Les mariages de PhilomĂšne
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Les mariages de PhilomĂšne

Henry Gréville

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  1. 277 pages
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Les mariages de PhilomĂšne

Henry Gréville

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Vous le voyez, ma chĂšre dame, j'ai eu bien des peines, conclut la veuve en s'essuyant les yeux, et encore, je crains bien de n'ĂȘtre pas au bout. - Pourquoi? demanda innocemment madame Aubier. - Parce que les affaires d'argent ne sont pas terminĂ©es, et je crois bien que la famille de mon dĂ©funt mari ne les arrangera pas Ă  mon avantage. - On ne peut pas leur demander ça! fit observer la vieille dame, non sans quelque apparence de bon sens: votre mari vous avait Ă©pousĂ©e malgrĂ© eux; ils n'ont aucun motif de vous avantager dans ce partage. - Depuis deux ans que cela dure, il me semble pourtant qu'ils auraient pu en finir; mais... Madame PhilomĂšne CrĂ©pin laissa sa phrase inachevĂ©e, et sa confidente essaya de la terminer pour elle.

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Informations

Éditeur
Books on Demand
Année
2019
ISBN
9782322152148
Édition
1

XXV

Le surlendemain, madame Aubier reçut une lettre de sa filleule, et, dĂšs la premiĂšre ligne, elle se frotta les yeux, croyant s’ĂȘtre trompĂ©e, tant ce qu’elle lisait, bien que prĂ©vu, lui parut invraisemblable.
« Ma chĂšre marraine, Ă©crivait Virginie, venez Ă  mon secours, et dĂ©fendez-moi contre un affreux malheur : mon pĂšre veut me marier Ă  Lavenel. Jamais je n’épouserai cet homme que je dĂ©teste ; j’aimerais mieux mourir. »
La lettre n’était pas longue : quelques phrases Ă©plorĂ©es, rĂ©pĂ©titions de ce mĂȘme cri d’alarme, et mille tendresses enfantines pour la bonne marraine qui saurait la protĂ©ger, c’était tout.
Madame Aubier demeura pensive. Elle connaissait le caractĂšre entĂȘtĂ© et despotique du pĂšre Beuron ; le heurter de front, c’était planter en face de soi les raisonnements et l’intelligence d’une muraille ; tenter de le prendre par la douceur et la rĂ©flexion, c’était lui faire affirmer l’implacable rĂ©solution d’un homme qui ne se ruine pas en idĂ©es, mais qui tient Ă  celles qu’il a par hasard, et qui ne veut pas passer pour une girouette ; depuis qu’il Ă©tait nĂ©, personne n’avait jamais rien obtenu de lui par la persuasion ; il eĂ»t cru dĂ©choir en cĂ©dant.
Restait la question d’intĂ©rĂȘt. Virginie devait recevoir en dot le bien de sa mĂšre, plus ce que son pĂšre lui donnerait sans doute : madame Aubier connaissait trop bien Lavenel pour ne pas ĂȘtre certaine qu’il avait demandĂ© et obtenu quelque chose : si elle pouvait amener ce vieil entĂȘtĂ© Ă  blĂąmer son gendre en expectative pour ses vues intĂ©ressĂ©es, elle aurait gagnĂ© du temps, et, pour le moment, il n’en fallait pas davantage. Avant un mois, PhilomĂšne reviendrait, et ce serait affaire au marchand de grains de se dĂ©gager de ses mains furieuses.
