
- 336 pages
- French
- ePUB (adapté aux mobiles)
- Disponible sur iOS et Android
eBook - ePub
À propos de ce livre
Qui sont ces hommes en redingote noire, portant barbe et papillotes, étonnamment proches des juifs de Pologne ou de Russie dépeints par les écrivains yiddish, qui peuvent surprendre aujourd'hui dans les rues de Paris ? Comment vivent-ils ? Comment travaillent-ils ? Qu'est-ce qui inspire et structure leur itinéraire et leur existence familiale et sociale ?Après des années d'enquête, Laurence Podselver propose, au plus près du quotidien, une radiographie des communautés hassidiques en plein développement. On y comprendra mieux les parcours individuels, les mécanismes de conversion, la fonction de l'école, le destin des femmes, etc. Avec, en filigrane, une interrogation : pourquoi la totalité ou presque des familles loubavitch que comptent Paris et sa banlieue est-elle composée de juifs « revenus » récemment à la religion ? Qu'est-ce que cela suggère sur la France et le judaïsme d'aujourd'hui ?Un document anthropologique rare. Anthropologue, Laurence Podselver est chercheur à l'École des hautes études en sciences sociales à Paris. Elle est spécialiste du judaïsme contemporain.
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Informations
1
Loubavitch, une dynastie hassidique
Le renouveau religieux du XVIIIe siècle en Europe centrale et orientale s’est développé autour de certaines personnalités, souvent des prédicateurs, qui devinrent des leaders populaires attentifs aux problèmes des pauvres. Bien qu’issus du peuple, ils avaient cependant des dons particuliers et étaient notamment voyants et guérisseurs. En rassemblant des fidèles autour d’eux, ils devinrent des rabbins hors des institutions traditionnelles et leur légitimité s’appuyait sur la reconnaissance de leurs capacités, de leurs savoirs et de leurs intentions. Ainsi le hassidisme recentrait-il la vie religieuse autour d’une personnalité capable de ramener les gens du peuple à l’observation des commandements religieux mais aussi à valoriser le sentiment religieux hors de toutes connaissances érudites. C’est alors qu’apparurent des saints, des tsaddikim dont on attendait des miracles et dont chaque geste semblait exprimer la volonté de Dieu. Hors du système traditionnel d’apprentissage religieux – ce qui ne veut pas dire en opposition aux savoirs constitués –, la littérature orale et notamment les légendes qui relataient la nature exceptionnelle de ces rebbe prirent une importance extraordinaire dans le développement et la diffusion du hassidisme. De nos jours encore, à partir d’une même matrice narrative, les légendes contemporaines sont racontées puis consignées afin d’ajouter foi aux croyances. Les miracles d’hier sont confirmés par ceux d’aujourd’hui et l’on continue d’y décrire l’attitude du rabbi en insistant sur les traits de son visage et sur tout ce qui, au-delà des mots, est susceptible d’exprimer un sentiment.
Hors de la sphère strictement religieuse, les critiques abondaient, notamment au XIXe siècle en Allemagne de la part des intellectuels juifs et des savants représentés par la Wissenschaft des Judentums (Science du judaïsme) qui dénonçaient sans ménagement l’archaïsme du hassidisme et qualifiaient ses rabbins d’imposteurs. Pour des historiens comme Graetz, Baron ou Doubnov10, les mouvements hassidiques s’opposaient à l’émancipation des juifs et à leur entrée dans la culture moderne et européenne. Ils n’auraient favorisé que les superstitions populaires et l’obscurantisme. Plus encore, le hassidisme était pour eux une déviation chrétienne de la théologie juive car l’importance du tsaddik, son autorité et son pouvoir, ses visions prophétiques, ses cures miraculeuses, l’« idolâtrie » dont il était l’objet, auraient rappelé les pratiques des sectes esséniennes11. Par ailleurs, le tsaddik exploiterait l’ignorance et profiterait de la crédulité pour prendre l’argent des plus démunis par le biais du pidyon (don de rédemption) et ainsi n’être qu’un vulgaire charlatan12. Bien que Martin Buber et Gershom Scholem aient reconnu au hassidisme une dimension philosophique et historique, voici en quels termes les détenteurs de la mémoire d’avant la Shoah interrogés par Mark Zborowski et Elisabeth Herzog se souviennent de l’univers hassidique : « Les rebbes étaient très riches, je veux dire extrêmement riches. Les femmes des rebbes étaient toujours habillées à la dernière mode de Vienne ou de Paris. Tout ce qu’ils possédaient était importé. Il y avait un extraordinaire lustre de cristal au milieu du plafond, et de plus petits sur les murs. Et ils avaient de luxueuses couvertures orientales bleues13. » Les historiens du monde askenaze qui ont eu accès aux archives et aux textes de la littérature du XIXe siècle ainsi qu’aux photos disponibles confirment la réalité de cet aspect de magnificence attribué à quelques rares cours hassidiques, que l’on disait « royales » à la fois parce que les rabbis s’arrogeaient une filiation davidique et parce que l’opulence de leur demeure les faisait comparer à des palais. L’architecture et les diverses composantes de ces maisons sont décrites pour manifester l’importance de leur rôle social ainsi que la vie quotidienne, toujours empreinte de religiosité et de solennité14. Certaines de ces cours se sont maintenues jusqu’à la Première Guerre mondiale, jouant le rôle du Kahal elles constituaient « un petit État », et faisaient souvent contraste avec le bourg misérable qu’elles côtoyaient, ainsi que le rapporte Martin Buber à propos de Sadgora15. Cette image du hassidisme perdura longtemps, la littérature contribuant sur le mode satirique à dresser ce type de tableau accablant16.
