Partie 1
Contexte
Chapitre 1 | PATHOLOGIE ET QUALITÉ
1.1 ATTENTES DE LA MAÎTRISE D’OUVRAGE
Vitruve, architecte romain du Ier siècle, écrivait que tous les édifices doivent être exécutés de manière que la solidité, l’utilité et la beauté s’y rencontrent. La formule est élégante. Tout y est. Usant de termes modernes, un architecte écrirait que son ouvrage doit posséder une bonne résistance mécanique, être agréable à vivre et posséder des qualités esthétiques certaines.
La qualité a donc toujours été de mise. Mais de quelle qualité s’agit-il, que recouvre ce mot tout à fait commun ?
Quelles sont les attentes de la maîtrise d’ouvrage ?
Qu’est-ce qu’un ouvrage de qualité ?
Est-ce uniquement un ouvrage solide, dans lequel il fait bon vivre et doté d’une esthétique agréable.
D’autres critères peuvent être mis en avant :
• le prix et surtout le respect du prix convenu ;
• le montage de l’opération puis la réalisation des travaux dans un délai convenable ;
• la réalisation d’un bâtiment facile à entretenir, à coût raisonnable.
Il y a là des dispositions souvent figées par contrat.
La résistance de l’ouvrage à long terme, au-delà du délai de garantie légal et la facilité avec laquelle il pourra être entretenu ne peuvent être négligées, tout comme les dépenses prévisibles pour le chauffer ou le rafraîchir. Pourquoi ne pas considérer qu’une empreinte carbone du bâtiment aussi réduite que possible constitue aussi un critère qualitatif ?
L’attractivité du bien, les possibilités de revente dans de bonnes conditions ne doivent pas être occultées. Les Français aiment être propriétaires, mais déménagent souvent.
Il y a là des fondamentaux auxquels les divers acteurs concernés vont apporter des réponses bien différentes. Le mot « qualité » reste donc assez vague. Chacun l’interprète comme il l’entend. L’absence de désordres ou plutôt de désordres majeurs constitue le critère de base, mais ce n’est pas le seul.
Le client attend toujours — espère — prendre possession d’un ouvrage qui vieillira bien. Si l’absence de désordres constitue le critère de base, avec des exigences portant sur le confort intérieur, encore convient-il de s’entendre sur la notion de désordres.
Les maîtres d’ouvrage n’ont pas à ce sujet la même sensibilité.
1.1.1 Point de vue du particulier
Le particulier qui fait construire une maison qu’il va habiter se montrera beaucoup plus exigeant qu’un bailleur social, ou plutôt n’aura pas la même approche que celui-ci face à l’apparition d’un dommage. Sa maison constitue l’achat le plus important de sa vie. Une modeste fissure lui paraîtra importante, inacceptable, quand bien même ne revêtirait-elle aucun caractère de gravité. Et si ce particulier envisage de vendre son bien, il n’ignore pas que ce défaut, quelle qu’en soit l’importance, va dévaloriser sa construction voire compromettre la vente.
Ce même dommage sera négligé par une société HLM, car il est sans impact technique majeur et reste sans conséquence pour la vie de ses locataires.
Le particulier sera plus sensible à l’aspect général de l’ouvrage, aux surfaces dont il va disposer qu’aux aspects techniques qu’il méconnaît. L’accès à Internet est pour lui une source d’informations incertaines qui sèment souvent le trouble.
Il sera toujours quelque peu désemparé dès lors qu’il sera confronté à une anomalie dont il espère réparation. La portée des garanties qui lui sont acquises lui est mal connue. Les moyens mis à sa disposition pour obtenir satisfaction lui sont souvent étrangers.
La survenance d’un dommage, quel qu’il soit, reste toujours très sensible pour un particulier. Il n’est pas à même d’en apprécier la gravité et l’évolution prévisible. Il peinera à cerner qui en est responsable.
La police dommages-ouvrage, introduite avec la loi Spinetta, viendra toutefois l’aider, pour autant qu’elle ait été souscrite et que l’expertise susceptible d’être mise en place soit bien menée. Ce n’est pas toujours le cas.
Dans ce contexte, le particulier sera tenté d’aller en justice.
1.1.2 Point de vue du bailleur social
Un bailleur social sera très attentif à la durabilité des équipements des logements qu’il fait construire, aux modalités d’entretien en général. Il sait par avance qu’il devra gérer les litiges survenant après la réception, faire face à la survenance de dommages, pour le moins inévitables. Cela fait partie de son quotidien.
Il est habitué à cela et dispose des services ad hoc, techniciens et juristes. Il connaît bien mieux que le particulier ce qui relève de ses droits et de ses devoirs. Il est en capacité d’apprécier avec recul le comportement de l’ouvrage qu’il doit gérer.
Ses souhaits auront un impact sur la conception de l’ouvrage.
1.1.3 Point de vue du promoteur
Un promoteur a pour objectif de vendre au meilleur prix les appartements qu’il fait construire. L’aspect de l’immeuble, la présence de terrasses et de balcons ou encore le soin apporté aux finitions seront pour lui des critères importants.
Les litiges qui surviendront lors de l’occupation de l’immeuble seront gérés par le syndic de copropriété, aidé s’il y a lieu par l’assureur dommages-ouvrage. Cet aspect n’est pas sans poser problème dans la mesure où la police dommages-ouvrage est souscrite par le promoteur qui ne bénéficiera pas des garanties de la police d’assurance qu’il souscrit. Le promoteur sera tenté de rechercher le prix le plus bas, là où le bénéficiaire de la garantie — le syndic de copropriété, voire les copropriétaires — sera sensible à la qualité des garanties apportées.
FAUT-IL FAIRE INTERVENIR UN PROGRAMMISTE ?
Quels sont les souhaits du maître d’ouvrage ? Le maître d’œuvre ou le constructeur de maisons individuelles saura aider un particulier à formuler ses désirs, à les exprimer. Il pourra ensuite proposer des solutions adaptées compatibles avec le terrain choisi, la surface à construire et les possibilités de financement. Les opérations simples peuvent se dispenser de l’élaboration d’un programme formalisé.
Un maître d’ouvrage professionnel saura plus facilement exprimer ses attentes qu’un particulier. Il dispose de services techniques, mais face à une opération complexe il fera appel à un programmiste.
En effet, la réussite d’une opération de construction d’envergure passe par la définition d’un programme. Comment concevoir sans cela ?
Un programme clair facilitera le travail du maître d’œuvre, permettra un déroulement harmonieux du chantier. Rien n’est pire que de devoir modifier la conception lorsque les travaux sont engagés.
Définir un programme, c’est réfléchi...