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eBook - ePub
À propos de ce livre
L'angle d'approche choisi pour le présent ouvrage surprendra peut-être les amateurs de l'oeuvre de Giono. On s'attend en effet à ce que le motif des cosmétiques soit d'une importance mineure dans un univers romanesque d'abord ancré en pleine nature. Pourtant, les parfums, les fards, les huiles entrent avec le corps, et notamment avec la peau, dans de subtiles dialectiques du naturel et de l'artifice, de la surface et de la profondeur, du sain et du malsain et jouent avec le désir, la réalité, le néant. Jean Giono, Corps et cosmétiques est le premier volet d'une réflexion sur la représentation, les usages et les langages du corps dans l'oeuvre de Jean Giono.
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Informations
« Imprimer sa marque » : de la peau tatouée à l’imaginaire fictionnel
Le corps de Queequeg était donc une énigme à résoudre, une œuvre merveilleuse en un volume, mais il ne pouvait pas se lire lui-même, bien que son cœur vivant batte sous la page. Ces mystérieuses sciences étaient donc destinées à pourrir finalement avec le vivant parchemin sur lequel elles figuraient et à s’éteindre à jamais36.
Le tatouage peut avoir affaire, comme le veut un des sens du terme kosmêtikon, avec la beauté, l’ornement ou la parure. Cependant, indélébile, totalement assimilé à la peau, il vit et vieillit avec le corps, et apparaît surtout comme une reconfiguration du donné et de l’ordre biologiques initiaux. Il résulte d’un choix de marquage de soi, qui, à l’époque du Giono d’avant les Chroniques, tantôt insère dans un groupe d’individus souvent en marge (voyous, bagnards, marins, soldats, et pour les femmes, prostituées), tantôt singularise et, si l’on peut dire, démarque jusqu’au risque de l’exclusion sociale – rappelons que le Lévitique interdit le tatouage37. Cette pratique exotique redécouverte aux alentours de 1770 par les expéditions de James Cook aux îles Marquises en Polynésie38 vient donc paradoxalement inscrire, à même la surface de soi, une signature personnelle intime39.
Plusieurs occurrences de tatouages peuvent être relevées dans l’œuvre de Giono. Mis à part le cœur tatoué « sur la poitrine » de Clef-des-Cœurs (« du côté droit naturellement. Le tatoueur était un vieil Anglais qui aimait les symboles » [VI, 294]) dans Ennemonde (1968), c’est surtout dans la première partie de sa pratique d’écriture qu’apparaissent les tatouages, plus exactement entre 1929 (Un de Baumugnes) et 1944 (Fragments d’un paradis). Ces années viennent enserrer deux occurrences déterminantes : Jean le Bleu en 1932, et surtout Deux cavaliers de l’orage dans son état de 1942, année au cours de laquelle fut vraisemblablement rédigé ou terminé le chapitre « Le Flamboyant », essentiel pour mon propos. C’est donc une pratique liée au Giono écrivain du rapport au cosmos, au Giono traducteur de Moby Dick en 1941, roman où le tatouage et la peau jouent un rôle majeur. On se rappelle en effet ce qu’Ishmaël, frère « siamois »40 de Queequeg dont le corps est tatoué aux insignes du monde, écrit à propos de la baleine : « [j]’avais beau vouloir la disséquer, je ne puis pénétrer plus loin que sa peau41. » C’est peut-être que la peau elle-même en dit déjà long sur l’intériorité… Ishmaël ainsi, tout d’abord vierge de tout signe, inscrit son « poème » – à savoir le livre que le lecteur est en train de lire – sur sa peau : « et à la fin plus rien de moi-même ne restera sans tatouage »42.
Expression d’un fond de l’âme, le tatouage indexe une manière d’être au monde. Le seul mauvais tatouage chez Giono, relié à un goût douteux et vulgaire pour la parure, ne déroge pas à cette loi. Au début même de la carrière de l’écrivain, en 1929, le tatouage renvoie, dès son premier chapitre, à l’intrigue d’Un de Baumugnes :
[…] y avait avec nous un type de Marseille, un jeune tout creux comme un mauvais radis, la peau sur l’os et un tatouage à la paume de la main où il y avait d’écrit Merde. Il tripotait le blé avec ça !
[…] je crois qu’il avait dû faire une chose sale et qu’il avait changé d’air pour quelque temps. […] il se coiffait avec des accroche-cœur […] et […] il se foutait du parfum sur la gueule comme une femme de peu. (I, 223).
Le Louis, qui salit le blé, ce grain originaire pourvoyeur de vie, salira aussi non seulement la pure Angèle, qu’il transformera en prostituée, mais aussi, à travers le prénom anagrammatisé de celle-ci, Jean Giono/Jean le Bleu. Le « merde » à la main droite ne signifie plus ici « la provocation envers les gradés »43 de la guerre de 14, mais bien la souillure qu’opère celui dont la maigreur de chair et d’âme (il a « la peau sur l’os ») bafoue la vie, la grandeur et la pureté. Dans l’ensemble cependant, le tatouage est chez Giono valorisé, selon des modalités diverses qui vont faire l’objet de cet article.
L’ekphrasis sur le vélin de la peau : tatouage et création
Analogue à l’écriture sur une page, le tatouage, imprimé à même le vélin44 de la peau humaine, ouvre vers l’imaginaire et le monde fictionnel : « porter le rêve de l’artiste » (III, 990), telle est la fonction du tatouage de Paumolle le bien nommé45, dans Fragments d’un paradis. Le tatouage a donc, à l’intérieur même de chaque récit où il s’insère, une fonction de mise en abyme – dans Un roi sans divertissement, le sang humain/l’encre inscrira ses hiéroglyphes tragiques sur le blanc de la neige/de la page. En témoigne notamment cette ekphrasis vivante que constitue le torse du Flamboyant dans Deux cavaliers de l’orage, la nef tatouée faisant signe vers l’origine mythologique des Jason et le combat du lutteur avec Marceau, orientant vers le combat final des deux frères. Comme le rappelle la philosophe Barbara Cassin :
Il ne s’agit plus en effet dans l’ekphrasis d’imiter la peinture en tant qu’elle cherche à mettre l’objet sous les yeux – peindre l’objet comme en un tableau –, mais d’imiter la peinture en tant qu’art mimétique – peindre la peinture. Imiter...
Table des matières
- « L’Esprit des lettres »
- Dans la même collection
- Avant-propos
- Usages gioniens des cosmétiques, ou les ambivalences du corps
- Il faut qu’une peau soit ouverte ou fermée. Sur le motif de la peau dans l’œuvre de Giono
- « Imprimer sa marque » : de la peau tatouée à l’imaginaire fictionnel
- Faire parler la poudre
- Le parfum des âmes fortes
- « L’odeur si belle ». Les sortilèges du parfum dans Angelo
- Peintures de guerre : le corps et ses ornements dans Le Grand Troupeau
- Présentation des auteurs
- Présentation des communications