En France, il faut attendre les années 1970-1980, à la faveur du goût pour une authenticité singulière, pour que dans les représentations collectives le hassidisme ne soit plus relégué au rang des aberrations et des anachronismes révélateurs des aspects archaïques de la religion. Les personnages éminents du hassidisme ont alors retrouvé une certaine crédibilité. Dans une vision désormais pluraliste et souvent nostalgique du judaïsme, le hassidisme, bien qu’il soit encore contesté par les héritiers des Lumières, est devenu une variante possible du judaïsme et ses représentants, les rebbes hassidiques, adulés par de jeunes fervents, font partie du folklore17 et de la mémoire collective sous la forme d’une sorte d’image d’Épinal symbolisant parfois jusqu’à la caricature la résistance du juif face au monde moderne. Notre propos est ici de montrer la coïncidence entre certains attributs du rebbe ancrés dans la tradition et les aspirations contemporaines du domaine religieux, tournées vers la recherche de personnages charismatiques, recherche associée à des savoirs hors du champ des connaissances de la société moderne positiviste.
Les dynasties18
Après avoir été les disciples du Baal Shem Tov, ces hommes différents dans leur essence même se sont entourés de fidèles et ont fondé ce que l’on désigne souvent comme des dynasties hassidiques, puisque la charge et le pouvoir des rebbes se transmettaient de père en fils. Ces cours furent nombreuses, chacune se distinguant des autres par le caractère et les dons particuliers de son rebbe et son enseignement. Les particularités de chacune des dynasties au sein du courant hassidique perdurent de nos jours et les juifs – désormais américains – qui racontent leurs souvenirs d’avant-guerre en Europe centrale insistent sur cet aspect qu’ils assimilent à la vitalité culturelle de leur communauté d’origine. « Chaque dynastie, et donc chaque tsaddik, avait un mode particulier, un derekh (chemin), une façon spéciale de traiter avec Dieu et avec les hassidim19. » L’attachement à ses figures emblématiques d’un judaïsme aujourd’hui en grande partie disparu participe à la construction d’une mémoire des origines et à la nostalgie de localités juives effacées elles aussi.
De nos jours, les hassidim de loubavitch n’échappent pas à cette règle et la cohésion du groupe se fonde essentiellement autour de la reconnaissance et de la croyance en la qualité spécifique de leur rebbe comme intercesseur entre Dieu et les hommes. Ceci n’exclut nullement les échanges d’idées, d’opinions ou de savoirs entre les différentes dynasties. On reste d’ailleurs frappé par l’extrême mobilité des fidèles qui parcouraient autrefois des centaines de kilomètres pour rendre visite à différents rebbes et qui aujourd’hui, grâce aux moyens de communications modernes, se rendent avec autant de facilité à Anvers, New York ou Jérusalem, qu’autrefois de Brest-Litovsk à Pinsk ou Lublin.
La cohésion communautaire centrée sur une personnalité, avec tous les rites qui accompagnaient cette forme de religiosité populaire et démonstrative, produisait et produit encore un système d’interactions d’une grande efficacité affective et symbolique : « La personnalité prend la place de la doctrine ; ce qui est perdu en rationalité par ce changement est gagné en efficacité20. » De ce fait, la dynastie hassidique formait un groupe actif produisant ses propres rites (comme le seraient des rites domestiques) et devenait un pôle d’attraction pour les juifs, dont le système institutionnel perturbé (comme ce fut le cas avec la fin des kehilot, les communautés institutionnelles ne suffisaient plus à la cohésion religieuse). Si l’on examine les cartes21 de la Pologne juive, de Russie ou d’Allemagne, elles paraissent dans les moments des plus grandes difficultés, constellées de points qui sont les centres de ces petites dynasties, portant souvent le nom de la bourgade où elles se situent, et qui investissent un lieu d’une importance qui ne relève ni du nombre d’habitants ni du développement industriel mais d’un rayonnement spirituel et de la présence d’une école rabbinique de renom.
