
- 216 pages
- French
- ePUB (adapté aux mobiles)
- Disponible sur iOS et Android
eBook - ePub
À propos de ce livre
Septembre 1793. La Terreur gronde dans Paris. Un médecin éclairé, Philippe Pinel, arrive à Bicêtre, le plus grand asile de France. Dans l'ombre des cachots, il découvre la condition des malheureux qui ont perdu la raison : battus et enchaînés, les insensés sont traités par douches froides, purges et saignées. Grâce à lui, les plus fous retrouveront l'air libre. Et Pinel d'inventer le "traitement moral" de l'aliénation, ancêtre des psychothérapies modernes. François Lelord s'est plu à reconstituer ces années décisives. Dans son récit, on trouvera des marquises, des salons, des prisons, des héros, des salauds, des académiciens, des émeutiers, des administrateurs, des aliénés tirant sur leurs chaînes, des amours clandestines à l'ombre de la guillotine, Condorcet, Chaptal, Jefferson... et bien sûr la liberté. François Lelord est psychiatre. Il est l'auteur de plusieurs ouvrages à succès, notamment, avec Christophe André, Comment gérer les personnalités difficiles et L'Estime de soi .
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Informations
I
22 juin 1789
À première vue, rien d’inhabituel. Une belle propriété comme il en existe bien d’autres aux abords du Faubourg Saint-Antoine. Derrière de hauts murs qui arrêtent les regards indiscrets, un parc ombragé parcouru d’un petit ruisseau, des statues de nymphes verdies à l’ombre des arbres, puis au milieu d’une vaste pelouse déjà jaunie par l’été débutant, une belle demeure de pierre blonde dans ce style inspiré de la Grèce antique si à la mode en ce règne du bon roi Louis le Seizième. Sans doute une maison élevée par quelque noble amateur de colonnes doriques en façade, ou par quelque bourgeois aspirant à l’anoblissement.
Devant le perron, toutes ces dames perruquées, fardées n’ont-elles pas l’air noble ? Mais tandis que certaines le sont peut-être un peu trop, fardées et perruquées, d’autres au contraire, pâles, négligées dans leur toilette, semblent à peine sorties de l’intimité de leur chambre, alors que l’après-midi est bien avancé. Pourquoi certaines parlent-elles si fort ? Pourquoi d’autres à l’inverse semblent frappées de mutisme, le regard dans le vague, la tête agitée d’un lent balancement ? Et celle-ci, qui s’allonge dans l’herbe, au mépris de sa coiffure et de sa robe ! Voici qu’elle retrousse ses jupons, expose ses dessous, et horreur, se livre avec frénésie à des gestes indécents ! Serait-on dans une maison de folles ?
– Revoilà la baronne qui se branle ! dit l’intendant en regardant par la fenêtre.
Le commis aux écritures, un jeune homme aux joues roses, est choqué par ces paroles impures. Il pense qu’on ne doit pas parler comme ça d’une dame, ni d’aucune autre femme d’ailleurs. Mais en même temps il rougit en pensant à sa cousine, avec laquelle il a fait des choses mais, Mon Dieu, ils étaient tous les deux des enfants, ils ne savaient pas que c’était mal.
– Cette dame ne sait pas ce qu’elle fait, dit-il pour défendre la baronne.
– À mon avis, elle sait quand même que ça lui fait du bien, dit l’intendant avec un rire gras.
Contrarié, le jeune commis baisse le nez sur les registres. Il doit tenir à jour les recettes et les dépenses journalières de la maison de santé, car l’intendant, s’il sait compter, écrit comme un cochon au point qu’on ne comprend pas que cet homme puisse occuper une telle fonction. Le maître des lieux, le sieur Belhomme, le garde pourtant à son service depuis des années, et le commis soupçonne que depuis tout ce temps ces deux-là doivent partager bien des secrets honteux. En tout cas, cette maison est prospère, le chiffre des dépenses n’atteint jamais, et de loin, celui des recettes, et le jeune homme sent son amertume redoubler en pensant au salaire de misère qu’on lui octroie, tandis que le sieur Belhomme parade dans de magnifiques costumes brodés.
– Tiens, v’là le docteur, dit l’intendant.
