Prima donna
eBook - ePub

Prima donna

Opéra et inconscient

  1. 336 pages
  2. French
  3. ePUB (adapté aux mobiles)
  4. Disponible sur iOS et Android
eBook - ePub

Prima donna

Opéra et inconscient

À propos de ce livre

Je chante, je meurs. Je meurs en chantant. Je chante Ă  en mourir. VoilĂ  tout l'opĂ©ra. Il est nĂ© il y a quatre siĂšcles, Ă  cet instant de l'Orfeo de Monteverdi (1607) oĂč se prononce cette phrase : É morta ! Son histoire est celle d'un deuil impossible. Faire revenir la Prima Donna, retrouver la voix perdue, franchir le LĂ©thĂ© sĂ©parant le langage de la musique. Chaque opĂ©ra illustre ce mythe et ce chagrin. Tout comme le jeu d'OrphĂ©e arrache la morte aimĂ©e Ă  la captivitĂ© des Enfers, l'opĂ©ra, en Ă©levant son chant des mots et des morts, transporte ses personnages au-delĂ  de leur destin. Fatale maladie, il s'adresse au plus obscur, au plus tendre, au plus sinistre de nous-mĂȘmes. Il Ă©veille l'enfant mĂ©chant, excite le despote terrorisĂ©, Ă©meut le dĂ©laissĂ© anĂ©anti. Il chante la douleur de dĂ©sirer.  Michel Schneider a Ă©crit sur la musique : Glenn Gould, piano solo, La TombĂ©e du jour, Schumann, Musiques de nuit et sur la psychanalyse : Blessures de mĂ©moire, Voleurs de mots. Il a Ă©tĂ© de 1988 Ă  1991 directeur de la musique au ministĂšre de la Culture et a publiĂ© La ComĂ©die de la culture.

Foire aux questions

Oui, vous pouvez résilier à tout moment à partir de l'onglet Abonnement dans les paramÚtres de votre compte sur le site Web de Perlego. Votre abonnement restera actif jusqu'à la fin de votre période de facturation actuelle. Découvrez comment résilier votre abonnement.
Pour le moment, tous nos livres en format ePub adaptĂ©s aux mobiles peuvent ĂȘtre tĂ©lĂ©chargĂ©s via l'application. La plupart de nos PDF sont Ă©galement disponibles en tĂ©lĂ©chargement et les autres seront tĂ©lĂ©chargeables trĂšs prochainement. DĂ©couvrez-en plus ici.
Perlego propose deux forfaits: Essentiel et Intégral
  • Essentiel est idĂ©al pour les apprenants et professionnels qui aiment explorer un large Ă©ventail de sujets. AccĂ©dez Ă  la BibliothĂšque Essentielle avec plus de 800 000 titres fiables et best-sellers en business, dĂ©veloppement personnel et sciences humaines. Comprend un temps de lecture illimitĂ© et une voix standard pour la fonction Écouter.
  • IntĂ©gral: Parfait pour les apprenants avancĂ©s et les chercheurs qui ont besoin d’un accĂšs complet et sans restriction. DĂ©bloquez plus de 1,4 million de livres dans des centaines de sujets, y compris des titres acadĂ©miques et spĂ©cialisĂ©s. Le forfait IntĂ©gral inclut Ă©galement des fonctionnalitĂ©s avancĂ©es comme la fonctionnalitĂ© Écouter Premium et Research Assistant.
Les deux forfaits sont disponibles avec des cycles de facturation mensuelle, de 4 mois ou annuelle.
Nous sommes un service d'abonnement Ă  des ouvrages universitaires en ligne, oĂč vous pouvez accĂ©der Ă  toute une bibliothĂšque pour un prix infĂ©rieur Ă  celui d'un seul livre par mois. Avec plus d'un million de livres sur plus de 1 000 sujets, nous avons ce qu'il vous faut ! DĂ©couvrez-en plus ici.
Recherchez le symbole Écouter sur votre prochain livre pour voir si vous pouvez l'Ă©couter. L'outil Écouter lit le texte Ă  haute voix pour vous, en surlignant le passage qui est en cours de lecture. Vous pouvez le mettre sur pause, l'accĂ©lĂ©rer ou le ralentir. DĂ©couvrez-en plus ici.
Oui ! Vous pouvez utiliser l’application Perlego sur appareils iOS et Android pour lire Ă  tout moment, n’importe oĂč — mĂȘme hors ligne. Parfait pour les trajets ou quand vous ĂȘtes en dĂ©placement.
Veuillez noter que nous ne pouvons pas prendre en charge les appareils fonctionnant sous iOS 13 ou Android 7 ou versions antĂ©rieures. En savoir plus sur l’utilisation de l’application.
Oui, vous pouvez accéder à Prima donna par Michel Schneider en format PDF et/ou ePUB ainsi qu'à d'autres livres populaires dans Social Sciences et Social Science Biographies. Nous disposons de plus d'un million d'ouvrages à découvrir dans notre catalogue.