Le shtibl, littéralement la « petite pièce », là où les adultes étudiaient de manière tout à fait informelle, était le centre d’une intense activité et un pôle d’attraction qui suscitait de véritables pèlerinages. Les noms de villes qui désignaient les dynasties hassidiques ont pour la plupart changé. Subissant les avatars des conquêtes et des partages successifs des régions entre divers États, la mémoire juive s’est faite répertoire et conservatoire d’une géographie révolue22. Ces noms de villes disparues désignent alors une origine spatiale et la continuité avec une tradition, une dynastie. Ainsi que le suggère Israël Rubin23, les hassidim de loubavitch devraient aujourd’hui s’appeler « brooklyner » puisque leur dernier rebbe résidait à Brooklyn. En fait, chaque groupe hassidique a voulu maintenir une filiation temporelle et spatiale datant de plus d’un siècle et demi pour insister à la fois sur la profondeur historique de leur tradition et sur leur ancrage passé dans un espace longtemps interdit. Plus encore, si les hassidim devaient prendre le nom de leur lieu d’implantation actuelle, la concentration de différents groupes dans une même métropole nous empêcherait de les distinguer24. Ce toponyme évocateur d’un lieu d’origine et d’un passé s’est véritablement transformé en une sorte de patronyme, puisqu’il recouvre non seulement une filiation mais aussi une communauté dont les ancêtres se confondent. Comme nous le verrons, la volonté de se constituer comme une grande famille tant biologique que spirituelle n’est pas étrangère à cette emprise du nom.
Mais si le nom a pour fonction essentielle de distinguer chaque dynastie, il suppose aussi la transmission de traditions locales relatives à la manière d’accomplir le rite ou les commandements. Ces « traditions locales » sont en fait des traditions religieuses et intellectuelles qui témoignent d’une interprétation ou d’une mise en valeur spécifique des textes sacrés. Ces coutumes (minhagim) qui opèrent un processus de différenciation des groupes hassidiques entre eux, mais ne peuvent être contradictoires avec la loi, permettent l’actualisation de conceptions intellectuelles et de coutumes locales qui traduisent de manière lisible dans les actes de la vie quotidienne les différentes traditions intellectuelles ou spirituelles. Ainsi, chaque groupe revendique son propre derekh (chemin), formalisant leurs pratiques spécifiques dans le Sefer a minhagim, le Livre des coutumes.
Ainsi le hassidisme devint une composante culturelle témoignant d’une grande vitalité intellectuelle. S’il connut à ses débuts de vives oppositions qui conduisirent jusqu’au herem (l’excommunication), il réussit néanmoins à exercer une influence certaine sur le judaïsme askenaze, et la secte persécutée d’hier est aujourd’hui valorisée par la culture majoritaire askenaze et par l’ensemble de la judaïcité, qui y puise en grande partie les éléments de son ressourcement. Du point de vue de son histoire, le hassidisme comme mouvement social permit la restructuration des communautés juives d’Europe orientale. D’abord de manière informelle en se substituant à l’institution communautaire ou en s’y inscrivant en marge, puis par sa longévité, en s’institutionnalisant à son tour.
La diffusion culturelle du hassidisme fut donc très large, jusqu’à constituer une « nouvelle culture » aboutissant à un « processus de diversification du judaïsme religieux ». Processus à l’origine de l’éclosion de « sous-culture » (« subculture ») représentée par chaque dynastie25.
Tout comme pour les autres groupes hassidiques, le Baal Shem Tov et son continuateur le Maguid de Mezeritch sont les pères fondateurs de la dynastie loubavitch. C’est à la troisième génération que nous assistons au processus de différenciation des dynasties entre elles. Schneour Zalman de Lyadi, désigné aussi comme l’alter rebbe (l’ancien rabbin) fonde le groupe par son ouvrage Likkutei Amarim, ou Tanya, en 1796. Inspiré par la kabbale d’Isaac Louria26, le Tanya est un ouvrage théosophique définissant les rapports de l’homme et de Dieu ainsi que les obligations des hommes fervents. « Seule œuvre novatrice sur le plan théorique », selon Gershom Scholem27, le Tanya développe une « psychologie mystique » marquée par une « interprétation panthéiste » et « un intérêt intense pour l’esprit humain ». C’est en effet par la réflexion et la connaissance que l’homme peut accéder à Dieu. Sans renier aucunement les traits spécifiques du hassidisme, à savoir la valorisation de l’intention, de la ferveur et de la joie, le Tanya insiste sur l’aspect intellectuel de la mystique en définissant trois axes fondamentaux. Ces trois axes sont en fait des sephirot (manifestations divines) par lesquelles le groupe se désigne et s’identifie. Car les hassidim de loubavitch sont aussi appelés HaBaD. Il s’agit ici de l’acronyme de trois termes en hébreu : Hohma/Bina/Daat (HBD) qui signifient la sagesse, la compréhension et la connaissance.
