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La Meilleure Façon de manger
Les désarrois du mangeur moderne
- 288 pages
- French
- ePUB (adapté aux mobiles)
- Disponible sur iOS et Android
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À propos de ce livre
Le mythe de la santé à tout prix ne risque-t-il pas de nous faire perdre nos repères et nos bons réflexes alimentaires ? Ne conduit-il pas à culpabiliser les gros mangeurs et à valoriser les conduites anorexiques ? D'ailleurs, l'augmentation du nombre des obèses n'est-elle pas due en partie à leur trop grande médicalisation ? Psychologues cliniciennes, Michelle Le Barzic et Marianne Pouillon analysent les désarrois du mangeur moderne, souvent perplexe devant la multiplication des recommandations alimentaires. Surtout, elles analysent les dangers que font courir à chacun d'entre nous, gros, mince ou maigre, les dérives de l'hygiénisme contemporain. Depuis près de vingt ans, Michelle Le Barzic et Marianne Pouillon exercent dans le service de Nutrition de l'Hôtel-Dieu à Paris.
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Informations
CHAPITRE III
L’UNE MANGE, L’AUTRE PAS
La critériologie internationale, dans sa froide objectivité, décrit l’anorexie et la boulimie en se référant au comportement alimentaire, sans se soucier de la personne du mangeur, sans rien raconter des anorexiques et des boulimiques. Comment reconnaître nos patients dans ces tableaux désincarnés ? Un retour à la clinique s’impose pour tenter de brosser un tableau vivant susceptible de représenter fidèlement ceux et celles qui sont atteints d’anorexie ou de boulimie. On en souffre dans les deux sexes, à raison d’un homme pour neuf femmes ; une telle prépondérance féminine incite à les évoquer au féminin, d’autant plus que l’essentiel des études implique exclusivement des femmes puisque les hommes ne sont pas en effectif suffisant pour autoriser un traitement statistique des données.
Rarement évoquées l’une sans l’autre, l’anorexie et la boulimie sont, à première vue, radicalement opposées : l’une consiste à manger presque rien, presque jamais, alors que l’autre implique que l’on mange beaucoup, trop, trop vite et n’importe quoi. La crise de boulimie advient souvent lorsque le barrage du jeûne cède, lorsque l’anorexique « craque » ; et la boulimique s’offre volontiers à nos yeux comme l’image inversée d’une « cadette » – son âge moyen est supérieur à celui de l’anorexique – dont elle envie la maîtrise (presque) sans faille et la minceur. Car toutes deux sont obnubilées par la peur de grossir. Le jeûne de l’anorexique s’entrecoupe souvent d’accès boulimiques plus ou moins reconnus qui, quoi qu’elle en dise, assurent sa survie. Une restriction alimentaire sévère s’intercale habituellement entre les épisodes boulimiques, permettant d’éviter des prises de poids trop voyantes.
Toutefois, les points communs ne doivent pas faire sous-estimer les différences. La part des choses n’est pas simple à faire. L’emploi de dénominations telles que Bulimia-nervosa1 ou Boulimiarexa2 illustre bien la difficulté des spécialistes à les isoler l’une de l’autre, autant qu’à déterminer leur primauté respective. Anorexie et boulimie sont-elles deux entités distinctes ? Les manifestations contraires d’un même désordre du comportement alimentaire ? Ou les deux extrêmes d’une unique pathologie nutritionnelle qui se distribuerait sur un continuum ?
Intemporelle anorexie
Étymologiquement, le terme « a-norexie » signifie absence d’appétit ; il ne préjuge pas de la cause, qui peut être somatique ou psychologique. L’anorexie du nourrisson, celle de la première enfance, l’anorexie mentale propre à l’adolescence ou celle du vieillard ne répondent pas strictement à cette définition : elles sont dites « psychogènes », autrement dit d’origine psychologique. Elles résultent d’un refus actif de la nourriture qui implique un déni plus ou moins conscient de la sensation de faim.
