Vivre mieux avec les émotions de son enfant

Aurélie Crétin

• Éditeur: Odile Jacob
• Année: 2013
• Imprimer l'ISBN: 9782738130488
• ISBN de l'eBook: 9782738174901
• Sujet: Psychology
• Sujet: Developmental Psychology

Toutes les émotions, la joie, la colère, la tristesse, la peur, sont indispensables à l'enfant pour se développer, communiquer, exprimer ce dont il a besoin ou envie, ce qu'il aime ou ce qu'il n'aime pas. Mais il n'est pas toujours évident de comprendre pourquoi il réagit de telle ou telle manière aux situations du quotidien. C'est pourquoi ce livre, conçu pour vivre mieux les émotions de son enfant, propose tous les repères utiles pour  • réagir face à ses peurs ; •?lui permettre d'apprécier les moments de joie ; •?trouver l'attitude adaptée lorsqu'il est en colère ; •?l'aider quand il est triste ; •?faire la différence entre émotions normales et excessives ; •?gérer ses propres émotions de parents. Pour réagir de la façon la plus appropriée aux émotions de son enfant, pour se donner toutes les chances de l'accompagner au mieux afin qu'il ait davantage confiance en lui : des solutions concrètes et des outils adaptés favorisant une bonne gestion des émotions de chacun. Aurélie Crétin est psychologue et psychothérapeute, praticienne en thérapie comportementale et cognitive.?Elle exerce en libéral à Lyon et enseigne à l'université Lyon-I (en DU de thérapie comportementale et cognitive et en DU de psychopathologie infanto-juvénile). 

Chapitre 1

Les émotions de l’enfant

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Peur, colère, tristesse… tant d’émotions que nous souhaiterions voir s’effacer pour laisser place à la joie, à ce sourire qui éblouit tant le visage de nos enfants !

Flavien est très en colère lorsque son frère lui prend son nouveau jeu vidéo. Esther est ravie, ses yeux brillent, lorsqu’elle voit arriver ses parents après une semaine de colonie. Maël n’arrive pas à contrôler sa peur. Elle ne cesse de penser aux cambrioleurs qui pourraient venir chez elle pendant la nuit. Elian est triste de devoir déménager loin de ses supercopains…

Tant de situations auxquelles vous pouvez être confronté régulièrement.

Avant d’arriver à des exemples et « outils » concrets permettant d’accompagner votre enfant sur le chemin de ses émotions, quelques repères théoriques me paraissent nécessaires. Ils vous permettront d’accepter et d’accompagner plus aisément les émotions de vos enfants.

Qu’est-ce qu’une émotion ?

Nous l’avons dit, les émotions sont multiples. Nous les ressentons, nous pouvons donner des exemples d’émotions (la joie, l’angoisse, la tristesse…) mais il est beaucoup plus difficile de définir ce qu’est une émotion.

Le Petit Robert1 définit l’émotion (du latin ex-movere qui signifie mouvement vers l’extérieur) comme un « état affectif intense, caractérisé par une brusque perturbation physique et mentale où sont abolies, en présence de certaines excitations ou représentations très vives, les réactions appropriées d’adaptation à l’événement (au sens affaibli, on parle d’un état affectif, plaisir ou douleur, nettement prononcé) ».

Essayons encore de préciser notre sujet afin d’obtenir une définition plus personnelle de ce qu’est une émotion…

Quelle serait votre définition de l’émotion ?

Je vous invite à prendre quelques minutes de réflexion :

Pour moi, une émotion c’est…

« L »’émotion

Pour aller à l’essentiel, on peut dire qu’une émotion est principalement composée de sensations physiques internes qui donnent des informations sur une situation et nécessitent d’aller vers l’extérieur… L’émotion est influencée par des pensées (interprétations de nos observations). Elle est filtrée par nos expériences et nous conduit à l’action.

La jeune Sibylle, 10 ans, me l’expliquait très bien : « Je n’y arrive pas. Tout mon corps se tend. Je sens cette boule venir dans ma gorge et les larmes montent dans mes yeux, mon cœur tape trop trop fort. Et c’est pareil à chaque fois que je les vois. C’est pareil quand c’est une mouche, un insecte, une guêpe… Je ne peux pas m’en empêcher, je cours, je crie, je dois partir. Et puis après je n’arrête pas de me dire qu’ils sont forcément toujours là, que je ne les vois plus mais qu’ils sont là quelque part, c’est horrible ! » Sacrées émotions !

Jean Cottraux2 définit l’émotion comme la « réponse comportementale et physiologique, brève et intense, qui reflète et/ou révèle le vécu subjectif de celui qui est affecté par un événement interne ou externe ».

