
- 320 pages
- French
- ePUB (adapté aux mobiles)
- Disponible sur iOS et Android
eBook - ePub
À la conquête du marché américain
À propos de ce livre
Après deux siècles d'échecs, plus ou moins retentissants, la France serait-elle sur le point de relever le défi américain ? Comment expliquer qu'en moins de dix ans, une quinzaine de grands groupes français soient parvenus à s'implanter solidement en Amérique ? Et pourquoi ont-ils fait, le plus souvent, le choix de la croisance externe et décidé de s'implanter en achetant une entreprise américaine ? Analysant l'aventure américaine de Rhône Poulenc, Accor, Péchiney, Thomson Multimedia, mais aussi Axa, Ugine, Saint-Gobain et Schneider, Guillaume Franck montre combien ces exemples d'implantation par acquisitions sont riches d'enseignements pour l'ensemble des pratiques du management français. Destiné aux spécialistes du monde de l'entreprise, aux étudiants des écoles de commerce et à tous ceux que l'avenir de la France dans le monde préoccupe, À la conquête du marché américain est conçu comme une suite d'études de cas, riches d'anecdotes et de recommandations concrètes visant à permettre aux entrepreneurs français de demain de réussir leur aventure américaine. Et si, finalement, l'apprentissage du management des acquisitions américaines permettait, en fait, l'émergence d'un nouveau management à la française ? Après avoir enseigné en France et aux États-Unis, Guillaume Franck est aujourd'hui professeur à HEC et consultant auprès de nombreux groupes français et américains.
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Informations
1
Un projet mobilisateur comme coup d’envoi
L’internationalisation de Rhône-Poulenc Agrochimie
Au printemps 1986, Rhône-Poulenc Agrochimie, dont le siège est à Lyon, est l’un des cinq grands secteurs du groupe Rhône-Poulenc. Avec 4 200 personnes dans le monde, dont 300 aux États-Unis, et un chiffre d’affaires de 6 milliards de francs (13 % de celui du groupe), RPA se situe au soixante-dix-huitième rang des entreprises françaises. Dans son secteur, il occupe la sixième place mondiale et fait 78 % de son chiffre d’affaires grâce à l’exportation.
Depuis deux décennies, le marché mondial de l’agrochimie a connu des transformations importantes. La productivité agricole des pays développés a considérablement augmenté grâce, notamment, aux produits phytosanitaires de l’agrochimie – insecticides, herbicides et fongicides. Les investissements lourds en Recherche & Développement (R&D) ont permis la multiplication des principes actifs, auxquels il faut ajouter les découvertes en génie génétique et les nouvelles semences hybrides. La tendance mondiale sur le marché de l’agrochimie est à la concentration : il faut une stratégie mondiale pour survivre et de très importants efforts de recherche. Les leaders sont le suisse Ciba Geigy et les allemands Hoechst et Bayer, fortement implantés sur le marché américain, suivis par Dupont de Nemours, ICI, Dow Chemicals et Monsanto.
Une convention révolutionnaire
Le 21 mai 1986, Philippe Desmarescaux, président de RPA – devenu, depuis, directeur général du groupe Rhône-Poulenc –, s’adresse aux cent premiers responsables de l’entreprise réunis pour tenir leur première convention internationale de management. « Nous pouvons être fiers de ce que nous avons réalisé depuis dix ans, explique-t-il. D’ici à l’an 2000, nous serons dans les dix premières entreprises mondiales d’agrochimie. Notre objectif, à partir de l’an 2000, doit être de contrôler la production végétale. Pour y arriver, nous avons encore beaucoup de choses à comprendre ; il nous faut aussi poursuivre notre politique de développement et d’intégration. Et cela doit être l’effort de tous. » Quelques minutes plus tard, Desmarescaux annonce aux responsables de RPA venus des cinq continents qu’une présence massive aux États-Unis est indispensable. En 1985, elle a été trop faible alors que le marché américain est le plus important du monde. Cette convention des cadres marque le lancement de l’internationalisation de RPA et prépare son aventure américaine et sa globalisation.