L’anorexie mentale est connue en Europe depuis le Moyen Âge. Elle est racontée par les religieux avant d’être appréhendée par le monde médical. À lire les uns et les autres, on s’aperçoit que la conduite anorexique reste immuable en dépit des changements du monde ; une remarquable constance qui s’observe « au travers des époques et des pays3 » et persiste même si le point de vue de ses observateurs change. Historiens, sociologues, endocrinologues, psychanalystes ou nutritionnistes, en donnent chacun une interprétation différente alors qu’ils en font des descriptions étonnamment comparables.
En effectuer la synthèse va nous permettre de brosser un portrait type dont la vraisemblance clinique compensera la construction fictive. Cette solution nous dispense d’utiliser les observations de patientes vivantes, pratique qui pose un problème éthique et qui n’est pas sans danger pour les patientes ainsi exposées aux feux de la rampe. En effet, il n’est pas rare que des rechutes spectaculaires sanctionnent la participation à des émissions de télévision, sous prétexte de témoignage. Comment peut-on guérir quand c’est la maladie qui rend célèbre ? Et comment supporter de replonger dans l’obscurité et la monotonie de l’anonymat ? Découvrir son histoire rendue publique est bouleversant surtout quand on mesure le décalage qui existe entre ce que l’on a vécu, ou cru vivre, dans l’intimité de la relation avec son thérapeute et la version écrite qu’il en donne. Certains ont payé de leur vie l’exploitation médiatique qui avait été faite de leur cas, même avec leur assentiment. Il n’est malheureusement pas nécessaire d’avoir des intentions malveillantes pour être nuisible.
PORTRAIT TYPE DE L’ANOREXIE MENTALE
Nous l’appellerons Roxane.
Roxane a quinze ans. Elle est la deuxième d’une fratrie de trois dont l’aînée est une fille. Le troisième est un garçon. Elle a été une enfant sage, docile, parfaite, « sans histoire » d’après ses parents. Elle seconde sa mère avec dévouement, elle est sa confidente et prend parti pour elle contre son père. C’est une brillante élève de 1re. Ses professeurs l’apprécient, la plupart de ses camarades l’aiment bien. On lui confie volontiers des responsabilités.
Six mois auparavant, à l’instar de ses amies, elle entreprend un régime amaigrissant. Jugeant disgracieuses les rondeurs que leur inflige la puberté, elles espèrent les réduire. La conduite de Roxane est considérée comme anodine et s’installe dans l’indifférence, voire avec l’assentiment parental. Elle ne fait alors qu’attester la conformité de ses idéaux avec sa classe d’âge, l’adolescence, et son milieu social.
Son père est ingénieur-chimiste, sa mère enseignante dans le secondaire. Ils forment un couple sans histoire aux yeux de leurs famille et relations. Tous deux sont cultivés et informés. Responsables, ils sont attentifs à leur santé et à celle de leurs enfants. Ils sont partisans de la prévention et convaincus que la minceur est garante de la santé. Ils considèrent avec indulgence les excès de zèle diététique de leur fille qu’ils interprètent comme une lubie passagère que le temps résorbera.
Les amies de Roxane ont depuis longtemps abandonné leur régime et réintégré les kilos qu’elles estiment superflus. Roxane, elle, persiste dans sa restriction alimentaire et l’intensifie. Son comportement alimentaire se ritualise, proscrivant systématiquement les aliments réputés faire grossir. Elle manifeste une prédilection pour les produits lactés, crèmes, glaces et fromages blancs, riches en protéines. Sa ration quotidienne se réduit progressivement à quelques bouchées par repas.
La nourriture est portée en bouche par minuscules portions qui sont longuement et minutieusement mastiquées. La durée du repas s’allonge d’autant plus que la quantité absorbée décroît. Elle évite la table familiale et prend ses repas seule, à des heures différentes, dans sa chambre ou dans la cuisine. Paradoxalement, elle manifeste un intérêt accru pour tout ce qui touche à la nourriture... des autres. Elle collectionne les recettes, aide à la préparation de la cuisine, confectionne pour ses parents des petits plats dont elle ne mange pas. Il lui arrive parfois de voler de la nourriture.
