Les Enfants des rues
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Les Enfants des rues

Une clinique de l’exclusion

  1. 160 pages
  2. French
  3. ePUB (adapté aux mobiles)
  4. Disponible sur iOS et Android
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Les Enfants des rues

Une clinique de l’exclusion

À propos de ce livre

Les enfants des rues, ce sont ces enfants que l'on voit errer, seuls ou en groupe, dans les rues des mégapoles. Dégùt collatéral de l'urbanisation et de la mondialisation, ils sont souvent molestés par les commerçants, poursuivis par la police et rejetés par l'ensemble de la population. Comment aider ces petits exclus ? Quels sont les piÚges à éviter pour se faire accepter d'eux et agir efficacement ? Fort de son expérience auprÚs des grands exclus, Xavier Emmanuelli se penche ici sur le sort de ces enfants abandonnés de tous. Enfants sorciers ou enfants soldats, filles-mÚres ou adultes ayant refusé de grandir, tous ont des comportements de survie archaïques qui relÚvent de ce qu'il appelle l'« atroce liberté ». Quand ces comportements sont compris, ils peuvent servir d'appui pour une démarche de soin concrÚte. Un document d'une richesse clinique exceptionnelle. Un témoignage poignant sur l'un des scandales de nos sociétés. Xavier Emmanuelli est cofondateur de Médecins sans frontiÚres, pionnier du Samu, fondateur du Samu social et ancien ministre de l'Action humanitaire d'urgence. 

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Informations

Éditeur
Odile Jacob
Année
2016
Imprimer l'ISBN
9782738134608

CHAPITRE 1

L’urgence, une mĂ©thode
pour sortir de l’urgence
Je suis un mĂ©decin urgentiste et je n’ai vraiment entamĂ© ma vie professionnelle qu’avec la crĂ©ation du Samu (Service d’aide mĂ©dicale urgente), Ɠuvre mĂ©dicale collective du service public hospitalier nĂ©e au tournant des annĂ©es 1970 et appliquĂ©e depuis sur tout le territoire français.
Auparavant, j’avais exercĂ© dans des milieux sociaux et environnementaux extrĂȘmement diffĂ©rents : au cours de nombreux remplacements en mĂ©decine de campagne ; comme mĂ©decin de marine marchande, embarquĂ© sur les derniers paquebots autour du monde, sur des cargos, des navires usines, et autres bateaux pĂ©troliers ; comme mĂ©decin du travail en mer ; comme mĂ©decin des mines de charbon de Lorraine ; et, enfin, comme mĂ©decin de prison.
Puis, j’ai entamĂ© une spĂ©cialitĂ© d’anesthĂ©sie-rĂ©animation au Samu 94 Ă  CrĂ©teil, dans le Val-de-Marne, en 1972. Ce fut le grand tournant de ma carriĂšre. Si l’on voulait dĂ©crire par un aphorisme le Samu, on pourrait dire, en jouant sur deux niveaux de sĂ©mantique : « Le Samu dĂ©veloppe par l’urgence une mĂ©thode pour sortir de l’urgence. » L’urgence est un terme gĂ©nĂ©rique qui qualifie une situation ou un Ă©tat demandant Ă  ĂȘtre traitĂ© instantanĂ©ment, comme en cas de risque vital ou de crise aiguĂ«, et il implique toujours une notion de gravitĂ© extrĂȘme ou d’intense pĂ©ril.
Par extension, et dans le sillage du Samu, on parlera ainsi d’urgence Ă  diffĂ©rents niveaux d’interprĂ©tation : urgence vitale, urgence ressentie, urgence relative, urgence collective, jusqu’à Ă©laborer l’oxymore d’« urgence chronique ». Et la rĂ©ponse de l’urgence Ă  l’urgence consiste en un dĂ©ploiement de moyens adĂ©quats selon des mĂ©thodes prĂ©cises, par des professionnels compĂ©tents et pour une situation qui ne peut souffrir d’aucun retard.
En cela, le mot « urgence » dĂ©crit aussi bien la situation sur le terrain que les moyens mis en Ɠuvre pour y faire face. Il dĂ©crit Ă©galement l’accueil hospitalier prĂ©vu pour recevoir et traiter ladite urgence : en l’occurrence, un service ouvert jour et nuit, qui permet l’entrĂ©e immĂ©diate dans le circuit hospitalier pour des malades qui s’estiment ou qu’on estime en grand danger.

