Cahiers de l'Atelier n° 557
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Cahiers de l'Atelier n° 557

Migrations : construire des ponts, pas des murs

  1. French
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Cahiers de l'Atelier n° 557

Migrations : construire des ponts, pas des murs

À propos de ce livre

La politique de la France et celle de la majeure partie des pays d'Europe visent de plus en plus à dissuader les exilés, réfugiés, demandeurs d'asile ou pas, de séjourner sur le Vieux Continent. Ce numéro analyse le sens des mesures prises récemment par le gouvernement français et le projet de loi qu'il annonce. En réponse à cette attitude de fermeture après les États généraux des migrations organisés en mai par 470 associations et collectifs citoyens, ce numéro des Cahiers de l'Atelier met également en lumière les pratiques d'accueil des étrangers qui, en France et ailleurs, bien loin de déchirer le tissu social, le renforce.

En réponse aux demandes des associations et des citoyens devant le sort fait aux étrangers arrivant en France, les pouvoirs publics ont développé un discours alliant « humanité et fermeté ». Dans la pratique, les politiques menées ne répondent pas, voire aggravent, la situation des étrangers. La chasse aux migrants continue dans les Alpes, près de Calais et partout en France, tandis que les procès de citoyens solidaires se succèdent. Le tri entre « bons » et « mauvais migrants » semble devenir la ligne de conduite gouvernementale. Pendant que les reconduites à la frontière s'amplifient, le processus d'externalisation du contrôle migratoire en Lybie, au Tchad, au Niger se renforce. À quelle logique obéit cette politique de courte vue? Quelle vision du monde, de ses atouts et de ses périls, révèle-t-elle?

Loin de se résigner à la critique de cette politique motivée par la peur, ce numéro montre que l'accueil des étrangers, pour peu qu'il soit organisé et fasse appel aux citoyens, peut devenir un révélateur et un moteur de solidarité pour toute la société. L'intelligence collective développée dans ces pratiques dessine les traits d'un monde où les ponts des dynamiques coopératives sont plus riches que les murs du repli sur soi.

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Informations

Les politiques migratoires contemporaines

Bilan des politiques migratoires : les droits des étrangers sacrifiés

Danièle Lochak est juriste et présidente du Groupe d’information et de soutien des immigrés (GISTI). Elle est l’auteure de nombreux ouvrage dont Le droit et les paradoxes de l’universalité (PUF, 2010).
Au gré des politiques publiques menées depuis plusieurs décennies et des gouvernements qui se sont succédé, la situation des étrangers sur le territoire français a connu une aggravation égale à celle des politiques migratoires toujours plus répressives. Danièle Lochak dresse le bilan de ces évolutions.
La politique dite de « maîtrise des flux migratoires » menée par la France depuis les années 1980, et confortée par une politique européenne commune désormais tout entière axée sur la fermeture des frontières, a des effets de plus en plus destructeurs, à mesure que le temps passe, sur les droits fondamentaux des étrangers. Elle a des répercussions à la fois sur la condition des immigrés installés régulièrement sur le territoire, sur la situation des centaines de milliers d’individus qu’elle maintient en situation irrégulière, et enfin sur tous ceux, migrants économiques et réfugiés confondus – si tant est que l’on puisse les distinguer –, qu’on veut à tout prix empêcher d’atteindre les frontières de l’Europe.

