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Résistance et Dissuasion
Des origines du programme nucléaire français à nos jours
- 400 pages
- French
- ePUB (adapté aux mobiles)
- Disponible sur iOS et Android
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Résistance et Dissuasion
Des origines du programme nucléaire français à nos jours
À propos de ce livre
Il peut paraître surprenant d'accoler les deux termes « Résistance » et « Dissuasion » à une époque, la Seconde Guerre mondiale, où la dissuasion nucléaire française n'existait pas encore. Toutefois, les racines de celle-ci remontent bien à ce conflit, comme en témoignent le caractère pionnier des travaux scientifiques de Frédéric Joliot et de son équipe au Collège de France, ainsi que le rôle clé joué par les atomiciens de la France libre. Une leçon essentielle s'imposa à l'issue de la guerre : l'existence de la France en tant que pays libre ne va pas de soi. C'est dans cet « esprit de Résistance » que se poursuit l'aventure atomique française, avec, à l'initiative du général de Gaulle, la création du Commissariat à l'énergie atomique (CEA) en 1945, puis, sous la IVe République, le lancement secret du programme nucléaire militaire, jusqu'à la consécration de la dissuasion nucléaire sous la Ve République. Aujourd'hui encore, la dissuasion nucléaire demeure la garantie ultime de la sécurité, de la protection et de l'indépendance de la France. C'est ce lien entre Résistance et Dissuasion, d'hier à aujourd'hui, qu'examine cet ouvrage, à la rencontre de l'histoire et de la géopolitique, avec le témoignage de grands acteurs de la politique de dissuasion nucléaire française. Sous la direction de Céline Jurgensen et Dominique Mongin Céline Jurgensen est diplomate. Elle a occupé divers postes au ministère des Affaires étrangères, au ministère des Armées et au CEA. Elle enseigne à l'École normale supérieure (Ulm), au sein du Centre interdisciplinaire d'études sur le nucléaire et la stratégie. Dominique Mongin est docteur en histoire. Il enseigne à l'École normale supérieure (Ulm), au sein du Centre interdisciplinaire d'études sur le nucléaire et la stratégie, ainsi qu'au département Hautes Études internationales de l'Inalco.
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Informations
CHAPITRE 1
Le nucléaire, un enjeu stratégique pour la France au cours de la Seconde Guerre mondiale
Frédéric Joliot-Curie et les débuts de l’énergie atomique,
1900-1939
RENAUD HUYNH*1
Frédéric Joliot-Curie fait partie des grands scientifiques qui ont marqué le XXe siècle, tant par ses travaux de physique et de chimie que par sa participation pionnière à l’organisation de la science et de la recherche en France ou encore à travers son combat pour l’utilisation pacifique de l’énergie atomique. L’objectif de cette contribution est de retracer son parcours jusqu’en 1939 et d’évoquer ainsi le passage de la « science de la radioactivité » du début du XXe siècle à l’ère du nucléaire, qu’il soit civil ou militaire.
Jean Frédéric Joliot naît à Paris le 19 mars 1900, l’année même où Pierre et Marie Curie présentent au Congrès international de physique leur rapport sur « les nouvelles substances radioactives et les rayons qu’elles émettent ». Frédéric, qui a vingt ans de moins que son frère aîné, est le sixième et dernier enfant d’Henri Joliot (1847-1921) et d’Émilie Roederer (1857-1946). Son père est un négociant cultivé, musicien et amateur de pêche et de chasse, et il communiquera à son fils Frédéric son goût de la nature et des arts, tandis que sa mère, issue d’une vieille famille alsacienne protestante, républicaine et libérale, saura éveiller en lui des valeurs sociales auxquelles il adhérera tout au long de sa vie1.
Frédéric entre en huitième au lycée Lakanal de Sceaux à la rentrée scolaire de 1910. Il y obtient son certificat d’études secondaires en juillet 1915. Il y reste encore deux ans pour préparer le baccalauréat, dont il obtient la première partie en juin 1916. Il intègre alors l’École Lavoisier, en vue de préparer le concours d’entrée à l’École de physique et chimie industrielles de la ville de Paris (ESPCI), qu’il obtient en 1919. Joliot intègre la 39e promotion de 1920, avec Pierre Biquard, André Langevin, André Lazard, Henri Le Boiteux, Jacques Parrot et Jean-Jacques Trillat. Ce groupe d’amis restera uni, bien au-delà des études. Frédéric Joliot commence alors à se passionner pour la chimie, jusqu’à transformer l’intérieur du logement familial en laboratoire expérimental, comme le décrira son ami Pierre Biquard2. C’est durant ces trois années à « PC3 » que son admiration pour Paul Langevin, que les élèves appelaient le Patron, naîtra et grandira. Ses talents d’expérimentateur s’affirmeront également durant cette période. Joliot sort major de sa promotion de physique en 1923. Paul Langevin devient rapidement un mentor pour Frédéric, peut-être en raison des nombreux points communs dans leurs parcours (origines sociales, École Lavoisier, ESPCI…). L’influence de Langevin s’effectue au niveau scientifique, bien sûr, mais aussi au niveau politique et philosophique. Comme Langevin, Joliot croit profondément au bienfait de la science et au progrès de l’humanité par la science, ainsi qu’à la nécessité d’un enseignement scientifique pour tous4.
