La Mémoire et la Folie
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La Mémoire et la Folie

La découverte des prions. Un nouveau paradigme biologique

  1. 384 pages
  2. French
  3. ePUB (adapté aux mobiles)
  4. Disponible sur iOS et Android
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La Mémoire et la Folie

La découverte des prions. Un nouveau paradigme biologique

À propos de ce livre

Le neurobiologiste américain Stanley B. Prusiner a obtenu le prix Nobel pour sa découverte des prions. Il a vécu une aventure scientifique peu commune. D'abord fasciné par la maladie de Creutzfeldt-Jakob, forme de démence due à une dégénérescence du cerveau, il se voit confronté, au début des années 1990, à la célèbre maladie de la vache folle, qui produit des effets comparables chez les bovins. Pour expliquer cette encéphalite spongiforme dont on pense qu'elle va causer une gigantesque épidémie, le monde de la recherche se lance sur la piste d'un agent infectieux classique — bactérie, parasite ou virus. Prusiner est persuadé qu'il s'agit d'un agent biologique entièrement nouveau, une « protéine infectieuse », ou prion. Les protéines étant les constituants ordinaires des êtres vivants, l'idée même du prion est une hérésie très mal accueillie par le monde de la biologie. Elle se révèle pourtant justifiée, au terme d'années de lutte et de controverses très instructives sur le fonctionnement du milieu scientifique. Les prions, protéines déformées, sont bien responsables des encéphalites, et ils jouent aussi un rôle majeur dans les maladies de Parkinson et d'Alzheimer. Leur découverte est une aventure scientifique haletante, hors des sentiers battus. « Ce livre relate une des plus importantes découvertes de l'histoire récente de la médecine ; c'est aussi un portrait sur le vif d'un grand scientifique dont le courage et la ténacité ont été mis à rude épreuve face au scepticisme général provoqué par son hypothèse des prions. » Oliver Sacks. Stanley B. Prusiner a obtenu le prix Nobel de médecine en 1997. Il est le directeur de l'Institut des maladies dégénératives de l'Université de Californie à San Francisco. 

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Informations

Éditeur
Odile Jacob
Année
2015
Imprimer l'ISBN
9782738131560

CHAPITRE 1

Devenir grand


Que je choisisse une carrière universitaire peut sembler un peu bizarre alors que j’ai trouvé mes études scolaires plutôt ennuyeuses. Je pouvais obtenir des B sans grand effort, et cela semblait toujours suffire. Mes parents ne m’ont jamais poussé à faire mieux, même si tous deux avaient été des élèves avec des A.
Mon collège-lycée était la Walnut Hills High School à Cincinnati dans l’Ohio. C’était un établissement public préparant à l’université, et il fallait passer un test pour y être admis. Walnut Hills, autant que je sache, n’avait rien de spécial. Nombre de ses professeurs y enseignaient depuis des décennies et semblaient peu préoccupés d’intéresser leurs élèves. Comme nous devions faire du latin pendant trois ans dès la première année de collège, mon père décida de m’épauler afin que je puisse mieux saisir les arcanes de cette langue. Son aide fut utile, et le latin devint l’une de mes matières préférées une fois ses bases maîtrisées. En fait, c’était si facile que j’ai gardé le latin pendant cinq ans au lieu de prendre une langue plus utile comme le français, décision que j’ai regrettée par la suite.
Mon expérience avec la science fut différente. Je prenais des cours avancés de maths au lycée, mais mon professeur tuteur, qui enseignait la chimie, ne voulut pas que je suive des cours avancés de chimie. Lorsque mes parents s’en plaignirent, il leur dit que je ne serai jamais capable de comprendre cette matière. Je suivis alors les cours de chimie standard et finis par encadrer beaucoup d’amis qui trouvaient le raisonnement abstrait de la chimie difficile. Ai-je été major en chimie à l’université de Pennsylvanie juste pour prouver que mon professeur tuteur se trompait ? Ai-je passé ma vie à faire de la recherche en biochimie dans l’espoir secret de recueillir ses félicitations ? Quelques psychiatres pourraient tenter ce genre d’interprétation, mais je doute que ce revers au lycée ait quelque chose à voir avec ma poursuite de la chimie. J’aimais cette matière parce que je n’avais jamais à mémoriser quoi que ce soit. Le tout était d’équilibrer les équations, d’être sûr qu’il y avait bien de chaque côté le même nombre d’atomes d’hydrogène, de carbone, d’azote, d’oxygène ou de soufre. Une fois que le compte était bon, tout ce dont j’avais besoin était une connaissance rudimentaire du processus, bien que j’aie appris depuis que la recherche en chimie demande un peu plus de jugeote et beaucoup plus de réflexion.
Malgré une scolarité peu enthousiaste, je me passionnais pour le scoutisme et la fraternité de mon lycée. Je préférais les activités scoutes à celles demandées pour mes études, elles étaient un antidote à mon ennui. Je devins un scout Aigle et fus employé l’été au camp scout local. J’ai même essayé de retarder l’université en postulant pour un poste d’un an comme aide scout militaire sur la base de l’armée de l’air américaine de Thulé au Groenland. Ce n’est que des années plus tard, après avoir été au pôle Sud, que j’ai réalisé ma chance de n’avoir pas été retenu.
Même si je n’ai jamais été au Groenland, je gardais un intérêt pour les températures froides. Ma première expérience de recherche a commencé l’été suivant mon entrée à l’université, lorsque j’ai étudié les effets de l’hypothermie pour retarder le gonflement du cerveau chez le rat1. L’été suivant, j’ai développé un projet dirigé par Bernard Black-Schaffer de l’Université de Cincinnati. J’y étudiais la tolérance de hamsters hypothermiques à des accélérations huit cents fois supérieures à celle de la gravité, comparables à celles qui seraient subies au cours d’un voyage interstellaire2. Pendant mes études médicales, j’ai commencé par étudier la graisse brune des hamsters à la sortie de leur hibernation3.
Si mon intérêt pour les basses températures a pris fin avec l’étude de la graisse brune, mon amour pour la science avait encore grandi. Le privilège de passer du temps à découvrir quelque chose encore jamais connu par personne se transforma en une soif insatiable de découverte. Il s’avère que les hamsters allaient continuer de jouer un rôle crucial dans ma recherche sur les mystères du prion.

