Une Ă©ducation sans Ă©cole
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Une Ă©ducation sans Ă©cole

Thierry Pardo

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Une Ă©ducation sans Ă©cole

Thierry Pardo

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À propos de ce livre

Aujourd'hui, les mots «?Ă©ducation?» et «école» sont devenus quasiment synonymes. Pourtant, l'Ă©cole ne reprĂ©sente qu'une infime partie de l'histoire de l'Ă©ducation. Comment cet amalgame a-t-il pu se produire? Pourquoi en sommes-nous arrivĂ©s Ă  croire que l'Ă©ducation de nos enfants devait relever de la responsabilitĂ© de l'État? Quelles logiques sont Ă  l'Ɠuvre derriĂšre cette vaste entreprise de normalisation des masses??

Une Ă©ducation sans Ă©cole, qui se prĂ©sente comme une longue lettre Ă  Ivan Illich, porte un regard critique sur l'institutionnalisation de l'Ă©ducation. À la lumiĂšre des grandes thĂ©ories de la pĂ©dagogie (SĂ©bastien Faure, CĂ©lestin Freinet, Edgar Morin, David Sobel...), Thierry Pardo soutient que les parents sont souvent les mieux placĂ©s pour Ă©duquer leurs enfants et il examine diverses alternatives Ă©ducatives: la transmission du savoir dans les sociĂ©tĂ©s traditionnelles et autochtones, l'«éducation Ă  domicile» ( unschooling ) et celle prodiguĂ©e par le biais du voyage. Cet ouvrage au souffle poĂ©tique et libertaire est traversĂ© par la mĂ©taphore du pirate, alliance de l'imagination et de la rĂ©volte, de l'utopie et de l'aventure. Sa proposition, inscrite dans le champ de l'Ă©ducation relative Ă  l'environnement, s'appuie notamment sur le contact avec la nature et l'insertion dans un rĂ©seau social fĂ©cond.