Comme la plupart des grands groupes français dans la seconde moitié des années 1980, RPA a une activité internationale importante, mais ne dispose pas, pour autant, d’un management international. L’entreprise est une mosaïque de structures, produit de l’évolution du groupe Rhône-Poulenc et de l’histoire de ses relations techniques, commerciales et humaines sur les cinq continents. La culture de ce qu’on appelle alors en France la « grande exportation » reste ethnocentrique, fortement marquée par la nationalité française de la maison mère. RPA n’y échappe pas : beaucoup de décisions sont centralisées au siège, la majorité des responsables de pays proches ou lointains sont des Français et l’activité est plus multilocale que véritablement transnationale.
Les dirigeants du groupe, et tout particulièrement ceux du secteur agrochimie, ont compris que la globalisation de l’activité exigeait celle du management : une gestion pays par pays ou même régionale ne peut permettre de faire jouer les synergies de recherche et de développement, d’industrialisation, de production et de marketing. Mais, chez les managers de niveau opérationnel, cette prise de conscience exige, pour pouvoir se faire, un événement cristallisateur. L’absence de culture commune à travers les différentes unités constitue une faiblesse par rapport aux grands concurrents européens et nord-américains, dit encore Desmarescaux lors de la convention. « J’attends beaucoup de vous, affirme-t-il, et je souhaite que vous contribuiez activement à la définition de ce nouveau management et à l’émergence d’une équipe internationale, motivée et gagnante. »
À la demande de l’entreprise, un état des lieux a été effectué pour préparer cette convention. Nous avons conduit un audit de management dans plusieurs unités de RPA en France et à l’étranger. Ces entretiens ont fait ressortir plusieurs problèmes de management communs à un grand nombre de groupes internationaux français dans les années 1980. Citons, en particulier :
- la nécessité d’une approche internationale plus structurée et mieux intégrée pour l’élaboration des plans stratégiques ;
- le besoin de passer du simple contrôle budgétaire, utilisé par les entreprises françaises de l’époque, à un contrôle de gestion permettant de relier le plan stratégique aux plans opérationnels et aux budgets ;
- le manque de managers compétents à l’échelle internationale et la faible plurinationalité au sein de l’entreprise. Les besoins des unités situées en Europe et Outre-mer sont généralement satisfaits par l’envoi de Français qui ont fait de bonnes études supérieures, mais ont une faible expérience de l’international. Ils sont expatriés sans grande préparation : s’ils ont manifesté des compétences en France à un poste spécialisé (vente, marketing, etc.), on se dit qu’ils sauront bien se débrouiller à l’étranger ;
- la trop forte identité franco-française du siège de RPA, qu’il faut atténuer tout en diminuant les tendances centrifuges des entités « décentralisées ». Les plus importantes de ces unités appartiennent aux structures étrangères du groupe (Brésil, Royaume-Uni, etc.) où les dirigeants locaux disposent d’une grande autonomie pour contrôler l’activité agrochimique et les autres activités de Rhône-Poulenc (santé, chimie, etc.).
Pour répondre à de tels enjeux et réaliser pareil changement organisationnel, il est nécessaire de mettre en place de nouveaux outils de management et de nouveaux comportements intellectuels et relationnels. Un patron même charismatique et extrêmement volontariste, soutenu par une équipe de direction motivée, ne peut suffire : il faut associer activement les managers opérationnels et créer les conditions permettant la prise de conscience d’un nécessaire changement global et individuel. C’est le rôle que joue la convention des cadres du Rouret, dont nous avons analysé les modalités précises en annexe. Quelques mois après, on apprend l’acquisition par Rhône-Poulenc de la division Agrochimie d’Union Carbide. Annoncé par Desmarescaux au Rouret, le projet d’implantation aux États-Unis se réalise. Il est, certes, difficile de préciser l’impact de la réunion du Rouret sur la capacité de RPA d’affronter cette opération d’acquisition-fusion. Néanmoins, tous les cadres interrogés ont souligné à quel point cette convention avait introduit une rupture nette avec la culture et les pratiques du passé. En somme, c’était une bonne préparation au processus de fusion avec Union Carbide1.