De plus en plus maigre, Roxane est pourtant obsédée par le sentiment d’être grosse. Elle pourchasse les kilos par tous les moyens : laxatifs et jogging intensif quotidiens. L’amaigrissement s’intensifie dramatiquement, elle est devenue squelettique. Elle n’a plus ses règles. Ses parents s’en inquiètent sérieusement. Ils la pressent de se nourrir mieux et plus. Les repas pris en commun sont l’occasion de discussions sans fin entre elle et eux, éprouvantes surtout pour eux ! Roxane résiste farouchement à leurs supplications, menaces et chantages, leur rétorque obstinément ne pas avoir besoin de manger davantage. Son hyperactivité et son dynamisme surprenants, ses performances scolaires qui restent excellentes lui servent de preuve.
Les parents parviennent enfin à la décider à consulter. Roxane leur cède pour avoir la paix, bien décidée à leur prouver qu’ils ont tort et qu’elle n’est pas malade. Ils sont bouleversés lorsqu’on leur propose d’hospitaliser leur fille en psychiatrie, choqués qu’on puisse songer à leur interdire de lui rendre visite. Ils perçoivent cette mesure comme une contestation implicite de leurs qualités de bons parents. Roxane n’a aucune difficulté à les convaincre de la « nullité » de ce médecin-là.
Cette première incursion dans le circuit thérapeutique déclenche une noria de premières consultations sans suite. La conduite anorexique ne cède en rien, mais la belle énergie commence à vaciller. Les résultats scolaires déclinent, l’hyperactivité s’essouffle et la moindre contrariété provoque des crises de larmes injustifiées. La maigreur insistante trahit la pathologie et finit par avoir raison du déni le plus chevillé au corps. Les parents de Roxane sont de plus en plus inquiets. La concordance des avis thérapeutiques finit par emporter leur conviction. Ils adoptent alors le parti du médecin au lieu de celui de leur fille. La phase thérapeutique peut enfin commencer.
Obsession de la minceur, anorexie, amaigrissement, aménorrhée, déni de la gravité de son état, Roxane remplit parfaitement tous les critères de l’anorexie mentale du DSM-IV. Le choix des stratégies de prise en charge – psychiatrique ou nutritionnelle, hospitalisation ou cure ambulatoire, psychothérapie individuelle ou familiale, thérapie comportementale individuelle ou de groupe –, va dépendre autant des orientations du spécialiste consulté que des particularités de la patiente. Dans tous les cas, la conduite du traitement requiert du temps, de la patience et de la prudence.
Notre Roxane a une chance sur deux d’être tout à fait guérie de son anorexie dans dix ans. Pour ce faire, il faut qu’elle rencontre un médecin qui sache se faire accepter d’elle, choisir le traitement qui lui convient et l’appliquer en évitant les pièges et en obtenant la coopération de ses parents. Sinon, elle court le risque de mourir quatre fois sur cent4 des complications somatiques liées à la malnutrition, ou par s...
Table des matières
- Couverture
- Titre
- Copyright
- Dédicace
- PRÉFACE
- INTRODUCTION
- Chapitre premier - MANGER, JEÛNER, SENS OU NON-SENS ?
- Chapitre II - LE TROUBLE DE MANGER, MODE OU FLÉAU DU TROISIÈME MILLÉNAIRE ?
- Chapitre III - L’UNE MANGE, L’AUTRE PAS
- Chapitre IV - NOURRISSAGE SCIENTIFIQUE APPLIQUÉ AUX PETITS
- Chapitre V - PSYCHISME ET IDENTITÉ DU MANGEUR MODERNE
- Chapitre VI - L’ORDRE NUTRITIONNEL
- Chapitre VII - LES AMBIGUÏTÉS DE LA NUTRITION
- CONCLUSION
- REMERCIEMENTS
- RÉFÉRENCES BIBLIOGRAPHIQUES
- Table