L' Homme douloureux
eBook - ePub

L' Homme douloureux

  1. 304 pages
  2. French
  3. ePUB (adapté aux mobiles)
  4. Disponible sur iOS et Android
eBook - ePub

À propos de ce livre

Il y a autant de douleurs que d'individus qui souffrent. Issu des regards croisés de trois spécialistes – un neurobiologiste, un médecin de la douleur et un anthropologue –, ce livre montre que la douleur ne s'élabore pas dans un cerveau amnésique, mais au sein d'un système nerveux façonné par le passé singulier et les expériences de chacun. Voilà pourquoi, sans négliger les progrès considérables de la biomédecine et des neurosciences, il est urgent de remettre le patient au cœur du phénomène douloureux. Ce qui implique de se focaliser sur son histoire individuelle et, donc, sur sa vulnérabilité particulière à la douleur, laquelle relève autant de questions existentielles que de questions biologiques. Une analyse complète et originale du phénomène douloureux en même temps qu'un questionnement salutaire sur le rôle possiblement délétère de certains médicaments. Guy Simonnet est professeur émérite à l'université de Bordeaux. Membre de l'Institut de neurosciences cognitives et intégratives d'Aquitaine du CNRS, il est à l'origine du concept d'hypersensibilité durable à la douleur, observée après l'analgésie induite par la morphine et ses dérivés. Ce regard nouveau sur la prise en charge de l'homme douloureux, qui tient compte de son histoire individuelle, l'a conduit à proposer des stratégies thérapeutiques innovantes, dont une thérapie nutritionnelle. Bernard Laurent est professeur de neurologie à l'université de Saint-Étienne, membre de l'équipe Inserm NeuroPain, qui étudie les réponses cérébrales à la douleur chez l'homme. Il a consacré sa carrière médicale à la prise en charge de la douleur chronique et des troubles de la mémoire. Membre correspondant de l'Académie de médecine, il a été successivement président des Sociétés françaises de la douleur, de neuropsychologie et de neurologie. David Le Breton est professeur de sociologie à l'université de Strasbourg. Membre de l'Institut universitaire de France et de l'Institut des études avancées de l'université de Strasbourg (USIAS), il est l'auteur de plusieurs ouvrages sur l'anthropologie de la douleur.

Foire aux questions

Oui, vous pouvez résilier à tout moment à partir de l'onglet Abonnement dans les paramètres de votre compte sur le site Web de Perlego. Votre abonnement restera actif jusqu'à la fin de votre période de facturation actuelle. Découvrez comment résilier votre abonnement.
Pour le moment, tous nos livres en format ePub adaptés aux mobiles peuvent être téléchargés via l'application. La plupart de nos PDF sont également disponibles en téléchargement et les autres seront téléchargeables très prochainement. Découvrez-en plus ici.
Perlego propose deux forfaits: Essentiel et Intégral
  • Essentiel est idéal pour les apprenants et professionnels qui aiment explorer un large éventail de sujets. Accédez à la Bibliothèque Essentielle avec plus de 800 000 titres fiables et best-sellers en business, développement personnel et sciences humaines. Comprend un temps de lecture illimité et une voix standard pour la fonction Écouter.
  • Intégral: Parfait pour les apprenants avancés et les chercheurs qui ont besoin d’un accès complet et sans restriction. Débloquez plus de 1,4 million de livres dans des centaines de sujets, y compris des titres académiques et spécialisés. Le forfait Intégral inclut également des fonctionnalités avancées comme la fonctionnalité Écouter Premium et Research Assistant.
Les deux forfaits sont disponibles avec des cycles de facturation mensuelle, de 4 mois ou annuelle.
Nous sommes un service d'abonnement à des ouvrages universitaires en ligne, où vous pouvez accéder à toute une bibliothèque pour un prix inférieur à celui d'un seul livre par mois. Avec plus d'un million de livres sur plus de 1 000 sujets, nous avons ce qu'il vous faut ! Découvrez-en plus ici.
Recherchez le symbole Écouter sur votre prochain livre pour voir si vous pouvez l'écouter. L'outil Écouter lit le texte à haute voix pour vous, en surlignant le passage qui est en cours de lecture. Vous pouvez le mettre sur pause, l'accélérer ou le ralentir. Découvrez-en plus ici.
Oui ! Vous pouvez utiliser l’application Perlego sur appareils iOS et Android pour lire à tout moment, n’importe où — même hors ligne. Parfait pour les trajets ou quand vous êtes en déplacement.
Veuillez noter que nous ne pouvons pas prendre en charge les appareils fonctionnant sous iOS 13 ou Android 7 ou versions antérieures. En savoir plus sur l’utilisation de l’application.
Oui, vous pouvez accéder à L' Homme douloureux par Guy Simonnet,Bernard Laurent,David Le Breton en format PDF et/ou ePUB ainsi qu'à d'autres livres populaires dans Médecine et Théorie, pratique et référence de la médecine. Nous disposons de plus d'un million d'ouvrages à découvrir dans notre catalogue.

