Les invasions barbares. Une généalogie de l'histoire de l'art
Ăric Michaud
- 320 pages
- French
- ePUB (adapté aux mobiles)
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Les invasions barbares. Une généalogie de l'histoire de l'art
Ăric Michaud
Ă propos de ce livre
L'histoire de l'art a commencĂ© avec les invasions barbares. Vers 1800, ces invasions sont devenues soudainement l'Ă©vĂ©nement dĂ©cisif par lequel l'Occident se serait engagĂ© dans la modernitĂ©: le sang neuf des races du Nord, tout en conservant l'ancien, aurait apportĂ© un art nouveau, nĂ©cessairement antiromain et anticlassique, et dont l'hĂ©ritage Ă©tait encore manifeste en Europe. Ce rĂ©cit fantastique, insĂ©parable de la formation des Ătats-nations et de la montĂ©e des nationalismes en Europe, se fondait sur le double postulat de l'homogĂ©nĂ©itĂ© et de la continuitĂ© des peuples "Ă©trangers": il fit bientĂŽt tomber les styles artistiques sous la dĂ©pendance du sang et de la race. L'histoire de l'art associa ses objets Ă des groupes raciaux en s'appuyant sur quelques singularitĂ©s visibles: tantĂŽt leurs qualitĂ©s "tactiles" ou "optiques" les dĂ©nonçaient comme "latins" ou "germains", tantĂŽt la prĂ©dominance des Ă©lĂ©ments linĂ©aires trahissait une origine mĂ©ridionale, quand le "pictural" indiquait clairement une provenance germanique ou nordique. Les musĂ©es, pour finir, regroupĂšrent les productions des beaux-arts selon leur provenance gĂ©ographique et l'appartenance "ethnique" de leurs crĂ©ateurs. Il serait parfaitement vain de chercher Ă dĂ©montrer que l'histoire de l'art fut une discipline raciste: elle ne l'aura Ă©tĂ© ni plus ni moins que les autres sciences sociales qui, toutes, furent touchĂ©es ou orientĂ©es par la pensĂ©e raciale visant Ă classer et hiĂ©rarchiser les hommes en fonction de traits somatiques et psychologiques qui leur Ă©taient attribuĂ©s. Mais, montre Ăric Michaud, les liens qu'elle a tissĂ©s entre les hommes et leurs objets artistiques ne sont pas encore tranchĂ©s: l'opinion la plus commune sur l'art est qu'il incarne au mieux le gĂ©nie des peuples. Aujourd'hui encore, sur le marchĂ© mondialisĂ©, la provenance ethnico-raciale exhibĂ©e des Ćuvres â "Black", "African American", "Latino" ou "Native American" â donne Ă ces objets d'Ă©change une plus-value estimable. Ainsi s'expose en permanence une concurrence des "races" qui n'est jamais que la mĂȘme qui prĂ©sida aux commencements de l'histoire de l'art.