Le conte témoin du temps observateur du présent
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Le conte témoin du temps observateur du présent

Essai sur les pratiques actuelles du conte

Collectif Littorale, PlanĂšte rebelle

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  1. 205 pages
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Le conte témoin du temps observateur du présent

Essai sur les pratiques actuelles du conte

Collectif Littorale, PlanĂšte rebelle

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À propos de ce livre

La maison d'édition PlanÚte rebelle s'associe aux Productions Littorale et à l'Université de Sherbrooke pour offrir aux passionnés du conte, mais également à tous ceux et celles avides de savoirs, un généreux essai intitulé Le conte: témoin du temps, observateur du présent. L'ouvrage rassemble les principales réponses et réflexions entendues lors d'une rencontre internationale, au cours de laquelle la proposition générale était de centrer réflexions et échanges sur « l'état actuel du conte et de sa pratique ».

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Informations

Année
2012
ISBN
9782923735665

Raisons d’ĂȘtre

[ DÉBAT PUBLIC ]

Micheline LanctĂŽt, cinĂ©aste et marraine de la Rencontre internationale sur le conte : Je pense que s’il y avait dans la salle des gens qui ne l’étaient pas, vous nous avez tous convaincus de la nĂ©cessitĂ© du conte.
Ma question est un peu perverse et s’adresse aux conteurs, dont je ne suis pas : « La spĂ©cificitĂ© du conte est-elle dans le contenu ou dans la forme ? Autrement dit, le conte implique-t-il nĂ©cessairement la parole et la proximitĂ© ou peut-il prendre des formes autres ? »
Mike Burns : Je pense qu’on ne peut pas sĂ©parer les deux, surtout quand on parle de conte traditionnel ; ce sont des diamants polis dans des bouches pendant des gĂ©nĂ©rations. La structure est aussi importante que la complicitĂ©, la proximitĂ©. Si l’on pense tĂ©lĂ©vision : c’est trĂšs difficile ; radio : un peu plus Ă©vident ; une salle de 1 000 personnes : help ! 300 personnes : limite
 Mais pour ma part, je suis vraiment conteur de cuisine. Et Ă  mon avis, plus on est proche, mieux c’est.
Micheline LanctĂŽt : Je parle d’une façon intĂ©ressĂ©e, bien sĂ»r, puisque je suis cinĂ©aste. Je pourrais vous nommer une quinzaine de films qui sont des contes tels qu’on les entend ici, c’est-Ă -dire qui sont nĂ©cessaires Ă  l’auditoire. Je mentionnerais, par exemple, le rĂ©alisateur portugais Manoel De Oliveira, qui a fait un film absolument extraordinaire intitulĂ© Non, ou la vaine gloire de commander. Un professeur d’histoire raconte le destin du Portugal Ă  des soldats en mission en Angola. Le film dure quatre heures et demie — et, de mon point de vue, c’est un conte.
Je pense que les contes nous rejoignent dans une zone extrĂȘmement profonde, utile, nĂ©cessaire dans le sens moral ou dans le sens des valeurs, et je crois que le cinĂ©ma le fait aussi, sans la proximitĂ©, bien entendu. Et pas nĂ©cessairement avec la parole. Pour vous, est-ce indissociable ?
Il y a, par exemple, des Ɠuvres de peintres naĂŻfs — l’art naĂŻf est un art narratif — qui sont des contes. Il y a beaucoup de peintres haĂŻtiens qui content HaĂŻti au moyen de la peinture plutĂŽt que par la parole. « Peut-on penser que le conte, avec sa nĂ©cessitĂ©, son effet, son pouvoir, peut adopter d’autres formes que la parole de cuisine ? Peut-on considĂ©rer que le conte reste le conte s’il change de forme ? »
Mike Burns : Je crois qu’aussitĂŽt qu’on essaie de faire une dĂ©finition impermĂ©able, on a un papillon clouĂ© sur le mur. C’est beau, mais ce n’est plus un papillon. C’est intĂ©ressant que vous parliez du cinĂ©ma. Je me souviens que dans les annĂ©es soixante, dans mon village, une femme avait dĂ©cidĂ©, un jour, de faire de l’argent. Elle a pris un truc construit en blocs de ciment qui pouvait contenir une centaine de personnes, elle y a mis un Ă©cran, une sortie de secours qui ne fonctionnait pas, des siĂšges remplis de puces. C’était hallucinant, l’atmosphĂšre qu’il y avait lĂ  ! On se connaissait tous, il y avait donc beaucoup de complicitĂ© parce qu’on reconnaissait tout le monde : celui qui riait, celui qui criait, celui qui avait peur. Dans ce contexte-lĂ , oui. Mais si je vais au cinĂ©ma aujourd’hui, c’est comme si je lisais un roman : chacun est dans son imagination individuelle et personnelle ; il n’y a pas de partage et il ne peut pas y en avoir dans le contexte d’un cinĂ©ma anonyme, qu’il y ait 3 personnes ou 500. Je ne veux pas dire que ce n’est pas un art valable : j’adore le cinĂ©ma d’auteur
 mais ce n’est pas du conte.