Mes ancêtres…

Les racines de mon amour pour la science ont toujours été mystérieuses pour moi. Aucun de mes parents n’était un scientifique, mais ils ont dû me transmettre des qualités utiles au domaine. Mon père, Lawrence Albert Prusiner, était un architecte doué pour les nombres, et ma mère, Miriam Hannah Spigel, était pleine d’imagination, une créative, qui s’investissait toujours à fond dans ses passions, que ce soit la poterie, les poissons tropicaux, les bonsaïs ou l’ikebana. Ils descendaient tous deux de Juifs immigrés d’Europe de l’Est. Pour mieux comprendre mes parents, je devins obsédé par l’idée d’en apprendre plus sur mes origines (figures 1 et 2).
Mon arrière-grand-père paternel Wulf Prusner (le i s’est glissé plus tard) était un avocat en vue à Moscou, qu’il quitta au printemps 1891 peu après que son gouverneur, le frère du tsar Alexandre III, eut ordonné l’expulsion de tous les Juifs de la ville. La permission de rester n’était donnée qu’à ceux qui se convertissaient au christianisme, aux femmes qui voulaient devenir prostituées, et aux riches marchands avec leur famille jugés utiles à l’économie de la ville. En tout, plus de quatorze mille familles juives furent expulsées de Moscou vers la Zone de Résidence, à l’ouest de la Russie, territoire qui correspondait à une grande part de la Lituanie, de la Biélorussie, de la Pologne et de l’Ukraine actuelles.
À Moscou, Wulf réussit à obtenir un passeport du consul général de l’Allemagne. Alors que sa femme, Feine Moiseev, ses deux fils et sa fille allèrent à Mogilev, la capitale de l’est de la Biélorussie, il partit pour l’Allemagne avec l’intention d’émigrer aux États-Unis pour pouvoir ensuite offrir une meilleure vie à sa famille. Il arriva à New York et rejoignit Chicago où il trouva un petit boulot de rouleur de cigares. Ayant appris qu’il y avait de meilleurs emplois plus à l’ouest, il déménagea et, à la fin de 1891, il avait atteint la ville de Sioux City dans l’Iowa où se trouvait une communauté juive dynamique en pleine expansion. Les premiers Juifs de Sioux City étaient arrivés avant la guerre de Sécession. Tous étaient d’origine allemande, et les premiers Juifs de Russie arrivèrent en 1888, trois ans seulement avant Wulf. Sur place, il fit divers petits boulots comme veilleur de nuit dans une étable pour chevaux de voitures, gardien de bibliothèque publique, marchand de fruits ambulant. Il prit des cours du soir pour apprendre l’anglais et finit par monter une société d’assurances qu’il appela, ayant anglicisé son nom, la William L. Prusiner Insurance Company.
 Le côté Prusiner de ma famille. Dans le sens horaire, à partir de la gauche en haut : mon arrière-arrière-grand-père Lippman-David  Prusiner, père de Wulf . Feine  (assise à gauche) et Wulf (au centre), mon grand-père Ben (debout à gauche), Dave (debout à droite), Molly  (assise à droite) et Bessie  (en bas). Ma grand-mère Ethel Galinsky  avec ses fils, mon père Lawrence  (à droite) et son frère Stanley . Moi (à droite), mon père (au centre), et mon frère Paul en 1997. Mon arrière-grand-père Moshe Lazar Galinsky, père d’Ethel.
Figure 1. Le côté Prusiner de ma famille. Dans le sens horaire, à partir de la gauche en haut : mon arrière-arrière-grand-père Lippman-David Prusiner, père de Wulf. Feine (assise à gauche) et Wulf (au centre), mon grand-père Ben (debout à gauche), Dave (debout à droite), Molly (assise à droite) et Bessie (en bas). Ma grand-mère Ethel Galinsky avec ses fils, mon père Lawrence (à droite) et son frère Stanley. Moi (à droite), mon père (au centre), et mon frère Paul en 1997. Mon arrière-grand-père Moshe Lazar Galinsky, père d’Ethel.
 Le côté Spigel de ma famille. Dans le sens horaire, à partir de la gauche en haut : mon grand-père Ben (debout) et ma grand-mère Mollie  Feldman (assise) avec leurs enfants, Herbert  (à gauche), Miriam  (au centre), et Naomi. Mon père et ma mère. Moi à l’âge de trois ans . Ma mère et mon père à l’âge de cinquante-deux et cinquante-six ans.
Figure 2. Le côté Spigel de ma famille. Dans le sens horaire, à partir de la gauche en haut : mon grand-père Ben (debout) et ma grand-mère Mollie Feldman (assise) avec leurs enfants, Herbert (à gauche), Miriam (au centre), et Naomi. Mon père et ma mère. Moi à l’âge de trois ans. Ma mère et mon père à l’âge de cinquante-deux et cinquante-six ans.
Comme avocat à Moscou, Wulf avait réussi à gagner l’équivalent de plus de 40 000 dollars sous forme de biens, une petite fortune pour l’époque. Lorsque les Juifs furent expulsés, il donna son mandat d’avocat à un ami de confiance, qui accepta de liquider ses biens et de remettre l’argent à Feine et leurs trois enfants. Quelques mois après leur départ pour Mogilev, Feine revint avec ses enfants à Moscou pour récupérer les biens de son mari auprès de son ami, mais celui-ci dénonça traîtreusement leur retour à la police. Une troupe de fonctionnaires leur tomba dessus et les jeta en prison. Pour avoir tenté de faire valoir ses droits, Feine reçut une amende de 500 dollars. Dans une lettre à son mari envoyée à Sioux City, elle écrit que c’est « tout l’argent qu’elle avait sur terre ». Après cela, Feine et ses enfants furent emmenés dans la banlieue de Moscou et reçurent l’ordre de partir du pays. Wulf envoya 125 dollars à sa femme pour qu’ils puissent gagner l’Amérique, et la famille se mit en route pour l’Allemagne, soit quatre jours de voyage en train. Lorsqu’ils arrivèrent à la frontière, ils furent refoulés par des sentinelles qui étaient là pour contenir la marée des réfugiés juifs de Russie. C’était une époque d’exode massif. Chaque jour, près de quatre mille d’entre eux tentaient de partir. Désespérée, Feine retourna à Mogilev pour attendre.
Selon un article du Sioux City Journal de l’époque, lorsque deux amis de Wulf à Sioux City firent des démarches pour obtenir les visas de transit pour sa femme et ses enfants, on leur répondit que « compte tenu des lois allemandes et de quarantaine, […] il [sera] impossible de faire quoi que ce soit ». Ils firent toutefois appel au Département d’État américain au nom de Feine. Leur effort fut récompensé en mars 1893 quand le Secrétaire d’État Walter Gresham reçut un message de la délégation américaine à Berlin indiquant que le gouvernement allemand avait accordé l’autorisation à Feine Prusiner et à ses enfants de traverser l’Allemagne. À la mi-avril, la famille quittait Hambourg sur le navire California, et elle arriva à New York à la fin du mois. Peu après, elle put rejoindre Wulf à Sioux City.
Quatre ans plus tard, Wulf fit venir ses deux sœurs et son père, Lippman-David, à Sioux City. Le père de Lippman-David, Noach, a dû venir à Shklov sur le Dniepr de la ville de Pruzhany, ou Prusana, située dans l’ouest de la Biélorussie, près de la frontière lituanienne. Noach n’avait probablement pas de nom de famille, ce qui était courant chez les Juifs vivant dans la Zone de Résidence. Vers...

