Chine-France : connaître et reconnaître
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Chine-France : connaître et reconnaître

Septième séminaire interculturel sino-français de Canton

  1. French
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Chine-France : connaître et reconnaître

Septième séminaire interculturel sino-français de Canton

À propos de ce livre

En 1964, la France fut la première puissance occidentale à reconnaître la Chine populaire. Depuis cette date, les relations bilatérales entre les deux pays ont connu des progrès remarquables, mais aussi des moments de perturbation.Ce volume est le fruit du septième séminaire interculturel sino-français de Canton, organisé par l'Université des Études Étrangères du Guangdong à l'occasion de la célébration du 50e anniversaire de l'établissement des relations diplomatiques franco-chinoises. Cette rencontre avait pour objectif de susciter des réflexions sur des problèmes rencontrés dans les coopérations bilatérales et sur l'avenir des échanges entre les deux pays.L'ensemble des textes réunis dans ce recueil représente un large éventail des recherches actuelles sur les relations interculturelles entre la France et la Chine. YANG Xiaomin, professeure, directrice adjointe de la Faculté des Langues et Cultures Européennes de l'Université des Études Étrangères du Guangdong et directrice adjointe du CERSI (Centre de Recherche sur l'Interculturel), travaille sur l'anthropologie sociale.ZHENG Lihua est professeur de sociolinguistique à l'Université des Études Étrangères du Guangdong, directeur du CERSI (Centre de Recherche sur l'Interculturel) et chercheur associé au Center for Foreign Literature and Culture de cette même université.

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Chapitre 1
Connaître et reconnaître

 

 
 