Précarisation du droit au séjour

Car maîtriser les flux, cela veut dire : fermer les frontières et instaurer des contrôles draconiens à l’entrée du territoire, au risque de compromettre l’exercice du droit d’asile ; contraindre au départ ceux qui sont entrés et se sont maintenus irrégulièrement en France et donc, pour les repérer, organiser des contrôles d’identité à grande échelle et évidemment sélectifs ; s’efforcer enfin de colmater toutes les brèches par où les « flux » pourraient encore pénétrer, en entravant l’arrivée des familles, des étudiants, des demandeurs d’asile, des simples touristes, des conjoints de Français, soupçonnés d’être de faux étudiants, de faux demandeurs d’asile, de faux touristes, des conjoints de complaisance... Si, en 1974, a été officiellement annoncée la suspension de l’immigration de main-d’œuvre – et d’elle seule –, on voit bien, quand on regarde les chiffres, quand on observe l’évolution des textes et des pratiques, que l’objectif réellement poursuivi par la suite a été de réduire au maximum tous les « flux » migratoires.
Et pour atteindre cet objectif, on n’a pas hésité à apporter des restrictions croissantes à des droits fondamentaux théoriquement universels. La parenthèse de 1981 et de l’espoir qu’a suscité l’accession de la gauche au pouvoir s’est vite refermée. Par la suite, le retour de la gauche au pouvoir au gré des alternances n’a plus véritablement enrayé cette évolution régressive.
Ainsi, la liberté de se marier est en principe garantie à tous, sans considération de nationalité. Mais sous prétexte de se prémunir contre la fraude, le mariage des étrangers a été placé sous haute surveillance dès l’instant où il est susceptible d’engendrer un droit au séjour ou à la nationalité française. Le mariage de complaisance, ou « mariage blanc », a été érigé en délit passible de cinq ans de prison, de même que, plus tard, l’imagination du législateur étant sans limites, le « mariage gris » : celui où l’étranger a trompé l’époux français sur sa véritable intention.
Le droit au respect de la vie privée et familiale, proclamé lui aussi haut et fort, est mis à mal par les conditions de plus en plus strictes mises au regroupement familial et à l’obtention d’un titre de séjour. La carte de résident de dix ans, créée en 1984, qu’obtenaient à l’origine de plein droit tous les étrangers ayant des attaches en France, n’est plus délivrée que sous conditions et au compte-gouttes.
Les discriminations fondées sur la nationalité ont été supprimées pour l’accès aux prestations sociales, mais l’affiliation à la Sécurité sociale et le droit aux prestations sont subordonnés depuis 1993 à la détention d’un titre de séjour, alors même que les réformes successives ont rendu de plus en plus difficile son obtention. Ainsi, les dizaines de milliers de personnes qui se retrouvent sans papiers par l’effet de la législation ou des pratiques préfectorales se voient refuser la plupart des droits sociaux. Alors même qu’en raison de leur situation familiale, de la durée de leur présence en France ou des risques qu’ils encourent dans leur pays, ils auraient légitimement vocation à obtenir un droit au séjour.
Si le droit au juge est, sur le papier, parfaitement garanti puisqu’un recours est toujours ouvert contre les décisions de l’administration, y compris un refus de séjour ou une mesure d’éloignement, la protection qui en résulte s’avère souvent illusoire parce que les conditions dans lesquelles le juge doit être saisi et dans lesquelles il statue rendent les recours souvent ineffectifs. Le contentieux des mesures d’éloignement, régi par une procédure dérogatoire, illustre un fonctionnement de la justice conçu avant tout pour ne pas entraver l’action de l’administration : brièveté des délais de saisine, assistance juridique au rabais, procédures accélérées, juge unique, appel non suspensif...
Si le droit de ne pas être détenu arbitrairement s’applique aux étrangers comme aux nationaux, les premiers peuvent néanmoins être privés de liberté – placés en zone d’attente ou en rétention administrative – en dehors de toute procédure pénale, dès lors qu’ils sont sous le coup d’un refoulement ou d’une mesure d’éloignement. Au fil des réformes, la durée de cet enfermement s’est allongée : au départ fixée à 7 jours, elle peut atteindre aujourd’hui 45 jours et atteindra 90 jours une fois adoptée la loi actuellement en discussion.
Le droit d’asile est vidé de sa substance par une politique restrictive de reconnaissance du statut de réfugié et la systématisation d’un ensemble de notions comme celles de « pays tiers sûr », « pays d’origine sûr », « demande manifestement infondée » qui permettent de rejeter les requêtes sans examen sérieux du dossier ou, plus radicalement encore – on le montrera plus loin –, par les obstacles mis à l’accès des réfugiés au territoire européen.

Développement de l’arsenal répressif

Pour renforcer l’efficacité de cette politique de rejet et d’exclusion, on a mis en place un réseau de surveillance et de contrôles de plus en plus dense et un arsenal répressif toujours plus sévère face à des étrangers désormais suspectés d’être non seulement dangereux pour la sécurité publique, mais des clandestins ou des fraudeurs en puissance : généralisation des contrôles d’identité au faciès ; enquêtes policières au domicile pour repérer la présence de membres de famille en situation irrégulière ou, à l’inverse, pour vérifier la réalité de la vie commune entre conjoints ; prolifération des fichiers intégrant un nombre croissant de données, y compris biométriques, et interconnectés ; aggravation constante des peines encourues pour les infractions à la législation sur le séjour, etc.
L’arsenal répressif n’est pas dirigé seulement contre les migrants. Sur la base d’une interprétation de plus en plus large du délit d’aide au séjour irrégulier – le fameux « délit de solidarité » –, les poursuites se multiplient – accompagnées le cas échéant de mesures d’intimidation telles que placement en garde à vue ou perquisitions domiciliaires – contre les citoyens qui apportent un soutien aux sans-papiers ou se montrent solidaires des exilés pourchassés par la police.

