
- 208 pages
- French
- ePUB (adapté aux mobiles)
- Disponible sur iOS et Android
eBook - ePub
Deuil et Santé
À propos de ce livre
Le deuil est-il devenu tabou ? Doit-il être soigné ? Comment traiter la dépression du deuil ? Faut-il s'en tenir aux antidépresseurs ? Ne peut-on faire du deuil l'objet d'une élaboration, d'une " expérience " au sens philosophique du terme ? Quelles sont les répercussions du deuil sur la santé ? Si vous avez perdu un proche, ce livre souhaite vous rejoindre dans vos interrogations : que puis-je faire pour atténuer mes souffrances ? Vais-je pleurer longtemps ? Retrouverai-je l'appétit de vivre comme avant ? Si vous êtes médecin ou soignant, des réponses plus spécifiques vous sont fournies : comment annoncer un diagnostic mortel de maladie chronique ? Comment accompagner un mourant et, surtout, sa famille, dans le pré-deuil ? Comment supporter d'être " quittés " par tous ces malades que nous investissons pour soigner, mais qui nous apportent aussi beaucoup ?Marie-Frédérique Bacqué est psychologue, maître de conférences en psychopathologie à l'université de Lille III. Secrétaire général de la Société de thanatologie, elle dirige l'association Vivre son deuil. Elle est l'auteur du Deuil à vivre, Mourir aujourd'hui et Les nouveaux rites funéraires.
Foire aux questions
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Informations
TROISIÈME PARTIE
LA MÉDECINE,
LA MORT
ET LE DEUIL
CHAPITRE 11
Annoncer un diagnostic mortel
Deuil de soi et maladie chronique
Le médecin est souvent au premier plan lorsqu’il s’agit de la mort d’un sujet. Cependant, bien avant la mort, il a le rôle délicat d’annoncer la « mauvaise nouvelle ». Informer d’une maladie grave correspond à évoquer sa mort prochaine au malade, consciemment ou inconsciemment.
Les cancers sont bien connus pour transformer les médecins en personnages de mauvais augure. Parfois même, ils risquent de perdre un patient, tant celui-ci rejette la prédiction, « fictive » la plupart du temps, qui découle du diagnostic. Plusieurs attitudes sont courantes chez les patients : refus, dépression, révolte, combat, acceptation. Elles correspondent aux étapes du deuil, très proche et précédé de pertes successives telles que la perte de la bonne santé, des projets, d’une certaine image de soi.
La perte du sentiment d’invulnérabilité
Nous avons vu que l’enfance se caractérisait par des sentiments de toute-puissance, très utiles pour oser affronter un monde hostile. Mais seule la protection parentale permet à l’enfant d’ignorer sa fragilité. L’enfant directement confronté à la précarité, à la blessure et à la mort fait vite la triste expérience de sa faiblesse.
Lorsqu’une personne en bonne santé se rend chez le médecin, elle se trouve aussi dans cet état de relatif bien-être qui fait que l’on oublie de réaliser que l’on est mortel. Si, subitement, le médecin renvoie le patient à sa précarité existentielle, c’est le choc. L’illusion, jusque-là relativement solide (et qui nous permet de ne pas attendre anxieusement notre fin comme certains phobiques ou sujets des attaques de panique), d’avoir devant soi une longue vie à remplir s’effondre et avec elle une partie des projets, voire de l’avenir du sujet.
Freud a toujours souligné que si l’homme se sait mortel, il a une fâcheuse tendance à l’oublier. C’est en effet le cas. Nous refoulons la maladie et la mort, à la différence de certains malades mentaux qui en sont obsédés, comme les nosophobiques et hypocondriaques. D’autres encore cherchent à obtenir les avantages fantasmés qu’offre le statut de malade. C’est le cas dans le syndrome de Münchausen (production volontaire mais inconsciente de symptômes reconnus comme pathologiques par la médecine). Mais à part ces exceptions psychopathologiques, rares sont les êtres humains qui recherchent le statut de malade.
Qu’est-ce donc que la maladie et la santé ?
Ces deux entités ont des valeurs anthropologiques différentes. Et même sur un plan philosophique, Georges Canguilhem écrivait que la santé est un concept invisible puisque seule son absence permet de prendre conscience de son importance. La santé est une notion qui n’existe que « par défaut », en tant qu’« innocence organique », elle est le véritable « silence des organes » si l’on en croit la célèbre définition de René Leriche. Ce paradoxe s’inscrit dans la lignée des travaux de Claude Bernard qui démontre que le diabète se situe sur un continuum avec la glycémie normale. Dans ce cas, maladie et santé sont de même nature, seule une différence quantitative les distingue.
