Locke
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À propos de ce livre

Locke est cĂ©lĂšbre pour une philosophie dont on lui prĂȘte la paternitĂ© l'Empirisme moderne. En lisant son Essai sur l'Entendement Humain, de 1690, on se rend compte qu'il n'en est rien. Bien plutĂŽt, il s'agit de la premiĂšre Philosophie de l'Esprit. En ces temps oĂč l'on nous dit que nous ne pensons que grĂące aux neurones, Locke nous dĂ©montre que les facultĂ©s mentales ne sont pas des fantasmagories. Ces facultĂ©s mentales permettent l'Ă©mergence de la pensĂ©e, de l'entendement, mais surtout de la conscience, que Locke est le premier Ă  conceptualiser. Et il faut ajouter Ă  cela les notions essentielles de «moi», de «moi personnel», et d'«identitĂ© personnelle». On voit peu Ă  peu se dessiner quelque chose: l'humain, dans toute sa complexitĂ©. La seule maniĂšre de lutter contre le rĂ©ductionnisme pseudo-scientifique qui, par certains cĂŽtĂ©s, ronge notre dignitĂ© d'ĂȘtre humain, en tant aussi qu'ĂȘtre psychique et mental, c'est encore la Philosophie. Et, de fait, une introduction Ă  la lecture de l' Essai, nous semble, plus que jamais, d'une grande actualitĂ©.

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Informations

Année
2020
Imprimer l'ISBN
9782340037014

Chapitre 1
L’idĂ©e d’expĂ©rience et l’expĂ©rience de l’idĂ©e

Nous avons compris que l’expĂ©rience nous constitue ; cela, tous les philosophes l’accordent. Les problĂšmes surgissent quand nous ajoutons des interstices conceptuels qui permettent d’affiner les liaisons entre l’expĂ©rience et nous, les percevants, les pensants. Cependant, les interstices ajoutent d’autant aux bagages conceptuels, qu’il faut toujours avoir aux mains pour franchir les Ă©tapes de la comprĂ©hension : Ce qui peut se traduire par une addition parfois inutile de difficultĂ©s. Mais cela ne veut pas dire qu’allĂ©ger les bagages rendra plus aisĂ©e la comprĂ©hension. Locke a rĂ©ussi Ă  faire tenir en un seul concept le passage de l’expĂ©rience naturelle (celle du monde et des corps) Ă  l’expĂ©rience de l’esprit. Et ce concept tient en un seul mot : IdĂ©e. Avec son concept d’« idĂ©e », nous nous transportons littĂ©ralement depuis le monde extĂ©rieur jusqu’au monde « intĂ©rieur ». Et cela repose sur une conviction liĂ©e Ă  ce que l’on peut appeler la philosophie naturelle lockĂ©enne (nous y reviendrons), soit l’inclusion des entitĂ©s percevantes dans la Nature, et inversement, de la Nature dans les entitĂ©s percevantes. C’est ce que j’appelle la Liaison. Mais, avant de voir comment Locke procĂšde, il faut rappeler ce qui l’amĂšne Ă  reformuler cette liaison, et c’est l’« Ă©pisode Descartes ».

