Millennials, la génération qui secoue l'Amérique
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Millennials, la génération qui secoue l'Amérique

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Millennials, la génération qui secoue l'Amérique

À propos de ce livre

« Aux États-Unis, chaque génération est un nouveau pays », écrivait Tocqueville. La quatorzième génération américaine, les « Millennials », nés entre 1981 et 1996, lui donne raison. Forte de ses 75 millions de membres, elle est la plus diverse de l'histoire du pays, la plus diplômée, la plus ouverte culturellement et, électoralement, la plus à gauche depuis les années 1960.

Vue de l'esprit? Divagation? Parle-t-on bien des États-Unis d'Amérique présidés par Donald Trump?

L'Amérique des Millennials – jeune, plurielle et progressiste – est en effet l'antithèse de l'Amérique de Trump – vieillissante, blanche et conservatrice. Elle a déjà aiguillé le pays vers des avancées sociétales (mariage gay, légalisation de la marijuana).

Saura-t-elle mener une « révolution politique » en assurant la défaite de Donald Trump lors de la présidentielle de 2020 et en permettant la mise en œuvre du programme le plus radical depuis le New Deal?

Foire aux questions

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Chapitre 1
United Colors of Millennials

Le soir, lorsqu’elle rentre de la célèbre New York University où elle étudie l’anglais et l’histoire de l’Art, Ashley, dont les origines sont anglaise, allemande, norvégienne et italienne (elle a fait un test ADN, c’est à la mode), s’arrête faire quelques courses dans l’épicerie tenue par des citoyens américains nés en Corée du Sud. Parfois, le ventre un peu vide après une intense journée de cours, elle craque pour une part de pizza « pepperoni » (sa préférée) chez Melani Pizzeria où elle exerce aussi son espagnol avec le pizzaiolo né au Mexique. Les samedis de soirée entre potes, elle s’arrête à Essex Street pour prendre conseil, chez Gary’s Liquor, auprès de ce jeune vendeur, dont la famille est originaire d’Inde, qui ne lui est pas indifférent. Tous les matins, en partant du T4 qu’elle loue en colocation sur Ridge Street pour rejoindre la station de métro Delancey Street, elle emprunte Rivington Street et passe entre l’école maternelle Amalia-Castro et l’école primaire Nathan-Strauss qui accueillent des centaines d’enfants âgés de 2 à 10 ans, citoyens américains venus de dizaines d’horizons ou immigrés récents et parfois sans-papiers.
Chacun des pas quotidiens de la jeune étudiante dans le quartier de Lower East Side, à New York, dessine un point d’un tableau beaucoup plus grand : celui du bouleversement démographique que connaissent les États-Unis.
Celui-ci est indéniable, mais encore faut-il dire avec précision de quoi il s’agit. Car la façon dont le bureau du recensement des États-Unis (US Census Bureau) présente les choses n’est pas sans poser problème. Selon cet organisme fédéral, à l’horizon d’une génération (2042 ou 2044, peu importe), les Blancs deviendront une minorité et les États-Unis seront alors un pays sans majorité démographique. Mais qu’est-ce qu’un Blanc, dans le cadre des présupposés du recensement ? Certes, quelqu’un qui se déclare comme tel puisque le principe déclaratif prévaut. Mais si le fils d’un Blanc et d’une Africaine-Américaine coche plusieurs cases (en l’occurrence « Blanc » et « Noir »), il sera intégré à la catégorie « autre race » et il ne sera comptabilisé ni comme Blanc ni comme Noir, alors qu’il en porte l’héritage culturel. Donc, pour en rester à ce qui échauffe les esprits assez aisément outre-Atlantique, à savoir la diminution de la proportion de Blancs, ne sont appelés à être définis comme Blancs que ceux qui n’ont pas d’ancêtres autres que Blancs...
Projection du poids de chaque génération d’ici 2050
