
- 352 pages
- French
- ePUB (adapté aux mobiles)
- Disponible sur iOS et Android
eBook - ePub
Les Pouvoirs de l'esprit sur le corps
Ă propos de ce livre
 Comment se fait-il qu'une personne guĂ©risse et qu'une autre pas ? Comment se fait-il que l'une survive vingt ans Ă un cancer alors que l'autre est emportĂ©e en quelques mois ? Quel est cet Ă©lan coordinateur qui rassemble les ressources de notre organisme pour que s'opĂšre la guĂ©rison ? C'est tout l'objet de ce livre : explorer le pouvoir de l'esprit sur le corps. Les expĂ©riences du passĂ©, les guĂ©risons miraculeuses et l'Ă©clairage des dĂ©couvertes les plus rĂ©centes permettent de mieux comprendre le rĂŽle des puissants facteurs psychiques qui peuvent agir sur le corps. Une plongĂ©e passionnante, guidĂ©e par un mĂ©decin psychiatre, au cĆur des phĂ©nomĂšnes Ă©tranges de guĂ©rison. Un plaidoyer pour une mĂ©decine plus ouverte qui prenne en compte cette dimension inexplorĂ©e de la guĂ©rison : la force vitale de l'ĂȘtre humain. Patrick Clervoy est mĂ©decin psychiatre, professeur agrĂ©gĂ© du Val-de-GrĂące. Il fut engagĂ© sur plusieurs théùtres d'opĂ©rations militaires importants. Il est l'auteur d'ouvrages sur les phĂ©nomĂšnes de traumatisme psychique et de mĂ©canismes inconscients de violences collectives.
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Informations
Ăditeur
Odile JacobAnnée
2018Imprimer l'ISBN
9782738143464ISBN de l'eBook
9782738143471PARTIE V
Les étranges chemins de la guérison
CHAPITRE 19
Les pouvoirs de lâempathie
La petite fille de 9 ans avait mal au ventre. Cela faisait plusieurs jours quâelle se plaignait. Sa mĂšre lâavait conduite Ă diffĂ©rentes reprises au cabinet du mĂ©decin de famille. Chaque fois celui-ci lâavait examinĂ©e attentivement. Il avait apportĂ© Ă ses parents des explications rassurantes avec des conseils diĂ©tĂ©tiques. Comme les douleurs persistaient, le docteur avait donnĂ© des mĂ©dicaments pour faciliter la digestion. Mais la petite fille continuait Ă avoir mal. Un soir dâune crise plus violente, la mĂšre lâavait conduite directement aux urgences de lâhĂŽpital. Ă nouveau lâexamen mĂ©dical Ă©tait normal. La petite fille avait un visage bien rose. Ă la palpation le ventre Ă©tait souple. La prise de sang Ă©tait normale. Par prĂ©caution le mĂ©decin des urgences prescrivit un scanner abdominal. Quand la petite entendit le mot scanner, elle fut Ă la fois intĂ©ressĂ©e et apaisĂ©e. Lâexamen Ă©tait normal. Le mĂ©decin donna des explications Ă la mĂšre. Lorsquâil eut terminĂ©, la petite fille demanda : « Est-ce que je lâai, le cancer ? »
Tout sâĂ©claira pour la mĂšre qui Ă©tablit alors le lien entre le mal au ventre de sa fille et lâĂ©tat de santĂ© de son mari. On venait de diagnostiquer chez le pĂšre de lâenfant un cancer du rein. Les parents avaient Ă©vitĂ© de parler de cette maladie devant leur fille. Pour la protĂ©ger, ils avaient tentĂ© de cacher leur inquiĂ©tude. La petite venait de montrer que, sans un mot qui lui laissĂąt prendre conscience de la maladie cancĂ©reuse de son pĂšre, elle en avait su quelque chose et elle en avait incorporĂ© le symptĂŽme sous la forme de douleurs abdominales.