– Si j’écrivais Ă  PhilomĂšne ? pensa la bonne dame. Mais elle renonça sur-le-champ Ă  cette idĂ©e ; livrer le nom et la tranquillitĂ© de Virginie Ă  cette femme lui paraissait plus nuisible que tout le reste, car elle ne savait rien des tendres sentiments que nourrissait la veuve pour l’ingrat Masson, et croyait Ă  sa bonne foi dans le mariage projetĂ© avec Lavenel.
– Je vais toujours Ă©crire Ă  Marie Verroy, conclut madame Aubier, qui se mit sur-le-champ Ă  l’Ɠuvre, et, de sa bonne Ă©criture vieillotte, elle annonça l’évĂ©nement fĂącheux Ă  ses amis de Paris, les laissant juges de prĂ©venir ou de ne pas prĂ©venir Masson du sort rĂ©servĂ© Ă  la jeune fille. Ensuite elle adressa quelques mots de consolation Ă  sa filleule, en lui promettant d’intervenir, et aprĂšs cet excĂšs de style Ă©pistolaire, elle se livra Ă  de profondes rĂ©flexions, pendant lesquelles le nom de Lavenel ne se trouva pas une seule fois accolĂ© Ă  des Ă©pithĂštes flatteuses.
Nos amis dĂ©jeunaient ensemble lorsque la lettre de madame Aubier leur fut apportĂ©e avec le reste du courrier. PhilomĂšne Ă©tait sombre ; ses courses matinales Ă  l’adresse de son dĂ©biteur Ă©taient jusqu’ici restĂ©es sans rĂ©sultat, si bien qu’elle avait remis sa crĂ©ance aux mains d’un homme d’affaires. Chacun sait que ces messieurs ne travaillent pas uniquement dans le but philanthropique de faire rendre gorge aux dĂ©biteurs rĂ©calcitrants, et madame CrĂ©pin avait Ă©tĂ© forcĂ©e de dĂ©nouer les cordons de sa bourse, opĂ©ration qui lui Ă©tait toujours essentiellement dĂ©sagrĂ©able.
Elle Ă©tait donc sombre, et mangeait peu, – c’est-Ă -dire ne mangeait que les meilleurs morceaux et laissait le reste sur son assiette ; ses cousins, qui commençaient Ă  s’habituer Ă  cette maniĂšre d’agir, sans pouvoir toutefois s’accoutumer Ă  la trouver agrĂ©able, ne s’occupaient pas d’elle et causaient de leurs affaires. Marie, en remuant les journaux et les imprimĂ©s de toutes sortes qui composaient le courrier du matin, trouva la lettre qui portait le timbre de DiĂ©lette, et ne put retenir un lĂ©ger mouvement.
– Qu’est-ce que c’est ? fit Charles en levant la tĂȘte.
– Rien, rĂ©pondit Marie, devenue prudente, sans s’expliquer pourquoi.
Une lettre ?
– Une vieille histoire, rĂ©pliqua Marie avec un peu d’impatience, en mettant la lettre dans sa poche.
Charles retourna Ă  sa cĂŽtelette, sous le regard accusateur de PhilomĂšne qui disait : Tu n’es qu’une bĂȘte, mon ami, de laisser ta femme mettre ainsi des lettres dans sa poche. Je te dĂ©clare bien que mon mari sera tenu de me montrer les siennes. Mais Verroy ne vit ni le regard ni le reproche, et prit une seconde cĂŽtelette, car il avait bon appĂ©tit.
Le repas terminĂ©, laissant retomber une porte sur la queue de la robe de PhilomĂšne, ce qui l’obligea Ă  se retourner pour se dĂ©gager, Marie courut Ă  Charles, le prit par le bras et l’entraĂźna dans l’asile inviolable de la chambre Ă  coucher ; pour plus de sĂ»retĂ©, elle poussa le verrou, et revint Ă  son mari la lettre Ă  la main.
– Que de mystĂšres ! dit celui-ci ; est-ce qu’on nous rĂ©clame cent mille francs ?
– Non, mais c’est madame Aubier qui nous Ă©crit, rĂ©pondit la jeune femme, qui avait dĂ©jĂ  pris connaissance de l’épitre pendant que son mari parlait. On veut marier Virginie, – Ă  qui ? je te le donne en mille, – Ă  Lavenel.