Informations

DEUXIÈME PARTIE

D’où vient notre douleur ?



CHAPITRE 3

Douleur et nociception :
la pain disease


« Du cerveau et du cerveau seul naissent nos plaisirs, nos joies, nos rires et plaisanteries, ainsi que nos peines, nos douleurs et nos chagrins. »
HIPPOCRATE.

De l’âme de Descartes au cerveau

Comme nous l’avons vu, c’est surtout à partir de Vésale et de son traité De humani corporis fabrica, publié en 1543, que s’engage définitivement la démarche initiée aux siècles précédents qui conduit à penser que le corps humain n’est pas le résultat d’une fabrication providentielle, mais une structure anatomique et physiologique. Dès lors, la compréhension occidentale, pièce à pièce, de la machine humaine apparaît par l’étude du corps. La mise en évidence expérimentale de la circulation sanguine par William Harvey, qui publie en 1628 Exercitatio anatomica de motu cordi et sanguinis in anima, ouvre la voie à un rapprochement avec la démarche révolutionnaire déjà accomplie en physique et en astronomie qui passe par la mathématisation de l’univers. Même si la condamnation de Galilée par l’Église en 1633 retarde la publication du Traité du monde écrit par Descartes la même année et qui ne sera finalement publié qu’en 1664, après la mort de son auteur, le mécanicisme triomphant dans les sciences de la nature envahit à son tour le monde de la médecine. La circulation sanguine dans des vaisseaux permet de concevoir une communication rapide entre deux points quelconques du corps, ouvrant le concept de relations corps-cerveau.
L’observation d’un cas de douleur fantôme chez une jeune fille qui a subi une amputation de la main et de l’avant-bras conduit Descartes – prolongeant en cela une constatation d’Ambroise Paré – à conclure que la persistance des douleurs qui semblent venir d’extrémités qui n’existent plus est bien la preuve que « la douleur de la main n’est pas ressentie par l’âme en tant qu’elle est dans la main, mais en tant qu’elle est dans le cerveau ». Il utilise la fameuse analogie du clocher pour expliquer que la stimulation douloureuse est conduite jusqu’au cerveau par un filament, comme la corde transmet à la cloche l’énergie qui la fait sonner. D’où la célèbre représentation de l’homme brûlé au niveau du pied dont l’information remonte jusqu’au cerveau dans son Traité de l’homme paru en 1644. L’image de la corde comme élément de transmission, reprise plusieurs fois par Descartes, offre les prémices d’une conception linéaire et câblée des voies nerveuses de la douleur, telle qu’on l’enseigne aujourd’hui de façon moderne via l’influx nerveux. Elle suggère aussi, par voie de conséquence, l’existence de structures, de localisations cérébrales qui joueraient un rôle particulier dans la perception de la douleur. Cette vision localisationniste d’une transmission du corps au cerveau et de la nécessité d’une continuité entre les deux inspire encore largement aujourd’hui la neurologie à travers les nombreux développements de la neuro-imagerie cérébrale à la recherche de zones du cerveau impliquées dans le traitement de l’information douloureuse. Pour Descartes, le corps est matière, rien que matière. D’Hippocrate à Descartes, la question se pose de savoir comment une information en provenance de l’interface corps-environnement (extéroception) ou issue de nos organes (intéroception) conduit à une douleur.