Alors qu’avant Claude Bernard, le dualisme ambiant consistait à séparer maladie et santé, la maladie est avec lui réintégrée parmi les variations du fonctionnement global de l’organisme. Le passage entre l’état normal et l’état pathologique est dès lors impossible à saisir et Claude Bernard ajoute (1877) : « Ces idées de lutte entre deux agents opposés, d’antagonisme entre la vie et la mort, la santé, la maladie, la nature brute et la nature animée ont fait leur temps. Il faut reconnaître partout la continuité des phénomènes, leur gradation sensible et leur harmonie. » Ce retour appréciable vers le monisme va hélas se doubler d’une nouvelle grande tendance en médecine : la tendance biologisante. Les variations quantitatives d’indices seront soumises à des évaluations qui vont progressivement couper le malade en tant que personne de ses propres données biologiques.
Le médecin va donc s’intéresser d’une part à la maladie dans ses variations autour de la norme, d’autre part au malade en tant que sujet social. Cette dissociation est à l’origine des difficiles problèmes de communication autour d’un diagnostic grave. Soit le médecin s’interroge sur les chiffres et reste distant avec le malade, soit il compatit et ressent, par identification avec celui-ci, une gêne à annoncer les difficultés qui vont suivre le diagnostic.
Si nous appliquons le processus du deuil à l’appréhension d’un pronostic malin, nous savons que la nouvelle va d’abord engendrer un état de choc, qui se traduit par une sidération des fonctions physiques et mentales du sujet. Le blocage concerne surtout les facultés intellectuelles, et plus précisément l’aptitude à traiter de nouvelles informations. Inutile donc de transmettre toute une série de détails et éléments importants, ceux-ci ne passeront pas. Autant laisser le sujet exprimer ses propres interrogations au sujet de la maladie.
Qu’est-ce qu’une mauvaise nouvelle ?
Une « mauvaise nouvelle » est une information qui transforme radicalement la vie du patient. L’assombrissement de son avenir entraîne une remise en cause non seulement du sentiment d’invulnérabilité, mais aussi des projets et même du passé qui va alors brutalement remonter à la surface pour permettre d’expliquer la situation. Comme lors d’une perte brutale, le sujet refuse d’accorder du crédit à l’annonce qui lui est faite, puis il va mettre en doute la crédibilité du médecin, enfin, quand l’équivoque sera levée, il risque de tomber dans la dépression. L’acceptation de la maladie a lieu quand plus rien ne peut être tenté pour inverser la situation. Cependant accepter ne veut pas dire baisser les bras, au contraire, la collaboration thérapeutique du patient et de son médecin doit créer une synergie capable d’améliorer les conditions de survie et d’entente. Mais celles-ci dépendent d’abord de la communication médecin-malade.
Pourquoi est-il si difficile de transmettre une mauvaise nouvelle ?
L’absence de formation
Certains médecins sont naturellement doués pour communiquer avec leurs patients. Cependant, les conditions d’exercice actuel de la médecine rendent souvent difficile cet échange. Les coups de téléphone intempestifs pendant la consultation, la gestion des résultats de laboratoire et la nécessité d’une réflexion intellectuelle entre l’examen clinique et les données biologiques parasitent l’attention. Mais surtout, les conditions économiques de l’exercice médical réduisent le temps consacré aux explications concernant le diagnostic, en les privant du même coup de leur efficacité. Le sentiment d’incapacité à communiquer envahit parfois les médecins, conscients du décalage entre l’aménagement de leur lieu de travail, la durée de chaque consultation et leur propre désir. Ils finissent donc par renoncer.
La peur d’éveiller des sentiments négatifs ou difficiles chez le patient
Donner une mauvaise nouvelle consiste à se transformer en Cassandre, rôle peu agréable par lequel on risque de s’attirer agressivité ou colère du patient ou de provoquer des pleurs. L’idée de provoquer des émotions fortes fait parfois reculer le médecin, pour des raisons professionnelles et aussi affectives. « Que vont dire les autres patients dans la salle d’attente s’ils voient sortir cette femme en pleurs de mon cabinet ? Si des échos bruyants, des cris, des vociférations sont perçus à travers la porte, que vont penser ma clientèle, ma secrétaire ? Si les patients se plaignent au pharmacien, au personnel du laboratoire, de l’hôpital, auprès de collègues ? D’un point de vue personnel maintenant, pourrais-je supporter de voir un patient pleurer ? Puis-je lui mettre la main sur l’épaule, lui tendre un mouchoir ? Dois-je attendre que ça passe ? » etc.
