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À propos de ce livre
Est-il possible de comprendre l'Histoire sans évoquer ses protagonistes?Sans réduire l'Histoire à la geste héroïsée des grands personnages, il est nécessaire pour les chercheurs d'inscrire le destin de ses acteurs dans le continuum historique pour donner sens et relief au récit et aux événements.Le propos de ce livre est de souligner, la pertinence scientifique et didactique d'une histoire incarnée à travers des exemples inscrits dans différentes temporalités.Appréhender les parcours individuels de Charlemagne, Césaire, Kennedy, Jeanne d'Arc ou les actions de groupes anonymes donne du sens et nourrit la réflexion.
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Informations
Les jeunes gens australiens tombés à Fromelles en 1916 : des héros ou des acteurs ?
Chantal Dhennin-Lalart
Agrégée
Docteur en histoire contemporaine
Laboratoire H.L.L.I, ULCO,
Université Lille Nord de France
Lambis Englezos, un historien amateur de Melbourne, en Australie, s’était mis en tête de retrouver la trace des jeunes gens australiens – plus de 5 000 ! – qui sont tombés lors de la bataille de Fromelles de juillet 1916. Les corps de ces acteurs combattants avaient été enterrés dans des fosses communes par les soldats de l’armée bavaroise qui occupaient le secteur de ce front situé entre Armentières et La Bassée, au sud-ouest de Lille. La mémoire en avait été perdue. Un siècle s’est passé sans que personne ne songe à rechercher les restes de tant d’Australiens disparus. Il a fallu la ténacité de Lambis Englezos[1]. La découverte a eu lieu en 1999, l’exhumation a été terminée en 2009, les recherches ADN ont été menées avec succès pour 50 % des cas. Les restes humains et d’équipement militaire pouvaient être réinhumés. Une cérémonie grandiose à la gloire de ces hommes devenus des héros a eu lieu en 2010 à Fromelles en présence du prince Charles et de Madame la gouverneure d’Australie.
Le terme de héros est-il justifié ? En effet, ceux dont on a exhumé puis réinhumé les restes, les acteurs de la très difficile bataille de Fromelles des 19 et 20 juillet 1916 qui a abouti à une des défaites parmi les pires de l’histoire australienne, ont-ils exalté un héroïsme transcendant, faisant oublier l’ordinaire de leur vie ? Autrement dit, le quotidien de ces 5 533 soldats grièvement blessés, tués ou disparus, fait de quelques grandes actions et de nombreuses petites bassesses ordinaires, est-il désormais, à présent qu’ils sont disparus dans une mêlée sanglante, supplanté par la mort sur le champ de bataille ?
Il convient d’abord de s’intéresser à la notion d’héroïsme, comme le fit Pierre Bourdieu[2], en mettant à distance aussi bien la mort tragique de ces soldats que leur parcours ordinaire : quelle structure héroïque est mise en place, si tant est que ces hommes furent des héros ? Il faut ensuite voir, à l’instar de Michel Foucault[3], si le courage des soldats en guerre les apparente à des héros : en quoi leur action durant les combats de Fromelles, ne relevant pas du « mieux vaut mourir debout que de vivre à genoux ! », leur confère-t-elle malgré tout la qualité de héros ? Interrogeons enfin le héros tel qu’il est vu par Jacques Derrida[4], souvent un anti-héros, un héros malgré lui, pour comprendre quels aspects de l’action des Australiens de Fromelles les fait passer de personnages sans qualités à celui de soldats magnifiques.
La structure héroïque mise en place autour des acteurs de la bataille de Fromelles
Le 25 avril 1916, les troupes australiennes, néo-zélandaises et océaniennes de l’ANZAC (Australian and New Zealand Army Corps) viennent d’avoir une cérémonie du souvenir en l’honneur de ceux de leurs pays qui ont débarqué, un an plus tôt exactement, sur le promontoire étroit des Dardanelles à Gallipoli. Il leur avait été demandé d’escalader des escarpements très raides face au feu des Ottomans dirigés par un jeune général, Kemal Pacha, le futur Mustafa Kemal Atatürk. Plus de huit cents Océaniens étaient morts dans la bataille. La défaite de Gallipoli a sonné alors comme une preuve de courage et de fierté : des héros ont donné leur vie pour la défense du droit. Ce 25 avril devient, un an après Gallipoli, l’ANZAC Day[5], le jour de la fête nationale des Australiens et des Néo-Zélandais. Mais quelques mois plus tard, en juillet 1916, une autre hécatombe cloue les ANZAC sur place devant les tranchées allemandes de Fromelles, dans le Nord, sur le front occidental du sud-ouest de Lille. La fête nationale garde sa date inchangée mais, désormais, ce sont aussi et surtout les 5 533 pertes océaniennes qui sont célébrées.