Informations

Éditeur
Odile Jacob
Année
2001
Imprimer l'ISBN
9782738109415

JOUIR



XII

Sombrer inconsciente, jouissance extrĂȘme :
Tristan et Isolde de Richard Wagner


Pour commencer, deux citations en forme de jeu. Qui a Ă©crit : « Toute inclination amoureuse, pour Ă©thĂ©rĂ©es que soient ses allures, prend racine uniquement dans l’instinct sexuel » ? Qui affirma que l’« on devrait envisager la possibilitĂ© que quelque chose dans la nature mĂȘme de la pulsion sexuelle ne soit pas favorable Ă  la rĂ©alisation de la pleine satisfaction » ? On aurait tendance Ă  attribuer Ă  Freud et Ă  son « pansexualisme » la premiĂšre phrase et au pessimisme tragique de Schopenhauer la seconde. Or, c’est l’inverse1. Laissons aux philosophes le soin de dĂ©mĂȘler les influences, et considĂ©rons plutĂŽt Ă  quel point Wagner, qui se trouve en quelque sorte Ă©quidistant, sut faire, dans Tristan und Isolde une sorte de synthĂšse de ces deux conceptions.
À la fin, le rideau tombe sur le mot « jouissance » (höchste Lust). Un livret qui s’achĂšve sur le dĂ©sir comme dĂ©sir de sombrer, de se noyer, inconsciente, dit Isolde, un chant de mort qu’éclaire le devenir-chose (dans la jouissance, le sujet disparaĂźt), ne sauraient laisser sourd le psychanalyste. PrĂšs de cinquante ans avant les Trois Essais sur la thĂ©orie sexuelle, le musicien devance le thĂ©oricien. Wagner prĂ©dit Freud. Que disent-ils ? La jouissance n’est pas le plaisir. Elle est sous-tendue par une identification Ă  l’autre et implique une transgression de la loi. Elle veut la rĂ©pĂ©tition et cĂŽtoie la pulsion de mort.
Tristan und Isolde est l’opĂ©ra de la jouissance, comme Parsifal est celui du dĂ©sir. Ce rien que Schopenhauer plaçait au terme du vouloir se dĂ©gage au long des trois actes, au-delĂ  de ce que le dĂ©sir ne possĂšde jamais (l’objet), de ce que le plaisir n’atteint pas (la cause), de ce Ă  quoi le sujet se soumet et qui le fait disparaĂźtre (la chose). De cette expĂ©rience qui n’a en fait pas de nom, de forme ni de lieu, le philtre est le symbole. Il rend visible un contenant, un contenu et un acte. Le contenant dĂ©signe l’ñme qui dĂ©sire. Le contenu reprĂ©sente l’amour. L’acte de boire est la jouissance sexuelle.