Les émotions sont donc reconnues par l’enfant par des sensations physiques, agréables ou désagréables, des membres, de l’expression faciale3, de la peau. Elles sont ainsi liées à un traitement de l’information, interprétation de la situation vécue ayant des répercussions sur son comportement. L’enfant aura donc besoin de temps, d’expériences et d’accompagnement pour apprendre à les identifier, les reconnaître, les nommer et à réagir face à elles.

« Les » émotions

« Bobo », « j’aime pas », « je ne suis pas bien », « je me sens bizarre », « je ne suis pas content », « il m’énerve », « je me sens coupable »…

Il existe un nombre très important d’émotions différentes qui ne sont pas toujours faciles à identifier et à nommer pour nous adultes. L’enfant en développement commencera par identifier des sensations physiques. Il associera ensuite ces sensations physiques à des émotions « binaires » (j’aime, je n’aime pas), puis à des émotions primaires.

Les émotions de base sont : la joie, la peur, la tristesse, la colère ainsi que le dégoût et la surprise.

Il identifiera ensuite des émotions plus complexes (par exemple : la rage, la nostalgie…). Face à une situation, l’enfant pourra ressentir deux émotions consécutives : une émotion primaire puis une émotion secondaire (souvent liée à un jugement de l’émotion primaire) : je ressens de la colère (émotion secondaire) d’être triste (émotion primaire)…

Progressivement, l’enfant va apprendre à identifier ces différentes émotions. Lorsqu’il manifestera de la joie, de la tristesse, de la colère, de la peur, ses parents nommeront ces émotions, lui permettant ainsi d’associer un mot à une émotion et ainsi les reconnaître.

Selon ses gazouillis, ses mimiques faciales, ses comportements, ses parents ou son entourage vont faire des hypothèses sur ce que l’enfant peut ressentir et le mettre en mots : « Oh ! là tu n’as pas l’air très content, tu dois être en colère !!! », ou au contraire : « Ça, ça a l’air de te plaire, on dirait que tu es heureux. » C’est en grande partie grâce à ces verbalisations, qu’il va apprendre ce qu’est une émotion, comment les nommer, comment les verbaliser, les vivre, mais également ce que cela fait vivre à l’autre. L’enfant va observer les effets de la manifestation de ses émotions sur les personnes avec lesquelles il est en contact, et va ainsi entrer en relation avec elles : « Lorsque je souris, que je suis content, on me fait des sourires ; lorsque je crie, que je montre mon mécontentement, on vient me voir ; lorsque je pleure, on me prend dans les bras… », et ça, l’enfant va rapidement le comprendre !

Les émotions qu’il va ressentir et qu’il manifestera ont des conséquences sur l’attention qui lui est portée, sur la présence ou l’absence de son parent. Il utilisera ce moyen de communication durant toute sa vie d’enfant… et d’adulte !

Mais à quoi servent les émotions ?

« Qu’est-ce que ce serait bien, si mon enfant ne ressentait que des émotions agréables ! Comme c’est difficile de le voir souffrir ! Je ne veux plus qu’il ressente autant de peur, de colère, de tristesse !… »

La maman de Fleur, 4 ans, faisait son maximum pour que sa fille ne ressente pas d’émotions désagréables depuis sa naissance. Elle et son mari consacraient la majorité de leur temps libre à leur fille afin qu’elle ne vive pas de frustration, de solitude, de peur… À la naissance de son petit frère, la maman de Fleur ne voulait pas qu’elle se sente délaissée. Elle passait donc la majeure partie de son temps à jouer avec elle. C’est une maman très bienveillante qui voulait protéger au maximum sa fille des émotions désagréables… Fleur, qui est une petite fille très gaie, vive, sociable, a néanmoins du mal à gérer ses émotions : elle tape et mord certains de ses petits copains. En ayant été très protégée par sa maman, elle n’a pas appris à ressentir suffisamment les émotions désagréables, à « faire avec » et elle ne sait donc pas comment réagir face à ce type d’émotion.

Notre travail a progressivement amené ses parents à permettre à Fleur de faire l’expérience de ses émotions désagréables, en lui laissant plus d’autonomie, en lui laissant faire des erreurs, en la félicitant… Ils lui ont ainsi permis de vivre davantage ses émotions. Ils l’ont aidée à les verbaliser et à apprendre comment faire autrement… Ce n’est pas facile de laisser son enfant vivre ses émotions de frustration, de peur. Mais au final, elles s’avèrent utiles et aident l’enfant à affronter les événements de vie…

Sous le coup de nos propres émotions, nous oublions à quel point celles de l’enfant sont importantes et nécessaires à son bon développement. Tout parent sait bien au fond de lui que ce ne serait ni possible, ni bénéfique à l’enfant de ne ressentir que la joie, le bonheur, le contentement… L’enfant a également besoin d’apprendre à ressentir et à vivre des émotions désagréables, sans quoi il ne saura comment y faire face.

