
- 144 pages
- French
- ePUB (adapté aux mobiles)
- Disponible sur iOS et Android
eBook - ePub
À propos de ce livre
L'un est un philosophe internationalement reconnu, en quête des révolutions de la connaissance. L'autre est un astrophysicien réputé, à la pointe des recherches sur les premiers matins du monde. Ensemble, ils nous entraînent aux confins de l'univers et de l'homme. Qu'est-ce que l'univers ? En quoi est –il le nôtre, non seulement parce que nous y résidons mais aussi parce qu'il nous a produits ? Partant à la redécouverte de la cosmologie, dans un exercice éblouissant où la circulation des cultures et des savoirs n'a d'égale que la rigueur scientifique du propos, Michel Cassé et Edgar Morin convoquent tour à tour les mythes anciens, les poètes, les philosophes, et bien sûr les savants , pour rendre compte des révolutions de la physique moderne sur le vide, la matière et le temps. Exemple même d'une rencontre vraie et intime entre la science et la philosophie, ce livre de gai savoir, toujours profond et toujours jubilatoire, nous restitue notre condition d'enfants du ciel. Michel Cassé est astrophysicien au Commissariat à l'énergie atomique et chercheur à l'Institut d'astrophysique de Paris. Il est l'auteur d'ouvrages remarqués, dont Du Vide et de la Création. Edgar Morin est directeur de recherches émérite au CNRS, penseur et homme de convictions. Il est l'auteur, entre autres avec La Méthode, d'une œuvre essentielle pour le débat contemporain.
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Informations
1
La révélation du vide
Pour une pensée physicienne du monde
EDGAR MORIN — Qu’est-ce que l’univers ? En quoi est-il notre univers ? Il est le « nôtre » non pas seulement parce que nous nous y trouvons, qu’il constitue notre site, mais aussi parce qu’il nous a produits, que nous en sommes issus et qu’il ne cesse de nous interroger au point d’ailleurs qu’aucune société n’a pu se passer de le représenter. Ainsi, au cours de notre histoire, en Occident a d’abord prévalu une conception géocentrique où la Terre figurait au centre de l’univers, ce qui était conforme aux apparences, et conforme aussi à la Bible. Puis nous sommes passés, non sans difficultés, avec Tycho Brahe, Copernic, Kepler, à un autre univers, où cette fois le centre était le Soleil. Nous étions détrônés, mais nous gardions néanmoins une place parmi les fauteuils d’orchestre, ce qui n’était pas si mal. Enfin est arrivée une révolution encore plus radicale dans notre conception de l’univers, dont l’un des aspects est que ni le Soleil ni même la galaxie, la Voie lactée, ne sont au centre du monde, mais que, peut-être, le monde lui-même n’a plus de centre. Ce nouvel univers qui commence à apparaître, et qui même n’a pas totalement émergé, selon les découvertes de Hubble sur son expansion et sur la fuite des galaxies, c’est celui dans lequel nous devons nous installer, et qui constitue, cher Michel Cassé, le motif de notre dialogue.
MICHEL CASSÉ — Premier fil rouge en effet, l’astrophysique et la cosmologie, en tant que sciences, sont nées lorsque Galilée, en pointant sa lunette vers la Lune, a vu apparaître des montagnes. Jusque-là, dans la vision aristotélicienne et scolastique dominante, la Lune marquait la limite entre deux mondes. Au-dessus d’elle se tenait donc le monde « supralunaire » réputé éternel, incréé et qui n’était composé ni d’eau ni d’air, ni de terre ni de feu, mais d’une cinquième essence parfaite, idéale, immuable, constituant la quintessence. En revanche, sous la Lune, dans la sphère « sublunaire » centrée sur la Terre, régnait un régime de changement, marqué par la corruption, la décadence et la mort. Or, selon les propres termes de Galilée, la Lune s’avérait « terreuse ». C’était un tournant essentiel. Quitte, aujourd’hui, à inverser la proposition, je dirais que la Terre est aussi bien céleste. Désormais, dans le champ éclaté et complexe du savoir, il est en effet une science fondamentale de l’unité qui pose l’équation la plus simple du monde : Terre = ciel ; ce qui est là-bas est comme ce qui est ici ; ce qui n’est pas ici n’est nulle part. Aussi bien les atomes que les lois. Il y a unité de substances et unité de lois dans l’univers. La physique est par conséquent universelle. Et cette science fondamentale, vive comme la spéculation et pointue comme les technologies qui lui donnent ses ailes et ses armes, porte le nom de cosmologie. Elle répond à des interrogations ancestrales en faisant valoir les arguments de la physique la plus sophistiquée et la plus abstraite. Ce mariage du ciel et de la Terre dans la pensée humaine renoue les fils entre la pensée antique des philosophes présocratiques et la pensée quantique et relativiste des savants contemporains, il consacre la pensée physicienne du monde.
