
- 160 pages
- French
- ePUB (adapté aux mobiles)
- Disponible sur iOS et Android
eBook - ePub
Ă propos de ce livre
Les enfants des rues, ce sont ces enfants que l'on voit errer, seuls ou en groupe, dans les rues des mĂ©gapoles. DĂ©gĂąt collatĂ©ral de l'urbanisation et de la mondialisation, ils sont souvent molestĂ©s par les commerçants, poursuivis par la police et rejetĂ©s par l'ensemble de la population. Comment aider ces petits exclus ? Quels sont les piĂšges Ă Ă©viter pour se faire accepter d'eux et agir efficacement ? Fort de son expĂ©rience auprĂšs des grands exclus, Xavier Emmanuelli se penche ici sur le sort de ces enfants abandonnĂ©s de tous. Enfants sorciers ou enfants soldats, filles-mĂšres ou adultes ayant refusĂ© de grandir, tous ont des comportements de survie archaĂŻques qui relĂšvent de ce qu'il appelle l'« atroce liberté ». Quand ces comportements sont compris, ils peuvent servir d'appui pour une dĂ©marche de soin concrĂšte. Un document d'une richesse clinique exceptionnelle. Un tĂ©moignage poignant sur l'un des scandales de nos sociĂ©tĂ©s. Xavier Emmanuelli est cofondateur de MĂ©decins sans frontiĂšres, pionnier du Samu, fondateur du Samu social et ancien ministre de l'Action humanitaire d'urgence.Â
Foire aux questions
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Informations
CHAPITRE 1
Lâurgence, une mĂ©thode
pour sortir de lâurgence
pour sortir de lâurgence
Je suis un mĂ©decin urgentiste et je nâai vraiment entamĂ© ma vie professionnelle quâavec la crĂ©ation du Samu (Service dâaide mĂ©dicale urgente), Ćuvre mĂ©dicale collective du service public hospitalier nĂ©e au tournant des annĂ©es 1970 et appliquĂ©e depuis sur tout le territoire français.
Auparavant, jâavais exercĂ© dans des milieux sociaux et environnementaux extrĂȘmement diffĂ©rents : au cours de nombreux remplacements en mĂ©decine de campagne ; comme mĂ©decin de marine marchande, embarquĂ© sur les derniers paquebots autour du monde, sur des cargos, des navires usines, et autres bateaux pĂ©troliers ; comme mĂ©decin du travail en mer ; comme mĂ©decin des mines de charbon de Lorraine ; et, enfin, comme mĂ©decin de prison.
Puis, jâai entamĂ© une spĂ©cialitĂ© dâanesthĂ©sie-rĂ©animation au Samu 94 Ă CrĂ©teil, dans le Val-de-Marne, en 1972. Ce fut le grand tournant de ma carriĂšre. Si lâon voulait dĂ©crire par un aphorisme le Samu, on pourrait dire, en jouant sur deux niveaux de sĂ©mantique : « Le Samu dĂ©veloppe par lâurgence une mĂ©thode pour sortir de lâurgence. » Lâurgence est un terme gĂ©nĂ©rique qui qualifie une situation ou un Ă©tat demandant Ă ĂȘtre traitĂ© instantanĂ©ment, comme en cas de risque vital ou de crise aiguĂ«, et il implique toujours une notion de gravitĂ© extrĂȘme ou dâintense pĂ©ril.
Par extension, et dans le sillage du Samu, on parlera ainsi dâurgence Ă diffĂ©rents niveaux dâinterprĂ©tation : urgence vitale, urgence ressentie, urgence relative, urgence collective, jusquâĂ Ă©laborer lâoxymore dâ« urgence chronique ». Et la rĂ©ponse de lâurgence Ă lâurgence consiste en un dĂ©ploiement de moyens adĂ©quats selon des mĂ©thodes prĂ©cises, par des professionnels compĂ©tents et pour une situation qui ne peut souffrir dâaucun retard.
En cela, le mot « urgence » dĂ©crit aussi bien la situation sur le terrain que les moyens mis en Ćuvre pour y faire face. Il dĂ©crit Ă©galement lâaccueil hospitalier prĂ©vu pour recevoir et traiter ladite urgence : en lâoccurrence, un service ouvert jour et nuit, qui permet lâentrĂ©e immĂ©diate dans le circuit hospitalier pour des malades qui sâestiment ou quâon estime en grand danger.
