SIGNE
DE L’INTUITION
JEUNESSE
Premiers souvenirs
Je suis né un 15 juillet, deux ans avant le déclenchement de la Seconde Guerre mondiale, à une époque où le souvenir encore très présent du terrible conflit de 14-18 aggravait le sentiment d’angoisse devant celui qui se précisait chaque jour un peu plus. Et je n’envie certes pas mes parents d’avoir dû faire face avec leurs trois et bientôt quatre enfants à la perspective d’une déflagration que tout annonçait sans pitié. La folie d’Hitler, la soif de revanche du peuple allemand toujours pénétré de la thèse du « coup de poignard dans le dos » exigeaient une issue sanglante et c’est bien ce qui s’est passé. Peut-être est-ce de cet environnement douloureux que j’ai tiré cette tentation du retrait du monde des hommes si présente dans mes années d’adolescence. Il est vrai aussi que, les combats à peine terminés, d’autres, plus terribles encore, allaient se profiler à l’horizon. On a peine aujourd’hui à imaginer ce qu’a représenté pour ma génération le cauchemar du possible conflit nucléaire, illustré par la catastrophe d’Hiroshima et réclamé par le général MacArthur à l’occasion de la guerre de Corée, éclatant moins de cinq ans après la fin des hostilités précédentes…
Le fait est que mon premier souvenir aura été celui de la bombe atterrissant dans le jardin de notre maison de campagne de Smarves, à quelques kilomètres de Poitiers, marquant ainsi d’une pierre noire l’esprit du bambin que j’étais alors. Cette maison était à l’image des campagnes françaises, peu touchées encore par le progrès matériel : sans aucun confort, avec dans la cour un poulailler et un peu plus loin un potager qui allaient se révéler bien utiles face à la disette qui devait suivre. Car les réquisitions permanentes de l’armée allemande pour le besoin de sa guerre à l’Est allaient bel et bien réduire la population française sinon à la famine, du moins aux privations. Je me souviens encore de ce morceau de pain que je mangeais en pleurant, conscient du fait que chaque bouchée réduisait la taille de ce qui me restait à consommer.
Cela étant, il y avait bien sûr beaucoup plus malheureux que nous et les tickets de rationnement auxquels s’ajoutaient le produit du poulailler et les tournées à bicyclette de mon père dans les fermes du voisinage nous permettaient de manger à peu près à notre faim. De plus, l’enchantement de la vie aux champs lors des fins de semaine et des vacances compensait le manque relatif de nourriture. Près du village passait une petite rivière, le Clain qui, au prix d’une descente facile, permettait un bain rafraîchissant. Je vois encore, délimité par quelques piquets, le délicieux plan d’eau de Ligugé, proche de l’abbaye bénédictine du même nom, où nous allions faire trempette sous la garde vigilante de ma mère inquiète de nos velléités de nageurs en herbe. La tour de l’abbatiale, fondée par saint Martin et au sein de laquelle François Rabelais avait rédigé sa première œuvre en français, était comme un rappel de l’importance du spirituel et je crois que, sans que j’en eusse conscience, s’est imprimé là, en moi, le sentiment profond du caractère religieux de la vie humaine. Il nous arrivait d’y aller en famille et le chœur des moines rassemblés touchait cette corde musicale qui est en moi inséparable du sentiment du sacré.
C’est ainsi qu’entre la maison familiale de Poitiers dominant la gare et notre refuge campagnard se sont déroulées mes premières années. La guerre avait prélevé sa dîme, tuant au passage un oncle et en blessant bientôt cruellement un autre et les sœurs de ma mère s’étaient rassemblées à proximité de notre logis, créant entre les membres de plusieurs générations des liens qui durent encore.
L’heure du jardin d’enfants, comme l’on disait, avait alors sonné et, âgé de cinq ou six ans, je me rendais tous les jours à pied au lycée de filles qui lui donnait refuge. Je me rends compte à évoquer cela que l’autonomie des petits était, ô paradoxe, bien plus grande en pleine guerre qu’elle ne l’est aujourd’hui, après soixante-cinq ans de paix. Il ne serait venu à l’idée de personne d’accompagner un enfant, même très jeune, sur le chemin de l’école et je fus ainsi retenu en route un matin par un officier allemand qui faisait sans doute partie de la garnison, à moins qu’il n’appartînt à un régiment de passage. Je me souviens encore après tant d’années de son beau visage attentif. Il me dit quelques mots dans un français hésitant auquel je répondis de mon mieux et je compris que je lui rappelais son fils. Mon père était lorrain de pure souche, ma mère était de Valenciennes, le fait est que j’étais mince et blond, et cet homme, que je n’ai bien sûr jamais revu, avait été traversé par le regret des siens. Bien que ma famille fût proche de la Résistance, je ne notais aucune angoisse particulière lorsque je relatais l’événement à mon retour. Je crois que l’émotion qu’avait exprimée cet homme était intelligible à tous et il me semble que la réaction de mon père fut de compréhension. Aujourd’hui encore, lorsque je me souviens de cet épisode, je ne peux m’empêcher d’avoir une pensée pour ce soldat solitaire, probablement mobilisé sans joie comme tant d’autres et qui regrettait les siens, restés à Worms, à Ratisbonne ou à Berlin. Puisse-t-il avoir survécu à cette terrible guerre !