E. M. — La pensée de la physis d’Empédocle et celle d’Héraclite se révèlent en effet, rétrospectivement, plus riches que la doctrine platonicienne des essences ou le système aristotélicien des causes. Elles n’élucident pas pour autant la distinction moderne entre astrophysique et cosmologie que vous avez esquissée.
M. C. — La cosmologie est l’étude de l’origine, de la structuration et de l’avenir de l’univers. Elle met à contribution les connaissances les plus diverses, y compris celles de la théorie des particules élémentaires. L’école du dedans, celle qui consiste à lire le monde dans un grain de sable, y rejoint l’école du dehors qui s’ouvre à la perspective cosmique. La cosmologie est une science historique. Au début, l’univers était chaud. Vous l’avez justement décrit en expansion, formule qui vaut introduction au discours cosmologique. Si on inverse la flèche du temps, il est en contraction ; et si on l’imagine comme un gaz, le contracter revient à le réchauffer. Au commencement, est donc la chaleur. Et dans cette grande chaleur prolifèrent des particules anonymes, élémentaires, énergétiques — la chaleur étant une mesure de l’agitation thermique, de l’énergie de chaque particule individuelle. Ce qui fait que nous pouvons simuler les conditions du big-bang au moyen des accélérateurs de particules, en conférant à des particules individuelles l’énergie qu’elles avaient originellement. Les astrophysiciens, quant à eux, sont soucieux de perfection formelle. Ils cherchent à déceler, dans l’univers, un plan coordonné, un schéma directeur, un concept organisé en train de se réaliser à travers la forme matérielle, donc une histoire. Dans le champ complexe du savoir, l’astrophysique et la cosmologie, sciences de plein air et de pleine conscience, cherchent en fait à situer l’homme dans l’espace et dans le temps.
Une équation en forme de poème
E. M. — Mais peut-on décrire cet univers, le pouvez-vous ? Et si oui, comment ?
M. C. — Commençons par ses éléments. Il y a les acteurs et il y a l’acte. Parmi les acteurs figure bien sûr la matière, mais sa définition a connu une extension considérable. Par exemple, on y inclut désormais la lumière, considérant qu’elle est une forme matérielle neutre. On peut lui conférer le signe zéro, mais le zéro n’est jamais qu’un plus et un moins additionnés. Disons que le plus correspond à la matière, et le moins à l’antimatière. En conséquence, la matière naît de la lumière, mais en compagnie de son double antagonique et mortel, l’antimatière. Et ces deux formes, si elles se rejoignent redonnent le zéro. Selon cette dialectique entre la lumière et la matière à laquelle la nature donne libre cours, le big-bang est l’événement où la lumière se matérialise alors que l’étoile, en revanche, constitue l’anti-big-bang. Elle est le lieu où la matière se transforme en lumière — raison pour laquelle les étoiles brillent. Voilà une première description de la dialectique matière-lumière en vertu de la plus belle équation que l’on connaisse de par sa sobriété, un petit poème que tous les enfants savent par cœur, sans pouvoir en expliciter le sens et qui s’écrit E = mc2. Personne ne soupçonne le potentiel explosif qu’elle cache sous son simple cotillon ! L’univers est conforme à la théorie d’Einstein en ce qu’il correspond à une description relativiste. Mais il est aussi quantique, et j’y reviendrai, la physique quantique étant la meilleure description que nous possédions s’agissant de l’infiniment petit. Reprenons toutefois le chemin vers l’origine. La découverte de l’expansion de l’univers par Hubble que vous évoquiez a, en effet, été décisive. Tout comme celle du rayonnement cosmologique fossile qui filtre depuis la nuit des temps et vient grelotter à l’oreille de nos radiotélescopes parce qu’il est très froid, si froid qu’il caresse la Terre et les récepteurs qui l’entourent sous forme de micro-ondes. Or ce rayonnement invisible est omniprésent et permanent. Cela veut dire que la nuit n’existe pas, qu’elle est du domaine des apparences, que le ciel n’est pas noir, mais notre regard obscur. Mais telles des prothèses, les yeux électroniques que nous avons forgés afin de pallier notre cécité nous permettent de voir l’invisible. Ce rayonnement-là qui filtre des origines a été émis il y a treize milliards d’années, est perceptible par le moyen de radiotélescopes ou de satellites dédiés à son étude. Il nous donne à voir la première image du monde. Elle est quasiment lisse, hormis de très légères aspérités qui laissent supposer que la forme va s’extraire d’un substrat indifférencié. Elle nous permet de lire les chapitres liminaires de l’histoire du monde et accrédite l’idée d’une cosmologie conforme à la relativité générale d’Einstein selon laquelle l’univers se déploie, prend du volume au fil du temps et se refroidit.
E. M. — Un déploiement qu’il serait cependant illusoire, suivant la pente de notre entendement, de concevoir selon les représentations les plus communes.
