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Contes Merveilleux
FrĂšres Grimm
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Contes Merveilleux
FrĂšres Grimm
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Ă propos de ce livre
Nouvelle approche, c'est: Un nouvel art de lire... ou de relire. Un nouvel art d'aborder les textes, mĂȘme les plus intimidants.Un prince transformĂ© en grenouille, un cercueil de verre oĂč une dĂ©licate jeune fille vit en hibernation, un enfant si petit si petit qu'on l'avale par mĂ©garde... Dix-sept histoires de surnaturelle-fiction qui commencent trĂšs, trĂšs mal...
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Informations
La Petite table, lâĂąne et le bĂąton
Il y a bien longtemps, il Ă©tait un tailleur qui avait trois fils et une seule chĂšvre.
La chĂšvre devait les nourrir tous les trois avec son lait ; il fallait quâelle mangeĂąt bien et quâon la menĂąt tous les jours aux champs. Les fils sâen occupaient chacun Ă son tour.
Un jour, lâaĂźnĂ© la mena au cimetiĂšre, oĂč lâherbe Ă©tait la plus belle, la laissa lĂ Ă manger et Ă gambader. Le soir, quand le moment fut venu de rentrer Ă la maison, il demanda :
â Alors, chĂšvre, es-tu repue ?
La chÚvre répondit :
â Jâai tant mangĂ© que je ne peux plus avaler â bĂȘ, bĂȘ, bĂȘ, bĂȘ !
â Eh bien ! viens Ă la maison, dit le garçon.
Il la prend par sa corde, la conduit Ă lâĂ©curie et lâattache.
â Alors, demanda le vieux tailleur, la chĂšvre a-t-elle assez mangĂ© ?
â Oh ! rĂ©pondit le fils, elle a tant mangĂ© quâelle ne peut plus rien avaler.
Le pĂšre voulut sâen rendre compte par lui-mĂȘme. Il alla Ă lâĂ©curie, caressa la chĂšre petite chĂšvre et demanda :
â ChĂšvre, es-tu repue ?
La chÚvre répondit :
â De quoi devrais-je ĂȘtre repue ? Parmi les tombes jâai couru pour me nourrir rien nâai trouvĂ© bĂȘ, bĂȘ, bĂȘ, bĂȘ !
â Quâentends-je ! sâĂ©cria le tailleur. Il rentre Ă la maison et dit au garçon :
â Ah, menteur, tu dis que la chĂšvre est repue et tu lâas laissĂ©e sans nourriture ! Et, dans sa colĂšre, il prend une canne et en bat son fils en le jetant dehors.
Le lendemain, câĂ©tait au tour du second fils. Il chercha dans le jardin un coin oĂč poussaient de belles herbes et la chĂšvre sâen rĂ©gala. Le soir, comme il voulait rentrer, il demanda :
â ChĂšvre, es-tu repue ?
La chÚvre répondit :
â Jâai tant mangĂ© que je ne peux plus avaler â bĂȘ, bĂȘ, bĂȘ, bĂȘ !
â Alors, rentre Ă la maison, dit le garçon.
Il la tira vers la maison, lâattacha dans lâĂ©curie.
â Eh bien ? demanda le vieux tailleur, la chĂšvre a-t-elle assez mangĂ© ?
â Oh ! rĂ©pondit le fils, elle a tant mangĂ© quâelle ne peut plus rien avaler. Le tailleur nâavait pas confiance. Il se rendit Ă lâĂ©curie et demanda :
â ChĂšvre, es-tu repue ?
La chÚvre répondit :
â De quoi devrais-je ĂȘtre repue ? Parmi les sillons jâai couru pour me nourrir nâai rien trouvĂ© bĂȘ, bĂȘ, bĂȘ bĂȘ !
â Lâimpudent mĂ©crĂ©ant ! sâĂ©cria le tailleur. Laisser sans nourriture un animal si doux !
Il rentre Ă la maison et, Ă coups dâaune, met le garçon Ă la porte.
Câest maintenant au tour du troisiĂšme fils. il veut bien faire les choses, recherche les taillis les plus touffus et y fait brouter la chĂšvre. Le soir, comme il veut rentrer, il demande Ă la chĂšvre :
â ChĂšvre, es-tu repue ?