L’ñme qui dĂ©sire

Le dĂ©sir est infini. Cette idĂ©e, qui n’a rien de spĂ©cialement romantique, s’inscrit dans l’histoire de la philosophie et fait de Tristan cet « opus metaphysicum de tout art2 » que Nietzsche aimait si fort, qu’aprĂšs avoir jugĂ© « hilarant » le livret3, il avouait : « Aujourd’hui encore, je cherche vainement dans tous les arts une Ɠuvre qui Ă©gale Tristan par sa fascination dangereuse, par son Ă©pouvantable et douce infinitĂ©4. » InfinitĂ©. Le mot est partout sur les lĂšvres des amants : « Toujours, sans fin » (« Ewig einig/ohne End »), « Éternellement un »  La mort, la fin de la vie n’est qu’un moyen pour atteindre le sans-fin du dĂ©sir.
Comme la blessure de Tristan, comme celle d’Amfortas, le philtre est dĂ©sespĂ©rĂ©ment inĂ©puisable : il se vide Ă  mesure qu’il s’emplit. Il est une coupe fĂȘlĂ©e. On trouve Ă  plusieurs reprises chez Platon l’image du tonneau (ou de la jarre) percĂ©, pour reprĂ©senter l’ñme qui dĂ©sire. Dans le Gorgias5, c’est pour montrer Ă  CalliclĂšs l’horreur du dĂ©sir inassouvi et le contentement d’une vie rĂ©glĂ©e et satisfaite de ce que chaque jour lui apporte, que Socrate utilise l’image de la jarre trouĂ©e pour dĂ©signer cette partie de l’ñme dĂ©rĂ©glĂ©e et incapable de rien garder Ă  cause de sa nature insatiable. CalliclĂšs avait en effet prĂ©sentĂ© une conception violente, presque mortelle, du dĂ©sir : « Pour bien vivre, il faut laisser prendre Ă  ses passions tout l’accroissement possible, au lieu de les rĂ©primer, et, quand elles ont atteint toute leur force, ĂȘtre capable de leur donner satisfaction par son courage et son intelligence et de remplir tous ses dĂ©sirs Ă  mesure qu’ils Ă©closent6. » Position que Socrate rĂ©sume avec force : « Si l’on veut ĂȘtre tel qu’on doit ĂȘtre, il faut laisser grandir ses dĂ©sirs autant que possible et leur mĂ©nager par tous les moyens la satisfaction qu’ils demandent. » La vertu n’est pas la contention du dĂ©sir, mais son dĂ©chaĂźnement. Lacan ne dira pas autre chose : la seule Ă©thique est de ne pas cĂ©der sur son dĂ©sir. Mais qu’on tente de le modĂ©rer ou qu’on lui laisse carriĂšre, le dĂ©sir revient toujours. Tristan et Isolde veulent se dĂ©faire de leur propre dĂ©sir, par l’amour, la jouissance, la mort. L’accord fondamental de Tristan contient un motif dit « du dĂ©sir », qui se trouve presque fendu en deux lignes de sens inverse, comme pour marquer la souffrance, la division, l’insatisfaction.

