Les prisons familiales
eBook - ePub

Les prisons familiales

Se libérer et guérir des violences invisibles

  1. 192 pages
  2. French
  3. ePUB (adapté aux mobiles)
  4. Disponible sur iOS et Android
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Les prisons familiales

Se libérer et guérir des violences invisibles

À propos de ce livre

Se reconnaĂźtre victime pour ne plus jamais l'ĂȘtre

ÉpuisĂ©es, en butte Ă  l'incomprĂ©hension, partagĂ©es entre peur, honte et cloutes, les victimes de violence psychologique au sein de la famille ou du couple sont convaincues de n'ĂȘtre plus rien, de n'avoir jamais Ă©tĂ© personne.

Ces victimes n'ont pas de blessures apparentes, qui indiqueraient la maltraitance qu'elles subissent. Elles sont en vie, mais survivent plus qu'elles ne vivent.

Trop souvent cette violence est incomprise, voire niée. Dans ce livre, Anne-Laure Buffet donne la parole à ces personnes, femmes, hommes, enfants, qui affrontent au quotidien une réalité insoupçonnable, difficile à identifier. Elle expose les processus psychiques qui précipitent les victimes dans le déni et la culpabilité et leur donne les clés pour construire leur identité et leur chemin de vie.

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Informations

Éditeur
Eyrolles
Année
2019
Imprimer l'ISBN
9782212572049
ISBN de l'eBook
9782212150087
Édition
1

PREMIÈRE PARTIE

Un schéma emprisonnant

Chapitre
Des bourreaux invisibles 1
Couple, famille, amitiĂ©, lien professionnel, lien social (sportif, associatif, etc.)
 tout systĂšme crĂ©ant une interaction entre deux ou plusieurs personnes peut ĂȘtre contaminĂ© par la violence psychologique. Bien que les composantes et les rĂ©sultantes de cette forme de violence sournoise et invisible s’observent dans de nombreux contextes, ce livre porte essentiellement sur la violence psychologique intrafamiliale et conjugale.