Les Millennials constituent d’ores et déjà la génération la plus nombreuse. Son poids relatif ne cessera d’augmenter dans les prochaines années.
Source : Pew Research Center
D’une certaine façon, cette catégorisation perpétue la « one drop rule » du xixe siècle, selon laquelle une seule goutte de sang noir faisait de vous un Noir. C’est une règle au service de l’idéologie de la « pureté raciale » énoncée ainsi par l’eugéniste Madison Grant : « Le croisement entre un Blanc et un Indien est un Indien ; le croisement entre un Blanc et un Noir est un Nègre ; le croisement entre un homme blanc et un hindou est un hindou, et le croisement entre une des trois races européennes et un juif est un juif{5}. »
Il s’agit là d’une conception « biologique » de la question raciale, alors qu’elle est d’abord une question de pouvoir, selon Charles King{6}. La problématique du classement a déjà taraudé la société américaine. C’était au point culminant des vagues d’immigration du début du xxe siècle. Un furieux débat avait alors agité le pays : dans quelle catégorie classer les immigrés venus d’Europe de l’Est et du Sud ? Ils ont finalement été incorporés au groupe « Blancs », auquel avaient aussi été intégrés les Irlandais, d’abord puissamment rejetés par les WASP (White Anglo-Saxon Protestant, protestants blancs anglo-saxons, groupe symbolisé par les « pères fondateurs » qui l’étaient tous) lors de leur arrivée dans le Nouveau Monde, comme l’a formidablement dépeint Martin Scorsese dans Gangs of New York.
Les méthodes de classification de l’US Census Bureau provoquent une sous-évaluation de la taille de la population blanche et nourrissent l’idée, exploitée par les nationalistes, qu’elle va devenir minoritaire en son propre pays. L’immense majorité (80 % pour être précis) des enfants nés de couples « mixtes » (désormais 15 % de leur classe d’âge) a en effet un parent blanc, selon une étude publiée en 2018{7}. Et la plupart vivent dans des quartiers majoritairement blancs et ont des amis principalement blancs. L’un des auteurs de l’étude, le sociologue Richard Alba{8}, conteste le classement dans le groupe « minorités » de tout enfant né d’un couple mixte. « Je ne propose pas plus que le groupe “mixte” soit compté avec les Blancs » au prétexte que la majorité des parents sont blancs, ajoute le chercheur.
Selon lui, les chiffres du Bureau du recensement sont le fruit d’une « conception binaire ». Richard Alba est l’auteur d’un autre article qui déconstruit ces catégories anciennes{9}. « Les projections établissent une situation à somme nulle : si les individus ne sont pas blancs, alors ils font partie des minorités », dénonce-t-il, alors que « les groupes ethnoraciaux du futur ne ressembleront pas aux groupes du présent. Ils seront bien plus hétérogènes ». Et « il n’y aura peut-être jamais de minorités majoritaires » au sens où on l’entend aujourd’hui, ajoute-t-il à rebours du discours dominant.
Ces redéfinitions des groupes ethniques et le métissage de plus en plus courant conduiront à ce que les États-Unis deviennent rapidement une « nation post-européenne », selon la formule du politologue Philip Golub{10}.
De la portée tellurique de ces changements, Ashley n’a pas forcément conscience lorsqu’elle fait ses courses ou jette un œil sur une partie de foot entre gamins. Elle ne voit que des commerçants, des enfants et un caviste pour qui elle a le béguin. Sa vision des relations sociales et du monde est « color blind » : elle ignore la couleur de la peau dans un pays qui en a historiquement fait une obsession.
Là encore, la neutralité de sa rétine et de son esprit illustre un mouvement plus général : la génération dont elle fait partie, les Millennials, est à la fois la plus diverse de l’histoire des États-Unis et, à ce titre, sans doute, la moins sujette aux pulsions identitaires.