Ressentir ce que lâautre Ă©prouve
Dans cette histoire, plusieurs phĂ©nomĂšnes se sont conjuguĂ©s. La petite fille avait Ă©tĂ© sensible Ă lâangoisse quâĂ©prouvaient ses parents. Or ceux-ci ne lui avaient rien dit. Cependant la petite avait senti quelque chose. Elle avait devinĂ© que lâun dâentre eux Ă©tait malade et que câĂ©tait au niveau du ventre. En elle, des sens sâĂ©taient Ă©veillĂ©s. Elle avait captĂ© lâexistence de la maladie de son pĂšre malgrĂ© le silence de ses parents et son organisme avait rĂ©pondu en incorporant en elle, dans son petit corps dâenfant, des symptĂŽmes qui obligeaient ses parents Ă pousser les recherches jusquâĂ trouver la cause du mal. Câest-Ă -dire, dans ce cas, Ă mettre des mots sur la maladie, Ă Ă©tablir un diagnostic pour ensuite mettre en place un traitement. La petite fille avait montrĂ© une aptitude instinctive Ă ressentir en elle un symptĂŽme prĂ©sent chez une autre personne. On appelle ce phĂ©nomĂšne lâempathie.
La formule qui illustre le mieux le concept dâempathie mâa Ă©tĂ© donnĂ©e par une patiente. Cette mĂšre de famille venait dâapprendre avec plusieurs jours de retard que son fils avait eu un accident de moto. Il sâĂ©tait fracturĂ© une cheville et un poignet. Il avait attendu que sa mĂšre rentre de vacances Ă lâĂ©tranger pour lâinformer de son accident. Il savait que, sâil lâavait informĂ©e immĂ©diatement, sa mĂšre au comportement hyperprotecteur aurait pris le premier avion pour se rendre Ă son chevet. Lorsque sa mĂšre revint, il Ă©tait dĂ©jĂ chez elle et se dĂ©plaçait avec une bĂ©quille et un bras dans le plĂątre. Elle le vit descendre lâescalier. Elle ressentit immĂ©diatement de fortes douleurs dans son corps. Ces douleurs persistĂšrent plusieurs semaines. Elle me lâexpliqua avec ses mots : « Je me suis octroyĂ© sa douleur. »
Une autre patiente me raconta quâelle avait lâhabitude, le soir, pour dĂ©tendre son mari au retour dâune journĂ©e de travail, de lui masser le visage. Ă un moment de sa vie professionnelle, cette femme se trouva prise dans dâimportantes difficultĂ©s. Elle travaillait dans une agence dont les bureaux venaient dâĂȘtre rĂ©amĂ©nagĂ©s en espaces ouverts. Chacun pouvait Ă©pier ce que faisait lâautre. Plus personne nâavait dâintimitĂ©. Recevoir des appels sur son tĂ©lĂ©phone personnel ou envoyer des messages Ă©tait aussitĂŽt jugĂ© comme une faute. Soumise Ă un stress continu, elle se trouva Ă son tour avec des douleurs et des contractions. Elle mâindiqua que la seule chose qui la soulageait Ă©tait de masser⊠le visage de son mari. Le geste dâapaiser les tensions musculaires de son conjoint produisait chez elle un apaisement au mĂȘme endroit, sans que personne nây eĂ»t touchĂ©. Lâempathie permet de trouver un bienfait pour soi dâun soin apportĂ© Ă un autre.
Nos amis les animaux
Lâempathie est une capacitĂ© universelle et extraordinaire Ă la fois. Cette capacitĂ© est prĂ©sente chez tous les mammifĂšres sociaux. On observe mĂȘme de lâempathie entre animaux diffĂ©rents. Cela explique les capacitĂ©s thĂ©rapeutiques des chevaux, des dauphins, des chats et des chiens. Des personnes blessĂ©es mâont racontĂ© que, au moment oĂč elles retrouvaient leur domicile, alors que leur chien ne pouvait voir le pansement cachĂ© par leur vĂȘtement, lâanimal venait renifler lâendroit prĂ©cis qui avait Ă©tĂ© blessĂ©. Une femme qui avait Ă©tĂ© agressĂ©e mâa confiĂ© que, lorsquâelle Ă©tait rentrĂ©e chez elle, ses animaux avaient montrĂ© une agitation inhabituelle. Elle sâĂ©tait mise dans son fauteuil pour se reposer. Son perroquet Ă©tait venu sur elle et avait fait lâinventaire systĂ©matique des endroits oĂč elle avait reçu les coups : au visage, sur le torse et sur les bras. Lâoiseau lui parlait en mĂȘme temps quâil frottait doucement lâendroit avec son bec. Elle avait Ă©prouvĂ© un apaisement en se faisant la remarque que lâanimal Ă©tait aussi doux et aussi attentif quâun infirmier.