Descartes, la dé-liaison

C’est en 1636 que Descartes publie son Discours de la mĂ©thode, Ɠuvre dans laquelle nous trouvons une philosophie diamĂ©tralement opposĂ©e Ă  celle qu’allait devenir celle de Locke. Descartes nous y annonce sa mĂ©thode pour trouver la vĂ©ritĂ©, soit le principal objet de sa quĂȘte philosophique. Elle consiste, pour ainsi dire, en un grand nettoyage de tout ce qui, Ă  ses yeux, constitue une vision faussĂ©e de la rĂ©alitĂ©. Aussi, et tout naturellement pour lui, il chasse l’« expĂ©rience » et les « sens » hors sa quĂȘte de vĂ©ritĂ©, car, Ă©crit-il dans la « QuatriĂšme Partie » du Discours : « Ainsi, à cause que nos sens nous trompent quelquefois, je voulus supposer qu’il n’y avait aucune chose qui fĂ»t telle qu’ils nous la font imaginer. » Dans la PremiĂšre de ses MĂ©ditations mĂ©taphysiques (1641), il y revient : « Tout ce que j’ai reçu jusqu’à prĂ©sent pour le plus vrai et assuré, je l’ai appris des sens, ou par les sens : or j’ai quelquefois éprouvé que ces sens Ă©taient trompeurs, et il est de la prudence de ne se fier jamais entiĂšrement à ceux qui nous ont une fois trompés. » Descartes ne prouvera nullement que nos sens nous tromperaient en quoi que ce soit, cependant qu’il aura universalisĂ© dĂ©faillance et dĂ©fiance gĂ©nĂ©ralisĂ©es des sens, et donc d’un pan non nĂ©gligeable de l’expĂ©rience, sans remarquer d’ailleurs que penser, c’est aussi une expĂ©rience. En effet, je forme mes pensĂ©es Ă  l’aide, entre autres de mes idĂ©es, mais aussi de mes Ă©motions, de mon vĂ©cu, mes impressions, etc., et j’en suis responsable, ou pas (si, par exemple je ne comprends rien aux rĂšgles du cricket ou aux Ă©quations de la RelativitĂ© Restreinte). En fait, ce que Descartes croit avoir chassĂ© par la porte est revenu par la fenĂȘtre. Mais en sus, remarquez bien le saut qualitatif auquel a procĂ©dĂ© Descartes. À peine Ă©voque-t-il les sens qu’il convoque l’imagination. Comme si les sens devaient nĂ©cessairement en passer par l’imagination pour interprĂ©ter nos sensations ? Mais avons-nous besoin de notre imagination pour ĂȘtre au fait de ce que nous « sentons » ? Certainement pas. C’est seulement dans les cas, rares, oĂč nous ne savons pas ce que nous sentons, percevons, qu’alors, Ă©ventuellement, nous pouvons recourir Ă  notre imagination pour tenter de nous faire une idĂ©e. Or, et justement, l’imagination n’est en rien une facultĂ© de validation de ce qui est vrai ou non. Par consĂ©quent, nous comprenons pourquoi Descartes disqualifie les sens : Ils ne peuvent ĂȘtre que trompeurs, ou, Ă  tout le moins, incertains, comme l’imagination, qui nous fait voir des choses autant vraies que fausses (des licornes, des OVNI, des Jedi). Que l’imagination ait pu servir et serve encore Ă  des dĂ©couvertes n’est pas contestable, mais, dans ce cas, on parlera de ce qui n’existe pas encore, tandis que nous n’avons pas Ă  imaginer avoir des sens fiables ; ils le sont, dans la majoritĂ© des situations.