– Saprelotte ! s’écria Charles.
– Marie ! cria derriùre la porte la voix lamentable de Philomùne, pendant qu’elle frappait modestement, mais avec persistance.
– Je viens, rĂ©pondit celle-ci.
– J’ai deux mots à te dire.
– Attends-moi au salon, mon mari s’habille.
PhilomĂšne ne rĂ©pondit pas, mais aucun bruit derriĂšre la porte ne dĂ©cela qu’elle eĂ»t quittĂ© son poste.
– Quelle cravate veux-tu ? demanda madame Verroy trĂšs haut, comme si elle eĂ»t adressĂ© la parole Ă  son mari. J’irai te la chercher.
– J’y vais moi-mĂȘme, rĂ©pondit Charles sans bouger du fauteuil oĂč il s’était allongĂ©.
Un bruit de pas contenus, trÚs léger, leur apprit que madame Crépin avait quitté la place.
– Sais-tu que cela m’ennuie ? dit Verroy de mauvaise humeur ; nous voilĂ  obligĂ©s de jouer la comĂ©die Ă  prĂ©sent. Est-ce qu’elle ne s’en ira pas bientĂŽt ?
– Le plus tĂŽt possible, mon ami, rĂ©pondit Marie d’un ton conciliant. Mais, Ă©coute, Lavenel a demandĂ© Virginie en mariage.
– J’espĂšre qu’on l’a remballĂ© poliment ? fit Verroy.
– Non. Le pùre Beuron a consenti.
– Eh bien, et Masson, qu’est-ce qu’on en fait, alors ? Un Ă©pouvantail pour les petits oiseaux ?
Plus agitĂ© qu’il ne l’eĂ»t supposĂ© deux minutes auparavant, Charles se mit Ă  arpenter la chambre ; il aimait son ami, sincĂšrement et fortement ; les amitiĂ©s d’hommes ne se payent pas de bonnes paroles, mais il faut les voir Ă  l’épreuve. Ces gens qui se parlent comme des Ă©trangers, qui se serrent Ă  peine la main, Ă  un moment donnĂ©, se feraient tuer l’un pour l’autre. Si Verroy en ce moment eĂ»t tenu par les cheveux soit le pĂšre Beuron, soit ThĂ©odore Lavenel lui-mĂȘme, il les eĂ»t laissĂ©s tomber du troisiĂšme Ă©tage dans la rue sans se prĂ©occuper des remords que pourrait lui causer ensuite cette action irrĂ©flĂ©chie.
– Et elle, la petite, qu’est-ce qu’elle en dit ? fit-il en s’arrĂȘtant devant sa femme.
– Elle se dĂ©sespĂšre.
– Alors elle aime Masson ?
– Naturellement.
Charles reprit sa promenade. Un bruit imperceptible se fit entendre dans le corridor, et Marie mit un doigt sur ses lĂšvres ; son Ă©poux, moins patient, s’approcha de la porte Ă  grands pas, et l’ouvrit avec vĂ©hĂ©mence sur PhilomĂšne qui n’avait pas eu le temps de fuir.
– Qu’est-ce qu’il y a ? fit-il avec peu de grñce.
– C’est la bonne qui demande Marie, balbutia la veuve, fort honteuse et embarrassĂ©e.
– Ayez la bontĂ©, ma chĂšre cousine, de lui dire qu’elle veuille bien nous laisser en repos.
Il referma la porte, et cette fois madame CrĂ©pin s’en alla en faisant craquer ses lourds souliers de cuir pour plus de sĂ»retĂ©.
– Tu sais bien qu’un de ces quatre matins je lui dirai ses vĂ©ritĂ©s, fit Charles, soudain Ă©gayĂ© Ă  la pensĂ©e de cette future escarmouche : je commence Ă  en avoir besoin.
– Un peu de patience, mon ami ; Ă©coute, pour le moment, il s’agit de ceux que nous aimons.
– Tu as raison. Que faire ?
– Voir Masson aujourd’hui mĂȘme. Nous ne pouvons agir sans lui avoir demandĂ© ce qu’il veut faire.