FormĂ© par lâurgence
Ces annĂ©es de Samu auprĂšs dâun maĂźtre, le professeur Huguenard, mâont appris ce que devait ĂȘtre une action de terrain. Je veux rĂ©sumer ici les grands principes de cet enseignement, par lequel jâai Ă©tĂ© formĂ© et initiĂ©, de mĂȘme quâont Ă©tĂ© formĂ©s et initiĂ©s des gĂ©nĂ©rations dâanesthĂ©sistes rĂ©animateurs et autres urgentistes (mĂ©decins, infirmiers, ambulanciers), voire des « profanes ».
Lâaction urgente nâest pas dĂ©mocratique. Elle ne peut pas lâĂȘtre. Elle ne peut se faire, comme pour des opĂ©rations militaires, quâen respectant une hiĂ©rarchie en quelque sorte organisĂ©e sur trois niveaux :
â Le niveau stratĂ©gique : câest celui du recueil et du traitement de lâinformation. Certes, on doit savoir caractĂ©riser lâinformation, mais on doit surtout â et câest le seul moment vraiment « dĂ©mocratique » de cette action â pouvoir la recevoir, dâoĂč quâelle vienne et quel que soit lâinformateur. Câest ainsi que se forge la dĂ©cision de lâaction.
â Le niveau tactique : câest le niveau de lâapplication de lâaction, telle quâelle a Ă©tĂ© dĂ©cidĂ©e par un seul chef, qui est et reste le responsable, quoi quâil arrive. Cette phase dâapplication est la phase de rĂ©alisation de la dĂ©cision, selon les alĂ©as et les contraintes du terrain.
â Enfin, le niveau technique : câest lâexĂ©cution de lâacte dĂ©cidĂ©, selon des procĂ©dures Ă©prouvĂ©es et bien rodĂ©es. Il ne peut y avoir dâimprovisation⊠Cependant, si la situation change brusquement et en lâabsence dâautres directives, il est nĂ©cessaire de ne pas sâobstiner dans une procĂ©dure devenue une impasse et de savoir prendre lâinitiative dâen changer. La responsabilitĂ© mĂ©dicale est Ă ce prix. Dans cette situation, elle est en quelque sorte automatiquement et momentanĂ©ment dĂ©lĂ©guĂ©e. NĂ©anmoins, quoi quâil arrive, ce sera toujours au chef dâassumer les consĂ©quences de ce choix, car ce que choisit un subordonnĂ©, mĂȘme sans sâen rendre compte, est au final de la responsabilitĂ© du chef.
Une opération de terrain nécessite donc un responsable, une équipe en hiérarchie, des moyens adaptés, des communications fiables et des réseaux.
Le professeur Huguenard Ă©tait un pĂ©dagogue hors pair. Quand, pour le mettre en porte-Ă -faux, sur le problĂšme dâacharnement thĂ©rapeutique par exemple â terme quâil nâaimait pas dâailleurs, et auquel il prĂ©fĂ©rait « obstination thĂ©rapeutique » ou « application obstinĂ©e des procĂ©dures » â, on lui demandait : « Quand doit-on arrĂȘter une rĂ©animation ? », il sentait le piĂšge et sa rĂ©ponse Ă©tait : « Jamais !⊠» Il complĂ©tait alors : « Une rĂ©animation commencĂ©e ne doit jamais ĂȘtre arrĂȘtĂ©e⊠tant quâune Ă©quipe mieux Ă©quipĂ©e ou plus professionnelle ne vient pas prendre le relais. Si ce nâest pas le cas, il ne faut pas la commencer. Si vous nâĂȘtes pas en mesure de prĂ©voir les suites, alors non vraiment, il ne faut pas commencer. Ce serait une faute grave. »
Ainsi dĂ©crivait-il les trois paliers de lâurgence :
1° lâaction dâurgence proprement dite ;
2° la posturgence, qui est le relais choisi en fonction des suites de votre action ;
3° et, enfin, lâaction Ă long terme.
Dans lâurgence, aucune opĂ©ration complexe ne doit ĂȘtre entreprise seul et sans hiĂ©rarchie. La dĂ©cision doit toujours permettre dâidentifier un responsable, celui Ă qui, en derniĂšre analyse, incomberont les choix.
Câest depuis ce cadre mental que je parle, et câest ainsi que lâurgence, les actions dâurgence et le modĂšle Samu ont guidĂ© mes actions, non seulement dans le cadre hospitalier, mais aussi sur le terrain des crises et des catastrophes, et enfin dans tous les autres cadres de lâintervention auxquels jâai Ă©tĂ© confrontĂ©. Ce cadre mental mâa effectivement guidĂ© pour tenter dâaider les personnes en difficultĂ©, quâelles soient mĂ©dicales, psychologiques ou sociales. Je dis « guider » car je veux parler du point de vue technique, gestuel⊠le point de vue du « faire ».