Avoir des repères sur leur utilité4^,5 permettra de mieux les vivre et de les accepter, et ainsi, d’accompagner votre enfant lorsqu’il les ressentira à son tour, afin qu’il n’essaie pas de s’en protéger.

Informer

Les émotions renseignent l’enfant sur lui et sur le monde qui l’entoure. Elles lui indiquent par exemple si la situation est dangereuse, afin qu’il adapte sa réaction. Par exemple, face à un chien qui grogne et qui montre ses grosses dents, s’il ne ressent pas la peur, il ne ressentira pas l’alarme du danger. Il s’approchera du chien au risque de se faire mordre.

Intégrer

Les émotions aident à « digérer ». Quand l’enfant ressent une émotion, il est important qu’il puisse la vivre, car c’est en étant vécue et extériorisée, qu’elle va pouvoir diminuer d’intensité. Le fait de s’exposer à cette émotion-là permet de comprendre qu’elle n’est pas « dangereuse » mais « bénéfique ».

La tristesse par exemple permettra de faire son deuil. Si l’enfant ne la vit pas, le processus ne pourra pas s’opérer.

S’adapter/agir

En fonction de l’information fournie par l’émotion, des changements physiologiques opèrent et amènent l’enfant à modifier son comportement. Si nous reprenons l’exemple du chien, quand vous avez peur, ne courez-vous pas plus vite ?

Les émotions permettent à l’enfant de s’adapter au contexte dans lequel il se trouve. Par exemple, s’il ne ressent pas de colère (ou la garde très intériorisée) lorsqu’un autre enfant le tape, il risque de ne pas lui répondre, de ne pas défendre sa place. Il ne s’affirmera pas ou ne demandera peut-être pas d’aide, prenant le risque que l’événement se reproduise.

De même, ressentir du plaisir lors d’une activité, l’amènera à avoir envie que ces événements se reproduisent et à prendre encore plus le temps de les ressentir et de les apprécier.

Équilibrer

Les émotions sont facteurs d’équilibre car elles l’informent sur son équilibre interne, lui permettant de savoir si ses besoins sont respectés.

Tout au long de sa vie, l’enfant aura besoin de ressentir des déséquilibres internes provoquant, consciemment ou non, des émotions et des réactions qui lui permettront de rétablir un équilibre.

Par exemple, lorsqu’il se fait disputer, l’émotion désagréable ressentie l’amènera à modifier son comportement (et pas toujours dans la même direction !) afin de retrouver un équilibre émotionnel plus neutre ou plaisant. Cette émotion sera certes désagréable au départ, mais elle lui sera tout aussi agréable lorsqu’il aura modifié son comportement et que vous lui montrerez/direz à quel point vous êtes content de lui. Le déséquilibre sera finalement rééquilibré. C’est pour cela qu’il est important de donner un cadre aux enfants et qu’ils aient également un retour positif lorsqu’ils le respectent.

Communiquer

Les émotions renseignent aussi l’enfant sur ce qu’il ressent et ce que l’autre ressent. Il peut ainsi adapter son comportement et communiquer avec son entourage.

Les émotions ressenties se manifestent physiquement6, dans son positionnement, ses mimiques faciales, ses comportements, ses intonations…

Il communique aussi à son entourage des informations sur ce qu’il ressent, influant également le comportement d’autrui. Et inversement, il prendra des informations grâce aux mimiques, aux intonations de son entourage et modifiera son mode de relation à l’autre. Voyant un petit copain pleurer, il interprète ces pleurs comme un signe de tristesse et va le voir pour le consoler ou discuter avec lui. Si vous le voyez en colère, vous essayerez de lui demander par exemple ce qui lui arrive. Son émotion aura décle...

Table des matières

• Couverture
• Titre
• Copyright
• Sommaire
• Introduction
• Chapitre 1 - Les émotions de l’enfant
• Chapitre 2 - Comprendre les émotions de mon enfant
• Chapitre 3 - Comment accompagner mon enfant à vivre mieux ses émotions ?
• Chapitre 4 - Accompagner mon enfant, émotion par émotion
• Chapitre 5 - Quelques situations particulières
• Chapitre 6 - Être accompagné
• Conclusion
• Synthèse des outils
• Notes bibliographiques
• Remerciements
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