L’acquisition d’une entreprise orpheline
La catastrophe de Bhopal, en Inde, est dans toutes les mémoires : une fuite, un produit hautement toxique, des milliers de victimes. Fortement ébranlée par ce choc, la puissante entreprise américaine Union Carbide ne souhaite plus conserver d’activité dans le secteur de l’agrochimie. Avec un chiffre d’affaires mondial légèrement inférieur au tiers de celui de Rhône-Poulenc, Union Carbide Agricultural Products Company (UCAPCO) est bien implantée sur le continent américain et en Extrême-Orient. Sans être très importante, sa présence en Europe n’est pas négligeable. En France, l’usine de Béziers fabrique certaines matières actives, en particulier le Temik, un des produits phares du groupe, utilisé par les agriculteurs mais aussi par les jardiniers du dimanche à la recherche d’un désherbant efficace.
Quelques semaines après la convention des managers du Rouret, RPA reçoit d’Union Carbide un mémorandum décrivant son activité agrochimique. D’autres entreprises sont également contactées par le vendeur. Les candidats à la reprise doivent d’abord faire une première offre non définitive et Rhône-Poulenc figure parmi les propositions retenues. Son comité de direction souhaite vivement conclure l’affaire en raison de synergies potentielles évidentes en terme de produits, de marchés et de technologies. De son côté, Union Carbide a une image favorable de son confrère français en lequel elle voit un bon repreneur. Les préjugés favorables et la volonté mutuelle d’aboutir permettent à la phase de négociation de se dérouler sans que Union Carbide demande le concours d’un prestataire financier extérieur. Cela est suffisamment rare pour être souligné. Plusieurs semaines de discussions plus tard, l’accord est conclu pour 575 millions de dollars. L’acquisition d’UCAPCO doit être effective à compter du 1er janvier 1987. Rhône-Poulenc se rapproche du peloton de tête mondial, passant en troisième position après Ciba Geigy et Bayer.
L’intégration d’Union Carbide
Le processus de négociations entre Rhône-Poulenc et Union Carbide a été simple, rapide, et efficace. Les deux concurrents se connaissent et se respectent, les synergies sont connues, les tailles compatibles et l’expérience internationale partagée. La complémentarité géographique permet de tripler la part de marché de RPA aux États-Unis ; elle la double au Canada et au Brésil, l’augmente d’un tiers en Europe, la multiplie par sept en Turquie et la renforce en Asie, notamment dans les pays à démographie élevée, comme l’Indonésie et les Philippines, où l’entreprise française est peu implantée. La complémentarité des produits permet d’associer la force du Français dans le domaine des fongicides et des herbicides et celle de l’Américain dans les insecticides et les régulateurs de croissance. Ces quatre grandes lignes de produits sont soutenues par trois centres de recherche de haut niveau à Lyon, à Ongar au Royaume-Uni et à Research Triangle Park en Caroline du Nord.
Rhône-Poulenc a accepté de payer plus d’un demi-milliard de dollars pour gagner la partie, mais les relations personnelles instaurées au cours des négociations ont également joué positivement sur la décision du groupe Union Carbide de vendre au Français son activité agrochimique. Lors du processus de négociations (appelé due diligence aux États-Unis, ou vérification d’usage), il est évidemment question des aspects financiers et légaux mais, très vite, et avant même la signature, les principales dimensions du management sont abordées, ainsi que l’aspect culturel et humain de la fusion. On commence à poser les fondements d’une nouvelle organisation mondiale ainsi que les bases contractuelles et psychologiques d’un management qui se veut rapidement intégré. De part et d’autre, on souhaite une négociation gagnante, car on sait qu’elle est indispensable au succès ultérieur.
Dans cette négociation, un des éléments essentiels à la réussite tient à l’implication de différents experts dès les premières discussions. Leur présence constitue une gageure, dans la mesure où il faut absolument maintenir secret l’ensemble du processus. Au-delà des précautions habituelles contre un éventuel délit d’initiés, cette opacité est voulue pour éviter la propagation de rumeurs. En effet, le personnel d’Union Carbide vit dans une expectative anxieuse depuis la catastrophe de Bhopal, et il est préférable de ne pas l’inquiéter prématurément. D’autre part, les deux entreprises américaine et française, qui ont une position dominante dans leur pays d’origine, sont plus fragiles dans les nombreux pays où elles possèdent des filiales : mieux vaut, donc, que le personnel ne puisse s’alarmer.
