Les femmes ne sont pas des hommes comme les autres
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Les femmes ne sont pas des hommes comme les autres

  1. 300 pages
  2. French
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  4. Disponible sur iOS et Android
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Les femmes ne sont pas des hommes comme les autres

À propos de ce livre

Les changements survenus dans la seconde partie du XXe siècle ont considérablement éloigné les femmes du profil adopté par leurs mères. Aujourd'hui, les femmes ne sont plus très loin de former la moitié de la population active; elles ont investi en masse l'enseignement supérieur; elles ont délaissé les bancs de l'Eglise et, armées de la législation sur la contraception et la dépénalisation de l'avortement, elles sont devenues libres de leur corps. Toutes ces transformations conduisent-elles à tracer le portrait d'une femme qui serait devenue le clone de l'homme ? On peut se poser la question si l'on se souvient des propos des féministes dans les années 1970 qui reprenaient les thèses « égalitaristes » de Simone de Beauvoir. Plus récemment, certains sont allés jusqu'à annoncer la venue d'une société « androgyne ». Mais qu'en pensent les femmes et les hommes de ce pays ? Comment les femmes se voient-elles par rapport aux hommes ? Comment se définissent-elles et décrivent-elles leurs compagnons ? Pour réponse à ces questions, Janine Mossuz-Lavau et Anne de Kervasdoué ont effectué une longue enquête auprès d'une centaine de femmes aux statuts les plus divers (âge, profession, provenance, géographique, état de vie, etc.). Il en ressort une prise de conscience très aiguë de ce qu'est aujourd'hui l'identité féminine. Politologue, Janine Mossuz-Lavau est directrice de recherche au CNRS et à la fondation nationale des Sciences politiques. Elle a publié Les Français et la politique (Odile Jacob, 1994). Anne de Kervasdoué, gynécologue, a déjà publié Questions de femmes et Questions d'hommes (Odile Jacob, 1996).