Les soldats-acteurs de la bataille perdue de Fromelles les 19 et 20 juillet 1916
C’est vers Merville, dans le Nord de la France, en zone armée britannique, que s’entraînent les troupes de l’ANZAC, fraîchement arrivées d’Égypte, en vue de leur prochaine insertion sur la ligne des Weppes à 20 kilomètres de Lille. Côté allemand, après les batailles de la côte d’Aubers, de Festubert et de Loos, l’attitude des soldats évolue vers l’évitement[6]. Les hommes de la 6° DR bavaroise maîtrisent le front entre Armentières et La Bassée depuis octobre 1914. La vie quotidienne, alternant période sur les lignes et repos dans les villages de l’arrière-front, laisse bien du répit aux soldats qui s’ingénient à tromper la longueur des journées loin de leur famille en vivant au coeur des populations locales encore présentes. Ils montrent peu de brutalisation envers l’ennemi et sont dans un mécanisme d’occupation raisonnée du territoire qui permet aux occupés de trouver un équilibre dans le « survivre » de tous les jours. Les forces en présence pour la bataille de Fromelles se dessinent donc : d’un côté une armée venue d’Océanie, non encore préparée aux champs de bataille de Flandre et d’Artois, de l’autre des soldats prussiens et bavarois qui connaissent les lieux mais surtout aussi la routine qui émousse la force combative.
Si le front pouvait être percé au niveau de Fromelles, le résultat serait intéressant pour ensuite avancer vite vers Lille, au nord, et vers les sites miniers de Béthune et de Lens, au sud. Mais ces objectifs stratégiques ne sont pas le but recherché. La cible première de cette attaque mineure et latérale aux percées de la Somme, est d’obliger les Allemands à maintenir, dans le secteur Armentières – La Bassée, un nombre élevé d’hommes, les empêchant de se dégarnir ici afin de répartir vers Verdun ou vers Péronne leurs combattants. L’opération visant Fromelles doit simplement fixer les troupes allemandes dans cette portion des lignes tandis que des projets de plus grande ampleur et d’ambition plus élevée occupent les états-majors alliés du BEF (British Expeditionary Force) ; ce sont l’offensive parallèle de Pozières pendant laquelle l’armée Gough tente de reprendre position au pied de la forte position allemande, et l’attaque du fort de Souville, près de Fleury, dans l’est, où les gardes bavarois, anéantis, voudraient reprendre l’initiative[7]. En ces deux points précis, les commandements britanniques et français craignent l’arrivée de renforts allemands. Fromelles[8] est donc l’emplacement désigné où des assauts alliés obligeront les Prussiens et les Bavarois à maintenir sur place leurs hommes plutôt que de désépaissir leurs lignes[9].
Les soldats océaniens venus à Fromelles sont des volontaires. Sur plus de 4,5 millions d’habitants, l’Australie compte plus de 60 000 hommes qui se portent volontaires pour prendre part aux combats aux côtés des Alliés. « Le volontariat s’est imposé en Océanie sauf pour les citoyens français des colonies. Aussi bien les troupes kanak que les Anzac, les soldats originaires d’Australie et de Nouvelle Zélande sont presque totalement des volontaires »[10]. Les motivations sont certes, officiellement, le loyalisme et la fidélité à la mère patrie, mais l’engagement de ces hommes fut vécu aussi comme un moyen d’émancipation et d’identification spécifique. L’Australie et la Nouvelle-Zélande qui étaient en 1914 des dominions, des nations autonomes au sein de l’Empire britannique, ont considéré que la déclaration de guerre du Royaume-Uni les engageait, et beaucoup ont considéré comme une possibilité évidente d’y prendre part.
Pourquoi Fromelles ?
Fromelles, en dépit de ces considérations générales tendant à minimiser la tentative de percée alliée dans le canton de La Bassée, est le premier assaut des troupes de l’ANZAC sur le front occidental et en même temps le jour le plus sombre de l’histoire de l’Australie et de la Nouvelle Zélande. En une seule attaque, le 19 juillet 1916, cinq mille hommes sont fauchés, presque tous dans le no man’s land allemand entre les premières lignes ennemies et leurs alignements bétonnés de mitrailleuses faisant office de secondes lignes. Les quelques-uns qui réussissent à atteindre l’arrière des tranchées allemandes se trouvent dans de si modestes fossés qu’ils ne peuvent s’y terrer longtemps. À découvert sur un terrain plat, nu, exempt de tout abri, les hommes piégés par la configuration du sol ne trouvent aucun élément propice leur permettant de se cacher. Et les quelques autres qui se sont avancés plus loin, faute de munitions suffisantes pour continuer leur défense, privés de relève, sont contraints de battre en retraite, assaillis par le feu ennemi ; ils tombent. L’échec britannique est complet, humain, stratégique et tactique[11].