Ainsi, à la différence des autres groupes hassidiques, les loubavitch se distinguent par leur façon de se nommer. Le mouvement HaBaD est une école intellectuelle très influente jusqu’à nos jours dans l’univers juif religieux. Elle s’est forgée dans l’adversité. La proximité de la ville de Vilna, centre antihassidique représenté par le Gaon de Vilna28 et des nitnagdim (opposants) permit l’émergence de ceux qui deviendront par la suite les « orthodoxes ». La proximité et l’émulation qui existait entre les écoles de Vilna ont fait du mouvement hassidique loubavitch une école intellectuelle qui associe la rigueur, l’ambition et même une certaine austérité qui l’apparente à l’école lituanienne, dont elle conteste les principes mais partage les exigences intellectuelles.
De ce fait, les historiens les plus hostiles au hassidisme considérèrent le mouvement HaBaD comme « rationnel » et même, selon Dubnov, directement influencé par Maïmonide, surtout en ce qui concerne la tradition. À propos de Schneour Zalman, l’auteur du Tanya, il écrit : « L’idéal du tsaddik lui était totalement étranger. Et lorsqu’on lui demandait d’intercéder auprès de Dieu pour une chose ou une autre, il répondait : “Qui suis-je ? Suis-je donc l’émissaire de Dieu ?” Il a purgé le hassidisme de ses superstitions les plus grossières, mais il a également privé ce mouvement de la naïveté enfantine qui distinguait l’enseignement original du Baal Shem Tov. La doctrine de Schneour Zalman fut adaptée à l’assez haut niveau spirituel des masses juives dans le nord-ouest de la Russie. Dans le sud par contre, la doctrine HaBaD n’eut jamais aucun adhérent29. »
La spécificité du hassidisme lituanien est aussi reconnue par W. R. Rabinowitsch30, qui l’oppose au hassidisme ukrainien, moins intellectuel et plus superstitieux.
Seule dynastie à être également un mouvement intellectuel, HaBaD avait de ce fait quelques prédispositions à l’ouverture, parce qu’il est plus facile de rallier une école intellectuelle qu’une dynastie. Cet aspect explique en partie son succès actuel auprès de jeunes juifs pour qui le retour au judaïsme s’apparente à un ressourcement intellectuel31. Il n’en reste pas moins que les loubavitch sont aussi des hassidim pour lesquels les notions de sainteté et de dynastie demeurent centrales. Ce qui provoque au sein du groupe, sinon une dichotomie, du moins une très grande séparation entre les hassidim « de naissance » et les nouveaux adeptes.
Quant aux aspects de « religion populaire » décriés par Dubnov ou la Wissenschaft, il semble bien qu’ils puissent cohabiter avec la rationalité supposée du mouvement HaBaD. La postmodernité s’accommode, on le sait, de contradictions apparentes car, comme l’écrit Gilles Lipovetsky : « Le postmodernisme n’a pour objet ni la destruction des formes modernes ni la résurgence du passé, mais la coexistence pacifique des styles, la décrispation de l’opposition tradition-modernité32… » Ainsi le rebbe est à la fois un tsaddik capable de miracles et un maître intellectuel. L’attach...
Table des matières
- Couverture
- Titre
- Copyright
- Dédicace
- Introduction - Pourquoi les loubavitch ?
- 1 - Loubavitch, une dynastie hassidique
- 2 - De Tunis, Constantine et Meknès à Belleville
- 3 - De Belleville à New York. Voir le rabbi
- 4 - Devenir loubavitch : la techouva ou le retour comme repentir
- 5 - Conversion
- 6 - Lag ba-Omer, la rencontre de deux traditions
- 7 - L’école loubavitch dans le réseau des écoles juives
- 8 - Les femmes au cœur du paradoxe de la modernité
- 9 - Le travail et le sacré
- Conclusion - Ils voulaient le Messie « maintenant »
- Glossaire
- Notes
- Bibliographie
- Remerciements