De lâurgence individuelle
Ă lâurgence collective
Ă lâĂ©poque oĂč naissait le Samu dans sa forme dĂ©finitive (dĂ©cembre 1971) a aussi Ă©tĂ© créée lâassociation MĂ©decins sans frontiĂšres, fondation dont faisaient partie, Ă lâorigine, quelques-uns de mes camarades de facultĂ© et des journalistes mĂ©dicaux de Tonus1. Jâai participĂ© Ă cette crĂ©ation. Par rapport au Samu, il nây avait pas de relation de « causalitĂ© », mais, comme aurait pu lâĂ©crire Jung2, juste un rapport de « synchronicitĂ© » ou de coĂŻncidence, car cette culture de « projection de forces et de personnels mĂ©dicaux » hors les murs de lâhĂŽpital Ă©tait dans lâair du temps.
Dans ces annĂ©es-lĂ , les militaires avaient créé lâ« Ă©lĂ©ment mĂ©dical militaire dâintervention rapide » (EMMIR), les assureurs « EUROP Assistance », les mĂ©decins « SOS mĂ©decins », ouvrant ainsi des pistes pour des associations ou des entreprises qui ont repris les mĂȘmes concepts. Naturellement, pour les Ă©tats de guerre, le grand modĂšle restait le ComitĂ© international de la Croix-Rouge (CICR).
Le Samu a sans conteste influencĂ© la culture de MSF, mais MSF a aussi, Ă lâinverse, introduit au Samu, avec lâexpĂ©rience de ses missions, sa propre culture humanitaire et son savoir en mĂ©decine de crise et en mĂ©decine de catastrophe, puisque, depuis sa crĂ©ation jusquâĂ nos jours, MSF a Ă©tĂ© prĂ©sente sur toutes les crises, quâelles relĂšvent de lâurgence, de la posturgence ou du long terme : tremblements de terre, inondations, famines et Ă©pidĂ©mies⊠et, bien sĂ»r, lâaccompagnement des rĂ©fugiĂ©s et des personnes dĂ©placĂ©es â domaine dans lequel MSF a acquis sa notoriĂ©tĂ©, par sa conception de la logistique, grĂące en particulier au grand logisticien Jacques Pinel aujourdâhui disparu â, les attentats, les blessĂ©s de guerre â culture que MSF a pu dĂ©velopper avec et grĂące au savoir des mĂ©decins militairesâŠ
Sur tous ces terrains dâintervention, MSF a maintenu une activitĂ© de moins en moins Ă©loignĂ©e gĂ©ographiquement, de plus en plus proche de la pratique mĂ©dicale de nos sociĂ©tĂ©s, puisque les dĂ©placements de population, les Ă©pidĂ©mies et les attentats se sont rapprochĂ©s de lâOccidentâŠ
Ces hommes et ces femmes, professionnels de lâurgence, la plupart du temps bĂ©nĂ©voles, ont dĂ©crit les dĂ©sordres que ces situations entraĂźnaient, les actions pratiques et les solutions thĂ©rapeutiques inĂ©dites quâils Ă©taient au fur et Ă mesure amenĂ©s Ă dĂ©velopper. CâĂ©taient des empiriques. Ils ont ainsi apportĂ© au monde mĂ©dical de nouvelles pratiques, de nouvelles perspectives et de nouvelles expĂ©riences. La dimension dâinitiation quâils vivaient et les risques quâils prenaient ont donnĂ© une nouvelle signification aux interventions mĂ©dicales avec des expĂ©riences sans prĂ©cĂ©dent.
Le Samu et MSF ont grandi ensemble. Mais, il faut bien le reconnaĂźtre, leur montĂ©e en puissance sâest faite en mĂȘme temps que le dĂ©veloppement des mĂ©dias, de lâimage et de ses moyens. Il y eut notamment la tĂ©lĂ©vision avec les reportages instantanĂ©s et ses rĂ©cits en direct. Ces avancĂ©es ont permis la construction permanente dâune « saga » et ont assurĂ© la notoriĂ©tĂ© de chacune de ces deux structures. Ce ne fut pas sans inconvĂ©nients car, souvent, des actions furent scĂ©narisĂ©es devant les mĂ©dias pour des raisons pĂ©dagogiques ou de spectacle. Ces actions propulsĂšrent sur le devant de la scĂšne quelques personnages charismatiques, censĂ©s incarner le sauveteur. Cela donna en revanche une sorte de distance dĂ©sincarnĂ©e Ă tous ces drames. Mais, surtout, cet engouement nâĂ©chappa pas aux politiques, et les opĂ©rations humanitaires devinrent parfois un prĂ©texte Ă lâintervention des Ătats ou des gouvernements. Le savoir-faire et la culture de lâurgence et de lâintervention devenaient sous les mĂ©dias un support dâaction politique, qui, elle, restait classique dans les rapports de forces quâelle suscitait.