Ceci ne veut pas dire que certaines réunions ne sont pas très « sportives ». Dès le début, les Américains trouvent que les Français mettent la charrue avant les bœufs, en parlant de R&D, de processus industriels, de technologie et de parts de marché, le tout avec de grandes idées bien générales à la française. De son côté, l’équipe française s’impatiente devant ce qu’elle appelle le « pinaillage » juridique des Américains et leur obsession du budget. Mais, quoi qu’il en soit, il y a, de part et d’autre, une réelle volonté d’aboutir.
Les conditions d’une acquisition réussie
Les rapprochements d’entreprises peuvent servir de puissants catalyseurs et promouvoir une réflexion sur les modes les plus efficaces de management. En effet, ce type d’opérations suscitent toujours de profondes remises en cause en raison des confrontations qu’elles entraînent. Un rapprochement de grande ampleur est l’occasion pour l’acquéreur de réviser son propre fonctionnement. Pour peu qu’il reconnaisse les compétences existantes dans l’entreprise acquise, c’est aussi l’occasion de modifier sa propre organisation et de changer les détenteurs de certains postes clefs, moins compétents que les nouveaux arrivants. En outre, les enjeux liés aux attentes des diverses parties en présence vont très au-delà des intérêts des actionnaires, des économies d’échelle, de l’optimisation des réseaux de distribution, du contrôle des sources d’approvisionnement et des besoins de pouvoir des dirigeants.
Une ingénierie réussie du processus de rapprochement repose sur un ensemble de techniques et de méthodes visant l’intégration des structures, des systèmes de management et des hommes. Cette intégration peut se faire à différents degrés, depuis la simple insertion dans une holding financière ou industrielle qui en assure un suivi plus ou moins proche, jusqu’à une fusion complète de l’outil de production, des réseaux de distribution, et des circuits administratifs. Plus on achète de « compétences » – de capacités à faire fonctionner les actifs acquis de façon efficace et rentable –, et plus il faut tenir compte des individus. Dans le cas de rapprochements entre firmes multiproduits et multipays, exigeant une intégration forte, comme dans le cas de RPA, une démarche participative est nécessaire. Mais il faut que la formation de groupes de travail mixtes soit permise par l’évolution de la nature de la relation, de préférence avant la signature de l’accord ou, sinon, tout de suite après. Il est certain que la nature « amicale » du rapprochement facilite le développement d’un projet commun, mais même les OPA hostiles peuvent se prolonger par une volonté de reconstruction commune.
Pour plus de clarté, nous avons choisi de rassembler dans un encadré les conditions nécessaires à la réussite d’une acquisition américaine, lesquelles sont présentées de façon plus détaillée en conclusion.
Les grandes étapes d’une acquisition aux États-Unis
- Conditions préliminaires : analyse stratégique approfondie ; i...
Table des matières
- Couverture
- Titre
- Copyright
- Dédicace
- Avant-propos
- 1 - Un projet mobilisateur comme coup d’envoi - L’internationalisation de Rhône-Poulenc Agrochimie
- 2 - Accor et Motel 6 - Le succès d’un antimodèle
- 3 - Thomson Multimédia et RCA-General Electric - Le syndrome français de la fuite en avant technologique
- 4 - Péchiney et ANC - Un délit de non-initié
- 5 - AXA et Equitable Life - L’Amérique à l’épreuve du Ténéré
- 6 - Ugine et J&L Specialty Steel - Une forme originale d’apprentissage
- 7 - Saint-Gobain et Norton - Une vraie multinationale française
- 8 - Schneider Electric et Square D - Des logiques contrastées
- 9 - Rhône-Poulenc aux États-Unis - Une géométrie variable
- Amérique, mode d’emploi ?
- Annexe
- Bibliographie
- Remerciements
- Table