L’élaboration de la sensation douloureuse

Nous avons maintenant à examiner comment naît l’information nociceptive au niveau du corps. Le système de la nociception est, sur le plan neurobiologique, composé de récepteurs, les nocicepteurs, dits périphériques, parce qu’à distance du cerveau et de voies nerveuses qui conduisent les influx nerveux, nés de stimuli nociceptifs de la périphérie vers ce même cerveau, un peu comme dans la représentation caricaturale de Descartes. Cependant, dès le niveau périphérique (peau, organes…), une première distinction est qu’à la différence des systèmes sensoriels proprement dits où il existe des récepteurs spécifiques pour la vision (photorécepteurs), l’audition (organe de Corti), etc., il est généralement admis qu’il n’y a pas, anatomiquement parlant, de structures (récepteurs) spécialisées dans la détection des stimuli nociceptifs. En réalité, le message nociceptif résulte principalement de la mise en jeu de terminaisons dites libres de fibres nerveuses. Ces terminaisons libres sont constituées d’arborisations plexiformes dans les tissus cutanés, musculaires, articulaires, ainsi que dans la paroi de nos organes. Il existe cependant au sein de ces terminaisons libres des molécules « réceptrices », c’est-à-dire réactives à des stimuli physiques comme des modifications de température, de pression ou d’environnement chimique. Ces terminaisons libres sont le prolongement de fibres nerveuses de petit diamètre à conduction lente, les fibres dites C selon la classification des neurobiologistes. Sont impliquées des terminaisons de fibres un peu plus grosses que les fibres C, les fibres dites A delta, conduisant plus rapidement l’influx nerveux. Cette première distinction au niveau de la vitesse de conduction nerveuse a déjà une réelle conséquence fonctionnelle, car la transmission des messages nociceptifs s’effectuera plus rapidement dans les secondes que dans les premières. Cela explique pourquoi un sujet stimulé par exemple par un rayon laser de manière ponctuelle, produisant rapidement de la chaleur au niveau de la peau, ressent dans un premier temps (quasi immédiatement) une première douleur qui ressemble à une piqûre brève et bien localisée associée (mise en jeu des fibres A delta à conduction relativement rapide), suivie, dans un second temps, d’une douleur plus tardive, plus diffuse, à type de brûlure impliquant les fibres C à conduction plus lente.

Les récepteurs de la nociception répondent à des stimuli de nature variée et intense

Une deuxième distinction avec les récepteurs sensoriels hautement spécialisés est que la majorité de ces nocicepteurs sont mis en jeu par des stimuli de nature variée, aussi bien thermique que mécanique ou chimique. Il est ainsi parfois impossible pour un individu de distinguer réellement la nature mécanique ou thermique des stimuli nociceptifs, en particulier lorsqu’ils sont ponctuels. Ces récepteurs nociceptifs sont dits polymodaux. Cette polymodalité les différencie des récepteurs sensoriels qui sont unimodaux, c’est-à-dire stimulés uniquement par un stimulus de nature bien particulière. Ainsi, les photorécepteurs de la rétine sont-ils capables de détecter finement les photons pour le système visuel, mais uniquement les photons. Il est remarquable également de noter qu’il existe un système nociceptif polymodal dans la quasi-totalité des espèces animales et que des invertébrés parmi les plus simples, les méduses par exemple, possèdent une organisation neuronale autorisant une conduite de retrait en réponse à un stimulus considéré comme nociceptif ou menaçant. Des récepteurs nociceptifs proches de ceux observés chez les vertébrés sont déjà présents chez les invertébrés comme l’aplysie ou la sangsue. En d’autres termes, si leur rôle est essentiel pour le ressenti d’une douleur, ce n’est probablement pas seulement leur seule fonction et, leur polymodalité aidant, on sait aujourd’hui qu’ils jouent un rôle non négligeable dans l’établissement du schéma corporel et dans la protection du vivant à travers l’évolution.
Une troisième distinction avec les récepteurs sensoriels est liée à leur niveau de sensibilité, en particulier ce que l’on appelle le seuil d’activation. Ce seuil d’activation est toujours élevé, en particulier pour les nocicepteurs des fibres C où il correspond généralement, ou de manière proche, au seuil de sensibilité douloureuse, par exemple 44 °C pour une stimulation thermique.