Une structure désorganisée

DĂšs lors que s’exerce au sein de la famille ou du couple une violence, la structure se dĂ©sorganise et ses fondamentaux sont mis Ă  mal. Les rapports gĂ©nĂ©rationnels se modifient, les notions de protection et de sĂ©curitĂ© n’y ont plus de place. Un exercice de pouvoir et de contrĂŽle s’installe, sans bienveillance, de maniĂšre unilatĂ©rale, intĂ©ressĂ©e et coercitive. Cette dĂ©sorganisation vient souvent d’un seul membre. Elle peut se transmettre ou encore apparaĂźtre en Ă©cho Ă  une fracture (sociale, professionnelle, etc.) importante, modifiant radicalement le fonctionnement initial de ce systĂšme relationnel trĂšs particulier. Celui ou celle qui vit cette fracture, incapable de supporter cette Ă©preuve, reporte la charge de son impuissance sur son conjoint ou sa famille, les rendant coupables de ses propres incapacitĂ©s. La charge affective est toujours trĂšs forte et s’impose, interdisant toute comprĂ©hension, toute rationalisation, mais Ă©galement toute expression Ă©motionnelle proportionnĂ©e et adaptĂ©e. La famille n’est plus un espace intime et rassurant, mais un enfermement, une prison tenant au secret ce qui s’y dĂ©roule. La cellule familiale n’est plus un cocon mais une geĂŽle. Il n’est dĂšs lors possible ni de contredire ni de contrecarrer ce qui se joue entre les membres de cette famille.
Monique raconte : « DĂšs qu’il Ă©tait Ă  la maison, il me surveillait. Il Ă©piait. Il se mettait sur le canapĂ© avec un journal. Je savais qu’il ne le lisait pas
 Il ne tournait pas les pages. Il contrĂŽlait tout. Il savait tout de mes dĂ©placements, il connaissait chacune de mes habitudes, chacun de mes gestes, le sens de mes soupirs et de mes silences. J’ai appris Ă  tout faire sans faire de bruit. Mes enfants aussi. Nous faisions en sorte de disparaĂźtre de son champ de vision. Ça n’évitait pas les questions. Mais ça Ă©vitait les sons. Aujourd’hui le bruit me fait peur. Une porte, des pas sur le parquet, ce qui semble lĂ©ger mais qui vous suit
 ça me fait peur. S’il Ă©tait encore lĂ , il me demanderait pourquoi je fais ci ou ça. Je ne serais pas libre. Cette peur, je n’arrive pas encore Ă  m’en dĂ©faire. »
La violence psychologique, bien qu’invisible, est une entitĂ© Ă  part entiĂšre. La structure dĂ©sorganisĂ©e offre paradoxalement une protection Ă  ses membres. La violence devient le pilier de ce systĂšme dysfonctionnel et sa suppression risque de bouleverser le fonctionnement familial, le rĂŽle et la place de chacun. Mettre un terme Ă  la violence ferait exploser cette structure, obligerait Ă  accepter des changements individuels et collectifs radicaux, Ă  remettre en cause le lien affectif dĂ©faillant et toxique. Maintenir le systĂšme tel quel permet Ă  chacun de conserver sa croyance en un amour conjugal ou familial. Toute croyance, positive ou nĂ©gative, installe ou dĂ©veloppe des fonctionnements ; et lorsque le systĂšme est prĂ©alablement viciĂ©, les fonctionnements qui se mettent en place sont contraires Ă  l’intĂ©rĂȘt de ceux qui les vivent. L’interaction est trĂšs forte entre chaque membre de la famille, et les sentiments d’amour et de haine se confondent ou sont utilisĂ©s pour perturber les liens.