M. C. — On parle d’expansion de l’univers, mais en réalité il s’agit d’une dilatation de l’espace, à grande échelle. Les objets eux-mêmes, votre tête, la mienne, fort heureusement, ne gonflent pas. Les objets constitués, les objets pris dans des formes, dont les atomes sont reliés par des interactions beaucoup plus fortes que la gravitation, ne sont pas en expansion. Sinon, nos yeux s’écarteraient au même rythme que l’espace, et nous ne saurions pas que l’univers est en expansion. Il y a donc du fixe dans l’univers, mais il est à petite échelle. Il en est ainsi de la distance entre la Terre et la Lune et de toutes les distances dans notre propre galaxie. Quant aux galaxies elles-mêmes, en dehors des amas qu’elles forment parfois, elles sont si distantes les unes des autres que leur influence, notamment leur attrait mutuel, est négligeable. Ces îles d’univers s’écartent mutuellement, non pas parce qu’elles se révulsent ou se repoussent, mais parce que la trame de l’espace qui les sépare se dilate. Dans cette vision du monde, tout à fait élastique, le substrat de l’espace lui-même n’est pas fixe, mais en réalité ductile. Le temps lui-même est associé à une dimension. L’espace quadridimensionnel ou espace-temps est ainsi érigé, et une fois rempli de matière, il est identifié à l’univers par Einstein. Or il s’avère que ces quatre dimensions que nous percevons, les trois spatiales et la temporelle, pourraient ne pas être les seules.
Temps et révolutions
E. M. — Ces retrouvailles avec le temps apparaissent cruciales, et nous y reviendrons. Dans sa propre vision théologique, Augustin, déjà, notait le paradoxe : « À quel moment Dieu a-t-il créé le monde ? » Et il répondait : « À aucun moment, car la création du monde est celle du temps », dimension dont nous ne pouvons nous abstraire. Toutefois, dans ce temps singulier qu’est l’histoire humaine, comment est-on passé de la « Lune terreuse » à l’affirmation de plusieurs dimensions ?
M. C. — Nous en sommes, en ce sens, à la sixième révolution copernicienne. La première, vous l’avez souligné, est que la Terre n’est pas au centre du système solaire, le Soleil occupant cette place — et quoique cette révolution n’ait guère pénétré les consciences à constater la persistance de l’expression « le Soleil se lève ». La deuxième est que le Soleil et son cortège de planètes sont en marge de la galaxie, dans sa grande banlieue. La troisième est que ladite galaxie n’est pas au centre de l’univers, car l’univers lui-même n’a ni centre ni bord. La quatrième est que la matière qui nous constitue, faite d’atomes, n’est pas la substance essentielle de l’univers, révolution absolument considérable faisant perdre sa royauté à l’atome lumineux ; s’ouvre l’ère de l’invisible, d’une substance invisible, d’un nouvel éther, indétectable mais pourvu d’énergie. La cinquième est que les lois que nous considérions comme universelles, c’est-à-dire celles qui nous permettaient de décrire le comportement de la matière ici-bas et dans le ciel, semblent réservées à notre province cosmique. L’univers va au-delà de ce que nous pouvons qualifier en tant qu’homme, simplement homme voyant et sensitif. Disons que la théorie semble indiquer, de manière indirecte mais logique, que l’univers est un ensemble de cosmos, une sorte de champagne si l’on veut, et dont nous n’occuperions qu’une bulle. Sixième et dernière révolution conceptuelle, mais qui n’est pas encore avérée, bien qu’il nous faille l’admettre pour des questions d’harmonie et de cohérence de la théorie, l’existence de dimensions que nous ne percevons pas.
E. M. — La perception en est impossible, mais non pas la détection.
M. C. — Le visible est lié aux propriétés physico-chimiques de notre rétine. C’est l’insistance de la lumière qui a forgé notre œil, le Soleil qui l’a éduqué. Tous deux sont faits de la même substance : les atomes du Soleil parlent aux atomes des yeux le langage de la lumière, et la raison pour laquelle nous voyons réside dans cette identité de nature entre le détecteur et le récepteur. Que, dans le même temps, nous soyons aveugles à toutes les autres lumières ne signifie pas qu’elles n’existent pas. Notre visible est l’écume de la lumière. Notre matière est l’écume de la matière. Notre cosmos est une sphère causale où la cause précède l’effet, où tout peut être décrit de manière déterministe. Mais ce royaume-là ne serait qu’une bulle. Il serait lui-même éclos dans un milieu auquel on pourrait donner le nom de « substrat incréé » ou de « père du monde ». Et, sans que l’on puisse absolument le décrire, on peut le mettre en équation.
Quand parle la matière
E. M. — Cette dernière formule, « père du monde », dont je sais que vous n’y voyez qu’un usage métaphorique, ne laisse pourtant pas de m’interroger. Quelle valeur attribuer au regard que l’homme, de sa « bulle » dites-vous, porte sur l’indescrip...
Table des matières
- Couverture
- Titre
- Copyright
- Préface
- 1 - La révélation du vide
- 2 - Approches de l’invisible
- 3 - L’univers comme histoire
- 4 - La flèche du temps
- 5 - Vers l’anthropo-cosmos
- Postface
- Bibliographie sélective