– C’est trop juste. Je vais lui envoyer un tĂ©lĂ©gramme : Prudence et MystĂšre !
Ils quittÚrent leur retraite, et Charles sortit pour mettre son projet à exécution.
Le tĂ©lĂ©gramme ne devant pas parvenir Ă  son adresse avant deux heures, Marie profita de ce laps de temps pour faire une course pressĂ©e, et Verroy ayant fait le mĂȘme raisonnement, ils restĂšrent absents trois heures environ.
PhilomĂšne, fort intriguĂ©e par la confĂ©rence secrĂšte du matin, se tenait au salon, comme d’habitude, avec sa longue jupe Ă©talĂ©e sur le tapis ; un roman Ă  la main, assise sur un fauteuil dans une pose Ă©tudiĂ©e, elle se figurait ĂȘtre une duchesse et rĂȘvait Ă  des projets d’avenir vagues, mais dĂ©licieux.
Masson entra ; prĂ©venu par le tĂ©lĂ©gramme, il ne s’informa point auprĂšs de la cousine de ce qu’on pouvait avoir Ă  lui dire, mais il s’assit auprĂšs d’elle et se mit Ă  lui faire la conversation. Cette femme l’amusait avec ses prĂ©tentions, rĂ©cemment greffĂ©es sur l’arbre plus ancien des ambitions secrĂštes ; il la trouvait drĂŽle et la croyait bonne, ce qui lui donnait auprĂšs d’elle la libertĂ© d’allures qu’autorisait sa longue amitiĂ© avec Verroy. Ne se doutant pas d’ailleurs qu’on pĂ»t avoir une communication importante Ă  lui faire, pensant qu’il s’agissait de procurer des billets Ă  quelque ami de province, il avait l’esprit parfaitement en repos.
C’est avec la disposition d’esprit la plus enjouĂ©e qu’il s’assit auprĂšs de madame CrĂ©pin.
– Comme vous voilĂ  belle ! lui dit-il en souriant ; vous avez arborĂ© un bonnet tout neuf. Est-ce en mon honneur ?
– Mais oui, rĂ©pondit la veuve, qui rougit de plaisir.
– Vous saviez donc que je viendrais ? moi qui il y a deux heures n’en savais rien moi-mĂȘme.
– Je vous attends toujours, fit madame CrĂ©pin en baissant les yeux.
Masson prit cet aveu pour une bonne plaisanterie.
– C’est gentil au moins, ce que vous me dites là, fit-il avec sa bonhomie ordinaire ; tout le monde ne m’en dit pas autant. Restez-vous encore longtemps ici ?
– Je ne sais pas, cela ne dĂ©pend pas de moi.
– Êtes-vous heureuse de vivre lĂ -bas ? s’écria tout Ă  coup le jeune homme, laissant dĂ©border le trop-plein de son cƓur. Vivre lĂ -bas, dans une petite maison grise, avec un petit jardin... quel paradis !...
– Tout seul ?
– Ah ! non, par exemple, pas tout seul ! Avec ma femme ! La Heuserie avec ma femme, voilĂ  l’idĂ©al !
PhilomĂšne sentit son cƓur bondir dĂ©licieusement. La Heuserie et sa femme ! Mais si ces deux desiderata se rĂ©unissaient en un seul, propriĂ©taire et propriĂ©tĂ©, Masson n’aurait plus rien Ă  demander au ciel. Seulement, le dire n’était pas trĂšs facile, le faire comprendre Ă©tait une tĂąche non moins dĂ©licate. PhilomĂšne se promit de chercher un auxiliaire.
– Vous aimez donc bien la campagne ? dit-elle d’une voix aussi mĂ©lodieuse que son gosier voulut le lui permettre.
– Je l’adore ! C’est le repos, c’est le sommeil ! AprĂšs ce Paris embrasĂ© qui nous dĂ©vore, aprĂšs les soirĂ©es passĂ©es dans ce four Ă  cuire des hommes qu’on appelle le thĂ©Ăątre, respirer l’...

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