Les capacitĂ©s thĂ©rapeutiques des animaux sont utilisĂ©es pour soigner des enfants autistes et des personnes souffrant dâĂ©tat de stress post-traumatiques. Elles sont aussi utilisĂ©es dans des unitĂ©s de soins palliatifs. Les chats sont des animaux qui accompagnent les personnes en fin de vie et apaisent leur agonie. Ils sâinstallent au pied ou Ă cĂŽtĂ© du mourant. De temps Ă autre ils ronronnent et, aussitĂŽt que la personne est morte, ils se lĂšvent calmement et sâen vont.
Les mĂ©canismes de lâempathie
Toute notre existence est prise dans lâempathie. Le champ dâinfluence de cette capacitĂ© reprĂ©sente celui de notre conscience. Notre reprĂ©sentation du monde se construit en deux temps : les organes des sens nous apportent des informations sur notre Ă©tat intĂ©rieur et sur notre environnement, puis les mĂ©canismes de lâempathie Ă©tablissent une correspondance entre ces diffĂ©rentes informations. Ce que nous ressentons est mis en parallĂšle avec ce que nous percevons de ce que ressentent les autres. Secondairement, en fonction de son rĂŽle et de ses activitĂ©s, chaque individu apprend Ă refouler cette capacitĂ©. Chez nous, les primates humains, certains hommes ont une capacitĂ© dâempathie plus dĂ©veloppĂ©e que dâautres. Lâempathie est plus forte chez les enfants, chez les femmes, chez les personnes anxieuses ou maniaco-dĂ©pressives. Lâempathie nâest absente chez lâĂȘtre humain que lorsque celui-ci a appris Ă la neutraliser. Il faut rester indulgent envers ceux qui nâĂ©prouvent pas dâempathie. On peut comprendre que, pour se protĂ©ger, des personnes trop sensibles, ou dâautres qui ont trop souffert, soient parvenues Ă se dĂ©connecter de cette singuliĂšre sensibilitĂ© Ă ce que ressent autrui. Car, poussĂ©e Ă lâextrĂȘme, lâempathie peut ĂȘtre dĂ©favorable Ă la santĂ©. Elle est la cause du burn-out des soignants. Lâempathie provoque une usure liĂ©e Ă la contrainte de rester trop longtemps Ă proximitĂ© de personnes qui souffrent. Dans les hĂŽpitaux, on voit surtout des burn-out dans les unitĂ©s dâurgence et de soins intensifs, dans les unitĂ©s de cancĂ©rologie et de soins palliatifs. Lâempathie, cette capacitĂ© Ă ressentir en soi ce dont souffre une autre personne, est aussi Ă lâorigine de phĂ©nomĂšnes dâĂ©puisement chez les sauveteurs et les volontaires de lâaide humanitaire. Mais lâempathie est, au dĂ©part, une capacitĂ© formidable : ce mĂ©canisme est Ă la base du processus qui permet Ă une personne dâen soigner une autre et de produire une guĂ©rison.
On peut considĂ©rer deux modes dâempathie. Il y a le mode passif : la personne ressent involontairement ce quâĂ©prouve une autre personne. Mais il y a aussi un mode actif. Câest celui qui est prĂ©sent chez tous les professionnels du soin : les aides-soignants, les infirmiers, les panseurs, les brancardiers, les mĂ©decins, les psychologues, les ostĂ©opathes, etc. Ceux que lâon nommait autrefois les guĂ©risseurs Ă©taient des personnes qui avaient surdĂ©veloppĂ© des capacitĂ©s actives dâempathie. Lâempathie procĂšde Ă la guĂ©rison dĂšs lors quâune personne qui a dĂ©ployĂ© cette capacitĂ© se tient avec attention et douceur auprĂšs dâun malade. Les lieux de guĂ©rison, comme les sanctuaires religieux, produisent de la guĂ©rison parce que la capacitĂ© dâempathie des pĂšlerins est multipliĂ©e par lâeffet de masse. La foule entiĂšre est devenue empathique. De cette foule surgissent les puissantes Ă©nergies curatrices qui expliquent les guĂ©risons miraculeuses.