Mais la Libération approchait et, avec elle, la reprise des combats. Suspendue à Radio Londres, la famille écoutait avec espoir les annonces qui se succédaient et les « sanglots longs des violons de l’automne » allaient bientôt annoncer le Débarquement tant attendu. Ce furent des mois difficiles et le reflux vers le nord des armées allemandes fut marqué d’une horreur indélébile. J’entends encore mes parents évoquer à voix basse le massacre de Tulle effectué par la division « Das Reich », les femmes et les enfants enfermés et brûlés dans l’église d’Oradour. L’on chuchotait que certains membres de l’armée Vlassov, Ukrainiens qui n’avaient plus rien à perdre, avaient été incorporés dans la Wehrmacht, ce qui redoublait la cruauté des troupes en retraite.
En ces temps d’espoir et d’angoisse, les enfants vivaient dans la terreur, tirés de leurs classes maternelles pour être serrés dans les caves où parvenait le bruit sourd des bombardements. Qui dira l’effroi des bambins ainsi confrontés à l’idée de la mort aveugle ? Je sais que ces épisodes furent peu de chose comparés au martyre enduré par les populations de Russie ou Pologne et rien du tout en comparaison de l’extermination des Juifs d’Europe, mais je peux témoigner de la trace durable qu’imprime dans un esprit encore vierge la rencontre avec la folie des hommes.
Puis d’un coup, ce fut la Libération et le défilé du maquis auquel j’assistai, petit garçon de tout juste sept ans, avec ses uniformes fantaisistes et son enthousiasme communicatif. Ce furent aussi les sauf-conduits distribués par la Résistance à ceux qui, tel mon père, recevaient le droit de circuler dans les départements voisins, et le temps passant, le progressif retour à la normale. Je me souviens encore de l’arrivée à la maison de la première orange, fruit mystérieux dont j’ignorais l’existence, longuement observé, palpé, puis goûté avec l’étonnement du néophyte. On racontait que tel dentiste voisin, suspecté de collaboration, avait été emprisonné, que telle femme, vue en d’autres temps aux côtés d’un officier nazi, avait été tondue, mais ces rumeurs ne m’atteignaient guère et la joie des vacances revenues me fit vite oublier les errements guerriers des adultes.
L’heure vint pour moi, à la rentrée, de quitter le lycée de filles où je m’étais tant plu, moi, seul garçon ou presque au milieu de tant d’aimables compagnes et, dois-je le dire, je le regrettai amèrement. Je revois le passage devant moi de la classe de sixième, avec ses géantes dont j’admirais l’élégance et je crois que cette présence féminine à mes côtés devait là aussi me marquer durablement. La compagnie des femmes qui m’est si précieuse a sans doute pris son essor dans ces petites classes où j’étais adopté sans difficulté par le sexe opposé qui m’acceptait différent sans jamais me le faire sentir. Je gagnai alors l’école Jules-Ferry – mon père de tradition laïque y tenait beaucoup – et je me heurtai alors à un tout autre monde. En ces temps lointains, les classes n’étaient obligatoires que jusqu’à quatorze ans et mes camarades de huitième, puis de classe de fin d’études, comme on disait alors en lieu et place de CM1 ou CM2, avaient souvent quatre ou cinq ans de plus que moi et ne se privaient pas de me rosser d’importance. Quant aux instituteurs, ils n’étaient pas tendres : coups de règle, voire gifles et même coups de poing étaient au service de leur magistère, mais nous ne leur en voulions nullement, car ils étaient dévoués ac cadaver à leurs élèves et les résultats étaient indiscutables. Peu avant l’anniversaire de mes dix ans, je passai avec brio le certificat de fin d’études primaires et je peux assurer qu’arrivant en sixième au lycée, je n’eus aucune peine à prendre immédiatement la tête de la classe. Hommage soit rendu à ces maîtres à l’ancienne qui, pour avoir le châtiment facile, n’en ont pas moins élevé dans le respect de la discipline et de l’étude des générations de petits Français !
C’est à cette époque que j’ai perdu ma petite sœur de cinq mois, d’une bronchite capillaire. La pénicilline n’était pas parvenue jusqu’à notre médecin de famille… Un matin, je fus introduit dans la chambre de mes parents. Le bébé gisait dans son berceau devant ma mère en pleurs, et mon père me demanda de lui dire adieu. Je me penchais sur le cadavre, inerte, et mon cœur se serra douloureusement. J’avais neuf ans. De cette rencontre avec la mort, je me souviens surtout du mystère qui l’entourait, de son caractère auguste aussi : l’enfant mort trônait sur sa couche comme un roi. Il avait rejoint l’éternité… Et je compris que je n’étais pas le centre du monde, que l’univers des vivants n’était pas tout, qu’il en existait peut-être un autre, indiciblement mystérieux, et que mes parents garderaient un lien d’amour irréductible avec un être disparu. Il me semble que ce fut là comme un premier signe, tel le bruit à peine perceptible d’un doigt frappant une porte secrète, et ce signe je ne l’ai jamais oublié.
