Une histoire mondiale de la paix
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Une histoire mondiale de la paix

  1. 228 pages
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Une histoire mondiale de la paix

À propos de ce livre

Dans un monde de concurrence exacerbée entre les grandes puissances, de compétition pour l'accès aux ressources, d'affrontements violents entre les civilisations et les religions, une nouvelle guerre mondiale est-elle vraiment improbable, voire impensable ? Si elle veut survivre, l'humanité est « condamnée » à la paix. Mais quelle paix ? L'histoire nous éclaire. Depuis l'aube du néolithique, il n'y a eu de paix qu'impériale. Une telle paix ne saurait se réduire à l'exercice brutal d'une force arbitraire. Elle doit laisser aux populations dominées des zones d'autonomie, les persuader qu'il n'y a pas d'autre ordre possible. Or la Pax americana des années 1945-2003 a été la dernière paix impériale. La mondialisation, dynamique globale et conflictuelle, voue désormais toute ambition impériale planétaire, même celle d'une Chine réveillée, à l'échec. La seule paix mondiale possible doit reprendre le laborieux chemin de la paix contractuelle, démocratique et institutionnelle, exploré notamment par le philosophe allemand Emmanuel Kant. Il faudra bien bâtir la paix pour que notre terre ne devienne pas un enfer. Diplomate, puis chercheur à l'Institut français des relations internationales (IFRI), Philippe Moreau Defarges a enseigné à Sciences Po (Paris) et codirigé le rapport RAMSÈS (IFRI). Il est l'auteur d'ouvrages d'histoire des relations internationales et de géopolitique qui sont de grands classiques. 

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CHAPITRE 1

Les paix impériales, laboratoires et creusets de la paix planétaire


De l’aube de l’histoire à la Grande Rupture de la modernité individualiste et démocratique (du XVe au XXe siècle), les périodes de paix sont toujours impériales. Les exceptions ne font que confirmer l’inéluctabilité de l’Empire et de sa forme de paix. La Grèce des cités se détruit dans une lutte fratricide entre Sparte et Athènes (guerre du Péloponnèse, 431-404 avant J.-C.) et finit avalée par l’empire de Philippe et d’Alexandre de Macédoine. La Rome républicaine maintient une paix sociale très relative par la conquête et le pillage, ne stoppant ou plutôt ne limitant les affrontements incessants de ses généraux qu’en s’assumant comme république impériale ou comme empire sous Octave Auguste (63 avant J.-C.-14).
La fascination qu’exercent les paix impériales s’exprime déjà dans le nom latin que beaucoup reçoivent : Pax romana, Pax mongolica, Pax britannica, Pax americana… Ces paix, nées de et dans la force, contiennent nombre d’éléments définissant la problématique de la paix du futur : souder des hommes, des peuples, par un projet commun (pour la paix impériale, maintenir l’empire, assurer sa survie) ; préserver un équilibre dynamique entre unité et pluralité…
Deux paix impériales rayonnent au-dessus des autres, l’une enfermée dans une identité vécue comme immuable, l’autre constamment aiguillonnée par la quête d’une unité universaliste :
– La Pax sinica, la paix chinoise. La Chine impériale, qui, sous des dynasties changeantes, dure depuis plus de deux mille ans, ne cesse de s’écrouler pour renaître, du premier empereur Qin Shi Huang (~ 259-210 avant J.-C.) au président Xi Jinping (né en 1953). Cette paix ne se dissocie pas de la cohésion ethnique des Han (90 % de la population chinoise), durcie, consolidée tant par l’énormité et l’isolement géographiques du pays que par la Grande Muraille ou plus exactement les grandes murailles, constructions inégalées par leur longueur et leur sophistication, constamment percées et ruinées, constamment repensées et reconstruites. La paix chinoise ne peut être que chinoise, les autres – les non-Chinois, les barbares – étant pour toujours exclus de la « Civilisation » car n’étant pas chinois.
– La Pax romana, la paix romaine, s’oppose à la Pax sinica par son défi insolent des lois de l’histoire et finalement par son universalisme. Cette paix, au lieu de se fonder sur une homogénéité continentale, s’édifie autour d’une mer, espace réticent à l’appropriation mais exigeant la création d’un ordre. La frontière (limes) n’a rien de naturel, elle est tracée par l’aléa des conquêtes. Le monde romain unit Occident et Orient, Europe et Afrique. Ce bricolage extraordinaire dure cinq siècles, de la fin des guerres puniques (118 avant J.-C.) à la dissolution de l’Empire romain d’Occident, 476. Cette paix, forgée par les armes avec une brutalité extrême, produit un authentique ordre juridique, réservé initialement aux citoyens romains mais universalisant au sein de l’empire cette citoyenneté en l’ouvrant à tous ses habitants. Toute paix oscille entre d’innombrables tensions ou conflits qu’elle tente de réguler ou de maîtriser. Ainsi reviennent toujours les mêmes questions, les mêmes défis. Les paix impériales fournissent non des solutions, mais au moins des pistes pour la paix planétaire à inventer, cette dernière étant nécessairement radicalement « supérieure » ou au moins plus englobante que celles du passé.