Connaître et reconnaître :
entre doxa et épistémè

Louis-Jean Calvet
Je sais que nous sommes ici pour parler d’interculturel, mais je voudrais pour commencer réfléchir avec vous sur le titre de notre rencontre, connaître et reconnaître, d’une façon tout d’abord linguistique, et puisque nous avons trois langues de travail, en français tout d’abord puis sur les deux autres langues, anglais et chinois, ce qui est peut-être une façon comme une autre de « faire » de l’interculturel. Commençons donc par le français.
Sur le plan étymologique, connaître vient du latin cognoscere. Mais une étymologie doit répondre à deux critères, ou raconter deux histoires, l’une phonétique et l’autre sémantique. Du côté de l’histoire phonétique nous voyons bien comment cognoscere, en passant par la forme conoscere, a donné conocer en espagnol, conhocer en portugais, conoscere en italien et connaître en français, mais cela ne nous dit rien sur le sens du terme latin ni sur son évolution sémantique vers ces langues romanes. Voici donc, pour fixer les idées, un résumé de l’article du dictionnaire Gaffiot sur cognoscere.
1. Apprendre à connaître, chercher à savoir, prendre connaissance de, étudier.
2. Reconnaître (qqn., qqch.) que l’on connaît
Pour le sens 1 le Gaffiot cite César, cum, quanto in periculo imperator, versaretur, cognovissent « ayant appris quel danger courait le général », et pour le sens 2 il cite Cicéron, et signum et manum suam cognovit, « il reconnut et son cachet et son écriture »
Nous voyons ainsi qu’un seul verbe latin, cognoscere, couvre les deux verbes du titre de notre colloque, connaître et reconnaître.
Il faut souligner à propos de ce verbe connaître, qu’il constitue un piège, ou un bel exemple de fausse étymologie, d’étymologie populaire. Il est en effet facile et tentant de segmenter connaître en con (latin cum, « avec ») et naître : connaître ce serait donc « naître avec », étymologie que l’on a souvent avancée. Mais il faut se méfier de ces lectures de surface. En effet le verbe naître vient du latin nascere alors que la racine latine de connaître est noscere. Nous avons donc une histoire phonétique trompeuse qui peut faire croire à une proximité sémantique, de la même façon que des phrases comme louer Dieu et louer une voiture peuvent nous faire croire à l’existence d’un seul verbe louer alors qu’il y en avait deux en latin, laudare (qui a donné laudation) et locare (qui a donné location).
Le verbe latin, cognoscere, signifie donc apprendre à connaître, étudier, désignant une progression, un processus en train de se dérouler : c’est ce qu’on appelle un verbe inchoatif. Il est alors logique qu’au participe passé il prenne un sens d’accompli, de ce qui a été appris, c’est-à-dire ce que l’on connaît, ce qui est su, le savoir donc, sens qu’il a en français. À ce premier stade, connaître c’est apprendre, puis avoir appris et par conséquent savoir : connaître c’est savoir.
Pour sa part le verbe savoir vient du latin sapere, avoir de la saveur, du goût, donc de la pénétration. Mais le verbe signifie également sentir par le biais du goût et enfin avoir un bon jugement, être sage. Ici encore, voici un résumé de l’article du Gaffiot :
1.Avoir du goûto leum male sapit « l’huile a mauvais goût »
2.Sentir, exhaler une odeur
3.Sentir par le sens du goût nihil sapere « être sans intelligence »
4.Se connaître en quelque chose meam rem sapio « je connais mon affaire »
Pour cerner les relations entre ces deux verbes, connaître et savoir, nous pouvons soupeser les substantifs auxquels ils correspondent, connaisseur et sage ou savant. Nous pouvons aussi souligner qu’ils ont parfois le même sens : je connais le latin et je sais le latin, mais ce parallélisme de constructions est rare. Les choses en effet ne sont pas aussi simples. Considérons par exemple ces deux phrases :
Je connais Zheng Li-Hua
Je sais que Zheng Li-Hua est là.
Ici les deux verbes ne peuvent pas commuter, on ne peut pas dire :
*Je sais Zheng Li-Hua
*Je connais que Zheng Li-Hua est là
On connaît quelque chose ou quelqu’un, mais on sait quelque chose, le verbe connaître a donc plus de potentialités syntaxiques que le verbe savoir, d’un certain point de vue il l’englobe.
Dans le Vocabulaire européen des philosophies, publié sous la direction de Barbara Cassin[1], on trouve dans un chapitre consacré à l’épistémologie un court texte de Gérard Simon qui va nous permettre à la fois de passer à notre deuxième langue de travail, l’anglais, et de nous interroger sur le champ sémantique de reconnaître. Il y explique en effet que face aux verbes français connaître et savoir, il n’y a qu’un seul verbe en anglais, know, qui correspond aux différents usages des deux verbes français :
I know Zheng Li-Hua
I know Zheng Li-Hua is here