La génération la plus diverse

Le fossé générationnel : composition par groupes d’âge
Source : recensement des États-Unis 2010.
Sa génération – celle des 18-35 ans – est composée (avec toutes les précautions préalables bien présentes à l’esprit) à 56 % de Blancs et à 13 % d’Africains-Américains, la plus ancienne « minorité » du pays. 30 % font partie des « nouvelles minorités » : 21 % de Latinos, 6 % d’Asiatiques et 3 % qui déclarent plusieurs origines. Plus diverse qu’aucune autre génération avant elle... et plus urbaine. 86 % d’entre eux vivent dans des aires métropolitaines. Cette dernière notion est assez lâche puisqu’elle englobe les hypercentres comme les suburbs les plus éloignées et même les exurbs, ces excroissances urbaines situées à plusieurs dizaines de kilomètres des cœurs de métropole. Mais les statistiques montrent que la proportion de Millennials est la plus élevée dans les « urban cores », les centres-villes, et qu’elle diminue au fur et à mesure que l’on s’en éloigne. Pour être un peu plus précis, ce sont surtout les Millennials issus des minorités qui élisent domicile dans l’œil du cyclone métropolitain, tandis que les Millennials blancs se montrent plus réceptifs aux sirènes « suburbaines » qui ont tant appâté leurs parents baby boomers.
Les métropoles mondiales que sont New York, Los Angeles, Boston, Chicago et désormais Washington, D.C. constituent les aimants principaux. Mais des métropoles de « second rang » (Denver, Atlanta, Austin, San Diego, Dallas, Houston) se montrent également séduisantes pour la jeune génération. Enfin, pour la génération la plus diplômée de l’histoire du pays (voir chapitre 2), les villes universitaires (college towns) sont extrêmement attractives, y compris lorsqu’elles se situent dans des États en stagnation économique (Madison dans le Wisconsin en est l’exemple le plus représentatif). Vingt-deux des cent premières aires métropolitaines se trouvent d’ores et déjà dans la configuration future d’une Amérique supposément sans majorité « ethnique » (quatre États le sont également : Hawaï, le Nouveau-Mexique, le Texas et la Californie, ces deux derniers étant les plus peuplés du pays) tandis que, dans quatorze États, la population des moins de 18 ans se trouve déjà dans cette situation. Au final, la géographie de la population millenniale recoupe celles de l’archipel métropolitain et du dynamisme économique.
Composition « ethnique » de la population des Millennials dans des grandes aires métropolitaines en 2015
Source : William Frey, « The Millennial Generation: A demographic bridge to America’s diverse future », Brookings Institution, janvier 2018. D’après les estimations du recensement des États-Unis.
La géographie de la « diversité » est, quant à elle, un peu plus différenciée (voir graphique ci-contre). Les jeunes Africains-Américains privilégient les métropoles dynamiques du sud (Atlanta, Charlotte), participant à une « nouvelle grande migration », un siècle après la « grande migration » qui vit des millions de Noirs quitter les anciens États de la confédération pour les grandes villes industrielles (Chicago, New York, Detroit, notamment). Les logiques d’implantation des jeunes Latinos ne diffèrent pas tant que cela de celles de leurs aînés – proximité avec la frontière d’abord : Texas, Arizona et Californie pour ceux dont les racines plongent au Mexique et en Amérique latine, New York pour les Portoricains et les Caribéens. La proportion de Millennials blancs s’avère supérieure à la moyenne, comme par défaut, dans des villes où les immigrations et migrations sont moins fortes : Seattle, Pittsburgh, Detroit, Minneapolis-Saint Paul.
Les inégalités sociales frappent également les Millennials. À Bakerfield (Californie), près d’un tiers d’entre eux vit sous le seuil de pauvreté tandis que dans les « twin cities » (les villes jumelles de Minneapolis et Saint Paul), seul un dixième subit ce fléau. Dans la première ville, 59 % des jeunes sont Latinos. Dans les secondes, 71 % sont blancs. Même parmi la jeunesse, les distorsions sociales correspondent bien souvent à des distorsions « raciales ». Ainsi, à Bakerfield, 14 % seulement des jeunes sont diplômés de l’université, tandis qu’à Minneapolis et Saint Paul, près de la moitié peut s’en prévaloir. Aux États-Unis, les inégalités socio-raciales sont de plus en plus déterminées par le niveau d’éducation (voir chapitre 2).
La nature intrinsèque du système économique et social crée des failles et des fossés au sein des Millennials, mais de puissants unificateurs cimentent ce groupe démographique et en fait aussi un groupe social, selon William Frey, le meilleur spécialiste des questions démographiques aux États-Unis.

Une génération « mondialisée »

Dans une étude réalisée pour le compte du think tank Brookings Institution{11}, William Frey pointe trois attributs « globaux » que les Millennials sont plus enclins à partager que leurs aînés.
Le premier tient aux compétences linguistiques. « Un quart des Millennials parlent une langue étrangère chez eux, comparé à 23 % de l’ensemble des adultes en 2000 et seulement 11 % en 1980, détaille le chercheur. Plus de sept Hispaniques ou Asiatiques sur dix parlent une langue étrangère chez eux, alors que peu de Noirs et de Blancs le font. L’espagnol est parlé à la maison par 16 % des Millennials et 17 % sont bilingues, avec de fortes compétences [en anglais] malgré l’utilisation d’une autre langue à la maison{12}. » Le scénario catastrophiste élaboré par la droite nativiste des années 1990 fait de séparatisme latino et de « reconquista » démographique et linguistique est mort de sa belle mort. C’est le bilinguisme qui triomphe dans un pays où, il n’est jamais inutile de le rappeler, l’anglais n’est constitutionnellement pas la langue officielle.
Dès 2015, une enquête du Pew Research Center{13} montrait qu’en 2013, 73 % des Latinos de plus de cinq ans parlaient espagnol à la maison, la même proportion que dans les années 1980. Dans le même temps, la part de ceux (immigrés et citoyens ...

Table des matières

  1. Page de titre
  2. Sommaire
  3. Introduction Au pays des Millennials
  4. Chapitre 1 United Colors of Millennials
  5. Chapitre 2 Bac + 37 172 dollars
  6. Chapitre 3 « C’est l’histoire, imbécile »
  7. Chapitre 4 « Go left, young man{38} »
  8. Chapitre 5 Millenniales
  9. Chapitre 6 Pittsburgh, laboratoire de la jeune garde
  10. Chapitre 7 Culture et culture populaire : la Millennials’ touch
  11. Chapitre 8 Ces dix Millennials qui changent l’Amérique
  12. Chapitre 9 New York, Londres, Paris : Millennials de tous les pays
  13. Conclusion Révolutions ?
  14. Remerciements