FormĂ© par l’urgence

Ces annĂ©es de Samu auprĂšs d’un maĂźtre, le professeur Huguenard, m’ont appris ce que devait ĂȘtre une action de terrain. Je veux rĂ©sumer ici les grands principes de cet enseignement, par lequel j’ai Ă©tĂ© formĂ© et initiĂ©, de mĂȘme qu’ont Ă©tĂ© formĂ©s et initiĂ©s des gĂ©nĂ©rations d’anesthĂ©sistes rĂ©animateurs et autres urgentistes (mĂ©decins, infirmiers, ambulanciers), voire des « profanes ».
L’action urgente n’est pas dĂ©mocratique. Elle ne peut pas l’ĂȘtre. Elle ne peut se faire, comme pour des opĂ©rations militaires, qu’en respectant une hiĂ©rarchie en quelque sorte organisĂ©e sur trois niveaux :
– Le niveau stratĂ©gique : c’est celui du recueil et du traitement de l’information. Certes, on doit savoir caractĂ©riser l’information, mais on doit surtout – et c’est le seul moment vraiment « dĂ©mocratique » de cette action – pouvoir la recevoir, d’oĂč qu’elle vienne et quel que soit l’informateur. C’est ainsi que se forge la dĂ©cision de l’action.
– Le niveau tactique : c’est le niveau de l’application de l’action, telle qu’elle a Ă©tĂ© dĂ©cidĂ©e par un seul chef, qui est et reste le responsable, quoi qu’il arrive. Cette phase d’application est la phase de rĂ©alisation de la dĂ©cision, selon les alĂ©as et les contraintes du terrain.
– Enfin, le niveau technique : c’est l’exĂ©cution de l’acte dĂ©cidĂ©, selon des procĂ©dures Ă©prouvĂ©es et bien rodĂ©es. Il ne peut y avoir d’improvisation
 Cependant, si la situation change brusquement et en l’absence d’autres directives, il est nĂ©cessaire de ne pas s’obstiner dans une procĂ©dure devenue une impasse et de savoir prendre l’initiative d’en changer. La responsabilitĂ© mĂ©dicale est Ă  ce prix. Dans cette situation, elle est en quelque sorte automatiquement et momentanĂ©ment dĂ©lĂ©guĂ©e. NĂ©anmoins, quoi qu’il arrive, ce sera toujours au chef d’assumer les consĂ©quences de ce choix, car ce que choisit un subordonnĂ©, mĂȘme sans s’en rendre compte, est au final de la responsabilitĂ© du chef.
Une opération de terrain nécessite donc un responsable, une équipe en hiérarchie, des moyens adaptés, des communications fiables et des réseaux.
Le professeur Huguenard Ă©tait un pĂ©dagogue hors pair. Quand, pour le mettre en porte-Ă -faux, sur le problĂšme d’acharnement thĂ©rapeutique par exemple – terme qu’il n’aimait pas d’ailleurs, et auquel il prĂ©fĂ©rait « obstination thĂ©rapeutique » ou « application obstinĂ©e des procĂ©dures » –, on lui demandait : « Quand doit-on arrĂȘter une rĂ©animation ? », il sentait le piĂšge et sa rĂ©ponse Ă©tait : « Jamais !
 » Il complĂ©tait alors : « Une rĂ©animation commencĂ©e ne doit jamais ĂȘtre arrĂȘtĂ©e
 tant qu’une Ă©quipe mieux Ă©quipĂ©e ou plus professionnelle ne vient pas prendre le relais. Si ce n’est pas le cas, il ne faut pas la commencer. Si vous n’ĂȘtes pas en mesure de prĂ©voir les suites, alors non vraiment, il ne faut pas commencer. Ce serait une faute grave. »
Ainsi dĂ©crivait-il les trois paliers de l’urgence :
1° l’action d’urgence proprement dite ;
2° la posturgence, qui est le relais choisi en fonction des suites de votre action ;
3° et, enfin, l’action à long terme.
Dans l’urgence, aucune opĂ©ration complexe ne doit ĂȘtre entreprise seul et sans hiĂ©rarchie. La dĂ©cision doit toujours permettre d’identifier un responsable, celui Ă  qui, en derniĂšre analyse, incomberont les choix.
C’est depuis ce cadre mental que je parle, et c’est ainsi que l’urgence, les actions d’urgence et le modĂšle Samu ont guidĂ© mes actions, non seulement dans le cadre hospitalier, mais aussi sur le terrain des crises et des catastrophes, et enfin dans tous les autres cadres de l’intervention auxquels j’ai Ă©tĂ© confrontĂ©. Ce cadre mental m’a effectivement guidĂ© pour tenter d’aider les personnes en difficultĂ©, qu’elles soient mĂ©dicales, psychologiques ou sociales. Je dis « guider » car je veux parler du point de vue technique, gestuel
 le point de vue du « faire ».