Table des matières

  1. Couverture
  2. Titre
  3. Copyright
  4. Dédicace
  5. Préface
  6. Introduction
  7. Note de l’auteur
  8. CHAPITRE 1 - Devenir grand
  9. CHAPITRE 2 - Le début d’une odyssée
  10. CHAPITRE 3 - Une pléthore de théories
  11. CHAPITRE 4 - La course de la tremblante
  12. CHAPITRE 5 - Docteur America et les cannibales tremblants
  13. CHAPITRE 6 - La bataille pour un poste
  14. CHAPITRE 7 - Qu’y a-t-il dans un nom ?
  15. CHAPITRE 8 - Perdu dans le brouillard du Pacifique
  16. CHAPITRE 9 - L’histoire de l’amyloïde
  17. CHAPITRE 10 - Trouver le gène
  18. CHAPITRE 11 - Joutes avec la presse
  19. CHAPITRE 12 - L’élucidation des maladies à prion chez l’homme
  20. CHAPITRE 13 - Qu’y a-t-il dans une forme ?
  21. CHAPITRE 14 - Des batailles de territoire
  22. CHAPITRE 15 - La vache folle et d’autres souches de prion
  23. CHAPITRE 16 - Stockholm
  24. CHAPITRE 17 - Le troisième jugement de Paris
  25. ÉPILOGUE - La recherche de thérapies
  26. Glossaire
  27. Notes
  28. Remerciements
  29. Crédits des illustrations
  30. Index
  31. Table