Venant par l’allée qui traverse le parc, un homme encore jeune modestement vêtu de noir, sans perruque, monte vers la maison. Son expression est à la fois paisible et assurée, un peu comme celle d’un prêtre dépourvu d’ambitions mondaines qui se rendrait au chevet d’une âme tourmentée. Philippe Pinel, un des médecins de cette maison de santé pour gens de qualité qui ont besoin de reposer leurs nerfs, mais qui n’a pas perdu son air simple et sa modestie de provincial.
Dès qu’il apparaît, toutes les femmes abandonnent leurs promenades et leurs conversations (même la baronne revient à elle et à la décence, et se retrouve sur ses pieds) et voilà qu’elles convergent vers lui de tous les points du parc. Bientôt, elles l’entourent, telle une grande meute gémissante et implorante, l’empêchant presque d’avancer, le pressant de questions.
– Monsieur Pinel, puis-je sortir aujourd’hui ?
– Monsieur Pinel, mon mari veut vous voir !
– J’ai mal dormi cette nuit !
– Moi, je ne mange plus, je ne mange plus !
– Monsieur Pinel, je fais des rêves effrayants !
– Viendrez-vous me voir ?
– Regardez, regardez, mes doigts ont enflé !
– Et moi, ma gorge !
Et ainsi de suite, approchant leurs visages trop fardés tout près du sien, criant presque, le tirant par la manche, montrant leur gorge laiteuse, dénudant leurs bras blancs. Faut-il que cet homme ait l’âme bien trempée pour ne pas s’enfuir à toutes jambes, ou à l’inverse en attirer une aussitôt dans le parc à l’abri des regards, car deux ou trois sont fort tentantes, il faut l’avouer, comme le sont certaines dames bien nées quand elles abandonnent toute hauteur. Mais non, il s’arrête, les toise d’un regard ferme et leur déclare d’un ton sans réplique :
– Mesdames, je suis votre médecin, et je ne manquerai pas à mon devoir. Je passerai vous visiter, toutes, mais dans le calme. Retournez à vos chambres, je vous le demande.
Elles se taisent, un instant impressionnées par cette mâle assurance. Mais cela ne fait pas effet longtemps. L’une reprend d’une voix de petite fille :
– Mais ma gorge, que pensez-vous de ma gorge ?
– Et mon mari, le verrez-vous ? questionne une autre.
Et le charivari renaît pendant qu’il reprend sa marche, la grande meute du désir féminin l’entourant jusqu’à la maison.
Par la fenêtre du bureau, l’intendant observe la scène avec désapprobation. Que des femmes puissent montrer aussi peu de respect pour un homme, voilà qui montre bien que l’époque marche à l’envers !
– Elles finiront par le dévorer, ces chiennes !
Le jeune commis aux joues roses est choqué à nouveau.
– Mais c’est un si bon médecin, il est normal qu’elles lui soient attachées.
– Bon médecin, peut-être… mais il est trop doux avec ses malades.
– Vraiment ?
– Je crois que quelques bonnes raclées calmeraient ces folles mieux que toutes les médecines.
– Monsieur, mais ce sont nos pensionnaires !
– Je le sais bien, mais ce serait le devoir de leur mari que de les battre plus souvent.
Philippe entre et referme la porte sur un concert de voix féminines. De près, on voit qu’il a dépassé la quarantaine, mais une chevelure encore abondante, un regard franc, une certaine vivacité dans les mouvements, rappellent encore l’étudiant qu’il fut.
– Messieurs, bonjour.
– Monsieur, nous avons cru qu’elles ne vous laisseraient pas arriver jusqu’ici !
– Non, non, mais il est vrai que la chaleur agite un peu ces dames. Bon, voyons, quelles sont les nouvelles ?
L’intendant, devenu aussi suave et poli qu’il était auparavant grossier et moqueur, annonce la nouvelle du jour : le départ de Monsieur de Lucernes, un des pensionnaires les plus prestigieux de la maison. Cela ne se passe pas comme prévu. Il y a des difficultés.
– Quelles difficultés ? s’étonne Philippe. J’ai donné la permission. Il peut partir, il est rétabli.
– Ne délire-t-il pas encore un peu ? Il croit toujours entendre Dieu qui lui parle.