Quand on parle de conte dans le contexte dont il est question ici, il s’agit de quelqu’un qui raconte une histoire. Qu’il utilise la lumiĂšre, une scĂšne, des effets sonores, de la musique, c’est son choix. Est-ce que ça devient du thĂ©Ăątre ? Je ne sais pas. Mais le peintre naĂŻf, c’est un peintre, ce n’est pas un conteur, sauf peut-ĂȘtre au sens trĂšs large du terme.
Si je pense Ă  Marcel Marceau, par exemple, ce n’est pas un conteur dans le sens du conte tel que nous l’entendons ici. Quand je parle du conte, je parle spĂ©cifiquement de la parole, et encore plus spĂ©cifiquement de l’appropriation de la parole intime, partagĂ©e, de connivence, oĂč, en mĂȘme temps, chacun et chacune, dans la salle, part avec son roi, sa princesse, etc.
Michel Faubert m’a dĂ©jĂ  contĂ© quelque chose de magnifique Ă  ce sujet. Dans les annĂ©es quatre-vingt, il Ă©tait au Nouveau-Brunswick et un vieux lui a racontĂ© une histoire de roi. Michel s’est tournĂ© vers lui et il a dit : « Il a l’air de quoi, ton roi ? » Et le vieux lui a rĂ©pondu : « Ben, il est endimanchĂ©, il porte une cravate et un complet. » Michel Ă©tait complĂštement abasourdi ! Mais pour ce vieux-lĂ , dans le fin fond du Nouveau-Brunswick, un roi, c’était ça. S’il ne l’avait pas dit, Michel, qui a Ă©tĂ© nourri par la tĂ©lĂ©vision, par les livres, etc., ne l’aurait pas du tout vu comme ça, cela aurait Ă©tĂ© un tout autre roi
 C’est ça, la beautĂ© du conte.
Avec la tĂ©lĂ©vision, ou avec le cinĂ©ma — et on le dit souvent quand on a lu le livre auparavant, dans le cas d’une adaptation cinĂ©matographique —, on peut dire : « Ce n’est pas aussi bon que le roman ! » Avec le conte, ce qui est extraordinaire, c’est qu’on a une totale libertĂ©. Et, en mĂȘme temps, on le partage. Dans cette salle, ici, quand quelqu’un conte, il y a cinquante, cent rĂȘves diffĂ©rents ; on rĂȘve ensemble, en mĂȘme temps. Quand c’est lĂ , quand c’est vraiment lĂ  : aĂŻe, aĂŻe ! ! Ça n’empĂȘche pas que j’adore le cinĂ©ma, mais c’est autre chose. La peinture naĂŻve, c’est magnifique, mais c’est autre chose.
Marc Aubaret : Je m’appuie souvent sur une parole de Nicole Belmont, une parole qui me semble une clĂ© pour entrer dans le conte. Elle dit que le conte dĂ©voile en voilant. Je trouve que c’est un outil intĂ©ressant parce qu’on n’est pas dans un espace de comprĂ©hension, on est dans un espace qui dĂ©clenche quelque chose ; et ce dĂ©clenchement n’étant pas compris immĂ©diatement crĂ©e une distance. Le conte va nous habiter sans que l’on sache vraiment ce que ça travaille ; il va jouer avec des rĂ©sonances de notre propre matiĂšre intĂ©rieure. Il y a un processus qui est trĂšs spĂ©cifique, mais qui est extrĂȘmement profond et qui permet ce que tu disais : la violence peut ĂȘtre tempĂ©rĂ©e parce que ça nous donne des outils de mise Ă  distance de cette violence, par cet effet de temps qui doit passer pour arriver Ă  la comprĂ©hension.
Je suis d’accord avec Mike, quand il parle d’un rĂȘve collectif. Pour moi, dans le conte, il y a quelque chose de magique, en particulier dans le conte merveilleux. On a une structure qui nous sert de guide, de communautĂ©. C’est-Ă -dire qu’on ne perd pas complĂštement le fil, mais on remplit systĂ©matiquement cette structure avec des images diffĂ©rentes. Et lĂ , il y a vraiment quelque chose de l’ordre d’une collectivitĂ© en train de se faire. Il y a en effet des choses qu’on doit penser ensemble pour se comprendre, mais on n’est pas obligĂ© d’adhĂ©rer systĂ©matiquement de la mĂȘme façon Ă  cet espace-lĂ . Et ça, ça fait vraiment partie de la magie du conte.
J’aimerais ajouter un dernier commentaire. Je suis d’accord pour dire que quand je vais au cinĂ©ma, l’image est lĂ , mais il y a aussi des espaces vides. N’empĂȘche qu’il y a une ambiance, il y a des personnages qui me sont proposĂ©s. Je vais avoir du mal Ă  ĂȘtre complĂštement dans mes personnages, en train d’habiter une structure. Cette diffĂ©rence me paraĂźt importante, dans l’écoute du conte comme dans le travail du conteur. Ensuite, le conte en lui-mĂȘme, est-ce lĂ , uniquement lĂ , sa dynamique spĂ©cifique ? Il reste que dans la tradition, il y a quand mĂȘme quelque chose qui s’est tellement peaufinĂ©. On est devant quelque chose qui est expĂ©rimentĂ© depuis des millĂ©naires ! Je pense que ce serait difficile de vouloir arriver Ă  un Ă©quivalent, lĂ , immĂ©diatement
 C’est peut-ĂȘtre lĂ  qu’il y a vraiment des perles : si elles ne sont plus donnĂ©es dans les mĂȘmes contextes, mais qu’elles peuvent vraiment se reporter dans des contextes diffĂ©rents, tout en Ă©tant encore efficaces.
Vivian Labrie : J’ai envie d’apporter un Ă©lĂ©ment Ă  la discussion sur la question que Micheline vient de poser. Mais juste avant, pour ne pas perdre mon idĂ©e, quand Jihad a contĂ© l’histoire des pots fĂȘlĂ©s, il m’est revenu une phrase de Salah StĂ©tiĂ© qui dit : « Entre le dĂ©sert et le mirage, l’interstice. C’est lĂ  que tout se passe. »
Micheline LanctĂŽt : C’est ça, le cinĂ©ma, un interstice