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Informations

CHAPITRE III
Où se pose la question du travail et de la vie privée

Pour les femmes, l’un des grands changements des dernières décennies a été l’entrée massive sur le marché du travail. En 1994, elles forment dans notre pays 44,7 % de la population active contre 34,6 % en 1954. On peut présenter le fait autrement, en indiquant qu’entre vingt-cinq et quarante-neuf ans le taux d’activité des Françaises est de 76,2 %, ce qui classe ces dernières, en 1992, au deuxième rang de la Communauté européenne, juste après les Danoises. Signalons, pour avoir un point de comparaison, que ce taux d’activité est de 53,1 % en Espagne, 51,4 % en Irlande1. Par ailleurs, il s’agit d’un travail continu. Le temps n’est plus où les femmes interrompaient leur activité à la naissance du premier ou du deuxième enfant. Désormais, même lorsqu’elles deviennent mères de famille, elles tendent de plus en plus à conserver leur emploi. Ajoutons qu’elles ont fait une percée non négligeable dans les professions les plus qualifiées, puisqu’elles forment, en 1994, 31,9 % des cadres et professions intellectuelles supérieures, 44,6 % des professions intermédiaires. Toutefois, elles restent plus touchées que les hommes par le chômage, le travail précaire et le travail à temps partiel (83 % des travailleurs à temps partiel sont des femmes).
Comment se traduit aujourd’hui, dans le vécu des Françaises, ce formidable bouleversement qui en a fait des salariées, pour la très grande majorité d’entre elles, prenant chaque jour le chemin d’une « entreprise »2 ? Sont-elles à l’aise dans leur nouveau statut ? Le vivent-elles facilement ou au contraire non sans mal ? Entre ce travail qui les happe désormais et la construction familiale, entre leur vie professionnelle et leur vie privée, quels arbitrages sont rendus chaque jour, face à des hommes qui ne semblent pas se poser les mêmes questions qu’elles ? Car, d’après ce qu’elles nous disent, entretien après entretien, la relation des hommes au travail et celle des femmes sont loin d’être identiques.
Les hommes sont plus investis dans leur travail
Les femmes que nous avons interrogées plaident, on l’a dit, l’existence de différences entre les Français et les Françaises qu’elles côtoient, ou entre elles-mêmes et leurs compagnons. Et l’une de ces différences tient précisément à la relation contrastée que les uns et les autres entretiennent avec le travail. Pour nos interlocutrices, le constat s’impose : « Les hommes s’impliquent quand même plus dans le travail que les femmes. » Une jeune cadre dans la communication dont le mari est informaticien souligne :
« Finalement leur travail est plus important… leur travail a une place plus importante dans leur vie que pour les femmes. Pour un homme, le travail c’est une chose centrale, il faut qu’il se réalise là-dedans… donc le reste doit suivre et puis bon… après… la femme, la famille, les loisirs, ça vient se greffer comme ça par-dessus, mais ça reste quand même quelque chose de fondamental, donc ça, c’est quelque chose qui me paraît différent. »
D’autres insistent sur cette place primordiale accordée au travail, sur cette vie professionnelle « tellement prenante » que le reste passe au second plan. Pour une Haut-Savoyarde, « ils sont pris par leur travail et puis en dehors de leur travail, ben le reste… ils laissent un petit peu voir venir ». Quand la notion de travail laisse la place, dans certains milieux privilégiés, à celle de carrière, alors là il semble ne plus y avoir de limite : « Leur carrière bouffe tout », soupire la pédiatre parisienne mariée à un cadre supérieur. Et selon une femme au foyer qui semble bien vivre ce statut, « un homme ne peut pas envisager l’existence sans la vie professionnelle ».
Des femmes ayant dans leur famille fait l’expérience de la cohabitation avec des hommes qui n’avaient – momentanément – pas d’activité, pour cause de chômage total ou partiel, témoignent de l’extrême difficulté qu’ils ont eue à supporter cette situation. L’hôtesse de l’air signale que cela a été « très dur ». Et une jeune femme de vingt et un ans se rappelle l’état détestable dans lequel a été son père à un moment où il a dû être entretenu par sa femme.
« Elle a fait vivre la famille à certains moments et mon père l’a très mal supporté… D’ailleurs il ne supportait plus personne… Mon père est très orgueilleux. Dès qu’il a de l’argent, il est très grand seigneur, il lui fait des cadeaux, il l’emmène en voyage… et il est malheureux dès qu’il ne peut plus l’être. »
Comment expliquent-elles un tel investissement dans le travail ? Diverses raisons sont avancées par nos interlocutrices.
La première tiendrait à ce que les hommes « ont besoin de se prouver quelque chose ». Ils auraient l’ambition, comme le note la pédégère haut-savoyarde, « de faire des choses plus grandes, plus conséquentes ». Une enseignante insiste aussi sur le fait qu’ils auraient besoin de preuves, alors qu’elle-même ne ressent pas ce besoin. Façon de prouver leur virilité ? De mettre en scène la force qui fut longtemps leur apanage mais qui n’est plus toujours, sous sa forme physique, démontrable dans la vie quotidienne ? Manière d’affirmer une supériorité dont ils sentent peut-être qu’elle leur échappe ? Une conseillère d’orientation de Gennevilliers présente une autre interprétation. À ses yeux, les femmes conquièrent une telle puissance et connaissent un tel épanouissement quand elles ont des enfants que les hommes, pour compenser, se jettent encore plus à corps perdu dans le travail, pour se réaliser pleinement eux aussi, d’une autre manière :