À partir du moment oĂč Descartes cesse de se fier Ă  ses sens, il opĂšre une rĂ©gression depuis son propre corps, et, toujours en quĂȘte d’une vĂ©ritĂ© absolue, vient buter sur son « Ăąme », ultime Ă©tape mĂ©taphysique qui lui fait rĂ©aliser que sa vraie nature, en tant que « substance », n’est que de penser. D’oĂč le fameux ‘Cogito ergo sum’, « je pense donc je suis ». La formule est extraordinairement cĂ©lĂšbre. Mais il faut bien comprendre tout de suite que ce « je » cartĂ©sien est circonscrit dans un « endroit » tout Ă  fait clos, diffĂ©rent en genre et en nature de tout le reste, spĂ©cialement du corps. En effet, Descartes distinguait fermement entre la res extensa (chose Ă©tendue), soit la MatiĂšre, corps humain inclus, et la res cogitans (« chose pensante »), l’ñme. Et c’est Ă  cet endroit prĂ©cisĂ©ment que Descartes s’est « rendu » pour trouver la vĂ©ritĂ©. Autrement dit, Descartes coupe radicalement en deux la comprĂ©hension de la rĂ©alitĂ© ; l’une est douteuse, peu fiable, l’autre est assurĂ©e d’une vĂ©ritĂ© absolue. On a donc compris que Descartes sĂ©pare, d’un cĂŽtĂ©, l’expĂ©rience, et, de l’autre, la pensĂ©e (du moins, c’est ce qu’il croit)1. Et c’est ce que j’appelle la « dĂ©-liaison ». Descartes dĂ©lie la relation naturelle du corps et de l’esprit. Gilbert Ryle (1949), a laissĂ© Ă  la postĂ©ritĂ© son expression de « fantĂŽme dans la machine » (‘Ghost in the machine’), soit cette vie de l’esprit totalement isolĂ©e, comme « un Robison CrusoĂ« fantomatique ». DĂšs le dĂ©but de son livre, il prĂ©vient ainsi : « Je parlerai souvent, avec abus dĂ©libĂ©rĂ©, du “dogme du FantĂŽme dans la Machine” ». Ryle reproche Ă  Descartes d’avoir créé de toutes piĂšces un esprit totalement diffĂ©rent, en genre et en nature, du corps. DĂšs lors, au sein mĂȘme de l’humain, on trouve « deux mondes », le corps, fait de matiĂšre, comme le reste du monde matĂ©riel, et l’ñme (ou l’esprit), fait d’une tout autre matiĂšre. Le problĂšme le plus grave donc, pour Ryle, rĂ©side en ce que ces deux mondes ne peuvent pas communiquer. Or cette impossibilitĂ© est contredite par la moindre expĂ©rience : Nous avons conscience de percevoir aussi bien depuis notre esprit que depuis notre corps. Or, si corps et esprit (ou l’ñme), sont de nature radicalement diffĂ©rente, comment peut-on expliquer cette communication ? Descartes reconnaĂźt, par exemple dans ses Principes de la philosophie (1644), « qu’encore que notre Ăąme soit unie Ă  tout le corps, elle exerce nĂ©anmoins ses principales fonctions dans le cerveau, et que c’est lĂ  non seulement qu’elle entend et qu’elle imagine, mais aussi qu’elle sent
 ». Il y a un paradoxe Ă  refuser absolument au corps une facultĂ© propre qui serait de sentir, facultĂ© que, du coup, Descartes loge dans le cerveau. De son cĂŽtĂ©, Ryle va rĂ©gler le problĂšme Ă  sa façon, en commençant par statuer que l’esprit — si tant qu’une telle chose existe —, n’est pas quelque chose d’interne, de clos sur lui-mĂȘme ; il sert Ă  produire des « actes externes et des phrases » ; c’est bien pourquoi la notion d’« esprit » est un fantĂŽme, il n’y a rien Ă  voir « dedans », car l’esprit, en tant que tel, n’existe pas.