MSF sâĂ©tendit dans le monde entier et, en 1999, obtint le prix Nobel de la paix. Jâai eu lâhonneur et le privilĂšge â en dehors du fait dâen avoir Ă©tĂ© lâun des fondateurs â dâavoir fait partie du cercle de ses dirigeants durant vingt-trois ans, de lâavoir vu grandir et dây avoir contribuĂ© par mon expĂ©rience au Samu. Jâai pu apporter bien des Ă©lĂ©ments dans son ascension, en particulier dans la mĂ©decine de crise et de catastrophe. Je nâai quittĂ© MSF, en 1995, quâĂ regret, pour entrer au gouvernement JuppĂ©.
Quand Jacques Chirac fut Ă©lu prĂ©sident de la RĂ©publique, je devins secrĂ©taire dâĂtat Ă lâaction humanitaire dâurgence, une mission que jâai assurĂ©e pendant deux ans, entre 1995 et 1997. Le dĂ©part de lâassociation fut Ă la fois un chagrin de laisser mes copains en arriĂšre et Ă©galement un tournant important dans ma carriĂšre. Je suis entrĂ© au gouvernement en tant que reprĂ©sentant de la sociĂ©tĂ© civile et, pour ce qui me concerne, indĂ©pendant de toute Ă©tiquette ou de tout parti. Jây suis entrĂ© en raison des compĂ©tences que jâavais acquises dans le domaine mĂ©dical et humanitaire. Ce fut une expĂ©rience essentielle.
La pratique mĂ©dicale et sociale acquise avec MSF dans bien des situations et sur tant de lieux diffĂ©rents autour de la planĂšte mâavait fait vivre des expĂ©riences quâaucun mĂ©decin, je crois, nâa eu la chance de vivre. Jâai pu voir disparaĂźtre la variole, qui flambait encore au Bangladesh lors de ma toute premiĂšre mission, en 1972. Ă lâĂ©poque, la mortalitĂ© y Ă©tait encore importante. Pourtant, le dernier cas de cette maladie, qui avait accompagnĂ© lâhumanitĂ© depuis ses origines, a eu lieu en 1976, et celle-ci a Ă©tĂ© pour toujours et complĂštement Ă©radiquĂ©e en 1976 (sauf Ă©videmment dans les laboratoires secrets pour servir Ă©ventuellement dâarme biologique destructrice). Et jâai vu naĂźtre une nouvelle Ă©pidĂ©mie, le sida (syndrome dâimmunodĂ©ficience acquise), dont les premiers cas ont Ă©tĂ© dĂ©crits en 1981. Mais la maladie venait de plus loin bien sĂ»r, puisque, rĂ©trospectivement, on a compris quâelle Ă©tait apparue au Cameroun, au milieu XIXe siĂšcle.
Jâai compris peu Ă peu que les Ă©pidĂ©mies sont des ĂȘtres biologiques qui vivent et qui meurent. Pour arriver Ă cette conclusion, je me suis appuyĂ© sur le concept de « pathocĂ©nose », dĂ©veloppĂ© par Mirko Grmek3, un historien de la mĂ©decine. Ce mot dĂ©signe lâĂ©quilibre des pathologies Ă un moment donnĂ©, pour des populations donnĂ©es ; un concept « Ă©volutionniste » qui part du principe que les virus, les bactĂ©ries, les parasites et les champignons se dĂ©veloppent et entrent en compĂ©tition « darwinienne » pour Ă©tablir un nouvel Ă©quilibre. Si on Ă©limine une catĂ©gorie dâĂȘtres de lâenvironnement, une catĂ©gorie jusquâalors en arriĂšre-plan occupera cet espace dĂ©sormais vide et pourra sâexprimer. Ainsi les virus ont-ils supplantĂ© dâun...
Table des matiĂšres
- INTRODUCTION
- CHAPITRE 1
- CHAPITRE 2
- CHAPITRE 3
- CHAPITRE 4
- CHAPITRE 5
- CHAPITRE 6
- CONCLUSION