*
Puis nous partîmes pour Annecy. J’avais juste dix ans. La nationalisation des compagnies électriques venait d’être votée et mon père, qui dirigeait l’une d’entre elles, avait été nommé en Savoie.
En ces époques d’après-guerre, le logement était très difficile et nous commençâmes donc par vivre à l’hôtel avant de nous installer dans une vieille maison, au fond d’un parc, qui avait le mérite de nous obliger à passer le long du lac pour aller au lycée. De l’avenue aux platanes centenaires, la vue était magnifique et mon frère et moi admirions sans réserve les montagnes se reflétant à la surface de l’eau. Tout au fond, la chaîne du Grand Arc fermait l’horizon et, l’automne s’avançant, j’observai pour la première fois le spectacle émouvant de la neige descendant peu à peu les pentes. L’onde prenait par contraste un ton outremer que les jours de bise teintaient d’écume et je crois pouvoir affirmer que le sens esthétique qui s’éveillait à cette occasion constitua dès lors un des socles de ma personnalité naissante.
Ces années passées à Annecy furent un enchantement. Je faisais partie des privilégiés admis alors aux études secondaires et le lycée, doté de professeurs adorant leur métier, était excellent. Mais surtout, la présence de la nature se faisait de jour en jour plus formatrice. Car si le Poitou avait le charme de la campagne, la Savoie nous élevait à une autre dimension. Tous les jeudis, nous avions droit à ce que l’on appelait à l’époque le « plein air », ce qui signifiait en hiver le sport dans la campagne proche et en été la voile, avec, dans les deux cas, un contact direct avec les éléments. Je me souviens de ce jour d’été où, répartis imprudemment par nos maîtres sur les voiliers du centre nautique, nous fûmes surpris par un de ces coups de temps que l’orage occasionne sur les rives du lac. Nous étions sortis du port par un après-midi sans mystère lorsqu’un gros nuage noir se positionna sur les sommets et, à peine quelques minutes plus tard, un rideau de grêle jaunâtre dévala des crêtes, accompagné d’un vent furieux qui renversa d’un coup d’aile la plupart de nos modestes esquifs. Il faut dire que, manquant de forces comme de technique, nous étions bien incapables de les maintenir à flot. Ces tempêtes subites sont bien connues des riverains, mais l’insouciance, qui régnait en ces temps reculés où le principe de précaution n’existait pas encore, nous avait laissé la liberté de monter à bord.
La situation devint très vite dramatique : tout autour du voilier que je partageais avec un camarade de classe, le spectacle des enfants, heureusement pourvus de bouées de sauvetage, était angoissant. La grêle qui continuait à tomber balayait avec rage leurs têtes couvertes par l’écume des courtes vagues lacustres et leurs voix appelant au secours au milieu des éléments déchaînés étaient pathétiques. Le hasard voulut que le voilier que j’occupais fût encore à flot et nous pûmes tirer à bord plusieurs rescapés trempés. Heureusement la catastrophe avait été aperçue et bientôt quelques embarcations se détachèrent de la côte. Je me vois encore, terré avec cinq ou six camarades au fond d’un youyou manœuvré à la godille par une jeune femme venue à notre secours. Plusieurs parents affolés étaient accourus, s’inquiétant pour leur progéniture et ma mère me récupéra en pleurant, tout étonnée de me retrouver sain et sauf. Aucun noyé n’était à déplorer, ce qui pour moi aujourd’hui encore, relève du miracle. Le ciel avait été de notre côté… Mais je crois bien que ce genre de sortie s’arrêta là : le boulet était passé trop près.
La période hivernale nous ouvrait d’autres horizons. Mon père, en bon Lorrain, appréciait la froidure et il aimait nous emmener à La Clusaz faire du ski…
En cette époque où l’on sortait tout juste de la guerre, la station redémarrait à peine. Seuls quelques Anneciens venaient, avec l’hiver, se dégourdir les jambes sur des pistes damées par les skieurs eux-mêmes. Quant aux « planches », comme on disait alors, elles étaient en frêne plein, sans carres, avec des fixations genre sabot !
Je me souviens avec une netteté particulière d’un séjour au village au tout début du printemps. Le mois de mars finissant avait chassé la neige sur les hauteurs du Crêt-du-Loup, bien au-dessus de l’altitude du modeste chalet que nous occupions.
Ce dernier était un édifice à l’ancienne, sans aucun luxe, comme il était de règle. Profitant de l’aubaine du tourisme débutant, le ménage de paysans qui l’habitait l’avait loué pour dix jours à condition que nous nourrissions ses poules. On n’y trouvait, bien entendu, ni toilettes ni eau courante, à l’exception d’un robinet dans la cuisine, et les lieux...
Table des matières
- Couverture
- 4e de couverture
- Du même auteur
- Titre
- Copyright
- Dédicace
- Citations
- Prologue
- Sous le signe de l’intuition
- Une recherche spirituelle - « L’Esprit qui veille »
- Approfondissements
- Conclusion
- Épilogue
- Remerciements
- Table des matières