La chÚvre répondit :
â Jâai tant mangĂ© que je ne peux plus avaler â bĂȘ, bĂȘ, bĂȘ, bĂȘ !
â Alors viens Ă la maison, dit le garçon.
Et il la conduisit Ă lâĂ©curie et lâattacha.
â Eh bien ? demanda le vieux tailleur, la chĂšvre a-t-elle assez mangĂ© ?
â Oh ! rĂ©pondit le fils, elle a tant mangĂ© quâelle ne peut plus rien avaler. Le tailleur ne le croit pas.
Il sort et demande :
â ChĂšvre, es-tu repue ?
La mĂ©chante bĂȘte rĂ©pondit :
â De quoi devrais-je ĂȘtre repue ? Parmi les sillons jâai couru pour me nourrir nâai rien trouvĂ© â bĂȘ, bĂȘ, bĂȘ, bĂȘ !
â Ah ! le vilain menteur, sâĂ©cria le tailleur. Ils sont aussi fourbes et oublieux du devoir lâun que lâautre ! Vous ne me ferez pas plus longtemps tourner en bourrique !
Et, de colĂšre hors de lui, il rentre Ă la maison, frappe le pauvre garçon avec lâaune, si fort quâil le jette par la porte.
Et voilĂ le vieux tailleur seul avec sa chĂšvre. Le lendemain matin, il va Ă lâĂ©curie, caresse la chĂšvre et dit :
â Viens, ma mignonne, je vais te conduire moi-mĂȘme au champ.
Il la prend par sa longe et la mĂšne lĂ oĂč se trouvent les baies que les chĂšvres mangent avec le plus de plaisir.
â Pour une fois, tu peux y aller de bon cĆur, lui dit-il, et il la laissa brouter jusquâau soir. Il demanda alors :
â ChĂšvre, es-tu repue ?
Elle répondit :
â Jâai tant mangĂ© que je ne puis plus rien avaler, bĂȘ, bĂȘ, bĂȘ, bĂȘ !
â Alors viens Ă la maison ! dit le tailleur.
Il la conduisit Ă lâĂ©curie et lâattacha. Avant de partir, il se retourna une derniĂšre fois et dit :
â Alors te voilĂ donc repue pour une fois ?
Mais la chĂšvre ne fut pas meilleure avec lui quâavec les autres. Elle sâĂ©cria :
â De quoi devrais- je ĂȘtre repue ? Parmi les sillons jâai couru pour me nourrir nâai rien trouvĂ© â bĂȘ, bĂȘ, bĂȘ, bĂȘ !
Quand le tailleur entendit cela, il en resta tout interdit et vit bien quâil avait chassĂ© ses fils sans raison.
â Attends voir, sâĂ©cria-t-il, misĂ©rable crĂ©ature ! Ce serait trop peu de te chasser ; je vais te marquer de telle sorte que tu nâoseras plus te montrer devant dâhonnĂȘtes tailleurs !
En toute hĂąte, il rentre Ă la maison, prend son rasoir, savonne la tĂȘte de la chĂšvre et la tond aussi ras quâune pomme. Et, parce que lâaune eĂ»t Ă©tĂ© trop noble, il prend une cravache et lui en assĂšne de tels coups quâelle se sauve Ă toute allure.
Quand le tailleur se retrouva si seul dans sa maison, il fut saisi dâune grande tristesse. Il aurait bien voulu que ses fils fussent de nouveau lĂ . Mais personne ne savait ce quâils Ă©taient devenus.