La substance d’amour

La vieille image du philtre comme contenu d’amour remonte Ă  ThĂ©ocrite, Ă  Tibulle, au Cycle breton. Cet amour est sang. Le philtre de Tristan, comme le Graal de Parsifal contiennent ce qui ne peut ĂȘtre contenu : un mal qui sĂ©crĂšte son propre remĂšde, un remĂšde qui cause le mal. Mais lĂ  s’arrĂȘte la comparaison. Presque tous leurs traits opposent le philtre et le Graal.
Philtre
Graal
Vase fĂȘlĂ©
Coupe pleine
Cause de l’amour
Chose de désir
Amour hétérosexuel
Désir homosexuel
Substance mauvaise
Substance bonne
Mauvais qui devient bon
Bon qui devient mauvais
Mort qui apporte la vie
Vie qui apporte la mort
Pas de Rédemption
Arrivée du Rédempteur
Tragique
Religieux
Absence du pĂšre
Présence du pÚre
Que contient le philtre ? Sotte question, rĂ©pondait le chanteur Jess Thomas, qui souvent incarna Tristan et Parsifal. La composition chimique de la boisson qu’il verse n’a aucune espĂšce d’importance : il sert seulement Ă  dĂ©verrouiller l’inconscient pour que le dĂ©sir puisse se manifester. Mais quel dĂ©sir ? De mort, comme le croient Tristan et Isolde ? Ou d’amour, comme ils le savent en leur inconscient ? LĂ  encore, peu importe. S’ouvrir Ă  l’amour, c’est s’ouvrir Ă  la mort. Rencontrer un autre et lui dire : « Avant toi, je ne vivais pas, tu m’as donnĂ© la vie. » C’est en ces termes que Cosima von Bulow parle de sa rencontre avec Wagner7 et que celui-ci Ă©voque sa liaison avec Mathilde Wesendonck8. Aimer quelqu’un, c’est en fait lui dire : « Sans ton amour, je mourrai. » C’est lui donner la place de la mĂšre, selon ses deux versants, celle qui donne la vie, mais a aussi le pouvoir de la retirer par son manque de soins et d’amour. C’est d’ailleurs la mĂšre d’Isolde qui lui a confiĂ© les philtres jumeaux de la mort et de l’amour : « Pour les douleurs et les blessures, elle m’a donnĂ© le baume ; pour les poisons pernicieux le contrepoison. Pour la douleur la plus profonde, pour la souffrance la plus intense — elle m’a donnĂ© le philtre de mort9. » Le flanc percĂ© de Tristan coule donc, comme la blessure d’Amfortas, jusqu’à la mort. Et ce qui coule, c’est l’amour, c’est-Ă -dire l’autre en soi, baume apaisant autant que poison dĂ©vastateur. GuĂ©rir est Ă  la fois espĂ©rĂ© et redoutĂ©. Tristan meurt non rĂ©conciliĂ©, au moment mĂȘme oĂč le Roi Marke arrive, le pardon aux lĂšvres, oĂč Isolde le rejoint, l’amour au cƓur.
Dans le livret de Tristan, Wagner utilise nombre d’inversions de mots ou de syllabes. Tristan n’est autre que le Tantris qui a pris Ă  Isolde son promis. Isolde meurt en faisant une sorte de jeu de mots : « Languir et en mourir, mais non mourir de languir10. » Tristan n’est pas en reste : « La maĂźtresse du silence m’enjoint de me taire : si je saisis ce qu’elle tut, je tais ce qu’elle ne saisit11. » Pourquoi ces formules ? Coquetteries archaĂŻsantes d’une langue que Wagner invente en mĂȘme temps que ses livrets ? Pas seulement. Ces mots en miroir forment une sorte de mĂ©taphore du dĂ©sir comme dĂ©sir de l’autre : je dĂ©sire ĂȘtre ce que tu dĂ©sires que je sois. Mais aussi, plus secrĂštement, un aveu de la composante narcissique de tout amour, l’autre Ă©tant le miroir qui me rend Ă  moi-mĂȘme par l’illusion que rien dĂ©sormais ne me manque.
Tristan n’aime pas Isolde, ni Isolde Tristan. Il s’aime en elle, elle s’aime en lui ; et chacun aime l’amour plus qu’il n’aime l’autre. Tout l’effort des amants se rĂ©sume Ă  parvenir Ă  supprimer la conjonction de coordination « et »12, puis Ă  supprimer encore les noms qui les diffĂ©rencient : « Éternellement unis, sans fin, sans rĂ©veil, sans angoisse, n’ayant plus de nom, Ă©treints dans l’amour13. »