Après avoir obtenu plusieurs sursis, Frédéric Joliot est contraint en novembre 1923 d’effectuer son service militaire. Durant cette période, il songe à son avenir et se renseigne pour une carrière dans la recherche scientifique. En novembre 1924, Paul Langevin lui propose une entrevue avec Marie Curie dans le laboratoire qu’elle dirige à l’Institut du radium de Paris. Celle-ci lui obtient d’être dispensé des trois semaines de service militaire qu’il lui reste à faire et l’engage en 1925 comme préparateur particulier. L’année suivante, à la demande de la Patronne, il passe la deuxième partie de son baccalauréat et s’inscrit en licence ès sciences, qu’il obtient en 1927. Le voici donc, de 1925 à 1927, à la fois étudiant et assumant ses fonctions de préparateur.
Au contact des travailleurs de ce laboratoire, et notamment de Fernand Holweck, le chef de travaux, et d’Irène Curie, la fille aînée du célèbre couple, le jeune chercheur s’initie à la « chimie de l’impondérable », aux techniques liées à la préparation et à l’étude des sources radioactives, et se révèle un habile expérimentateur. Des liens professionnels et amicaux se tissent avec Irène, dont l’abord est réputé difficile. Ils se marient le 9 octobre 1926, dans l’intimité. Ils auront deux enfants : Hélène, qui voit le jour en 1927, et Pierre, né en 1932.
« Nous avions compris que nous pourrions difficilement nous passer l’un de l’autre. Nous avions des caractères différents, mais qui se complétaient. Les bonnes associations, pour le travail comme pour la vie, ne sont pas celles de caractères identiques, mais complémentaires5 », dira Joliot au sujet de leur union.
En complément de son poste de préparateur, Frédéric Joliot commence en 1927 à donner des cours à l’École d’électricité industrielle de la ville de Paris. La même année, il obtient une bourse d’études de la Fondation Edmond-de-Rothschild, qu’il conserve jusqu’en 1931. Enfin, par décret du 1er octobre 1931, il est nommé chargé de recherche de la Caisse nationale des sciences.
Le 1er octobre 1932, Irène Joliot-Curie est nommée chef de travaux : son mari la remplace immédiatement en tant qu’assistant du laboratoire de radioactivité. Il est nommé officiellement à ce poste le 1er janvier 1933. Il garde ses fonctions jusqu’au début 1935.
Les premiers travaux scientifiques de Frédéric Joliot sont publiés en mai 1927, sur l’étude du dépôt électrolytique des radioéléments, et en 1930, il soutient brillamment sa thèse de doctorat « sur l’étude électrochimique des radioéléments », devant un jury composé de Georges Urbain, Jean Perrin et André Debierne.
Il acquiert à l’Institut du radium une certaine maîtrise technique de la chambre d’ionisation et de la chambre à détente de Wilson, un appareil qu’il perfectionne et qui lui permettra plus tard, en 1939, d’apporter une preuve physique de la fission de l’uranium. Il s’intéresse à l’étude des rayons alpha du polonium ainsi qu’à la préparation de sources intenses de rayonnements.
Jusqu’en 1932, Frédéric travaille et publie abondamment seul (douze publications) ou avec d’autres auteurs (huit). La cadence s’accélère entre 1932 et 1935, avec de nombreuses publications, qui illustrent notamment son étroite collaboration avec Irène Curie et une activité de recherche prolifique6.
Leur principal sujet de cette période est l’étude du rayonnement pénétrant excité par les rayons alpha des atomes légers. Puis ils mènent des recherches sur les neutrons, mais aussi sur la production et les propriétés des électrons positifs, jusqu’à la découverte de la radioactivité artificielle. Pour cette dernière découverte, un jeune physicien allemand travaillant au Laboratoire Curie en 1933, Wolfgang Gentner, spécialiste des compteurs Geiger, contribua aux expériences des Joliot-Curie pour prouver l’existence de ces nouveaux corps radioactifs créés par transmutation.