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Informations

Année
2017
ISBN
9782897193447
PREMIÈRE PARTIE

LES VOIES DE LA PIRATERIE ÉDUCATIVE

CHAPITRE PREMIER

L’invention de l’école

L’esprit humain a rĂ©agi aux accidents de l’histoire en crĂ©ant des institutions qui nous manipulent. Aujourd’hui on comprend mieux l’esprit humain, ce qui devrait aider l’homme Ă  se protĂ©ger contre ces institutions. Mais encore faut-il profiter de ces nouvelles connaissances pour changer le contenu de l’enseignement scolaire.
– David Premack7
C’est l’existence, dans notre comportement personnel et dans nos propres institutions, de conditions qui ont permis dans les pays Ă©trangers, la victoire de l’autoritĂ© extĂ©rieure, de la discipline, de l’uniformitĂ©, de la dĂ©pendance envers le chef. Par consĂ©quent, le champ de bataille est aussi ici, en nous-mĂȘmes et dans nos institutions.
– John Dewey
DEPUIS QUE L’HUMANITÉ a conscience d’elle-mĂȘme et des enjeux liĂ©s Ă  ses moyens de subsistance, elle a cherchĂ© Ă  transmettre aux plus jeunes l’expĂ©rience et les connaissances qu’elle jugeait utiles. Dans l’histoire des peuples, on trouve un grand nombre d’actes individuels et collectifs permettant Ă  une culture de se survivre Ă  elle-mĂȘme. Les rituels de passage, les cĂ©rĂ©monies et les traditions, mais aussi la participation aux travaux de la vie quotidienne constituent l’expĂ©rience Ă©ducative la plus rĂ©pandue de cette histoire.
Au dĂ©tour du XXe siĂšcle, se sont cristallisĂ©s des concepts tels que «l’enfance», «l’enseignement» et, plus rĂ©cemment encore, celui de «la professionnalisation de l’acte Ă©ducatif». Ce dernier a rĂ©ussi en moins d’un siĂšcle Ă  occuper une place de quasi-monopole dans la prise en charge de l’éducation et de la vie avant le travail.
Le jeune humain, qui participait autrefois aux travaux de la vie courante tout en occupant le bas de l’échelle sociale (comme le montrent les termes fantassin, infanterie, garçon de café ), entrait dĂ©sormais dans le giron des professionnels de l’éducation et se voyait ainsi protĂ©gĂ© des abus potentiels de l’autoritĂ© parentale, patronale ou autre. On peut remarquer que durant cette mĂȘme pĂ©riode, ce ne sont pas seulement les enfants qui ont fait l’objet de «l’attention» des professionnels, mais tous ceux que l’on jugeait improductifs: malades, vieillards, fous, handicapĂ©s et criminels ont Ă©tĂ© confiĂ©s Ă  ceux qui ont reçu l’autorisation de diagnostiquer la «maladie» et d’y apporter le remĂšde. Au fil de ces dĂ©cennies, de vĂ©ritables corporations professionnelles se sont mises en place, revendiquant le contrĂŽle et parfois l’exclusivitĂ© de l’exercice de leur science. L’éducation n’a pas Ă©chappĂ© Ă  ce phĂ©nomĂšne.
Pourtant, il n’existe pas de façon «neutre» ou «normale» d’éduquer les enfants. Chaque dĂ©cision, chaque acte, chaque objectif dĂ©coule d’une intention ou d’une conception qui s’inscrit elle-mĂȘme dans un paradigme identifiable. DĂ©jĂ , en 1906, François Guex exprimait cette idĂ©e dans son Histoire de l’instruction et de l’éducation: «Tout systĂšme d’éducation correspond Ă  un idĂ©al social quelconque et, partout, la pĂ©dagogie a Ă©tĂ© et sera ce qu’a Ă©tĂ© et ce que sera la conception du monde, de l’homme et de sa destinĂ©e8.» Or, le temps de l’institutionnalisation de l’éducation correspond, pour la plupart des pays nord-occidentaux, Ă  celui de la course ambitieuse, via l’industrialisation, pour la constitution et le maintien d’empires coloniaux, qui sont les prĂ©misses au capitalisme gĂ©nĂ©ralisĂ© que nous connaissons aujourd’hui. À cette Ă©poque, plusieurs États Ă©taient d’ailleurs eux-mĂȘmes en voie de constitution – Italie, 1861; Canada, 1867; Allemagne, 1871; NorvĂšge, 1905; etc. – ou en train d’essayer de stabiliser leurs frontiĂšres