L’extrĂȘme de la jouissance

Le philtre est le point autour duquel le tragique se noue et les destins basculent. Son sens n’est pas, comme dans la lĂ©gende celtique mĂ©diĂ©vale, celui d’un objet de magie, d’un poison secret, d’une substance mystĂ©rieuse. C’est le symbole d’une rĂ©alitĂ© psychique : philtre de mort et philtre d’amour ne s’opposent pas et si l’on peut prendre l’un pour l’autre c’est tout simplement parce que c’est le mĂȘme. Boire l’amour aux lĂšvres de l’autre, c’est boire la mort. Il y a en fait une sorte de croisement entre les reprĂ©sentations que le philtre suggĂšre. La reprĂ©sentation consciente : vouloir mourir avec l’autre, sert de masque Ă  la reprĂ©sentation inconsciente interdite et refoulĂ©e : vouloir jouir de l’autre. Et l’inverse n’est pas moins vrai. Mais en fait, les deux reprĂ©sentations, refoulante et refoulĂ©e, sont inverses : les amants veulent se faire du bien, se donner du plaisir l’un Ă  l’autre et l’un par l’autre, sans trop savoir qu’ainsi, ils abandonnent Ă  l’autre une part de leur ĂȘtre et mĂȘme de leur ĂȘtre vivant, ou, Ă  tout le moins, qu’ils confĂšrent Ă  l’autre la possibilitĂ© de les laisser dans l’abandon ou de les faire mourir.
Alors, pourquoi faut-il reprĂ©senter cette rĂ©alitĂ© psychique du tragique de l’amour, de la mĂ©taphysique de la mort par une mĂ©taphysique de l’amour, pour reprendre les mots de Schopenhauer14 ? Parce que l’inconscient existe, et la censure. Wagner, dans les notes du programme de la crĂ©ation parisienne du PrĂ©lude de Tristan disait que le philtre Ă©tait une nĂ©cessitĂ© pour que s’unissent des amants que la politique sĂ©pare. C’est surtout une nĂ©cessitĂ© pour que s’aveuglent les ĂȘtres sur ce qui les mĂšne Ă  la perte d’eux-mĂȘmes. Jouir, c’est se perdre, et faire jouir, vouloir que l’autre se perde.

La courbe non refermée

Quels sont les liens entre ces trois registres : dĂ©sirer, aimer, jouir ? Le premier acte de Tristan est celui du dĂ©sir, le deuxiĂšme celui de l’amour et le troisiĂšme celui de la jouissance. Tout d’abord, Tristan et Isolde cherchent dans les difficultĂ©s extĂ©rieures (fidĂ©litĂ© Ă  Marke, loi morale, sĂ©paration physique, jalousie de Melot
) autant d’évitements pour ne pas avoir Ă  reconnaĂźtre les obstacles Ă  l’amour. En fait, tous deux refusent l’amour pour se maintenir sous l’empire du dĂ©sir. Mais Isolde, plus clairvoyante comme souvent les femmes, nomme ce choix de la perte : « Pour moi Ă©lu, pour moi perdu15. » Puis, confrontĂ©s aux obstacles mis Ă  la satisfaction de l’intĂ©rieur du dĂ©sir lui-mĂȘme, les deux amants retardent la jouissance pour que l’amour persiste et s’exaspĂšre. Tout le deuxiĂšme acte est placĂ© sous le signe de cette fuite et de cette relance. Quant au troisiĂšme, marquĂ© par l’impossibilitĂ© de s’unir, il a pour enjeu de jouir afin de cesser de dĂ©sirer. Alors, se dĂ©ploie une jouissance infiltrĂ©e de mort, qu’il s’agisse de Tristan seul avec sa blessure, ou d’Isolde, mourant fermĂ©e sur l’énigme de la jouissance fĂ©minine.
Ces trois registres ont Ă©videmment leur traduction musicale. Le dĂ©sir est une dissonance. L’amour est une consonance. Et la jouissance ? Elle n’est ni tonale ni atonale. Quand on l’atteint, un accord parfait majeur peut ĂȘtre dissonant, comme l’accord qui achĂšve l’Ɠuvre sur une dĂ©chirure et non une rĂ©conciliation. Ou bien un accord dissonant peut donner un sentiment de plĂ©nitude absolue. La dissonance ne se rĂ©sout jamais, la consonance ne dure pas : tel est le tragique que Tristan met en scĂšne et en musique. Le recours systĂ©matique Ă  la gamme chromatique fait entendre cette finitude de l’amour et cet infini du dĂ©sir. Le chromatisme est comme le philtre, il unit les contraires en une substance qui ne cesse de couler, selon un temps sans bords. Ni bon ni mauvais, ni d’amour ni de mort, le philtre abolit ces contraires dans la langue comme le chromatisme fond l’opposition musicale du majeur et du mineur. Comme l’inconscient va, puis revient...

Table des matiĂšres

  1. Couverture
  2. Titre
  3. Copyright
  4. Dédicace
  5. La forme fatale
  6. AIMER
  7. DÉSIRER
  8. JOUIR
  9. Notes
  10. Lexique
  11. Les grands opéras du répertoire lyrique
  12. Bibliographie
  13. Sources et remerciements
  14. Table
  15. Du mĂȘme auteur