Le Code de la conscience
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Le Code de la conscience

  1. 432 pages
  2. French
  3. ePUB (adapté aux mobiles)
  4. Disponible sur iOS et Android
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Le Code de la conscience

À propos de ce livre

D'où viennent nos perceptions, nos sentiments, nos illusions et nos rêves ? Où s'arrête le traitement mécanique de l'information et où commence la prise de conscience ? L'esprit humain est-il suffisamment ingénieux pour comprendre sa propre existence ? La prochaine étape sera-t-elle une machine consciente de ses propres limites ? Depuis plus de vingt ans, Stanislas Dehaene analyse les mécanismes de la pensée humaine. Dans ce livre, il invite le lecteur dans son laboratoire où d'ingénieuses expériences visualisent l'inconscient et démontent les bases biologiques de la conscience. Grâce à l'imagerie cérébrale et même à des électrodes introduites dans la profondeur du cortex, nous commençons enfin à comprendre les algorithmes qui nous font penser. Détecter la présence de la conscience, décoder à quoi pense un individu, un bébé ou même un animal, sortir les patients du coma, doter les machines d'un début de conscience… Le Code de la conscience ouvre d'extraordinaires perspectives pratiques et intellectuelles, en accordant une importance égale aux implications technologiques, philosophiques, personnelles et éthiques de la résolution du dernier des mystères. Stanislas Dehaene est professeur au Collège de France, titulaire de la chaire de psychologie cognitive expérimentale et membre de l'Académie des sciences. Il a publié Les Neurones de la lecture et La Bosse des maths, qui ont rencontré un très grand succès. 