– Oui, mais Dieu ne lui conseille rien d’extravagant, c’est un délire calme. Il sera mieux dans sa campagne…
Depuis que Dieu lui parle, le vieux comte se promène dans la campagne en priant à tue-tête, alors que jusqu’alors il ne pensait qu’à la chasse et aux cultures. Après deux mois de repos et de conversations avec Philippe, sa ferveur religieuse a pris un tour plus calme, il consent à prier en silence, surtout quand il y a du monde autour de lui.
– … on ne peut pas garder les gens simplement parce qu’ils choquent leur famille, conclut Philippe.
– En tout cas, ce n’est pas l’avis de ses neveux, vous allez les entendre ! déclare l’intendant avec une jubilation à peine dissimulée.
Philippe a remarqué que l’intendant aime le voir en difficulté.
– Regardez, dit le commis, le départ se prépare.
Devant le perron, vient de s’arrêter un grand carrosse. Deux domestiques s’en approchent en titubant sous le poids d’une énorme malle. Ils commencent à la hisser à l’arrière.
Un vieil homme en perruque, l’air excentrique, apparaît près du carrosse. Il se retourne vers la maison, et apercevant son docteur derrière la fenêtre, il se découvre et fait un grand salut extravagant en se courbant jusqu’au sol. À peine s’est-il redressé que deux jeunes gentilhommes richement vêtus s’approchent de lui, l’entourent et lui parlent avec vivacité. Sans leur répondre, le comte leur tourne le dos avec une moue de dédain. Il monte dans le carrosse et referme la portière sans leur dire un mot.
– Les neveux ? demande Philippe.
– Ce sont eux. Ils sont arrivés hier soir à Paris pour vous voir. Ils veulent que nous gardions leur oncle. Vous devriez aller leur parler.
– Ce n’est pas la peine, ils arrivent.
En effet, les deux hommes font irruption dans le bureau, l’air arrogant de petits coqs en colère.
– Qui est le médecin de cette maison ?
– Messieurs, c’est moi. Que puis-je faire pour votre service ?
– Monsieur, notre oncle a perdu la raison. Il faut qu’il reste à se soigner.
– Nous sommes prêts à vous dédommager de vos bons soins envers lui aussi longtemps qu’il le faudra.
– Messieurs, je suis touché de l’attention que vous portez à la santé de votre oncle. Je l’ai vu hier. Il me semblait qu’il allait mieux. Je lui avais dit qu’il pouvait partir cette semaine.
Les neveux répondent à Philippe que le vieux comte certainement a su lui cacher son état, qu’en réalité leur oncle déraisonne sévèrement, qu’il est fort habile pour feindre d’avoir toute sa tête, et il est impératif qu’il reste gardé dans cette maison.
– Messieurs, allons le voir.
Le comte de Lucernes, assis dans son carrosse, les regarde s’approcher, fronçant ses sourcils touffus de vieillard. Il sent la contrariété venir. Quel malheur que la vieillesse, quand les gens commencent à décider pour vous. Dans un geste machinal de vieux soldat, il met la main à son épée, qui n’est plus à son côté depuis bien des années. Bon, voilà que ce jeune méridional de médecin vient vers lui, mais celui-là, le vieux comte le sent, a toujours été de son côté. En tout cas, personne ne le fera descendre de son carrosse, lui comte de Lucernes et de Foligny, baron des Haumes et d’Hamb...
Table des matières
- Couverture
- Titre
- Copyright
- Chapitre I
- Chapitre II
- Chapitre III
- Chapitre IV
- Chapitre V
- Chapitre VI
- Chapitre VII
- Chapitre VIII
- Chapitre IX
- Chapitre X
- Chapitre XI
- Chapitre XII
- Chapitre XIII
- Chapitre XIV
- Chapitre XV
- Chapitre XVI
- Chapitre XVII
- Chapitre XVIII
- Chapitre XIX
- Chapitre XX
- Chapitre XXI
- Chapitre XXII
- Chapitre XXIII
- Chapitre XXIV
- Chapitre XXV
- Chapitre XXVI
- Chapitre XXVII
- Chapitre XXVIII
- Chapitre XXIX
- Chapitre XXX
- Chapitre XXXI
- Chapitre XXXII
- Chapitre XXXIII
- Chapitre XXXIV
- Chapitre XXXV
- Chapitre XXXVI
- Chapitre XXXVII
- Chapitre XXXVIII
- Chapitre XXXIX
- Chapitre XL
- Chapitre XLI
- Sources
- Table