Écoutons Pierre parler de la relation avec son pĂšre : « Il a tapĂ© du poing sur la table lorsque je lui ai dit que je voulais ĂȘtre cuisinier. C’était impossible ! Ce n’était pas Ă  ma hauteur ! Je valais bien mieux que ça. Je devais viser plus haut, me dĂ©passer et me confronter Ă  la rĂ©alitĂ©, au monde, aux difficultĂ©s Ă©conomiques, aux lois du marchĂ©, aux risques du chĂŽmage. Je devais rĂ©flĂ©chir. Mon choix serait une condamnation si je voulais rĂ©ellement faire ce type “d’études”, comme il disait, un rictus au coin des lĂšvres. Et je lui faisais affront, je rejetais tout ce qu’il Ă©tait. Lui disait m’aimer : “Je suis un parent aimant, moi ! Aimant ! C’est pour ça que je te dis que tu fais des erreurs, que tu ne sais pas, que tu rĂȘves mais tu vas te planter !” J’ai renoncĂ© Ă  la cuisine. J’ai prĂ©parĂ© des concours. J’avais peur de le perdre. J’avais peur de le dĂ©cevoir. Moi, je ne comptais pas. Seule comptait l’idĂ©e obsĂ©dante que je pourrais le peiner et le dĂ©cevoir. Il voulait que je fasse une grande Ă©cole. J’ai passĂ© les diplĂŽmes qu’il exigeait. Je n’ai pas trouvĂ© de travail. Je cherchais un emploi pour lui plaire, c’était ma seule motivation. Mais j’ai repris sans rien dire une formation de cuisinier. Aujourd’hui je suis second de cuisine. J’aime mon travail. Je suis apprĂ©ciĂ© par mon chef, reconnu par mes collĂšgues. Mais je n’ai plus de pĂšre. »
Dans ces systĂšmes oĂč les relations sont dĂ©gradĂ©es et faussĂ©es, la violence psychologique s’installe par une prise de pouvoir et de contrĂŽle conduisant au dĂ©nigrement et Ă  la perte d’estime et de confiance en soi, mĂȘlĂ©s Ă  la volontĂ© de crĂ©er ou de restaurer un climat d’apaisement et d’amour. Ce besoin d’apaisement recherchĂ© par la victime la rassure ; elle espĂšre retrouver un lien affectif valorisant et cherche inconsciemment Ă  conserver le contrĂŽle de la relation, contrĂŽle reposant sur un pouvoir magique qu’elle attribue Ă  l’amour, et respectant ainsi cette dangereuse croyance selon laquelle l’amour serait plus fort que tout. Cette violence psychologique repose sur un abus caractĂ©risĂ© par le comportement agressif, directif et parfois destructeur d’un ou plusieurs membres de la famille Ă  l’encontre des autres membres et peut provoquer un traumatisme psychologique (anxiĂ©tĂ©, dĂ©pression chronique, troubles du comportement avec comorbidité ). À son stade ultime, elle devient emprise.
Sous emprise, plus rien n’est tangible, comprĂ©hensible, et tout est inversĂ©. Ce qui est fait dans le but d’annihiler est prĂ©sentĂ© comme de l’amour, l’injure n’est pas entendue, le mĂ©pris devient une punition mĂ©ritĂ©e, la menace ou le chantage sont perçus comme des paroles motivantes car chargĂ©es en considĂ©ration. Au lieu de penser : « Il cherche Ă  me dĂ©truire », la victime se rĂ©pĂšte : « Il fait tout ça pour moi, et je suis incapable de le satisfaire et d’en bĂ©nĂ©ficier. » Elle est redevable et honteuse de ne pas savoir le montrer. S’il peut y avoir violence psychologique sans emprise, il n’y aura jamais emprise sans violence psychologique. Sans emprise, la victime ressent la violence mĂȘme si elle demeure indicible. Sous emprise, la victime ne ressent rien, mĂȘme plus sa souffrance et sa peur.