Au cours de recherches sur les « électrons de transmutation », Irène Curie et Frédéric Joliot montrent que des noyaux atomiques irradiés par les rayons alpha du polonium émettent un rayonnement complexe qui ne s’explique pas. Ils interprètent ce résultat en supposant qu’au lieu d’un proton, il y a alors émission d’un neutron et d’un électron positif pour donner le même noyau final. Cette hypothèse est longuement discutée au cours du conseil de physique Solvay en octobre 1933. Une explication satisfaisante sera finalement apportée par la découverte de la radioactivité artificielle, trois mois plus tard.
Irène Curie et Frédéric Joliot parviennent en effet à produire artificiellement des radio-isotopes qui se désintègrent suivant la même loi exponentielle que les radioéléments naturels par l’émission d’un spectre continu d’électrons positifs. Ils identifient chimiquement deux nouveaux radio-isotopes, le radioazote 13N et le radiophosphore 30P.
Frédéric Joliot est nommé le 1er mars 1935 maître de conférences de chimie physique et radioactivité à la faculté des sciences, en remplacement d’André Debierne, devenu directeur du Laboratoire Curie après le décès de Marie Curie. Cette même année 1935, Irène et Frédéric Joliot-Curie reçoivent le prix Nobel de chimie pour la découverte de la radioactivité artificielle, en reconnaissance de leur synthèse de nouveaux éléments radioactifs7.
Dès lors, toutes les portes et fonctions vont être ouvertes à Frédéric Joliot, qui devient progressivement Frédéric Joliot-Curie. La presse parle alors des recherches du « couple atomique », des découvreurs du « radium artificiel », puis bientôt des « briseurs d’atomes ». Le 1er décembre 1936, Frédéric Joliot est nommé directeur du nouveau Laboratoire de synthèse atomique, l’un des premiers laboratoires du Centre national de la recherche scientifique (CNRS). Il fait alors transformer et équiper le « Laboratoire Ampère » à Ivry avec un accélérateur de particules de type Van de Graaf fournissant des impulsions de trois millions de volts (deux colonnes de cet appareil seront exposées à l’entrée du Palais de la découverte à son ouverture lors de l’Exposition universelle de 1937).
Le 1er janvier 1937, il devient professeur titulaire de la chaire de chimie nucléaire au Collège de France.
Ainsi, dès 1937, Joliot et son équipe travaillent à la construction et à l’exploitation d’accélérateurs de particules qui permettent d’étudier les réactions nucléaires et produire de nouveaux radioéléments artificiels. Le premier et le plus grand accélérateur de particules réalisé à l’époque en Europe occidentale est le cyclotron du Collège de France.
Irène Joliot-Curie quant à elle, après une brève participation au gouvernement du Front populaire de Léon Blum, où elle est nommée en 1936 sous-secrétaire d’État à la Recherche scientifique, poursuit ses recherches au Laboratoire Curie. En décembre 1938, reprenant ses résultats récents sur les « transuraniens », Otto Hahn, Fritz Strassman et Lise Meitner découvrent la fission du noyau d’uranium.
Aussitôt, Frédéric Joliot entreprend des expériences pour apporter une preuve physique de ce phénomène de rupture de noyau8.
Joliot et ses collaborateurs, notamment Hans Halban (1908-1964) et Lew Kowarski (1907-1979), travaillent alors sur les conditions de réalisation d’une réaction en chaîne.
Malgré le courrier du physicien Léo Szilard (1898-1964), daté du 2 février 1939, demandant à Joliot de ne plus publier les résultats de ses recherches sur la fission de l’uranium, Joliot et son équipe continuent de publier jusqu’à la déclaration de guerre en septembre 1939.
En 1939, à la veille du conflit mondial, trois demandes de brevets d’inventions, signés par Halban, Joliot, Kowarski et Perrin9, sont déposés sur la production d’énergie nucléaire, au nom du CNRS10 : « Dispositif de production d’énergie » (1er mai 1939), « Procédé de stabilisation d’un dispositif producteur d’énergie » (2 mai 1939) et « Perfectionnements aux charges explosives » (4 mai 1939).
Le premier brevet décrit les combustibles possibles, les ralentisseurs, les principes techniques de la production d’énergie nucléaire (y compris l’exploitation des radioél...
Table des matières
- Couverture
- Titre
- Copyright
- Remerciements
- Préface
- Avant-propos
- Présentation générale de l'ouvrage
- CHAPITRE 1 - Le nucléaire, un enjeu stratégique pour la France au cours de la Seconde Guerre mondiale
- CHAPITRE 2 - L'esprit de Résistance et les débuts du CEA
- CHAPITRE 3 - Le général de Gaulle et la souveraineté nucléaire
- CHAPITRE 4 - Indépendance nationale et dissuasion nucléaire française, d'hier à aujourd'hui
- Conclusion générale
- Annexes
- Cahier photos
- Table