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Informations

Éditeur
Odile Jacob
Année
2014
Imprimer l'ISBN
9782738131058

CHAPITRE 1

Quand la conscience entre au laboratoire


Comment la conscience est-elle devenue un objet de science ? Reléguant à plus tard les obscures énigmes du libre arbitre et de la conscience de soi, nous nous sommes concentrés sur la question de l’accès à la conscience : pourquoi certaines de nos entrées sensorielles deviennent-elles des perceptions conscientes, tandis que d’autres restent confinées aux limbes de l’inconscient ? Afin de comparer la perception consciente avec le traitement non conscient des informations sensorielles, nous avons appris à rendre n’importe quelle image visible ou invisible, à volonté et sous contrôle intégral de l’expérimentateur. Nous sommes même parvenus à présenter des images au seuil de conscience, en sorte qu’elles ne soient perçues consciemment que la moitié du temps. Dans ces conditions, il est devenu essentiel de faire appel à l’introspection de chaque observateur, car elle seule permet de connaître le contenu subjectif de la conscience. Tous ces ingrédients composent un programme de recherche simple : la quête des mécanismes objectifs de la conscience subjective, des « signatures » systématiques qui marquent la transition de l’activité cérébrale de la non-conscience à la conscience.
Examinez l’illusion visuelle présentée en figure 3. Douze gros points, imprimés en gris clair, entourent une croix. À présent, fixez cette petite croix du regard. Au bout de quelques secondes, vous devriez voir certains points disparaître de la page. L’espace d’un instant, ils s’effacent de la conscience, puis redeviennent visibles. Parfois, c’est tout l’ensemble qui s’évanouit et vous laisse face à une page blanche – pour mieux revenir, un instant plus tard, dans une nuance de gris qui semble soudain plus sombre.
illustre l’une des nombreuses manières de manipuler la conscience subjective. Fixez la croix centrale du regard. Au bout de quelques secondes, vous verrez certains des disques gris disparaître, puis réapparaître d’une façon imprévisible. Le stimulus objectif est constant, et pourtant son interprétation subjective ne cesse de changer. Reste alors à déterminer quels aspects de l’activité cérébrale varient en fonction de la perception subjective plutôt que de la stimulation objective.
Figure 3. L’illusion de Troxler illustre l’une des nombreuses manières de manipuler la conscience subjective. Fixez la croix centrale du regard. Au bout de quelques secondes, vous verrez certains des disques gris disparaître, puis réapparaître d’une façon imprévisible. Le stimulus objectif est constant, et pourtant son interprétation subjective ne cesse de changer. Reste alors à déterminer quels aspects de l’activité cérébrale varient en fonction de la perception subjective plutôt que de la stimulation objective.
Ainsi, une image fixe peut entrer et sortir de la conscience, plus ou moins au hasard. Cette observation profonde constitue le fondement de la science moderne de la conscience. En 1990, le prix Nobel Francis Crick, aujourd’hui disparu, et le neurobiologiste Christof Koch ont avancé l’idée que ce genre d’illusion visuelle fournissait un moyen scientifique d’étudier le trajet de stimuli conscients et non conscients dans le cerveau1.
Au moins en théorie, ce programme de recherche ne présente pas de difficulté majeure. Pendant l’illusion des douze points gris, par exemple, rien n’empêche d’enregistrer l’activité neuronale en divers endroits du cerveau pendant que les points sont visibles, et de comparer ces enregistrements avec ceux faits au moment où les points ne sont pas vus. Crick et Koch pensaient que le domaine de la vision était particulièrement mûr pour de telles recherches, car non seulement nous commençons à bien connaître les voies nerveuses qui transportent l’information de la rétine au cortex, mais également parce que des dizaines d’illusions permettent de comparer des stimuli visibles et invisibles2. Toutes ces illusions partagent-elles des points communs ? Existe-t-il une forme unique d’activité cérébrale qui sous-tend tous les états conscients et fournit une signature unifiée de l’accès à la conscience ? L’identification d’une telle signature ferait faire un pas de géant à l’élucidation de cette énigme.
Crick et Koch avaient entrouvert la porte du labyrinthe. À leur suite, des dizaines de laboratoires commencèrent à explorer la perception consciente par le biais d’illusions semblables à celles que vous venez d’éprouver. Trois éléments clés rendaient excitant ce programme de recherche. Tout d’abord, les illusions ne faisaient aucunement appel à une conception alambiquée de la conscience – il s’agit juste de comprendre l’acte de voir ou de ne pas voir, ce que j’appelle l’accès à la conscience. En second lieu, des dizaines d’illusions étaient disponibles – comme nous allons bientôt le voir, les chercheurs, devenus magiciens, ont vite appris à faire disparaître de la conscience n’importe quel mot, n’importe quelle image, et même un gorille tout entier ! Enfin, ces illusions sont purement subjectives – vous seuls savez où et quand les points disparaissent de votre vision. Il n’empêche que les résultats sont reproductibles : toute personne qui fixe l’image éprouve la même expérience subjective. Nous nous accordons tous sur le fait qu’un événement bien réel, étrange et fascinant, se produit dans notre conscience. Nous devons le prendre au sérieux.
En résumé, trois ingrédients suffisent à amener la conscience à portée de la science : la concentration des recherches sur l’accès à la conscience ; la panoplie d’illusions qui permettent de manipuler la conscience à volonté ; et le fait de traiter les phénomènes subjectifs comme d’authentiques données scientifiques. Examinons-les à présent en détail.