« L’homme, quand il devient père, il a ce désir de compenser un petit peu ce que la femme peut assurer sur le plan familial, par une vie professionnelle ardente, chargée […]. Je crois qu’un homme supporte pas d’être moins épanoui que sa femme. Il va compenser dans son travail… et dans la vie sociale. »
Il y aurait donc comme une lutte qui opposerait les hommes et les femmes dans la pleine réalisation de soi, et qui conduirait les hommes à s’investir d’autant plus dans la vie professionnelle que les femmes, avec le simple statut de mère, auraient acquis une nouvelle forme de pouvoir ou, du moins, de plénitude.
D’autres femmes évoquent le poids de l’histoire, et la vieille habitude qu’ont eue les hommes d’être les seuls pourvoyeurs du foyer. La situation actuelle où, dans la majorité des cas, le ménage bénéficie d’un double revenu est encore trop nouvelle pour qu’ils se déprennent d’attitudes qui ont dû être les leurs pendant si longtemps. Une enseignante de Châtenay-Malabry l’explique en ces termes :
« Pour apprécier cet engagement des hommes dans la compétition, il faut savoir que depuis des millénaires, c’est comme ça. Ils ont été contraints d’assumer, de faire vivre, d’être les meilleurs, de devoir se battre professionnellement. »
D’ailleurs, certains demeurent encore aujourd’hui les seuls à rapporter de l’argent à la maison. Et une femme au foyer reconnaît : « L’homme est investi dans cette mission alimentaire. C’est un poids très lourd sur ses épaules. » Jugement qui rejoint les conclusions d’une enquête d’Anne-Marie Devreux qui constate : « La paternité semble parfois conforter le nouveau père dans sa trajectoire professionnelle, ce qui, encore une fois, est traduit en termes de nécessité financière […]. La parentalité […] conforte les hommes dans le droit à la carrière, sous couvert de responsabilité économique de la famille ; tandis qu’elle déstabilise la situation professionnelle des femmes3. »
Interviennent aussi les inégalités de salaire. Dans notre société contemporaine, les hommes sont mieux rémunérés que les femmes. Aussi attend-on d’eux une plus grande disponibilité, une plus grande implication. Un homme ne peut aisément réduire son temps de travail pour consacrer plus de temps à sa vie privée, sinon les revenus du foyer en seraient affectés, et c’est souvent l’intérêt du couple de disposer du maximum d’argent. Une jeune cadre de l’édition de Clichy, qui vient d’avoir un bébé et tient absolument à ce que sa relation à l’enfant soit la même que celle de son mari, sent comme une menace ce rapport homme/travail qui requiert de l’homme une totale disponibilité. Elle constate qu’elle rentre à dix-huit heures alors que son mari ne peut pas être là avant vingt heures, qu’elle seule a pu prendre deux jours de congé pour permettre l’adaptation de l’enfant à la crèche et qu’une certaine inégalité est en train de poindre à l’horizon. Mais elle doit admettre qu’« on est quand même pris à un certain piège… parce que si on veut pas être coincé on a besoin d’avoir des moyens financiers ! Donc il se trouve que les salaires masculins sont encore plus élevés ». Salaires plus élevés, donc, mais qui obligent le cadre, en contrepartie, à rester sur son lieu de travail jusqu’à dix-neuf heures trente ou vingt heures. Il ne s’agit donc pas, dans l’esprit de cette femme, de reprocher à son mari de moins prendre en charge qu’elle l’enfant qu’ils ont depuis peu, mais de constater l’existence d’un système socioéconomique qui empêche les hommes qui souhaiteraient être plus disponibles pour leur vie privée de l’être réellement. Elle note : « Là je commence à sentir de petites inégalités parce qu’il est un peu coincé… mais ça le gêne… C’est pas pour lui… C’est pas une manière d’échapper à ça… Au contraire, il dit : je veux pas rater ce gosse. »
Cette disparité des salaires joue d’ailleurs à plein dans certains cas lorsque se pose la question de savoir qui va éventuellement s’arrêter de travailler pour s’occuper des enfants. Une ancienne ouvrière de Bois-Colombes, devenue femme au foyer, explique que le problème, dans son cas, a été vite résolu compte tenu de son petit salaire, bien inférieur à celui de son mari : « C’était à moi de me consacrer aux enfants. Vu la paie que je ramenais par rapport à mon mari. C’était un choix obligatoire… Il ramenait le double de ce que je ramenais. »
Ce n’est donc pas seulement une sorte de goût immodéré des hommes pour l’accomplissement professionnel qui est mis en cause, mais toute une pression sociale et l’existence d’un système qui les associe en priorité au travail alors que les femmes ne sont pas considérées à ce point comme dépositaires de cette activité. Cet ensemble de raisons conduit donc à ce que les hommes accordent la priorité à leur métier et se sentent moins investis dans la vie privée. L’hôtesse de l’air note que « l’homme se culpabilise moins […]. Il est pas là huit jours il se culpabilise pas vis-à-vis de sa femme ou vis-à-vis de son enfant de ne pas être là ». Il ne vit pas la relation à la famille sur un mode intense et demeure donc plus libre pour accomplir sa tâche professionnelle. Des femmes insistent sur cette disponibilité d’esprit qui permet aux hommes de donner toute leur mesure : « Il y a vraiment un accompagnement chez les mères ou chez la