Politique européenne de maintien à distance des migrants

Le tableau se noircit encore lorsqu’on porte le regard sur les mesures prises au niveau européen pour maintenir les personnes originaires des pays du Sud à distance des frontières de l’Europe, y compris celles qui fuient leur pays pour trouver refuge ailleurs. Sont sacrifiés à cette politique de fermeture des frontières des droits aussi fondamentaux et aussi absolus que le droit de quitter son pays, la liberté individuelle, le droit d’asile, le droit de ne pas être soumis à des traitements inhumains ou dégradants et même le droit à la vie.
L’enfermement des étrangers est devenu une constante et une composante essentielle des politiques d’immigration et d’asile à l’heure de la mondialisation. Le phénomène est amplifié et aggravé par l’« externalisation » de la politique européenne d’immigration et d’asile qui débouche sur la création de camps hors des frontières de l’Union européenne. Y sont maintenus des étrangers « coupables » d’un même et seul « délit » : celui d’avoir franchi ou tenté de franchir illégalement des frontières ou de s’être maintenu illégalement sur un territoire. Dans ces camps, les étrangers sont privés de la plupart des garanties minimales normalement reconnues aux personnes détenues dans un État de droit, tel le droit de connaître la durée de sa détention ou d’accéder à un juge. Ils sont exposés à subir brutalités et violences ou d’autres formes de traitements inhumains et dégradants.
Le droit d’asile se réduit lui aussi comme peau de chagrin. En verrouillant l’accès à leur territoire de tous les étrangers – ou plus exactement de ceux qui sont originaires du Sud –, les pays européens interdisent du même coup à ceux qui ont besoin d’une protection internationale de trouver une terre d’accueil, en violation de la Convention de Genève sur les réfugiés, qu’ils ont pourtant tous ratifiée. Car le droit d’asile est privé de tout contenu concret dès lors qu’on empêche les personnes d’arriver dans les pays où elles pourraient s’en prévaloir. On n’hésite pas non plus, sur la base d’accords de réadmission, à les refouler vers des pays de transit peu soucieux des droits de l’homme et du droit d’asile qui n’hésiteront pas à les renvoyer vers les pays qu’ils cherchaient à fuir.
C’est enfin le droit à la vie qui est dénié à ces hommes et ces femmes qu’on veut à toute force empêcher de parvenir aux frontières de l’Europe. Car en leur interdisant d’utiliser les modes de déplacement normaux, on les livre aux passeurs et au racket ; en érigeant sur leur chemin toujours plus de murs et de barbelés, on les contraint à trouver des voies de contournement dangereuses et souvent mortelles. Des centaines, des milliers de migrants, acculés à prendre toujours plus de risques pour échapper aux contrôles, trouvent la mort chaque année en tentant de franchir les obstacles qu’on dresse sur leur route.
On sait, par ailleurs, que des crimes contre l’humanité sont aujourd’hui commis dans plusieurs pays, dont la Libye. Or les États européens continuent à fournir des moyens aux autorités libyennes pour qu’elles interceptent les migrants qui tentent de quitter le pays : ce faisant, ils se rendent sciemment complices des crimes commis à leur encontre.
On le voit : ce ne sont pas seulement les droits des migrants qui sont sacrifiés aux politiques migratoires ; ce sont aussi les principes fondateurs de l’État de droit et de la démocratie que l’on voit progressivement se désagréger.

État des lieux des politiques migratoires à l’échelle internationale

Docteure en sciences politiques, Catherine Wihtol de Wenden est directrice de recherche émérite (CNRS, CERI).
Quelles réalités regroupe le terme générique d’« immigration » ? Et quelles sont, depuis plusieurs décennies, les politiques migratoires pratiquées à l’échelle internationale ? Catherine Withol de Wendel dresse un état des lieux de politiques et de réalités diverses selon les régions du monde.
Les politiques migratoires à l’échelle internationale sont, pour l’essentiel, définies par les grands pays d’immigration du monde : Europe, États-Unis, Canada, Australie, Japon. Ces politiques migratoires ont d’abord été marquées par des politiques de peuplement (États-Unis, Canada, Australie) ou de main-d’œuvre et d’accueil de réfugiés (Europe), parfois depuis les XVIIIe et XIXe siècles, puis par une approche sécuritaire dictée par la peur de l’invasion, du terrorisme, de la concurrence sur le marché du travail, et de la diversité ethno-culturelle.
Aujourd’hui, la plupart de ces politiques sont centrées sur le contrôle des frontières, modulé par une timide ouverture à l’immigration qualifiée et par l’obligation de respect des engagements juridiques relatifs au droit d’asile (Convention de Genève de 1951), aux droits de l’enfant (Convention internationale des droits de l’enfant de 1989), au regroupement familial (un principe souvent constitutionnel) et aux accords bilatéraux de main-d’œuvre (travail saisonnier ou agricole) dans certains pays. Pourtant, tous ces pays sont économiquement et démographiquement dépendants de l’immigration, seul facteur de croissance de leur population. La marge de manœuvre des politiques d’immigration est souvent limitée (notamment dans le cadre européen) et les impératifs contradictoires.
Les dilemmes sont nombreux pour ces politiques migratoires : les sondages et l’opinion publique, souvent hostiles à l’immigration et au fort impact sur les politiques publiques dans les démocraties, à concilier av...

Table des matières

  1. Page de titre
  2. Sommaire
  3. Éditorial
  4. Liminaire
  5. Les politiques migratoires contemporaines
  6. Des pratiques d'accueil
  7. Développer de nouveaux regards et de nouvelles pratiques
  8. Annexe
  9. À lire
  10. À paraître