Des ambitions insatiables mais aussi une intelligence politique… toujours précaire

Nombre d’empires aiment à se croire créés par inadvertance. Des ambitieux, pauvres, se sentant sans avenir, se jettent sur des territoires décrétés à prendre : Jules César partant à la conquête de la Gaule afin de se procurer les ressources financières nécessaires au règlement de ses dettes colossales ; conquistadors portugais et espagnols déterminés à trouver l’eldorado en Amérique ; cadets de grandes familles privés d’héritage… Très vite, les aventuriers apprennent qu’ils peuvent fort peu sans l’appui ou le contrôle des autorités établies, détentrices d’armes ou/et maîtresses du crédit : princes, banquiers, ordres religieux… Ces pouvoirs, en fait toujours en recherche d’argent, ne sauraient laisser échapper la richesse et la puissance que promet ou semble promettre une terre inconnue. Nombre de fondateurs d’empires finissent mal pour s’être crus rois ou presque…

UNE IDÉOLOGISATION NÉCESSAIRE
ET FINALEMENT JUSTIFICATRICE

La paix impériale triomphe par une énergie écrasante, multiforme, incontestable : légions romaines subissant des défaites catastrophiques pour mieux rebondir et montrer leur capacité à vaincre ; colonisateurs européens cumulant fanatisme de croisade, appétits commerciaux et multiples supériorités techniques ; troupes américaines apportant, avec leurs chars, le jazz, le chewing-gum et tous les plaisirs de la prospérité…
La force, tout en étant indispensable, ne suffit jamais. Napoléon peut être le dieu de la guerre, selon le qualificatif de Clausewitz, son empire n’en sombre pas moins du fait de son enfermement dans le continent européen mais aussi des idées révolutionnaires de liberté, d’égalité et de nation que diffusent les armées françaises et que les peuples dominés retournent contre elles. L’empire hitlérien, par son racisme toujours plus radical et exterminateur, rejette et bloque tout ralliement des populations soumises, n’étant obéi que tant qu’il terrorise, et n’obtenant finalement qu’une soumission craintive ou haineuse. Ni le génie napoléonien ni la fureur destructrice du Führer n’obtiennent ces victoires totales qui contraignent les vaincus à reconnaître que le vainqueur porte et incarne l’avenir.
La paix impériale doit apparaître comme inévitable mais aussi être ressentie comme la meilleure possible. Le vaincu, s’il veut survivre, doit se persuader qu’il n’a pas d’autre choix que de se rallier et devenir le plus dévoué, le plus efficace collaborateur de l’empire. Le vainqueur ne peut se contenter de piller. Il lui faut une mission : diffuser la civilisation (plus exactement, sa civilisation), convertir les sauvages à la vraie foi… Derrière les aventuriers se pressent soldats, missionnaires, marchands, mais aussi médecins et enseignants, et tout un appareil étatique, chargé d’identifier, de classer, de quadriller, de taxer, de mobiliser.
Toute paix impériale produit spontanément, instinctivement un message, une idéologie. Le raisonnement de base est toujours le même : l’empire porte la civilisation et a non le droit, mais le devoir de la diffuser afin de faire entrer dans l’humanité les sauvages. Ainsi « le fardeau de l’homme blanc » de Rudyard Kipling… Ainsi la « destinée manifeste » (John L. Sullivan, 1845) des États-Unis… Ainsi la France civilisatrice exaltée, sublimée dans l’Exposition coloniale internationale de 1931.
L’idéologisation des empires et donc des paix impériales, leur promettant inéluctabilité et permanence, intervient le plus souvent alors que l’édifice se fissure. C’est au IVe siècle, après la crise presque fatale du IIIe siècle, que l’Empire romain se réinvente en se donnant avec le christianisme une transcendance vite exclusive de toute tolérance. En 1876, deux décennies après la révolte des cipayes (1857), perçue par nombre d’habitants du sous-continent comme leur première insurrection indépendantiste, la reine Victoria se trouve couronnée impératrice des Indes.
Demain, l’humanité s’autoproclamera-t-elle impératrice de la terre, au moment même où ses excès auront tellement perturbé la nature que son règne sur la planète se révélera irrémédiablement mis en question (voir chapitre 5, « L’humanité condamnée à la “paix” ») ?