Vivian Labrie : Oui, mais pour revenir Ă  notre question, la spĂ©cificitĂ© est-elle dans le contenu ou dans la forme ?, une chose me frappe, pour avoir beaucoup frĂ©quentĂ© les contes. Curieusement, il y a des contes qui pourraient ne pas en ĂȘtre et des non-contes qui pourraient en ĂȘtre. Quand on regarde le rĂ©pertoire traditionnel, celui que les chercheurs ont mis dans les numĂ©ros du catalogue de Aarne et Thompson — et Utter, maintenant, ils sont trois —, par exemple, on sait que le conte numĂ©ro 313, c’est la fuite magique. Mais celui auquel je pensais, c’est celui du ruban qui rend fort. Il y a des contenus qui se sont transmis sur la longue durĂ©e par le conte. Mais curieusement, et pour bien les connaĂźtre, je suis frappĂ©e de voir rĂ©apparaĂźtre, au cinĂ©ma, des histoires comme, par exemple, A boy’s life de Jack Davis, Ă  laquelle on pourrait donner le numĂ©ro de type AT-590, comme pour un conte ! De toute Ă©vidence, le cinĂ©aste n’a pas voulu faire un conte. Quand on va voir Peau d’ñne de Jacques Demy, on sait qu’il veut essayer de nous donner une image de Peau d’ñne, alors que dans ce cas-lĂ , c’est un rĂ©cit autobiographique.
Je vais vous raconter un bout de l’histoire Ă  laquelle je pense pour qu’on puisse se situer. Dans les versions que je connais, le conte du ruban qui rend fort ressemble souvent Ă  ceci : une femme seule prend la route avec un de ses garçons ; elle traverse une ligne imaginaire dans la forĂȘt et, de l’autre cĂŽtĂ©, il y a un gĂ©ant. Le garçon prend un ruban qui le rend trĂšs fort et il le cache sur lui. Il va se faire maltraiter par le gĂ©ant. Or, dans le film en question qui se passe aux États-Unis, il y a une mĂšre avec son garçon dans une auto. Ils vont rencontrer un homme violent et le garçon va se faire maltraiter par cet homme.
Dans les contes que je connaissais, des mĂšres monoparentales avec un petit garçon, il n’y en avait pas des tonnes. Alors je me suis dit : « C’est l’histoire du ruban qui rend fort ! » Ça reste comme ça jusqu’au moment oĂč j’achĂšte le rĂ©cit autobiographique dont le film s’inspire, en me demandant oĂč Ă©tait « le ruban qui rend fort ». À un moment donnĂ©, le petit garçon dit : « Dans mon enfance, j’ai changĂ© de prĂ©nom, j’ai pris le prĂ©nom de Jack London parce que je voulais ĂȘtre fort comme lui. » VoilĂ , c’était le ruban !
Dans les versions que je connaissais, la mÚre avait deux garçons et elle en avait lais...

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