La famille

La famille est en principe l’élĂ©ment fondateur de chaque individu : tout au long de sa vie, il y trouvera assurance, affection, reconnaissance, valorisation, confort. Il y a sa place et cette place est respectĂ©e avec bienveillance. Il peut alors s’y Ă©panouir comme il peut s’épanouir Ă  l’extĂ©rieur de la famille. Celle-ci est nĂ©cessaire car elle propose des racines et des valeurs que chacun peut, en devenant adulte, accepter, rĂ©pĂ©ter ou Ă©carter si elles ne lui conviennent pas ou plus.
La famille est pourtant le cadre idĂ©al Ă  la violence psychologique. En effet, au nom des traditions et de la loyautĂ© familiales, de croyances transmises et de principes Ă©ducatifs, l’impossibilitĂ© de remettre en cause ce qui se joue et l’incomprĂ©hension ou l’aveuglement de l’entourage peuvent s’installer, favorisant le lit de cette violence. Ainsi, que ce soit au sein du couple, entre les parents et les enfants, ou dans la famille au sens Ă©largi, ce qui se met en place est souvent considĂ©rĂ© comme normal – ce qui permet de ne pas intervenir ni de prendre parti. L’image d’Épinal de la sacro-sainte famille prĂ©domine encore, empĂȘchant de penser et de croire qu’elle puisse non seulement manquer de protection et d’affection, mais plus encore ĂȘtre le nid de drames psychiques destructeurs, parfois sur plusieurs gĂ©nĂ©rations. Et plus le silence et le secret existent au cƓur de cette Ă©trange bulle toxique, plus on peut apparenter ces mĂ©canismes manipulateurs Ă  ceux d’une secte.
Secte et emprise familiale : des ressorts communs
Les mĂ©canismes de l’emprise observĂ©s au sein des sectes ou des familles dysfonctionnelles sont similaires :
  • discours rĂ©pĂ©titif d’un « gourou », en apparence rassurant mais ayant pour but de prendre le pouvoir ;
  • valorisation des victimes avant de les discrĂ©diter et les disqualifier ;
  • dĂ©votion des membres pour le « gourou » ; croyance en sa bienveillance et sa protection qui le rendent indispensable Ă  chaque victime ;
  • opinion personnelle interdite : les comportements de chaque membre doivent ĂȘtre en conformitĂ© avec ce qui est exigĂ©, sans laisser la moindre libertĂ© d’action et de pensĂ©e ;
  • contrĂŽle de tout besoin et tout dĂ©sir des membres ;
  • isolement et rupture gĂ©ographique, familiale et sociale, sous prĂ©texte d’un danger non explicite ;
  • persuasion, fausses vĂ©ritĂ©s, chantage et menace du rejet, crĂ©ation de peurs irrationnelles chez les membres, dĂ©veloppant un sentiment de paranoĂŻa ;
  • perte identitaire et sujĂ©tion des membres au gourou.
Comme dans le Village de la sĂ©rie Le Prisonnier1, tout va bien en apparence, le dĂ©cor est idyllique et chacun connaĂźt son rĂŽle, l’accepte et ne le remet jamais en cause. Dans le cas contraire, il est chassĂ©, rattrapĂ©, enfermĂ© et condamnĂ©.
Qui sont les victimes ? Des personnes « naturellement » en position d’infĂ©rioritĂ© (Ăąge, systĂšme familial, lien gĂ©nĂ©rationnel, handicap physique ou mental, fragilitĂ© Ă©motionnelle, dĂ©pendance Ă©conomique et matĂ©rielle) ou qui se retrouvent dans cette position car exposĂ©es Ă  un danger, une menace. Sans oublier celles qui constituent elles-mĂȘmes et Ă  leur corps dĂ©fendant une menace pour l’un des membres de la famille, parce que possĂ©dant des qualitĂ©s ou des compĂ©tences individuelles et sociales dont l’auteur de violence est dĂ©pourvu, qu’il envie et jalouse au point de chercher parfois Ă  dĂ©truire sa victime.
Alexia a ainsi subi la jalousie de son mari : « Il disait aimer mes rires, ma joie de vivre, mais il me reprochait de recevoir, de voir des amis, de prendre le bon cĂŽtĂ© des choses. Il refusait tout dialogue, s’enfermait dans la chambre quand mes amis venaient, prĂ©textant de la fatigue ou des soucis de travail. Ensuite, il sous-entendait que j’étais trop lĂ©gĂšre, inconsciente, que je ne lui prĂȘtais aucune attention. Le pire, c’est que ce n’était jamais un vrai reproche ; il rĂ©pĂ©tait toujours : “Tu en fais trop, chouchou, laisse de la place aux autres.” Il m’a convaincue que j’empĂȘchais tout le monde d’exister et que je volais l’espace pour ĂȘtre au centre. J’ai fini par ne plus recevoir personne. Il m’a alors laissĂ©e penser que c’était de ma faute, que je n’étais pas si drĂŽle que ça, que je lassais tout le monde et que je finirais seule. »
Le dĂ©sĂ©quilibre se concrĂ©tise dans un rapport de force intangible et indicible. Cette profonde asymĂ©trie permet de distinguer le conflit conjugal ou familial de la violence psychologique. Dans le conflit, les forces qui s’opposent sont Ă©quivalentes, elles se respectent mĂȘme si elles n’arrivent pas Ă  s’entendre, elles recherchent chacune l’écoute de l’autre partie. Le dĂ©sir est de convaincre, et non de dominer. L’émotion qui prĂ©domine est la colĂšre. En revanche, l’auteur de violence psychologique n’a aucun respect pour sa victime mais ne cesse d’en exiger, et deux Ă©motions s’affrontent : la colĂšre souvent froide (et nourrie d’orgueil) face Ă  la peur silencieuse (s’exprimant de maniĂšre dĂ©sordonnĂ©e). Il ne peut y avoir violence psychologique sans cette interaction nĂ©gative.
Si celui ou celle qui dĂ©tient une figure d’autoritĂ© l’impose...

Table des matiĂšres

  1. Couverture
  2. Page de titre
  3. Copyright
  4. Table des matiĂšres
  5. Introduction
  6. PremiĂšre partie – Un schĂ©ma emprisonnant
  7. Deuxiùme partie – Prisonniers familiaux
  8. TroisiĂšme partie – De l’évasion Ă  la libertĂ©
  9. Conclusion
  10. Remerciements
  11. Bibliographie