Il en existe en fait un autre, can, correspondant en partie au savoir français, par exemple dans des formes comme Can you swim ? que nous traduirons par Tu sais nager ? Mais il s’agit là d’un fait secondaire. Il nous faut surtout évoquer quelque chose que Gérard Simon ne prend pas en compte, ce n’est d’ailleurs pas son sujet, les façons dont on « reconnaît » en anglais, ce qui par contrecoup va nous permettre de cerner le sens de ce verbe français. Car s’il n’y a en anglais qu’un verbe (know) pour deux en français (connaître, savoir), il y en a en revanche au moins trois pour le reconnaître français : recognize, acknowledge et admit. Acknowledge c’est reconnaître une dette ou une erreur, c’est aussi reconnaître quelqu’un à sa valeur et, dans un sens plus restreint, accuser réception d’une lettre. Admit c’est bien sûr admettre, l’un des sens du reconnaître français : j’admets avoir tort, je reconnais avoir tort. Quant à recognize c’est sans doute celui des trois qui a les sens les plus variés : celui d’admettre (qu’on a tort), de reconnaître quelqu’un que l’on connaît déjà et surtout, je vais y revenir, de reconnaître un gouvernement.
Je voudrais maintenant passer, avec prudence et humilité, car je connais mal cette langue, au chinois. Voici quelques verbes qui me semblent correspondre au champ sémantique de la connaissance :
Tout d’abord hui, 會, et en caractère simplifié会, qui comme vous le savez signifie « être capable de » par exemple de parler une langue, donc la connaître :
hui you shui 會游水« savoir nager »
hui shuo會說 « savoir parler »
Mais le premier sens de會est « se réunir », « rencontrer », « lieu de rencontre », etc., et j’avoue être incapable d’expliquer le passage de ces différents sens à celui de « connaître » ou « savoir », mais sans doute certains parmi vous pourront nous éclairer.
Passons à zhidao 知道, « savoir », dans des phrases comme wo bu zhi dao, 我不知道 « je ne sais pas ». Nous avons aussi liaojie了解, « connaître quelque chose », mais je crois que liao signifie plutôt « comprendre ». Et enfin nous avons renshi认识, par exemple dans wo renshi ta, 我认识 他 « je le connais ». C’est ce verbe qui est utilisé dans le titre de notre rencontre, mais écrit sous sa forme classique, 認識 : 中國-法國 :認識與再認識.
Cela me mènerait, pour mettre fin à ces considérations linguistiques, à conclure que le connaître qui nous rassemble ne concerne pas le savoir (hui, 会, ou zhi dao, 知道) mais plutôt le contact familier, la relation, la compréhension, la perception, voire la représentation. Connaître quelqu’un ou quelque chose peut en effet signifier également « j’en ai une image, une représentation ». Or, depuis le philosophe grec Parménide, on distingue entre la doxa, c’est-à-dire une opinion commune et confuse que l’on a sur la réalité (du grec δόξα, doxa, « opinion », « conjecture ») et l’épistémè, la recherche scientifique de la connaissance.
Et nous voici au centre de l’approche interculturelle. Connaître l’autre, apprendre à le connaître pour revenir au sens latin du verbe, devrait être un processus qui évite la doxa pour tenter de « comprendre », étymologiquement de « saisir ». La doxa, le sens commun, est un ensemble de clichés, de stéréotypes qui constituent au bout du compte une idéologie. Les Chinois sont impénétrables, les Arabes fourbes, les Allemands brutaux…, le contraire donc de la compréhension.
Roland Barthes avait repris ce terme de doxa, qu’il traduisait par le ce-qui-va-de-soi, les fausses évidences, en un mot les mythologies qui constituaient dans les années 1950 ses cibles prioritaires. Il suffit de feuilleter son livre, publié en 1957, Mythologies, pour en faire une fructueuse récolte. Je voudrais vous en proposer quelques extraits, tirés de textes qui concernent non pas la France ou les Français mais, justement, le regard que les Français portent sur les autres.
À propos d’un film italien de 1954, Continent perdu, qui, de la Chine à l’Indonésie, présentait des scènes « typiques », rites, prise de voile d’une prêtresse, culture du riz, funérailles, Barthes se moquait de la postulation d’un « Orient formellement exotique, en réalité profondément semblable à l’Occident, du moins à l’Occident spiritualiste. Les Orientaux ont des religions particulières ? Qu’à cela ne tienne, les variations en sont peu de choses au prix de la profonde unité de l’idéalisme »
Ou encore il soulignait que :
« Les rites, les faits de culture ne sont jamais mis en rapport avec un ordre historique particulier, avec un statut économique ou social explicite, mais seulement avec les grandes formes neutres des lieux communs cosmiques (saisons, tempêtes, mort, etc.) »
pour enfin conclure :
« On voit donc que les “belles images” de Continent perdu ne peuvent être innocentes : il ne peut être innocent de perdre le continent qui s’est retrouvé à Bandoeng. »
Et peut-être faut-il rappeler qu’un an après la sortie de ce film, à la conférence de Bandoeng, en Indonésie, se réunissaient les représentants de 29 pays asiatiques et africains, parmi lesquels l’égyptien Nasser, l’indien Nehru, le chinois Zhou En Lai, et que cette réunion marquait l’arrivée sur la scène internationale de ce qu’on appela à l’époque le Tiers-Monde, ou les non-alignés.
À propos d’un reportage publié par Paris Match sur un couple de Français parti avec un bébé, appelé par ses parents Bichon, faire des dessins dans un pays africain, il écrit dans un texte intitulé Bichon chez les nègres :
« L’astuce profonde de l’opération-Bichon c’est de donner à voir le monde nègre par les yeux de l’enfant blanc : tout y a évidemment l’apparence d’un guignol. Or, comme cette réduction recouvre très exactement l’image que le se...