De l’urgence individuelle
à l’urgence collective

À l’époque oĂč naissait le Samu dans sa forme dĂ©finitive (dĂ©cembre 1971) a aussi Ă©tĂ© créée l’association MĂ©decins sans frontiĂšres, fondation dont faisaient partie, Ă  l’origine, quelques-uns de mes camarades de facultĂ© et des journalistes mĂ©dicaux de Tonus1. J’ai participĂ© Ă  cette crĂ©ation. Par rapport au Samu, il n’y avait pas de relation de « causalitĂ© », mais, comme aurait pu l’écrire Jung2, juste un rapport de « synchronicitĂ© » ou de coĂŻncidence, car cette culture de « projection de forces et de personnels mĂ©dicaux » hors les murs de l’hĂŽpital Ă©tait dans l’air du temps.
Dans ces annĂ©es-lĂ , les militaires avaient créé l’« Ă©lĂ©ment mĂ©dical militaire d’intervention rapide » (EMMIR), les assureurs « EUROP Assistance », les mĂ©decins « SOS mĂ©decins », ouvrant ainsi des pistes pour des associations ou des entreprises qui ont repris les mĂȘmes concepts. Naturellement, pour les Ă©tats de guerre, le grand modĂšle restait le ComitĂ© international de la Croix-Rouge (CICR).
Le Samu a sans conteste influencĂ© la culture de MSF, mais MSF a aussi, Ă  l’inverse, introduit au Samu, avec l’expĂ©rience de ses missions, sa propre culture humanitaire et son savoir en mĂ©decine de crise et en mĂ©decine de catastrophe, puisque, depuis sa crĂ©ation jusqu’à nos jours, MSF a Ă©tĂ© prĂ©sente sur toutes les crises, qu’elles relĂšvent de l’urgence, de la posturgence ou du long terme : tremblements de terre, inondations, famines et Ă©pidĂ©mies
 et, bien sĂ»r, l’accompagnement des rĂ©fugiĂ©s et des personnes dĂ©placĂ©es – domaine dans lequel MSF a acquis sa notoriĂ©tĂ©, par sa conception de la logistique, grĂące en particulier au grand logisticien Jacques Pinel aujourd’hui disparu –, les attentats, les blessĂ©s de guerre – culture que MSF a pu dĂ©velopper avec et grĂące au savoir des mĂ©decins militaires

Sur tous ces terrains d’intervention, MSF a maintenu une activitĂ© de moins en moins Ă©loignĂ©e gĂ©ographiquement, de plus en plus proche de la pratique mĂ©dicale de nos sociĂ©tĂ©s, puisque les dĂ©placements de population, les Ă©pidĂ©mies et les attentats se sont rapprochĂ©s de l’Occident