LA SUPÉRIORITÉ ÉPHÉMÈRE
DE L’HÉGÉMONIE IMPÉRIALE

La puissance et donc la paix impériales paraissent être portées par une supériorité ou une exceptionnalité imposant à ceux qu’elles soumettent une obéissance admirative. Rome triomphe dans le Bassin méditerranéen par des atouts uniques qui la dressent au-dessus des autres. Complexité des équilibres institutionnels, discipline des légions, clarté et sophistication du droit, aménagements urbains, sens du confort (au moins pour la très mince couche des plus riches), tout montre une extrême efficacité de l’organisation sociale. Les vaincus, ou plus exactement les survivants, ont-ils une autre voie que celle de devenir romains ? Du XVe siècle à la première moitié du XXe siècle, dans le sillage des grandes découvertes, les États européens combinent leur appropriation de la terre avec une compétition technique qui les pousse sans cesse en avant et les rend, au moins temporairement, invincibles pour les colosses vermoulus qu’ils attaquent. Tous les vieux empires se retrouvent submergés et écrasés tant par la Bible que par le canon ou des idées dont l’universalisme brutal dissout comme un acide leurs coutumes et traditions.
Cette supériorité peut être ressentie par ceux que l’histoire broie comme une sanction quasi divine à laquelle il est impossible de survivre. Ainsi les sociétés précolombiennes anéanties par les conquistadors. Mais nombre de colonisés, de dominés, écoutent, observent, analysent et apprennent. Ceux qui ouvrent la voie par leur effort de compréhension de l’espace impérial se sacrifient (inconsciemment ? consciemment ?), souvent dénoncés et pourrissant en prison, mis de côté par des rivaux sachant que seul importe finalement le pouvoir. Or les grandes paix impériales ne durent qu’en constituant pour se maintenir une couche de collaborateurs dévoués.

LES ÉLITES,
ROUAGES AMBIGUS DES ORDRES IMPÉRIAUX

Toute élite se corrompt et se dégrade. Après les bâtisseurs viennent les gestionnaires plus ou moins prudents puis les esthètes ou les gaspilleurs. Le recyclage s’impose si les sociétés veulent ne pas se pétrifier, se renouveler et faire l’économie d’écroulements révolutionnaires.
Toute paix, donc l’impériale, requiert des élites. Ces groupes restreints s’identifient par des signes d’élection et se soudent par la conscience (ou la vanité) d’une qualité ou d’une supériorité particulière, donc d’un destin voulu exceptionnel. Ces élites concentrent les équivoques de la paix impériale. Elles aussi s’usent et s’effondrent.

Vainqueurs, occupants, colonisateurs

Pour les conquérants, les envahisseurs, l’espace impérial doit s’offrir à leurs ambitions démesurées, mais ils savent que rien finalement ne leur revient. Jules César, arrivant, lors de la conquête de la Gaule, dans un coin perdu, déclare : « Je préfère être le premier dans ce village que le second à Rome », suggérant qu’il serait prêt, pour avoir son domaine propre – si humble soit-il –, à renoncer à la perspective du pouvoir suprême. Le futur maître de Rome, remarquable manipulateur, ne cherche qu’à plus ou moins séduire une misérable population, qui n’a pas d’autre choix que de se soumettre à lui. Pour César, toutes ses conquêtes ne peuvent avoir qu’un but : Rome. Tout grand conquérant, s’il ne s’installe pas au sommet, préfère tout perdre. Ainsi le conquistador Hernán Cortés (1485-1547) anéantissant l’Empire aztèque au nom de Charles Quint mai...

Table des matières

  1. Couverture
  2. Titre
  3. Copyright
  4. INTRODUCTION - La guerre et la paix reformulées
  5. CHAPITRE 1 - Les paix impériales, laboratoires et creusets de la paix planétaire
  6. CHAPITRE 2 - L'ultime paix impériale
  7. CHAPITRE 3 - À la recherche de la paix contractuelle
  8. CHAPITRE 4 - La Grande Guerre dans les poubelles de l'histoire ?
  9. CHAPITRE 5 - L'humanité condamnée à la « paix »
  10. CONCLUSION - Et l'Europe ? et la France ?
  11. Chronologie
  12. Bibliographie
  13. Index
  14. Table
  15. Du même auteur chez Odile Jacob