Aujourdâhui on commence Ă en deviner le mĂ©canisme avec la dĂ©couverte des neurones miroirs. Dans les annĂ©es 1990, une Ă©quipe de chercheurs italiens mettait en Ă©vidence les neurones miroirs grĂące au procĂ©dĂ© expĂ©rimental suivant : on donne Ă un singe une fonction Ă accomplir et on note les zones du cerveau qui sont activĂ©es par cette tĂąche exĂ©cutive ; on observe ensuite le fonctionnement du cerveau dâun autre singe qui ne fait que regarder le premier, et, surprise !, les mĂȘmes zones du cerveau sont activĂ©es. Ă regarder faire son congĂ©nĂšre, le singe spectateur a mis en action des circuits cĂ©rĂ©braux identiques Ă ceux du singe acteur. Celui qui observe reproduit dans son cerveau le travail cĂ©rĂ©bral de celui qui agit. Les neurones miroirs sont des neurones qui ont une activitĂ© aussi bien lorsquâon exĂ©cute une action que lorsquâon observe cette mĂȘme action. Par la suite, le mĂȘme phĂ©nomĂšne a Ă©tĂ© mis en Ă©vidence chez les oiseaux : lorsque lâun chante, les aires cĂ©rĂ©brales du chant sont activĂ©es en miroir chez les oiseaux qui lâĂ©coutent.
Les neurones miroirs sont impliquĂ©s dans deux comportements humains Ă©lĂ©mentaires : lâimitation et lâempathie. Lâimitation est le premier moteur de notre dĂ©veloppement. Lâenfant imite lâexemple qui lui est montrĂ©. Câest le processus de base de lâapprentissage. Ce qui lui est montrĂ© « fait travailler » son cerveau qui intĂšgre le schĂ©ma moteur de cette action avant mĂȘme dâavoir Ă la reproduire. Ainsi, ce quâune personne voit et entend lui donne lâaptitude Ă accomplir le geste que fait une autre personne.
Lâempathie fait, par exemple, que, lorsquâune personne tousse de façon rĂ©pĂ©tĂ©e, les autres personnes qui sont dans son voisinage Ă©prouvent une sensation de gĂȘne dans la gorge et se mettent Ă tousser. De la mĂȘme maniĂšre, si une personne dans un salon se met Ă bĂąiller, les autres sont prises dâune irrĂ©sistible envie de bĂąiller. Les mĂ©thodes modernes dâexploration du cerveau ont permis de gĂ©nĂ©raliser ce phĂ©nomĂšne. Voici une expĂ©rience rĂ©alisĂ©e en laboratoire. On demande Ă une premiĂšre personne de se gratter le bras. On regarde ce qui se passe dans le cerveau dâune seconde personne assise en face de la premiĂšre et qui lâobserve en train de se gratter. On remarque que, chez la personne qui ne se gratte pas, les zones sensorielles qui correspondent Ă la sensation de dĂ©mangeaison sont activĂ©es. Les auteurs de cette expĂ©rience lâavaient publiĂ©e avec le titre : « Je me gratte et ça te dĂ©mange ! »
Prendre une part de la souffrance de lâautre
Lâempathie est la capacitĂ© dâune personne Ă partager une sensation qui nâest pas la sienne au dĂ©part, Ă ressentir dans son corps ce qui se produit dans le corps de lâautre. Cette capacitĂ© participe Ă la guĂ©rison. Une personne qui prend sur elle une part de la souffrance dâune autre personne peut produire chez cette autre personne un soulagement de sa douleur. Comme mĂ©canisme de guĂ©rison par transfert dâun symptĂŽme dâune personne malade vers une personne saine, lâempathie peut produire des phĂ©nomĂšnes de corps surprenants. La couvade en est un exemple extrĂȘme. Dans les cas les plus dĂ©veloppĂ©s, elle se dĂ©roule en trois phases : lors de la grossesse de sa femme, lâhomme se met Ă prendre du ventre, se plaint de fatigue et de nausĂ©es ; lors de lâaccouchement il sâalite et reçoit des soins comme sâil avait lui-mĂȘme accouchĂ© ; aprĂšs lâaccouchement il prend des prĂ©cautions alimentaires comme sâil Ă©tait nouveau-nĂ©.