C’est donc devant Fromelles que s’est produit le désastre qui a conduit quelques chercheurs à se questionner, il y a une trentaine d’années, sur les pertes : leur nombre, leur identité, leur sépulture. Leur nombre : il y eut près de cinq mille soldats hors de combat ; leur identité : les listes des divers régiments impliqués ne faisaient pas alors le relevé précis des tués, blessés et disparus ; leur sépulture : le cimetière de la bataille de Fromelles, le V.C. Corner Australian Cemetery and Mémorial, à deux kilomètres au nord-ouest du bourg, devait officiellement rassembler toutes les victimes du combat, mais il manquait plus de mille personnes.
Alors, face à tant de problèmes non résolus, un historien amateur australien, Lambis Englezos, s’est interrogé : quel est le nombre exact des pertes ? Qui sont les jeunes hommes victimes de leur engagement ? Où la CWGC, la Commission des sépultures de guerre du Commonwealth, a-t-elle enterré les autres « disparus » ? Et d’ailleurs ces corps ont-ils été retrouvés et honorés d’une stèle au soir de l’offensive ?[12] Cela a amené Lambis Englezos à commencer une longue quête qui a duré trente ans. Son questionnement consiste à penser que, si tous les corps des soldats australiens morts durant la terrible attaque de Fromelles n’ont pas été enterrés dans le cimetière V.C. Corner, ils ont été inhumés ailleurs ; restait à savoir où. Or il manquait beaucoup de victimes sans trace de leurs corps, et il était incroyable qu’un tel nombre de soldats enterrés puisse passer inaperçu depuis des décennies. L’interrogation de Lambis était portée par les vétérans eux-mêmes, tels Charlie Henderson, Tom Brain et Bill Boyce, qu’il avait rencontrés autrefois, et qui l’avaient convaincu qu’une recherche devait être menée afin d’honorer la mémoire de ces combattants oubliés. L’affaire a pris un tournant important lorsque, enfin, fut identifié en 2008 un site à Fromelles, notifié dans un champ au bord d’un petit bois, à la lisière du bourg, et qui pouvait être le lieu de sépulture des disparus manquants de la bataille de Fromelles. Le bois était appelé Fasanenwäldchen par les Allemands, traduit en Copse Faisan par le Britannique Charles Bean, l’historien officiel des Australiens, et récemment renommé Pheasant Wood ou bois du Faisan. Mais, aux dires des habitants de Fromelles eux-mêmes, ce bois n’avait pas de nom dans la localité avant la Grande Guerre ; c’était le bois au fond du village.
Les mécanismes qui ont transformé les soldats décédés en héros
Les hommes venus combattre en Europe, au lieu d’avoir été poussés par leur famille, ou des rivaux qui mettaient parfois des plumes blanches sur le vêtement d’un jeune homme partisan de rester en Australie, sont désormais considérés comme des héros de la première heure, arrivés sur les terres françaises au nom d’idéaux patriotiques élevés et de considérations éthiques suggérant à leur égard empathie et sympathie. Ils disposeraient des qualités qui avaient élevé les personnages de la religion grecque antique, à savoir la force et la rage de vaincre comme Héraclès, le courage et la sagesse comme Aj...
Table des matières
- Crédits
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- Préface
- Introduction L’histoire, un récit incarné
- Kennedy, est-il le héros de la crise de Cuba ?
- François Ier un roi protecteur des arts et des lettres
- Villebois-Mareuil, le « La Fayette » d’Afrique australe Un soldat idéaliste de la Belle Époque
- En quoi Aimé Césaire est-il « un nègre fondamental » ?
- Annexe Quelques repères chronologiques
- Les femmes et la Révolution ou la force fragile des actrices
- Annexes Pour aider à construire une trame
- Les jeunes gens australiens tombés à Fromelles en 1916 : des héros ou des acteurs ?
- Réflexions sur la genèse de l’engagement collectif
- Annexe « La gifle », des élèves s’engagent contre les violences ordinaires
- Le fond de l’air était rouge L’engagement d’une jeunesse allemande dans « les années de plomb »
- Annexe Quelques données chronologiques
- Achille, héros d’un mythe grec Une leçon d’histoire incarnée
- Que sont nos héros devenus ? Jeanne d’Arc (Luc Besson, 1999), une représentation de l’actrice historique au cinéma
- Alexandre, Charlemagne et Napoléon Des grandes figures impériales à travers la bande dessinée
- Incarner le temps pour concrétiser les savoirs
- Conclusion Pour une réflexion opérante
- Biographie des auteurs
- Bibliographie indicative
- Couverture