Ces hommes et ces femmes, professionnels de l’urgence, la plupart du temps bĂ©nĂ©voles, ont dĂ©crit les dĂ©sordres que ces situations entraĂźnaient, les actions pratiques et les solutions thĂ©rapeutiques inĂ©dites qu’ils Ă©taient au fur et Ă  mesure amenĂ©s Ă  dĂ©velopper. C’étaient des empiriques. Ils ont ainsi apportĂ© au monde mĂ©dical de nouvelles pratiques, de nouvelles perspectives et de nouvelles expĂ©riences. La dimension d’initiation qu’ils vivaient et les risques qu’ils prenaient ont donnĂ© une nouvelle signification aux interventions mĂ©dicales avec des expĂ©riences sans prĂ©cĂ©dent.
Le Samu et MSF ont grandi ensemble. Mais, il faut bien le reconnaĂźtre, leur montĂ©e en puissance s’est faite en mĂȘme temps que le dĂ©veloppement des mĂ©dias, de l’image et de ses moyens. Il y eut notamment la tĂ©lĂ©vision avec les reportages instantanĂ©s et ses rĂ©cits en direct. Ces avancĂ©es ont permis la construction permanente d’une « saga » et ont assurĂ© la notoriĂ©tĂ© de chacune de ces deux structures. Ce ne fut pas sans inconvĂ©nients car, souvent, des actions furent scĂ©narisĂ©es devant les mĂ©dias pour des raisons pĂ©dagogiques ou de spectacle. Ces actions propulsĂšrent sur le devant de la scĂšne quelques personnages charismatiques, censĂ©s incarner le sauveteur. Cela donna en revanche une sorte de distance dĂ©sincarnĂ©e Ă  tous ces drames. Mais, surtout, cet engouement n’échappa pas aux politiques, et les opĂ©rations humanitaires devinrent parfois un prĂ©texte Ă  l’intervention des États ou des gouvernements. Le savoir-faire et la culture de l’urgence et de l’intervention devenaient sous les mĂ©dias un support d’action politique, qui, elle, restait classique dans les rapports de forces qu’elle suscitait.
MSF s’étendit dans le monde entier et, en 1999, obtint le prix Nobel de la paix. J’ai eu l’honneur et le privilĂšge – en dehors du fait d’en avoir Ă©tĂ© l’un des fondateurs – d’avoir fait partie du cercle de ses dirigeants durant vingt-trois ans, de l’avoir vu grandir et d’y avoir contribuĂ© par mon expĂ©rience au Samu. J’ai pu apporter bien des Ă©lĂ©ments dans son ascension, en particulier dans la mĂ©decine de crise et de catastrophe. Je n’ai quittĂ© MSF, en 1995, qu’à regret, pour entrer au gouvernement JuppĂ©.
Quand Jacques Chirac fut Ă©lu prĂ©sident de la RĂ©publique, je devins secrĂ©taire d’État Ă  l’action humanitaire d’urgence, une mission que j’ai assurĂ©e pendant deux ans, entre 1995 et 1997. Le dĂ©part de l’association fut Ă  la fois un chagrin de laisser mes copains en arriĂšre et Ă©galement un tournant important dans ma carriĂšre. Je suis entrĂ© au gouvernement en tant que reprĂ©sentant de la sociĂ©tĂ© civile et, pour ce qui me concerne, indĂ©pendant de toute Ă©tiquette ou de tout parti. J’y suis entrĂ© en raison des compĂ©tences que j’avais acquises dans le domaine mĂ©dical et humanitaire. Ce fut une expĂ©rience essentielle.
La pratique mĂ©dicale et sociale acquise avec MSF dans bien des situations et sur tant de lieux diffĂ©rents autour de la planĂšte m’avait fait vivre des expĂ©riences qu’aucun mĂ©decin, je crois, n’a eu la chance de vivre. J’ai pu voir disparaĂźtre la variole, qui flambait encore au Bangladesh lors de ma toute premiĂšre mission, en 1972. À l’époque, la mortalitĂ© y Ă©tait encore importante. Pourtant, le dernier cas de cette maladie, qui avait accompagnĂ© l’humanitĂ© depuis ses origines, a eu lieu en 1976, et celle-ci a Ă©tĂ© pour toujours et complĂštement Ă©radiquĂ©e en 1976 (sauf Ă©videmment dans les laboratoires secrets pour servir Ă©ventuellement d’arme biologique destructrice). Et j’ai vu naĂźtre une nouvelle Ă©pidĂ©mie, le sida (syndrome d’immunodĂ©ficience acquise), dont les premiers cas ont Ă©tĂ© dĂ©crits en 1981. Mais la maladie venait de plus loin bien sĂ»r, puisque, rĂ©trospectivement, on a compris qu’elle Ă©tait apparue au Cameroun, au milieu XIXe siĂšcle.
J’ai compris peu Ă  peu que les Ă©pidĂ©mies sont des ĂȘtres biologiques qui vivent et qui meurent. Pour arriver Ă  cette conclusion, je me suis appuyĂ© sur le concept de « pathocĂ©nose », dĂ©veloppĂ© par Mirko Grmek3, un historien de la mĂ©decine. Ce mot dĂ©signe l’équilibre des pathologies Ă  un moment donnĂ©, pour des populations donnĂ©es ; un concept « Ă©volutionniste » qui part du principe que les virus, les bactĂ©ries, les parasites et les champignons se dĂ©veloppent et entrent en compĂ©tition « darwinienne » pour Ă©tablir un nouvel Ă©quilibre. Si on Ă©limine une catĂ©gorie d’ĂȘtres de l’environnement, une catĂ©gorie jusqu’alors en arriĂšre-plan occupera cet espace dĂ©sormais vide et pourra s’exprimer. Ainsi les virus ont-ils supplantĂ© d’un...

Table des matiĂšres

  1. INTRODUCTION
  2. CHAPITRE 1
  3. CHAPITRE 2
  4. CHAPITRE 3
  5. CHAPITRE 4
  6. CHAPITRE 5
  7. CHAPITRE 6
  8. CONCLUSION