Les récepteurs nociceptifs peuvent s’autosensibiliser

Une quatrième distinction est la remarquable capacité des nocicepteurs à se sensibiliser. Dans certaines circonstances, on constate en effet que la douleur déclenchée par des stimuli nociceptifs d’intensité modérée est nettement exagérée. Cette amplification, observée le plus souvent pour des stimulations mécaniques, a en grande partie pour origine une composante au niveau même des nocicepteurs. Cette composante locale est liée à la libération in situ de multiples substances chimiques induite par la lésion tissulaire ou par l’inflammation qui en découle, et dont certaines sont dites « algogènes » (on parle de « soupe algogène » locale), libérées par les fibres mêmes auxquelles appartiennent ces nocicepteurs. Il existe donc une sorte de « cercle vicieux » d’autosensibilisation locale conduisant à une hypersensibilité qualifiée de périphérique. Il n’y a pas d’équivalent au niveau des systèmes sensoriels – l’arrivée de photons sur un photorécepteur de la rétine par exemple n’entraîne pas un gain de l’acuité visuelle. Ce gain, cette efficacité améliorée, ne concerne pas seulement l’intensité de la réponse du nocicepteur, mais conduit également à une extension spatiale de leurs champs récepteurs, se traduisant par le recrutement de nocicepteurs adjacents de l’activité électrique d’un neurone donné du système nerveux central – de manière générale, on entend par champs récepteurs, qu’il s’agisse de nos cinq sens ou de la nociception, toute zone du corps cutanée, viscérale, musculaire ou articulaire dont la stimulation particulière conduit à l’activation (champ récepteur ON) ou à l’inhibition (champ récepteur OFF). À ce neurone donné, qui peut être situé à différents niveaux (moelle, thalamus, cortex), correspond donc un champ de l’espace (visuel par exemple) ou une zone de notre corps (tact, douleur). Ainsi, un champ récepteur tactile se définit comme la zone de notre peau dont la stimulation (grattage, effleurement, par exemple) active (ou inhibe) l’activité électrique (potentiels d’action) d’un neurone au niveau de la moelle ou au niveau de structures supra-spinales (thalamus, cortex). Ces champs récepteurs peuvent avoir des tailles et des formes variées, révélant leur importance fonctionnelle. Ainsi, pour la somesthésie (sens du tact), ces champs récepteurs sont tout petits au niveau de la main (zone très sensible) alors qu’ils ont une grande surface au niveau du dos (zone peu sensible), ce qui signifie que nous sommes d’autant plus capables de différencier tactilement une zone de notre corps que le champ récepteur est petit et inversement.
Une zone enflammée périlésionnelle (stimuli de nature chimique principalement) deviendra ainsi hypersensible à des stimuli mécaniques, même de faible intensité, en raison du caractère polymodal des nocicepteurs. Ce phénomène est tout à fait remarquable en termes de gain. Appliqué aux systèmes sensoriels, il conduirait à imaginer que la réception d’un stimulus auditif par exemple augmente notre niveau de sensibilité visuelle. Étonnante capacité de ces nocicepteurs polymodaux à « tendre l’oreille » pour mieux informer ! Même s’il existe, comme nous le verrons, une composante centrale dans le processus de sensibilisation à la douleur, par ce processus, l’évolution a sans doute amélioré l’efficacité du système d’alarme, pour éviter de passer d’une lésion localisée à une autre plus étendue et, donc, plus menaçante en termes de survie de l’individu. Elle a construit peu à peu une « surprotection » primaire dès le niveau initial de l’information nociceptive qui protège bien des espèces de certains dangers de manière précoce.

Il existe des récepteurs nociceptifs de réserve

Une cinquième distinction, liée en partie au phénomène si particulier d’amplification, est reliée à l’existence de nocicepteurs silencieux, dits quiescents. Il existe en effet un grand nombre de nocicepteurs polymodaux rattachés aux fibres C qui ne sont pas activables dans les conditions normales, mais qui le deviennent dans des conditions pathologiques, en particulier lors de processus inflammatoires locaux. Très probablement, le recrutement de ces nocicepteurs silencieux (découverts initialement au niveau des articulations) relève de mécanismes proches du processus de sensibilisation périphérique que nous avons décrit succinctement et implique des molécules de l’inflammation, mais aussi le système nerveux végétatif. Une manipulation pharmacologique de ce système permet de réduire la douleur chez certains patients, même si le bénéfice n’est parfois que temporaire. On peut donc parler de nocicepteurs de réserve (possibilité qui n’existe pas pour les récepteurs sensoriels) qui donneraient aux organismes vivants, et dans certaines circonstances, une surcapacité à ausculter non seulement nos organes (intéroception), mais aussi l’interface avec le monde environnant (extéroception). Certaines réponses végétatives locales (modification de débit sanguin, augmentation de la température locale…), en réaction à des situations de stress par exemple, dévoilent cette capacité latente, afin de mieux détecter des informations menaçantes pour le maintien de l’intégrité de l’individu. Cette capacité a été peu explorée et reste encore en grande partie incomprise.