Les facettes de la conscience

« Conscience : le fait d’avoir des perceptions, des pensées et des sentiments. Le terme est impossible à définir, sauf en des termes qui sont eux-mêmes inintelligibles si l’on ne sait pas ce que signifie la conscience… Rien de valable n’a jamais été écrit à ce sujet. »
Stuart SUTHERLAND, International
Dictionary of Psychology
(1996).
La science progresse souvent en introduisant des distinctions nouvelles qui raffinent les concepts souvent flous des langues naturelles. Un exemple classique dans l’histoire des sciences est celui de la séparation des concepts de chaleur et de température. L’intuition traite ces deux termes comme des synonymes : après tout, ajouter de la chaleur, c’est augmenter la température, n’est-ce pas ? Non – un bloc de glace, lorsqu’on le réchauffe, fond tout en restant à une température constante de zéro degrés. Un matériau peut très bien avoir une température élevée (par exemple une étincelle de feu d’artifice peut facilement atteindre quelques milliers de degrés), et contenir une chaleur si faible qu’elle ne cause aucune brûlure (parce que sa masse est très faible). Au XIXe siècle, la distinction entre chaleur (la quantité d’énergie transférée) et température (l’énergie cinétique moyenne des particules qui composent un corps) a été l’une des clés du progrès fulgurant de la thermodynamique.
Le mot conscience, tel qu’on l’utilise dans la vie courante, ressemble au mot chaleur : en amalgamant plusieurs sens, il sème la confusion. Nous ne pourrons apporter de l’ordre à ce domaine qu’en les séparant. Dans ce livre, je défends l’idée que l’un d’entre eux en particulier, l’accès à la conscience, recouvre un concept particulièrement clair et suffisamment restreint pour faire l’objet d’expériences précises et susceptibles de jeter une certaine lumière sur l’ensemble du problème.
Qu’est-ce donc que l’accès à la conscience ? À chaque instant, notre cerveau est saturé d’innombrables stimulations sensorielles. Cependant, notre conscience ne nous donne accès qu’à une toute petite fraction d’entre elles. Chaque matin, en me rendant au travail, je passe devant les mêmes maisons sans jamais remarquer la couleur de leur toit ou le nombre de leurs fenêtres. Assis à mon bureau, tandis que je me concentre sur l’écriture de ce livre, ma rétine est littéralement bombardée d’informations sur les objets, les photos et les œuvres d’art qui m’entourent. Au même instant, mes tympans vibrent d’une superposition de musique, de chants d’oiseaux et de bruits de voisinage. Pourtant, tant que je parviens à rester focalisé sur mon travail, toutes ces distractions restent aux confins de ma conscience : elles n’y ont pas accès.
L’accès à la conscience est à la fois extrêmement ouvert et fortement sélectif. Son répertoire potentiel est immense. À tout instant, en réorientant mon attention, je peux prendre conscience d’une couleur, d’un parfum, d’un son, d’un souvenir oublié, d’un sentiment, ou des multiples acceptions d’un mot familier. Si je commets une bourde, il se peut que mon esprit soit envahi d’une vive conscience de mon erreur, puis d’émotions, de regrets et de stratégies pour reprendre le dessus. À un instant donné, pourtant, le répertoire effectif de la conscience est minuscule. Chacun de nous ne peut guère penser qu’à une seule chose à la fois (même si cette pensée peut être constituée d’un assemblage de plusieurs éléments, comme lorsque nous réfléchissons au sens d’une phrase).
Cette contenance extrêmement réduite oblige la conscience à se retirer d’un objet avant de pouvoir accéder à un autre. Cessez un instant de lire et prêtez attention à la position de vos jambes. Peut-être ressentez-vous une pression ou une douleur à tel ou tel endroit. Cette sensation vient d’accéder à votre conscience. Une seconde plus tôt, elle n’était que préconsciente – accessible, certes, mais pas encore accédée, elle restait dans les limbes de l’inconscient. Cela ne signifie pas qu’elle n’était pas représentée dans votre cerveau : sans en avoir conscience, vous ajustez constamment votre posture en réponse à des signaux inconscients. Cependant, l’accès à la conscience rend cette information disponible à l’ensemble de vos facultés intellectuelles. Soudainement, elle devient accessible par la voie du langage : vous pouvez décrire ce que vous ressentez. L’information consciente parvient également à votre mémoire, elle guide votre attention, vos intentions et vos plans d’action. C’est précisément ce passage soudain du préconscient au conscient qui fait accéder une information à la conscience et la rend disponible à mille et une opérations mentales, que j’analyserai dans les prochains chapitres. J’essaierai de clarifier ce qui se produit dans le cerveau à cet instant exact : les mécanismes cérébraux de l’accès à la conscience.