Table des matières

  1. Crédits
  2. Table des matières
  3. Introduction Chine-France : connaître et reconnaître
  4. Chapitre 1 Connaître et reconnaître
  5. Connaître et reconnaître : entre doxa et épistémè
  6. Jade brisé Lisa Bresner : connaissance et reconnaissance de la Chine
  7. François Cheng, le « Vide médian » entre deux cultures
  8. Chapitre 2 Relations et coopérations sino-françaises
  9. Charles de Gaulle et les relations sino-françaises
  10. La fidélité cède la place à la réalité : de Gaulle et la Chine
  11. La prospérité, la décadence et la réfraction de « la ferveur pour la Chine » en France
  12. L’édition sans frontières : une nouvelle page dans les relations Chine-Europe
  13. L’auf et sa perspective en Chine
  14. Chapitre 3 Les représentations
  15. Connaître et reconnaître l’Europe : l’évolution des représentations des Européens chez les Chinois entre 2000 et 2010
  16. Le romantisme français et les Chinois : une étude interculturelle
  17. Évolution des représentations de la Chine chez les Français
  18. Chapitre 4 La compréhension culturelle et la communication interculturelle
  19. Une interprétation biaisée de la culture chinoise par les Occidentaux
  20. L’interculturalité entre le français et le chinois au travers d’actes de langage
  21. Détour, une manière d’expression ou une stratégie préférée des Chinois ?
  22. Mieux comprendre des stratégies argumentatives à la française
  23. Dysfonctionnement de la communication à travers le backchannel
  24. Chapitre 5 L’adaptation culturelle
  25. Participation en classe et valeur de la parole dans l’enseignement chinois et français
  26. L’intégration et la communication interculturelle des étudiants ingénieurs chinois dans les Universités de Technologie en France
  27. Les musulmans algériens en Chine : nouvelle rencontre des cultures chinoise et islamique
  28. Chapitre 6 La formation et l’enseignement
  29. La formation au management interculturel franco-chinois pour des étudiants : de l’intérêt d’une expérimentation sur le tas ?
  30. Le contexte culturel, le comparatisme et le multimédia dans l’enseignement de la littérature française aux étudiants chinois
  31. Perspectives pédagogiques de la dimension interculturelle de l’enseignement du FLE par un professeur français à des étudiants chinois en Chine
  32. Chapitre 7 La culture, le management et le commerce
  33. Les Chinois d’un côté, les Français de l’autre
  34. Incertitude environnementale : Connaître et interpréter l’environnement économique d’un pays étranger
  35. L’effet culturel sur le transfert des pratiques de GRH dans les entreprises françaises en Chine
  36. L’effet de la « distance linguistique » sur le commerce bilatéral : Basé sur la France et la Chine
  37. Chapitre 8 La norme ISO 9000 en Chine
  38. Quand l’écrit change l’entreprise
  39. Quand ISO 9001 est détournée pour des raisons organisationnelles dans les Firmes Multinationales en Chine
  40. Chapitre 9 Les entreprises européennes en Chine et les entreprises chinoises en Europe
  41. Confiance et communication interculturelle : étude sur les problèmes de confiance dans les entreprises espagnoles en Chine
  42. Les conflits interculturels dans les entreprises anglaises en Chine
  43. L’expression et la perception des émotions dans un contexte professionnel interculturel : le cas des PME italiennes en Chine
  44. Des problèmes de management interculturel : le cas de Huawei au Portugal
  45. Chapitre 10 L’évolution de la société chinoise
  46. L’observation de l’émergence de la classe moyenne chinoise à partir de 1997
  47. Mémoire collective, mémoire individuelle : observation de la société chinoise des années 1980 et de la génération post 80
  48. Évolution des mots en vogue chez des étudiants chinois : étude fondée sur des enquêtes
  49. L’évolution de la mise en scène du corps en Chine depuis 50 ans : l’évolution de la Chine au spectre des pratiques corporelles
  50. Le rêve chinois et ses caractéristiques
  51. Bibliographie
  52. Des mêmes auteurs
  53. Couverture