et leur identitĂ©, parfois en uniformisant leurs diffĂ©rentes cultures rĂ©gionales. Il fut donc extrĂȘmement tentant de faire de l’éducation une affaire d’État. Les États-nations ont trĂšs tĂŽt compris l’intĂ©rĂȘt de greffer sur les aspirations humanistes de l’éducation les instruments utiles Ă  l’avĂšnement de leur puissance politico-Ă©conomique. Ainsi, en bĂątissant les savoirs, en faisant de l’acte Ă©ducatif le rĂ©sultat diagnostiquĂ© d’une science Ă©tablie, la sociĂ©tĂ© faisait entrer les enfants dans les classes, sans doute pour leur bien, mais aussi pour celui des États auxquels ils Ă©taient dĂ©sormais redevables.
L’exemple de Jules Ferry, le pĂšre de l’instruction publique «gratuite, laĂŻque et obligatoire» en France et fervent dĂ©fenseur de l’empire colonial, est Ă©loquent. L’éducation devait alors donner Ă  la RĂ©publique des reprĂ©sentants soumis et fidĂšles, capables de porter haut les couleurs de la France dans les colonies. Le rapport entre Ă©ducation et Ă©conomie est manifeste dans son discours Ă  la Chambre des dĂ©putĂ©s, en 1885:
Messieurs, il faut parler plus haut et plus vrai! Il faut dire ouvertement qu’en effet, les races supĂ©rieures ont un droit vis-Ă -vis des races infĂ©rieures. Je rĂ©pĂšte qu’il y a pour les races supĂ©rieures un droit, parce qu’il y a un devoir pour elles. Elles ont le devoir de civiliser les races infĂ©rieures. [
] La question coloniale, dans les pays comme le nĂŽtre, dont le caractĂšre mĂȘme de l’industrie est liĂ© Ă  des exportations considĂ©rables, est vitale pour la question des marchĂ©s. [
] De ce point de vue, la fondation d’une colonie est la crĂ©ation d’un marchĂ©9.
Je ne rĂ©siste pas Ă  l’envie de joindre une partie de la rĂ©ponse de ClĂ©menceau au discours de Ferry, montrant ainsi que de tout temps il y a eu des esprits Ă©clairĂ©s et que les options philosophiques ayant prĂ©valu n’étaient en rien des fatalitĂ©s ou des Ă©vidences dictĂ©es par une Ă©poque ou un prĂ©tendu sens de l’histoire:
Les races supĂ©rieures ont sur les races infĂ©rieures un droit qu’elles exercent, ce droit, par une transformation particuliĂšre, est en mĂȘme temps un devoir de civilisation. VoilĂ  en propres termes la thĂšse de M. Ferry, et l’on voit le gouvernement français exerçant son droit sur les races infĂ©rieures en allant guerroyer contre elles et les convertissant de force aux bienfaits de la civilisation. Races supĂ©rieures, races infĂ©rieures, c’est bientĂŽt dit! Pour ma part, j’en rabats singuliĂšrement depuis que j’ai vu des savants allemands dĂ©montrer scientifiquement que la France devait ĂȘtre vaincue dans la guerre franco-allemande parce que le Français est d’une race infĂ©rieure Ă  l’Allemand. Depuis ce temps, je l’avoue, j’y regarde Ă  deux fois avant de me retourner vers un homme et vers une civilisation, et de prononcer: homme ou civilisation infĂ©rieurs. Race infĂ©rieure, les Hindous! Avec cette grande civilisation raffinĂ©e qui se perd dans la nuit des temps! Avec cette grande religion bouddhiste qui a quittĂ© l’Inde pour la Chine, avec cette grande efflorescence d’art dont nous voyons encore aujourd’hui les magnifiques vestiges! Race infĂ©rieure, les Chinois! Avec cette civilisation dont les origines sont inconnues et qui paraĂźt avoir Ă©tĂ© poussĂ©e tout d’abord jusqu’à ses extrĂȘmes limites. InfĂ©rieur Confucius!
Aujourd’hui, l’influence des sphĂšres politico-Ă©conomiques sur les systĂšmes Ă©ducatifs ne semble pas s’ĂȘtre amoindrie. Par exemple, les dĂ©bats entre enseignement laĂŻque et enseignement religieux illustrent bien cette volontĂ© d’influencer la sphĂšre Ă©ducative. Dans nombre de sociĂ©tĂ©s, une Ă©ducation qui Ă©chapperait aux contrĂŽles institutionnels n’est pas encouragĂ©e, sinon que trĂšs modestement, par les pouvoirs politiques.