Pour ce faire, il nous faudra encore distinguer accès à la conscience et orientation de l’attention – une nuance délicate mais indispensable. En effet, comment définir ce qu’est l’attention ? Dans ses magistraux Principes de psychologie (1890), William James en a proposé une définition demeurée célèbre. L’attention, selon lui, est « la prise de possession par l’esprit, sous une forme claire et vive, d’un objet ou d’une suite de pensées parmi plusieurs qui semblent possibles ». Malheureusement, cette définition me semble amalgamer deux notions bien différentes et qui renvoient à des circuits cérébraux distincts : la sélection et l’accès. « La prise de possession par l’esprit » est essentiellement ce que j’ai appelé l’accès à la conscience : le fait d’amener une information au premier plan de notre pensée, de sorte qu’elle devienne un objet mental conscient que nous « gardons en tête ». Sous cet angle, l’attention se confond avec la conscience, pratiquement par définition : toutes les fois qu’un objet prend possession de notre esprit, si bien que nous puissions le décrire à d’autres (par mots ou par gestes), nous en sommes nécessairement conscients.
Cependant, la définition de l’attention selon William James recouvre également un deuxième processus : le fait d’isoler un objet de pensée parmi d’autres. C’est exactement ce que les sciences cognitives appellent aujourd’hui l’attention sélective. À chaque instant, notre environnement regorge de milliers de perceptions potentielles. Notre mémoire, également, fourmille de connaissances qui restent en sommeil. Afin d’éviter la saturation, notre cerveau applique une sévère procédure de sélection. Parmi d’innombrables pensées en puissance, seule « la crème de la crème » parvient à notre conscience. C’est ce filtre très complexe que nous appelons l’attention. Notre cerveau élimine impitoyablement toutes les informations dépourvues de pertinence pour n’en retenir qu’une seule qui soit la plus saillante ou la plus adaptée à nos buts actuels. Ce stimulus est alors amplifié jusqu’à prendre le contrôle de notre comportement.
Il est évident, dès lors, que la plupart de ces opérations de sélection attentionnelle, sinon toutes, doivent se dérouler en dehors de notre conscience. Comment pourrions-nous avoir la moindre pensée si nous devions, à chaque fois, commencer par passer au crible tous les candidats potentiels ? Le filtre de l’attention agit de façon inconsciente – et c’est pourquoi l’attention est dissociable de l’accès à la conscience. Dans la vie de tous les jours, notre environnement est souvent saturé de stimulations de toutes sortes, et nous utilisons alors l’attention afin de sélectionner celles qui méritent d’accéder à notre conscience. Dans ces conditions, l’attention contrôle la voie d’accès à la conscience3. Au laboratoire, cependant, nous parvenons à créer des situations si dépouillées qu’il ne reste qu’une seule information sur l’écran. Dans ce cas, la sélection n’est pas indispensable, et l’attention et la conscience apparaissent dissociées4. Inversement, dans d’autres expériences que nous discuterons plus loin, l’attention opère à couvert, en amplifiant ou, au contraire, en filtrant certaines informations sans pour autant qu’aucune d’elles ne finisse par parvenir à la conscience. En bref, l’attention et l’accès à la conscience sont des processus bien distincts.
Un troisième concept demande à être soigneusement mis de côté : la vigilance, que l’on appelle également la « conscience intransitive » ou l’« état de conscience ». En français, l’adjectif conscient peut être transitif, comme lorsque nous déclarons être conscients de la forme d’un fruit ou de la beauté d’une femme – nous parlons ...

Table des matières

  1. Couverture
  2. Titre
  3. Copyright
  4. Dédicace
  5. Introduction – La matière de la pensée
  6. CHAPITRE 1 - Quand la conscience entre au laboratoire
  7. CHAPITRE 2 - Sonder la profondeur de l’inconscient
  8. CHAPITRE 3 - À quoi sert la conscience ?
  9. CHAPITRE 4 - Les signatures de la pensée consciente
  10. CHAPITRE 5 - Théoriser la conscience
  11. CHAPITRE 6 - L’épreuve de vérité
  12. CHAPITRE 7 - L’avenir de la conscience
  13. Notes
  14. Bibliographie
  15. Remerciements
  16. Crédits des illustrations
  17. Du même auteur chez Odile Jacob
  18. Table