Finalement, de nombreux médecins choisissent de mettre le patient à l’abri d’émotions fortes. L’argument majeur confortant cette position est qu’il faut dire ce que le patient a envie d’entendre. Les conséquences sont, hélas, à la mesure de cette hypocrisie : le patient va perdre confiance en son médecin et vivre avec ressentiment le fait d’avoir été traité comme un être irresponsable. D’autres craintes effraient le médecin : faire un aveu d’échec.
En évoquant une maladie incurable, un handicap irréversible ou une mort proche, le médecin est confronté à ses limites et à celles de la science dont il était malgré lui l’un des hérauts. Les patients atteints du sida le savent bien, eux qui jour après jour guettent les progrès de la médecine. Cette impuissance du médecin est vécue comme castratrice, son bras n’est plus armé, il se sent maladroit, il ne sait plus où se situer : professionnel modeste ou ami compatissant, distant par son savoir ou proche par ses ignorances. Le médecin a du mal à dire « je suis désolé » ou « je comprends votre tristesse de ne pas voir vos projets se réaliser ». Il a alors l’impression d’être aussi lénifiant qu’une voisine de palier dont le propos serait anodin et poli. Et pourtant ici, l’accompagnement psychologique doit relayer la prise en charge médicale.
Le fait de compatir est donc aussi thérapeutique et professionnel qu’empathique et humain. Ce qui est souvent vécu comme contradictoire est parfaitement cohérent dès lors qu’on adopte une approche globale ou holistique. Le médecin a besoin d’oublier sa propre mort pour aborder celle de l’autre. Or la bonne distance est celle qui permet d’être à la fois un professionnel qui s’identifie au patient sur le plan émotionnel et historique et qui, parallèlement, conserve une certaine maîtrise de la situation. Pour Thurstan B. Brewin (1991), la meilleure attitude est à la fois compréhensive et positive : « Ses ingrédients essentiels sont la flexibilité, reposant sur l’interrelation avec le patient lors de l’annonce de la mauvaise nouvelle, et la pensée positive, le réconfort et la planification du futur immédiat, le tout accompagnant la mauvaise nouvelle et non remis à plus tard. »
Comment désamorcer l’impact d’une mauvaise nouvelle ?
How to break bad news est le titre du célèbre ouvrage de Robert Buckman, publié en 1992, sur la révélation des diagnostics difficiles. Cet oncologue d’origine anglaise, maintenant basé au Canada, enseigne des techniques de communication aux étudiants en médecine. Il possède, en plus de ses talents d’écrivain et de bon orateur, la sagesse d’un individu qui a lui-même affronté les difficultés d’une grave maladie. L’intérêt de son livre réside dans l’emploi d’une véritable stratégie de communication avec « check-list » et remise en cause de ses pratiques sans remise en cause de sa personnalité.
Ce pragmatisme tout anglo-saxon est simplement adapté à la pratique médicale. Des questions fondamentales sont posées comme celles de l’authenticité du médecin et de sa dépense d’énergie, des enjeux en termes de compliance au traitement (suivi des prescriptions), et enfin de l’importance de l’état moral du patient pour sa survie. R. Buckman a donc élaboré un véritable « protocole » d’annonce de la mauvaise nouvelle et toute une série de techniques vidéo ou de jeux de rôles qui permettent de l’assimiler seul ou en groupe.
Préparer la rencontre
L’annonce de la mauvaise nouvelle n’aura jamais lieu au hasard ou sans programmation. Bien au contraire, comme l’annonce de la perte subite d’un être cher, elle doit faire l’objet d’une série de préparatifs.
Connaître le cas permet d’éviter les erreurs et, surtout, les mensonges qui font immédiatement dire au patient : « Mais l’autre médecin, l’interne, a dit que… » Il faut donc non seulement connaître le dossier médical, mais enquêter par téléphone auprès de l’équipe soignante pour savoir ce qui a déjà été dit.
Connaître les interlocuteurs présents lors de l’annonce de la mauvaise nouvelle est important. Le colloque singulier méd...
Table des matières
- Couverture
- Titre
- Du même auteur
- Copyright
- Dédicace
- Avant-propos
- Première partie - QU’EST-CE QUE LE DEUIL ?
- Deuxième partie - PORTRAITS D’ENDEUILLÉS
- Troisième partie - LA MÉDECINE, LA MORT ET LE DEUIL
- Quatrième partie - LES URGENCES DU DEUIL : catastrophes humaines ou naturelles
- Conclusion
- Adresses utiles
- Références bibliographiques
- Remerciements
- Table des encadrés
- Table