LâaĂźnĂ© Ă©tait entrĂ© en apprentissage chez un menuisier. Il travaillait avec zĂšle et constance. Lorsque son temps fut terminĂ© et que vint le moment de partir en tournĂ©e, son patron lui offrit une petite table, qui nâavait rien de particulier, en bois trĂšs ordinaire. Mais elle avait une qualitĂ© : quand on la dĂ©posait quelque part et que lâon disait : « Petite table, mets le couvert ! » on la voyait tout Ă coup sâhabiller dâune petite nappe bien propre. Et il y avait dessus une assiette, avec couteau et fourchette, et des plats avec lĂ©gumes et viandes, tant quâil y avait la place. Et un grand verre plein de vin rouge Ă©tincelait que ça en mettait du baume au cĆur. Le jeune compagnon pensa : en voilĂ assez jusquâĂ la fin de tes jours ! Et, de joyeuse humeur, il alla de par le monde, sans se prĂ©occuper de savoir si lâauberge serait bonne ou mauvaise et si lâon y trouvait quelque chose Ă manger ou non. Quand la fantaisie lâen prenait, il restait dans les champs, les prĂ©s ou les bois, oĂč cela lui plaisait, dĂ©crochait la petite table de son dos, lâinstallait devant lui et disait : « Petite table, mets le couvert ! » Et tout de suite, tout ce que son cĆur souhaitait Ă©tait lĂ . Finalement, il lui vint Ă lâesprit quâil voudrait bien revoir son pĂšre. Sa colĂšre avait dĂ» sâapaiser et avec la « petite-table-mets-le-couvert », il lâaccueillerait volontiers.
Il arriva que, sur le chemin de la maison, il entra un soir dans une auberge pleine de monde. On lui souhaita la bienvenue et on lâinvita Ă prendre place parmi les hĂŽtes et Ă manger avec eux car on trouverait difficilement quelque chose pour lui tout seul.
â Non, rĂ©pondit le menuisier, je ne veux pas vous prendre le pain de la bouche. Il vaut mieux que vous soyez mes hĂŽtes Ă moi.
Ils rirent et crurent quâil plaisantait. Mais lui, pendant ce temps, avait installĂ© sa table de bois au milieu de la salle et il dit :
â Petite table, mets le couvert !
InstantanĂ©ment, elle se mit Ă porter des mets si dĂ©licats que lâaubergiste nâaurait pas pu en fournir de pareils. Et le fumet en chatouillait agrĂ©ablement les narines des clients.
â Allez-y, chers amis, dit le menuisier.
Et quand les hĂŽtes virent que câĂ©tait sĂ©rieux, ils ne se le firent pas dire deux fois. Ils approchĂšrent leurs chaises, sortirent leurs couteaux et y allĂšrent de bon cĆur. Ce qui les Ă©tonnait le plus, câĂ©tait que, lorsquâun plat Ă©tait vide, un autre, bien rempli, prenait aussitĂŽt sa place.
Lâaubergiste, dans un coin, regardait la scĂšne. Il ne savait que dire. Mais il pensait : « VoilĂ un cuisinier comme il mâen faudrait un ! »
Le menuisier et toute la compagnie festoyĂšrent gaiement jusque tard dans la nuit. Finalement, ils allĂšrent se coucher. Le jeune compagnon se mit Ă©galement au lit et plaça sa table miraculeuse contre le mur. Mais des tas dâidĂ©es trottaient dans la tĂȘte de lâaubergiste. Il lui revint Ă lâesprit quâil possĂ©dait dans un dĂ©barras une petite table qui ressemblait Ă celle du menuisier, comme une sĆur. Il la chercha en secret et en fit lâĂ©change. Le lendemain matin, le jeune homme paya sa chambre, installa la petite table sur son dos, sans penser que ce nâĂ©tait plus la bonne, et reprit son chemin. Ă midi, il arriva chez son pĂšre qui lâaccueillit avec une grande joie.
â Alors, mon cher fils, quâas-tu appris ? lui demanda-t-il.
â PĂšre, je suis devenu menuisier.
â Câest un bon mĂ©tier ! rĂ©torqua le vieux.
â Mais que ramĂšnes-tu de ton compagnonnage ?
â PĂšre, le meilleur de ce que je ramĂšne est une petite table.
Le pĂšre lâexamina sur toutes ses faces et dit :
â Tu nâas pas fabriquĂ© lĂ un chef-dâĆuvre. Câest une vieille et mĂ©chante petite table.
â Voire ! Câest une table mystĂ©rieuse, magique, rĂ©pondit le fils. Lorsque je lâinstalle et lui dis de mettre le couvert, les plus beaux plats sây trouvent instantanĂ©ment, avec le vin qui met du baume au cĆur. Tu nâas quâĂ inviter tous tes parents et am...