De l’information nociceptive au message douloureux :
le mode de la complexité

Au total, on voit combien, dès la réception des influx nociceptifs au niveau le plus périphérique, donc le plus primaire, le message nociceptif est flou et brouillé, mal localisé. On est loin de la précision analytique apportée par nos cinq sens. La détection n’est pas précise certes, mais a l’énorme avantage d’intégrer différentes modalités de stimuli (thermiques, mécaniques, chimiques) nous informant globalement de l’état général de notre corps quant à son intégrité. Une inflammation ou une lésion se perçoit à la fois grâce à la vision et au sens du tact (somesthésie), mais seule l’information nociceptive qu’elle génère est capable d’engager véritablement l’individu de manière efficace dans une conduite de soin et donc de protection.
À l’instar des messages générés au niveau des récepteurs sensoriels, les récepteurs nociceptifs sont capables de transformer un stimulus nociceptif, quelle qu’en soit la nature physique ou chimique, en signaux électriques, les potentiels d’action, d’amplitude constante mais organisés dans le temps. Il s’agit de la transduction du message nociceptif, qui correspond à la formation d’un message de nature électrique (les potentiels d’action) codé en termes de fréquence à partir des stimuli perçus au niveau des nocicepteurs. C’est sous cette nature qu’est analysé le signal nociceptif par le système nerveux, tout d’abord au niveau de la moelle épinière, puis au niveau du cerveau.
On est resté longtemps dans l’ignorance du mécanisme cellulaire de transduction amenant les nocicepteurs stimulés à générer un signal électrique. Aujourd’hui, les mécanismes moléculaires intimes de cette transduction sont mieux connus et semblent très proches des mécanismes de transduction existant au niveau des récepteurs sensoriels (vision, audition, etc.) en dépit de leurs différences de structure. Ces mécanismes font l’objet d’intenses recherches, dont une finalité est bien évidemment d’identifier de nouvelles cibles thérapeutiques. On conçoit en effet que bloquer ou réduire la transduction des signaux au niveau des nocicepteurs se traduise par de l’analgésie en « asséchant » la formation d’influx nerveux électriques en réponse aux stimuli nociceptifs. Ces recherches représentent donc un véritable enjeu pour l’industrie pharmaceutique.
Il est important de relever, dès ce premier niveau, la différence de stratégie thérapeutique avec celle utilisée pour traiter la pathologie des systèmes sensoriels : on cherche ici à supprimer ou à réduire la genèse des influx nerveux nés des informations nociceptives, alors que l’on cherche, à l’inverse, à rétablir ou à améliorer celle liée aux informations sensorielles, comme la vision, l’audition, etc. Dans le premier cas, l’excès relève du pathologique alors que dans les seconds, c’est le déficit.

Un mixage informationnel

Comme pour tous les messages sensoriels, la genèse des messages douloureux se fait à partir de zones corporelles bien localisées, appelées champs récepteurs. Un champ récepteur nociceptif permet de définir la zone corporelle dont un neurone du système nerveux central reçoit des informations, en l’occurrence à caractère nociceptif.
En réalité, dès le niveau de la moelle épinière, deux catégories de neurones répondent à des stimuli nociceptifs.
  • Les neurones nociceptifs spécifiques, d’une part, exclusivement activés par des stimulations nociceptives, qui sont intenses, de nature mécanique ou...

Table des matières

  1. Couverture
  2. Titre
  3. Copyright
  4. AVANT-PROPOS - Pourquoi cet ouvrage à trois voix ?
  5. Introduction
  6. PREMIÈRE PARTIE - Du corps douloureux à l'homme douloureux
  7. DEUXIÈME PARTIE - D'où vient notre douleur ?
  8. TROISIÈME PARTIE - La douleur prise en charge
  9. Conclusion
  10. ANNEXE - La douleur au piège de la « preuve de concept » : comment appréhender la douleur ?
  11. Notes bibliographiques
  12. Remerciements
  13. Table