plupart des mères, sauf exception, qui n’existe pas chez les hommes, et donc leur esprit est libre pour autre chose. Je crois que les femmes ne sont jamais complètement libres. » On plaint d’ailleurs cet être qui, tellement pris par son travail, ne peut profiter de la chaleur du foyer, et une femme sans profession insiste sur le fait que « l’homme passe à côté d’une immense vie affective parce qu’il est dévoré par sa vie professionnelle ». Hommes qui, en conséquence, n’arrivent pas à voir grandir leurs enfants, les considèrent généralement comme plus « petits » qu’ils ne sont, ce qui crée parfois des problèmes au sein des familles, mais qui, avantage cette fois, ne souffrent pas au même titre que les femmes de leur départ du foyer. Cette rupture correspond en général pour eux à un moment où ils sont en pleine activité professionnelle, où ils font des choses peut-être plus intéressantes qu’à leurs débuts, et ils subissent en conséquence moins brutalement cette nouvelle vie dans une maison sans enfants, ou dans une maison où les enfants sont devenus très indépendants.
Dans l’ensemble, les Françaises tendent donc à déplorer ce rapport des hommes au travail qui les distingue tant des femmes, on va y revenir, et qui semble trop exclusif, trop prenant, à la grande majorité d’entre elles. Parmi celles que nous avons interrogées, il ne s’en est trouvé qu’une pour attribuer aux hommes l’exclusivité de l’activité professionnelle. Il s’agit de l’épouse d’un santonnier marseillais, qui se situe à droite mais dont le mari vote pour le Front national et qui déclare : « Alors qu’il y a du chômage, la femme devrait rester à la maison et ça permettrait aux hommes de travailler, il y aurait plus de travail pour les hommes. » Et elle ajoute qu’il y aurait aussi moins de délinquance, puisque les enfants ne seraient plus alors obligés d’aller traîner dans les rues si leur mère était à la maison pour les accueillir. Autre voix, qui paraît assez isolée parmi les jeunes, celle d’une clerc de notaire qui souhaite que son mari gagne plus d’argent qu’elle, élément important à son sens pour qu’elle puisse l’estimer :
« J’ai envie que mon mari soit professionnellement plus important que moi… C’est très rétrograde […]. J’aimerais qu’il gagne plus d’argent que moi… parce que pour moi ça va avec l’estime que je peux porter […]. Qu’il ait un poste, quoi ! Qu’il fasse quelque chose de plus valorisant… c’est vraiment rétrograde… C’est complètement dépassé et malgré tout je sens que j’ai besoin de ça. »
Ce point de vue rejoint à certains égards celui de la journaliste de quarante-quatre ans, divorcée, qui explique qu’elle a eu avec un homme une liaison très forte sur les plans physique et intellectuel, mais que cela ne lui convenait pas « matériellement », car il n’avait pas un métier qu’elle admirait et qu’elle a besoin d’admirer un homme : elle a rompu. Il existe donc aussi des femmes qui ont complètement intégré cette valeur sacrée que représenterait le travail masculin et qui partagent avec nombre d’hommes l’idée que la réussite professionnelle mâle prime tout. Les enquêtes quantitatives montrent d’ailleurs que les femmes épousent des hommes un peu plus âgés qu’elles, qui sont donc engagés pour la plupart dans la vie active. On a pu interpréter ce phénomène comme une valorisation par les femmes de ce statut de « travailleur ». Pour Michel Bozon, « l’âge apparaît comme l’accoucheur de la position sociale de l’homme4 ».
Qu’elles déplorent ou qu’elles approuvent le fait, les hommes ont donc avec le travail, d’après ce que nous disent les femmes, une relation privilégiée, intense, prenante, qui participe de ces valeurs « centrifuges » propres à la population mâle, comme le note Olivier Schwartz au terme de son enquête sur les ouvriers du Nord. À ses yeux, « le travail constitue en effet un fondement essentiel des légitimités masculines. Il est terrain d’accès à une forme de reconnaissance sociale […]. Ce que [les acteurs] mettent en jeu sur ce terrain, c’est une certaine image de leurs capacités, et de la valeur de celles-ci au regard des modèles collectivement acceptés ; ce qu’ils veulent, c’est “se prouver” comme détenteurs de facultés socialement pertinentes5 ». Et l’auteur formule l’hypothèse que « travailler, frapper et boire communiquent secrètement dans certains univers masculins, et que la parenté entre ces trois expressions tient à ce qu’elles empruntent toutes quelque chose au prestige d’un même modèle : celui du déploiement non inhibé des forces6 ».
D’après ce que disent aussi quelques-unes de nos interlocutrices, nombre d’hommes préféreraient que leur femme reste au foyer et que la famille soit encore plus organisée autour de leur propre activité profes...

Table des matières

  1. Couverture
  2. Titre
  3. DES MÊMES AUTEURS
  4. Copyright
  5. Sommaire
  6. Remerciements
  7. Introduction
  8. Chapitre premier - Où la parole de l’intime n’est pas également partagée
  9. Chapitre II - Où le plus fort n’est pas toujours celui qu’on croit
  10. Chapitre III - Où se pose la question du travail et de la vie privée
  11. Chapitre IV - Où la sexualité des femmes n’est pas la réplique de celle des hommes
  12. Chapitre V - Où la politique au féminin a ses préoccupations propres
  13. Chapitre VI - Comme un roman : quelques histoires de vie
  14. Chapitre VII - Le regard des hommes
  15. Chapitre VIII - Pour conclure : l’identité féminine égalitaire et différencialiste
  16. Annexes