En outre, les États et les grands acteurs du secteur Ă©conomique ont souvent des intĂ©rĂȘts communs qui les mĂšnent Ă  entretenir une sorte de relation incestueuse. À titre d’exemples, on peut citer la richissime famille Bush, magnat du pĂ©trole Ă  la tĂȘte des États-Unis durant des annĂ©es, ou Silvio Berlusconi, industriel assumant jusqu’à tout rĂ©cemment encore les plus hautes responsabilitĂ©s de la rĂ©publique italienne. Pourtant, point de complot Ă  l’Ɠuvre: seulement l’incorrigible habitude humaine des privilĂ©giĂ©s Ă  maintenir le systĂšme dans lequel ont Ă©tĂ© acquis leurs privilĂšges.
L’enfance est donc aujourd’hui plongĂ©e dans l’expĂ©rience paradoxale qui consiste, Ă  des fins d’émancipation, Ă  superposer le contrĂŽle de l’État Ă  celui des parents. La problĂ©matique exposĂ©e dans ce livre est d’abord nĂ©e de l’inconfort de considĂ©rer comme Ă©vidents les bienfaits de ce dĂ©placement de responsabilitĂ© Ă©ducative des parents vers l’institution. Cet inconfort, alimentĂ© par l’étude de plusieurs grands auteurs, provient d’un sentiment d’injustice envers le rĂŽle dĂ©volu au fil du dernier siĂšcle aux parents – en lien avec leur communautĂ© – pour fournir Ă  leurs enfants les conditions favorables Ă  leur Ă©mancipation. Si leur rĂŽle n’est pas niĂ© par l’école, les parents semblent ĂȘtre considĂ©rĂ©s dans le meilleur des cas comme des «partenaires» du projet scolaire, ce qui les place paradoxalement dans une position pĂ©riphĂ©rique quant Ă  l’éducation de leurs propres enfants.
Je me propose donc, dans un premier temps, de porter un regard critique sur l’institutionnalisation de l’éducation et, dans un deuxiĂšme temps, de prĂ©senter quelques expĂ©riences d’éducation alternatives Ă  ce systĂšme, rĂ©sultat d’une douzaine d’annĂ©es de recherche. Il importe de prĂ©ciser que les termes «éducation Ă  domicile» ou «école Ă  la maison» sont utilisĂ©s ici pour dĂ©signer la prise en charge Ă  temps plein par les parents non seulement de l’éducation familiale, mais Ă©galement de l’instruction et de la socialisation des enfants.
Je tenterai de montrer en quoi le systĂšme scolaire, malgrĂ© sa diversitĂ© interne, ses rĂ©ussites et ses apports, n’a pas parfaitement tenu ses promesses Ă©mancipatoires, notamment Ă  cause de la discipline qu’exigeait la gestion des masses. Éducation pour tous peut-elle rimer avec Ă©ducation pour chacun?
Cette partie de l’ouvrage dĂ©crit de quelles façons l’école se dresse en obstacle entre l’enfant et son environnement naturel et familial. Ici est remis en cause le fait qu’un État arrime Ă  sa chaise un enfant durant six ou sept heures par jour, cinq jours par semaine, pendant une quinzaine d’annĂ©es. Cependant, affirmer une telle chose ne veut pas dire que toute tentative d’éducation collective est vouĂ©e Ă  l’échec (voir Ă  ce sujet la merveilleuse expĂ©rience de l’école des Amanins, en France10) ni que chaque enseignant est un «ravisseur» d’enfants. Cela ne veut pas dire non plus que la famille est nĂ©cessairement mieux placĂ©e pour rĂ©ussir une telle tĂąche de par sa seule ascendance familiale. Le lecteur attentif pourra donc observer deux constantes:
Je n’adresse en aucun cas de critiques aux enseignants, non que je pense que chacun d’eux accomplisse son travail Ă  la perfection, mais parce que je les tiens pour seuls remparts Ă  l’implacable traitement scolaire. Et si un Ă©lĂšve a une chance d’apprĂ©cier l’école, ce sera le plus souvent Ă  l’enseignant et Ă  l’équipe pĂ©dagogique qu’il le devra, non au caractĂšre institutionnel de l’école.
Il n’y a dans ces lignes aucun «chĂšque en blanc» attribuĂ© aux familles. Les cas de familles dĂ©faillantes sont lĂ©gion, et l’exercice de l’oppression n’a pas attendu sa forme Ă©tatisĂ©e pour se dĂ©p...

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