La couvade a longtemps intriguĂ© les anthropologues. On lâavait dĂ©crite dans lâAntiquitĂ© et au Moyen Ăge, mais elle se rĂ©vĂ©lait difficile Ă observer Ă lâĂ©poque moderne. Elle a Ă©tĂ© reconnue comme un phĂ©nomĂšne contemporain aprĂšs quâun mĂ©decin de marine, le Dr Maurel, en eut fait une description devant la SociĂ©tĂ© dâanthropologie de Paris en 1882. Il rapporte plusieurs tĂ©moignages dont un cas observĂ© par un magistrat lors dâun sĂ©jour en Guyane française dans une communautĂ© amĂ©rindienne installĂ©e au bord dâun fleuve. Cet homme, M. Voisin, se dĂ©plaçait dans cette zone peu explorĂ©e. Il reçut un soir lâhospitalitĂ© dans une hutte dâIndiens Galibi. Il dormit dans un hamac, sĂ©parĂ© de ses hĂŽtes par une mince cloison de branches et de feuilles. Rien nâavait troublĂ© sa nuit et son repos. Son Ă©tonnement fut grand le lendemain matin lorsquâil apprit que derriĂšre la mince cloison un enfant Ă©tait nĂ©. La mĂšre nâavait poussĂ© aucun cri. M. Voisin la vit dĂšs le jour aller au fleuve, sây accroupir pour faire sa toilette et celle du nouveau-nĂ© en le baignant avec vigueur. Il vit aussi le mari rester couchĂ© dans son hamac, se dĂ©clarer malade et recevoir les soins que lui prodiguait sa femme.
Les anthropologues ont proposĂ© comme explication de la couvade quâelle permettait Ă un homme dâaffirmer sa paternitĂ© sur le nouveau-nĂ©. On peut aussi supposer quâavec ce comportement lâhomme prend sur lui une part des symptĂŽmes en rapport avec la grossesse de sa femme pour la soulager. Dans le cas rapportĂ©, la surprise pour le visiteur fut de constater lâefficacitĂ© de cette pratique, la femme recouvrant rapidement son Ă©tat de santĂ© et son autonomie aprĂšs quâune autre personne, par empathie, lâeut dĂ©chargĂ©e des symptĂŽmes liĂ©s Ă la grossesse et Ă lâaccouchement. Cela paraĂźt surprenant, et une femme occidentale pourrait avoir des difficultĂ©s Ă admettre la rĂ©alitĂ© de ce phĂ©nomĂšne de substitution. Pourtant, sa frĂ©quence par le passĂ© et sa persistance, ajoutĂ©es Ă ce que lâon sait aujourdâhui sur lâempathie, sont des arguments qui rendent cette explication plausible.
Lâempathie au sein de la famille,
dans le couple
Comme dans lâhistoire plus haut de la petite fille qui avait mal au ventre, celle de la mĂšre dâun fils accidentĂ©, celle de lâĂ©pouse stressĂ©e, la famille est lâun des lieux oĂč la relation dâempathie est le plus souvent Ă lâĆuvre, sans paradoxalement quâon cherche Ă la mettre en Ă©vidence. Cette relation dâempathie est mutuelle. Elle ne dĂ©pend pas de la place de chacun dans cette famille. Lâempathie peut ĂȘtre aussi forte entre les parents, entre les parents et les enfants, et entre les enfants.
Au niveau dâun couple, surtout au fil du vieillissement, cette relation devient trĂšs forte. On voit ainsi sâĂ©tablir progressivement une relation dans laquelle lâun des partenaires est le thĂ©rapeute de lâautre, au point parfois que câest lors dâune sĂ©paration fortuite, comme lors dâune hospitalisation par exemple, que lâon peut mettre en Ă©vidence que le membre du couple qui est « porteur » de la maladie nâest pas celui qui est hospitalisĂ©. Câest une occurrence que lâon observe dans les phases initiales des pathologies neurodĂ©gĂ©nĂ©ratives comme la maladie dâAlzheimer. Lâun des conjoints dĂ©compense une maladie qui nâest pas la sienne mais celle de lâautre. En fait, la phase visible de la maladie apparaĂźt lorsque lâautre, depuis longtemps dans une forte relation dâempa...
Table des matiĂšres
- Couverture
- Titre
- Copyright
- Dédicace
- Préambule
- Partie I - Corps et psychisme : ce que l'on sait et ce qui reste à  explorer
- Partie II - Les mystÚres de la vie
- Partie III - Qu'est-ce que guérir ?
- Partie IV - Le mĂ©decin et le malade : un petit théùtre oĂč chacun tient son rĂŽle
- Partie V - Les étranges chemins de la guérison
- Ăpilogue â Une espĂ©rance raisonnĂ©e
- Principaux ouvrages consultés
- Table