Rappel humien

Locke procĂšde Ă  l’inverse de Descartes. Pour lui, il n’y a pas nĂ©cessairement de coupure entre monde extĂ©rieur et esprit, entre la pensĂ©e et le corps (sauf au niveau de la « RĂ©flexion » — voir plus bas 1.10.). LĂ  oĂč Descartes veut dissocier ExpĂ©rience (des sens) et IdĂ©e, Locke les associe. On l’a d’ailleurs qualifiĂ© d’« associationniste », qui est une thĂ©orie promue par le philosophe John Stuart Mill, voulant que les expĂ©riences sensibles rĂ©pĂ©tĂ©es finissent par produire des idĂ©es. Si Locke Ă©voque la rĂ©pĂ©tition des idĂ©es, c’est dans le contexte de ce qu’on appelle, depuis Piaget, l’« apprentissage », celui des mots, des syllabes, etc. Si Locke parle d’association des idĂ©es, ce ne sera que pour signifier la mise en contact d’« idĂ©es simples » entre elles pour former une « idĂ©e complexe ». Mais ce genre de degrĂ© de finesse n’est pas souvent notĂ©, si bien que l’on se mĂ©prend souvent sur la meilleure maniĂšre de caractĂ©riser la philosophie lockĂ©enne, la plus frĂ©quente Ă©tant de la qualifier d’empirique ; ce qu’elle n’est pas. Pour se dĂ©barrasser immĂ©diatement d’une appellation qui est trop paresseusement accolĂ©e, il suffit de citer :
1.1. « De la pensĂ©e, le corps ne nous permet aucune idĂ©e du tout, c’est seulement depuis la RĂ©flexion que nous avons cela » (L.II, C.XXI)2.
Un tel propos ne peut pas passer pour empiriste. Pourquoi ? Un philosophe empiriste ne pourrait pas admettre que le corps n’est pour rien dans l’émergence d’une idĂ©e ; ce serait parfaitement contradictoire avec sa philosophie. La grande subtilitĂ© du raisonnement chez Locke tient cependant dans sa reconnaissance du flux des idĂ©es Ă  travers le corps et l’esprit, mais sans que nous en ayons conscience proprement dit. C’était un postulat d’une trĂšs grande modernitĂ©, et nous allons y revenir. Ceci dit, pour nous convaincre que Locke n’est pas un philosophe empiriste, comparons avec un vĂ©ritable philosophe empiriste, David Hume, qui Ă©crit en 1739 : « Toutes les perceptions de l’esprit humain se rĂ©duisent d’elles-mĂȘmes en deux sortes distinctes, que j’appelle IMPRESSIONS et IDÉES. [
] Ces perceptions qui entrent avec le plus de force et violence, nous pouvons les nommer impressions ; et sous ce nom j’entends toutes nos sensations, passions et Ă©motions, telles qu’elles apparaissent dans l’ñme. Par idĂ©es j’entends les faibles images de celles-ci dans la pensĂ©e et le raisonnement. » On remarque tout de suite que Hume considĂšre les idĂ©es comme des « images » provenant des « impressions » ; ce qu’elles ne sont en aucun cas pour Locke, qui jamais, Ă  aucun moment dans l’Essay, Ă©crit que les idĂ©es seraient des images, cependant que certains exĂ©gĂštes diront que l’on trouve bien cette thĂ©orie imagiste chez Locke, et c’est par exemple M. Ayers qui y consacre un chapitre dans son livre-somme (1991). Locke : « Les idĂ©es simples [voir 2.1.] sont les apparences rĂ©elles des choses. PremiĂšrement, nos idĂ©es simples sont toutes rĂ©elles, toutes s’accordent Ă  la rĂ©alitĂ© des choses » (L.II, C.XXX). On pourrait penser que Locke se contredit, puisque l’idĂ©e simple semble Ă  la fois apparence rĂ©elle de la chose, et, en mĂȘme temps, ce n’est pas une image. Mais c’est justement ici qu’il faut faire attention Ă  ne pas confondre « apparence rĂ©elle » et « image ». Comment cela ? Quand je dis : « Ce mur est blanc », je signale ce que quiconque peut voir. Le mot « blanc » dĂ©signe « l’idĂ©e du blanc ». PremiĂšre Ă©tape. Car si je n’avais pas l’idĂ©e du blanc, je ne ...

Table des matiĂšres

  1. Couverture
  2. Page de titre
  3. Page de copyright
  4. Vie et Ɠuvre de Locke. Un aperçu
  5. Nota Bene
  6. Introduction
  7. Chapitre 1. L’idĂ©e d’expĂ©rience et l’expĂ©rience de l’idĂ©e
  8. Chapitre 2. Puissance (‘Power’) et PensĂ©e (‘Thinking’)
  9. Chapitre 3. La connaissance et ses limites
  10. Chapitre 4. Identité et actualité
  11. Conclusion
  12. Bibliographie
  13. Table des matiĂšres